Déontologie

Informations sur la décision

Résumé :

L’intimé a fait l’objet d’une enquête à l’issue de laquelle on a déterminé qu’il était responsable de cinq cas de conduite déshonorante en violation de l’article 7.1 du Code de déontologie de la GRC. Le Comité de déontologie a imposé les mesures disciplinaires suivantes : confiscation de 35 jours de solde et une réprimande pour chacune des cinq contraventions.

L’appelante a interjeté appel, car selon elle, les mesures disciplinaires imposées sont manifestement déraisonnables et fondées sur une erreur de droit.

Le Comité externe d’examen de la GRC a examiné l’affaire, et le président du Comité a déterminé que la décision du Comité de déontologie n’était pas manifestement déraisonnable ni fondée sur une erreur de droit. En l’absence d’une erreur manifeste et déterminante, le président a recommandé que l’appel soit rejeté et que les mesures disciplinaires soient confirmées.

L’arbitre est d’accord avec le président. Comme elle ne trouve aucune justifiant la modification de la décision du Comité de déontologie, l’arbitre rejette l’appel, et conformément à l’alinéa 45.16(3)b) de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, elle confirme les mesures disciplinaires imposées.

Contenu de la décision

Protégé A

2016-335279 (C-027)

2019 DARD 24

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GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

DANS L’AFFAIRE D’UN

appel d’une décision d’un Comité de déontologie au titre du paragraphe 45.11(1) de la

Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, L.R.C. 1985, ch. R-10

ENTRE :

La commandante de la Division K

Autorité disciplinaire

(appelante)

et

Le gendarme C. Clarke

Numéro de matricule 55134

(intimé)

(les parties)

Décision d’appel du Comité de déontologie

ARBITRE :  Jennie Latham

DATE :  28 novembre 2019


RÉSUMÉ

L’intimé a fait l’objet d’une enquête à l’issue de laquelle on a déterminé qu’il était responsable de cinq cas de conduite déshonorante en violation de l’article 7.1 du Code de déontologie de la GRC. Le Comité de déontologie a imposé les mesures disciplinaires suivantes : confiscation de 35 jours de solde et une réprimande pour chacune des cinq contraventions.

L’appelante a interjeté appel, car selon elle, les mesures disciplinaires imposées sont manifestement déraisonnables et fondées sur une erreur de droit.

Le Comité externe d’examen de la GRC a examiné l’affaire, et le président du Comité a déterminé que la décision du Comité de déontologie n’était pas manifestement déraisonnable ni fondée sur une erreur de droit. En l’absence d’une erreur manifeste et déterminante, le président a recommandé que l’appel soit rejeté et que les mesures disciplinaires soient confirmées.

L’arbitre est d’accord avec le président. Comme elle ne trouve aucune justifiant la modification de la décision du Comité de déontologie, l’arbitre rejette l’appel, et conformément à l’alinéa 45.16(3)b) de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, elle confirme les mesures disciplinaires imposées.


INTRODUCTION

[1]  L’appelante plaide cet appel en vertu du paragraphe 45.11(1) de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, L.R.C. 1985, ch. R-10 (la « Loi sur la GRC ») pour contester les mesures disciplinaires imposées par le Comité de déontologie (le Comité) lorsque ce dernier a déterminé que les cinq allégations de conduite déshonorante en violation de l’article 7.1 du Code de déontologie de la GRC visant l’intimé avaient été établies.

[2]  Le Comité a rendu sa décision écrite le 6 juin 2016, et l’appelante a présenté une déclaration d’appel (formulaire 6437) précisant que les mesures disciplinaires imposées par le Comité de déontologie étaient manifestement déraisonnables, déterminées d’une façon qui était contraire aux principes de l’équité procédurale et fondées sur une erreur de droit.

[3]  Le Comité a imposé les mesures disciplinaires suivantes : confiscation de trois jours de solde pour l’allégation 1, de huit jours de solde pour l’allégation 2, de huit jours de solde pour l’allégation 3, de trois jours de solde pour l’allégation 4, de 13 jours de solde pour l’allégation 5 et une réprimande pour chacune des cinq allégations. En application du paragraphe 45.15(1) de la Loi sur la GRC, l’appel a été renvoyé pour examen devant le Comité externe d’examen de la GRC (CEE). Le président a publié son rapport le 8 août 2019; il s’agit du dossier du CEE no C-2016-008 (C-027). Conformément à l’alinéa 45.16(3)a) de la Loi sur la GRC, le président a recommandé à la commissaire de rejeter l’appel et de confirmer les mesures disciplinaires.

[4]  Conformément au paragraphe 45.16(11) de la Loi sur la GRC, la commissaire m’a délégué ses pouvoirs en matière d’appels présentés aux termes de la partie Partie IV de la Loi sur la GRC et de la Partie 2 des Consignes du commissaire (griefs et appels) (DORS/2014-289) [« CC (griefs et appels) »]. Par conséquent, j’ai le pouvoir de statuer sur l’affaire dont je suis saisie.

[5]  Pour rendre cette décision, j’ai pris en considération les documents dont disposaient le Comité (les « documents »), le rapport du CEE (le « rapport »), ainsi que le dossier d’appel (l’« appel ») préparé par le Bureau de la coordination des griefs et des appels (BCGA), que l’on appellera collectivement le « dossier ». Sauf indication contraire, je préciserai le numéro de page concerné lorsque je mentionnerai les documents et l’appel et le numéro de paragraphe, lorsque je mentionnerai le rapport.

CONTEXTE

[6]  Le CEE a fourni un résumé des faits qui décrit avec exactitude les incidents ayant donné lieu à cette affaire.

[TRADUCTION]

[6] Le 17 juillet 2014, l’intimé a reçu un appel 911 signalant que deux individus de sexe masculin pourraient avoir des difficultés avec leur camionnette sur le bord de la route. Lorsque l’intimé est arrivé sur les lieux, les deux personnes avaient pris la fuite dans les buissons. L’intimé et un autre membre de la GRC ont retrouvé les deux individus plus tard et les ont identifiés comme deux jeunes (documents, pages 167 et 168; appel, page 42). L’intimé a vu une glacière bleue contenant de multiples bouteilles de bière Corona et canettes de boisson gazeuse dans la plateforme de la camionnette. Toutefois, ni l’un ni l’autre des jeunes ne semblait avoir consommé d’alcool (documents, pages 167 et 168; appel, page 42). L’intimé a composé avec le conducteur du véhicule, dont les parents venaient d’arriver sur les lieux, tandis que l’autre membre a reconduit le passager chez lui. L’intimé a remis un certain nombre de contraventions à la loi provinciale au conducteur, y compris une contravention au paragraphe 87(1) de la Loi sur l’alcool et les jeux de hasard de l’Alberta (possession d’alcool par un mineur) (documents, page 250). L’intimé a demandé au conducteur et à ses parents à qui appartenaient la glacière et la bière. Cependant, personne n’a avoué être propriétaire de ces articles.

[7] Lorsque l’autre membre est revenu sur les lieux, les deux membres ont récupéré la glacière bleue et l’ont placée à l’arrière du véhicule de police de l’intimé (documents, page 168). Lorsque l’intimé est revenu au détachement, il a placé la glacière dans une salle d’entreposage. Il a signalé l’incident dans le Système d’incidents et de rapports de police (SIRP), mais il n’a pas traité la glacière ou l’alcool à titre de pièces à conviction avant la fin de son quart.

[8] Le 22 juillet 2014, le commandant de détachement par intérim (p. i.) et deux commis de détachement ont nettoyé la salle d’entreposage et ont trouvé la glacière bleue (documents, pages 55, 56 et 79). Le commandant p. i. a ouvert la glacière et a vu qu’elle contenait des bouteilles de bière et des boissons gazeuses (documents, page 56). Ils ont laissé la glacière dans la salle d’entreposage. Le 23 juillet 2014, lorsque l’intimé est revenu au travail après quelques jours de congé, un des commis du détachement lui a posé des questions sur la glacière, et l’intimé a répondu qu’elle portait sur un de ses dossiers. Le commis de détachement a suggéré à l’intimé qu’il devrait éliminer l’alcool (documents, page 128). Avant de le faire, l’intimé a signalé dans son rapport d’incident du SIRP que l’alcool avait été éliminé et que la glacière se trouvait toujours dans le garage du détachement. Lorsque l’intimé est allé à l’extérieur pour se débarrasser de l’alcool, il a vu que les pompiers l’autre bord de la rue faisaient leur entraînement hebdomadaire. Il est allé les voir et a dit au chef des pompiers qu’il avait quelque chose pour eux. Il leur a ensuite montré la glacière et la bière et a demandé au chef si son équipe pouvait se défaire de l’alcool pour lui. L’intimé et le chef des pompiers ont mis la glacière dans le camion d’un autre pompier, et l’intimé a précisé que la glacière devait lui être remise (documents, pages 89, 95 et 96).

[9] Le 25 juillet 2018, le commandant p. i. était dans la salle d’entreposage et a remarqué que la glacière n’était plus là. Comme il n’avait vu aucune étiquette pour pièce à conviction sur la glacière, il a envoyé un message général à l’ensemble des membres du détachement pour identifier le responsable de la pièce à conviction et déterminer le dossier auquel la glacière était liée et où elle se trouvait (documents, pages 95-96). La même journée, l’intimé a répondu au courriel en précisant qu’il s’agissait de sa pièce à conviction et qu’elle avait été confisquée de mineurs à des fins de destruction. Il a également expliqué que personne n’avait affirmé être le propriétaire de l’alcool, que l’alcool avait été éliminé et que la glacière avait été remise dans la salle d’entreposage (documents, page 74). L’intimé a affirmé avoir ajouté une étiquette de pièce à conviction sur la glacière. L’étiquette précisait que le contenu de la glacière avait été éliminé à l’échelle locale.

[10] Le 28 juillet 2014, le commandant p. i. a communiqué avec le sous- officier consultatif de district pour discuter de la façon dont l’intimé avait traité les pièces à conviction. Le sous-officier consultatif de district lui a demandé de déterminer exactement ce qui était arrivé à la glacière et à la bière (appel, page 38; documents, page 58). Une des commis de détachement a dit au commandant p. i. que l’intimé, lorsqu’elle lui a demandé où se trouvait la glacière, lui a dit que les pompiers l’avaient (documents, pages 58, 79 et 82).

[11] Le 1er août 2014, pendant que le chef des pompiers était au détachement pour un autre dossier, le commandant p. i. l’a questionné au sujet de la glacière. Au début, le chef des pompiers a dit que l’alcool avait été éliminé à la caserne. Ensuite, toutefois, il a changé sa version des faits et a précisé que l’intimé avait apporté l’alcool à la caserne et en avait fait cadeau aux pompiers. À la demande du commandant p. i., le chef des pompiers a fourni une déclaration écrite racontant ce qui s’était passé le 23 juillet 2014 lorsque l’intimé avait apporté la glacière confisquée à la caserne. Au lieu d’être éliminé, l’alcool avait été chargé dans la camionnette d’un pompier (documents, pages 89 et 90).

PROCÉDURE DISCIPLINAIRE

Enquête relative au Code de déontologie

[7]  Le 13 août 2014, le commandant du District du Sud de l’Alberta a ordonné la tenue d’une enquête visant à déterminer si l’intimé avait contrevenu au Code de déontologie (documents, pages 5 et 6).

[8]  Le 15 août 2014, la lettre de mandat a été signifiée à l’intimé pour l’aviser qu’une enquête relative au Code de déontologie avait été ordonnée pour déterminer s’il avait contrevenu aux dispositions suivantes du Code de déontologie :

[TRADUCTION]

Allégation 1 : Entre le 17 et le 25 juillet 2014, à [X], en Alberta, ou à proximité, [l’intimé], pendant qu’il était de service, a omis de respecter les politiques et les procédures relatives à la manipulation des pièces à conviction lors de la saisie de pièces à conviction en lien avec le dossier d’enquête no 2014863145 du SIRP.

En ce qui concerne l’allégation susmentionnée, je suis d’avis que vous avez contrevenu au Code de déontologie, à savoir à l’article 47 du Règlement sur la Gendarmerie royale du Canada (le « Règlement sur la GRC ») :

« Le membre ne peut sciemment négliger aucune des fonctions qui lui sont confiées. »

Allégation 2 : Entre le 17 et le 29 juillet 2014, à [X], en Alberta, ou à proximité, [l’intimé], a sciemment ou délibérément menti à son superviseur [caporal M] de vive voix ainsi que dans son rapport général et dans un courriel interne GroupWise, en précisant qu’il avait éliminé ou détruit l’alcool constituant une pièce à conviction qui avait été saisi en lien avec le dossier d’enquête no 2014863145 du SIRP son superviseur, alors qu’il avait donné l’alcool à des membres du service d’incendie local pour qu’ils le consomment.

Pour ce qui est de l’allégation 2, je suis d’avis que vous avez contrevenu au Code de déontologie, à savoir à l’alinéa 45b) du Règlement sur la GRC :

« Le membre ne peut sciemment ou volontairement faire une déclaration ou un rapport faux, trompeur ou inexact à un membre qui lui est supérieur en grade ou qui a autorité sur lui, relativement : à une enquête. »

Allégation 3 : Le 23 juillet 2014, à [X], en Alberta, ou à proximité, [l’intimé], pendant qu’il était de service, a retiré l’alcool constituant une pièce à conviction liée au dossier d’enquête no 2014863145 du SIRP du détachement de la GRC de [X] et a donné l’alcool à un membre du service d’incendie local pour qu’il l’utilise et le consomme.

Allégation 4 : Le 23 juillet 2014, à [X], en Alberta, ou à proximité, [l’intimé], pendant qu’il était de service, a signalé au chef des pompiers de [X] [M. W] de dire à quiconque demandait ce qui était arrivé à l’alcool fourni en lien avec le dossier d’enquête no 2014863145 du SIRP que l’alcool avait été détruit à la caserne.

En ce qui concerne les allégations 3 et 4, je suis d’avis que vous avez contrevenu au Code de déontologie, à savoir au paragraphe 39(1) du Règlement sur la GRC :

« Le membre ne peut agir ni se comporter d’une façon scandaleuse ou désordonnée qui jetterait le discrédit sur la Gendarmerie. »

[9]  Le 15 août 2014, l’appelante a suspendu l’intimé de ses fonctions avec solde à compter du 13 août 2014 (documents, pages 7 à 10).

[10]  On a également effectué une enquête prescrite dans cette affaire, et un rapport d’enquête a été produit englobant tous les éléments touchés par l’enquête relative au Code de déontologie. L’enquêteur a interrogé sept témoins, a examiné des documents, notamment des rapports du SIRP, des copies des contraventions, des procès-verbaux du détachement, les politiques relatives aux pièces à conviction et des photographies de la glacière, de la bière restante, de la caserne et de la salle d’entreposage du détachement.

[11]  Le rapport d’enquête porte la date du 9 octobre 2014 (documents, page 20).

Avis d’audience disciplinaire

[12]  Le 16 juillet 2015, l’appelante a produit un Avis d’audience disciplinaire (l’« avis ») (voir Documents manquants – Avis d’audience disciplinaire). L’avis a été signifié à l’intimé le 26 juillet 2015. En raison de l’entrée en vigueur de la Loi visant à accroître la responsabilité de la Gendarmerie royale du Canada et du Règlement sur la Gendarmerie royale du Canada, DORS/2014-28, l’affaire a été traitée au moyen du nouveau processus disciplinaire. Même si la nature des allégations est demeurée la même, les allégations ont dû être modifiées afin de correspondre aux parties modifiées du nouveau Code de déontologie. Par conséquent, les allégations et leur sommaire ont été modifiés comme suit :

[TRADUCTION]

Allégation 1 : Entre le 17 et le 25 juillet 2014, à [le secteur du détachement] ou à proximité, dans la province de l’Alberta, [l’intimé] a eu une conduite déshonorante susceptible de jeter le discrédit sur la Gendarmerie, ce qui va à l’encontre de l’article 7.1 du Code de déontologie de la Gendarmerie royale du Canada.

Caractéristiques de la contravention :

1. À toute date pertinente, vous étiez un membre de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) affecté au [un détachement], Division K, dans la province de l’Alberta.

2. Pendant la nuit du 16 au 17 juillet 2014, vous avez arrêté [témoin X] et avez remis plusieurs contraventions à [témoin X].

3. Vous avez saisi une glacière et son contenu du véhicule associé à [Témoin X]. La glacière contenait plusieurs articles, y compris de nombreuses bouteilles de bière pleines.

4. Vous avez placé la glacière dans votre véhicule de police et êtes retourné au détachement de la GRC, puis vous avez laissé la glacière et son contenu dans la salle d’entreposage du détachement.

5. Le 23 juillet 2014, vous avez placé la glacière dans la camionnette de [M. F]. Vous avez avisé [M. F] qu’il pouvait garder le contenu de la glacière, mais qu’il devait vous rendre la glacière.

6. Le 25 juillet 2014, vous avez ajouté une étiquette pour pièce à conviction sur la glacière et l’avez remise dans un lieu d’entreposage sécurisé.

7. Vous n’avez pas protégé et préservé la glacière et son contenu dans un lieu d’entreposage sécurisé convenable dans les plus brefs délais, ce qui va à l’encontre de l’article 3.1.1.5 du Manuel des opérations (MO), chapitre 22.1 Traitement.

8. Vous n’avez pas consigné la glacière et son contenu dans le Système de gestion des dossiers (SGD), ce qui va à l’encontre de l’article 3.1.1.6 du Manuel des opérations (MO), chapitre 22.1 Traitement.

9. Vous n’avez pas conservé l’alcool saisi pendant 30 jours, ce qui va à l’encontre de l’article 2.5 du Manuel des opérations de la Division K – V9 Loi sur l’alcool et les jeux de hasard.

10. Vous n’avez pas éliminé la glacière et son contenu, conformément à l’article 2.5 du Manuel des opérations de la Division K – V9 Loi sur l’alcool et les jeux de hasard.

Allégation 2 : Vers le 23 juillet 2014, à [le secteur du détachement] ou à proximité, dans la province de l’Alberta, [l’intimé] a eu une conduite déshonorante susceptible de jeter le discrédit sur la Gendarmerie, ce qui va à l’encontre de l’article 7.1 du Code de déontologie de la Gendarmerie royale du Canada.

Caractéristiques de la contravention :

1. À toute date pertinente, vous étiez un membre de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) affecté au [un détachement], Division K, dans la province de l’Alberta.

2. Pendant la nuit du 16 au 17 juillet 2014, vous avez arrêté [témoin X] et avez saisi une glacière et son contenu du véhicule associé à [témoin X]. La glacière contenait plusieurs articles, y compris de nombreuses bouteilles de bière pleines.

3. Le 23 juillet 2014, vous avez rédigé un rapport complémentaire dans le SIRP. Dans ce dernier, vous avez écrit que l’alcool saisi de [témoin X] avait été éliminé et que la glacière saisie se trouvait encore dans le garage.

4. Votre rapport complémentaire du SIRP contenait des renseignements trompeurs et/ou faux.

Allégation 3 : Vers le 25 juillet 2014, à [le secteur du détachement] ou à proximité, dans la province de l’Alberta, [l’intimé] a eu une conduite déshonorante susceptible de jeter le discrédit sur la Gendarmerie, ce qui va à l’encontre de l’article 7.1 du Code de déontologie de la Gendarmerie royale du Canada.

Caractéristiques de la contravention :

1. À toute date pertinente, vous étiez un membre de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) affecté au [un détachement], Division K, dans la province de l’Alberta.

2. Pendant la nuit du 16 au 17 juillet 2014, vous avez arrêté [témoin X] et avez saisi une glacière et son contenu du véhicule associé à [témoin X]. La glacière contenait plusieurs articles, y compris de nombreuses bouteilles de bière pleines.

3. Le 25 juillet 2014, vous avez rédigé et envoyé un courriel à votre superviseur [caporal M]. Dans ce dernier, vous avez écrit que personne n’avait avoué être propriétaire de l’alcool et que l’alcool avait été éliminé.

4. Votre courriel au [caporal M] contenait des renseignements trompeurs et/ou faux.

Allégation 4 : Entre le 17 et le 25 juillet 2014, à [le secteur du détachement] ou à proximité, dans la province de l’Alberta, [l’intimé] a eu une conduite déshonorante susceptible de jeter le discrédit sur la Gendarmerie, ce qui va à l’encontre de l’article 7.1 du Code de déontologie de la Gendarmerie royale du Canada.

Caractéristiques de la contravention :

1. À toute date pertinente, vous étiez un membre de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) affecté au [un détachement], Division K, dans la province de l’Alberta.

2. Pendant la nuit du 16 au 17 juillet 2014, vous avez arrêté [témoin X] et avez saisi une glacière et son contenu du véhicule associé à [témoin X]. La glacière contenait plusieurs articles, y compris de nombreuses bouteilles de bière pleines.

3. Le 23 juillet 2014, vous avez demandé au chef des pompiers [M. W] si « les gars » voulaient éliminer le contenu de la glacière, ou un autre énoncé ayant la même signification.

4. Le 23 juillet 2014, vous avez mis la glacière dans la camionnette de [M. F]. Vous avez avisé [M. F] qu’il pouvait garder le contenu de la glacière, mais qu’il devait vous remettre la glacière.

5. Vous avez donné des pièces à conviction illégalement.

Allégation 5 : Entre le 23 et le 25 juillet 2014, à [le secteur du détachement] ou à proximité, dans la province de l’Alberta, [l’intimé] a eu une conduite déshonorante susceptible de jeter le discrédit sur la Gendarmerie, ce qui va à l’encontre de l’article 7.1 du Code de déontologie de la Gendarmerie royale du Canada.

Caractéristiques de la contravention :

1. À toute date pertinente, vous étiez un membre de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) affecté au [un détachement], Division K, dans la province de l’Alberta.

2. Pendant la nuit du 16 au 17 juillet 2014, vous avez arrêté [témoin X] et avez saisi une glacière et son contenu du véhicule associé à [témoin X]. La glacière contenait plusieurs articles, y compris de nombreuses bouteilles de bière pleines.

3. Le 23 juillet 2014, vous avez demandé au chef des pompiers [M. W] si « les gars » voulaient éliminer le contenu de la glacière, ou un autre énoncé ayant la même signification.

4. Le 23 juillet 2014, vous avez mis la glacière dans la camionnette de [M. F]. Vous avez avisé [M. F] qu’il pouvait garder le contenu de la glacière, mais qu’il devait vous remettre la glacière.

5. Le 25 juillet 2014, vous avez dit à [M. W] de fournir de faux renseignements concernant l’élimination de l’alcool contenu dans la glacière qui avait été remise à [M. F].

[13]  Dans l’avis, on a également informé l’intimé de l’identité de l’officier désigné nommé au Comité de déontologie.

Instance devant le Comité

[14]  Avant l’audience, le Comité a demandé aux parties de fournir des soumissions sur deux questions (appel, page 35) :

  1. La glacière et la bière constituaient-elles des pièces à conviction, comme on l’énonce dans l’allégation 4, conformément aux termes de la politique de la GRC en vigueur à cemoment?
  2. L’utilisation du mot « saisi », qui fait partie des cinq allégations, suppose-t-elle que lesarticles en question constituaient bel et bien des pièces à conviction, conformément aux termes de la politique de la GRC en vigueur à cemoment?

[15]  Le 27 novembre 2015, le Comité a rendu sa décision en avisant les parties que les articles en question constituaient des pièces à conviction conformément aux termes de la politique de la GRC en vigueur à ce moment (appel, page 36).

[16]  Entre les 12 et 14 avril 2016, une audience a eu lieu, et le Comité a déterminé que les cinq allégations étaient établies (appel, page 29).

a) Décision relative aux allégations

[17]  Le Comité a déclaré ce qui suit (appel, page 51) :

[TRADUCTION]

[103] Dans le résumé, je conclus qu’une personne raisonnable qui est au courant de toutes les circonstances de l’affaire et qui connaît non seulement les activités policières en général, mais également les activités policières de la GRC en particulier, serait d’avis que les comportements ci-après sont déshonorants et ternissent la réputation de la Gendarmerie.

·  Le défaut conscient et délibéré de respecter les politiques relatives à la manipulation d’une pièce à conviction, conformément à l’allégation 1;

·  La tentative délibérée d’induire en erreur dans le rapport du SIRP, conformément à l’allégation 2;

·  La tentative délibérée d’induire en erreur dans le courriel, conformément à l’allégation 3;

·  Le fait d’avoir donné des pièces à conviction illégalement, conformément à l’allégation 4;

·  Le fait d’avoir donné à M. C la directive de donner de faux renseignements au sujet de l’élimination de la bière, conformément à l’allégation 5.

[104] La personne raisonnable serait d’avis que tous ces actes sont suffisamment liés aux fonctions [de l’intimé] pour donner à la Gendarmerie un motif légitime d’imposer des mesures disciplinaires.

b) Soumissions sur les mesures disciplinaires

[18]  Le représentant de l’autorité disciplinaire (RAD) n’a présenté aucun élément de preuve ou antécédent disciplinaire. L’appelante a demandé le congédiement de l’intimé.

[19]  La seule preuve présentée par le représentant du membre (RM) est le témoignage de l’intimé afin de justifier l’imposition de mesures disciplinaires graves n’allant pas jusqu’au congédiement.

[20]  À l’étape des soumissions, le RAD a présenté plusieurs affaires criminelles impliquant un abus de confiance ainsi que plusieurs décisions d’un comité d’arbitrage de la GRC impliquant des éléments touchant la compromission de l’honnêteté et de l’intégrité. Enfin, le RAD a soutenu que l’arrêt R. c McNeil, 2009 CSC 3 (McNeil) est pertinent, car la durée de la carrière de l’intimé causerait un préjudice indu à la Gendarmerie si elle ne congédiait pas l’intimé.

[21]  Le RM a traité de la jurisprudence présentée par le RAD, soutenant que cette affaire est différente de toutes ces autres affaires, car l’inconduite n’était pas motivée par l’appât du gain.

[22]  Le RM a ventilé les allégations et fourni l’argument suivant concernant les mesures disciplinaires :

  • L’allégation 1 porte sur le manque de diligence de l’intimé, et la sanction proposéedans les cas mineurs est la confiscation de la solde pour une période de deux à huitjours.
  • Les allégations 2 et 3 portent sur la falsification de rapports de police, et la sanction proposée dans les cas mineurs est la confiscation de la solde pour une période de 11 à 29 jours. Le RM est d’avis que 20 jours conviendraient pour l’allégation 2 et 15 jours, pour l’allégation 3, car la conduite de l’intimé n’a pas compromis une enquête ou la relation entre le détachement local et le service d’incendie et n’a eu aucune incidence négative sur les droits d’une tiercepartie.
  • Pour l’allégation 4, le RM soutient que le Guide des mesures disciplinaires nementionne pas expressément le fait de donner des pièces à conviction. Selon lui, la confiscation de dix jours de solde est raisonnable, puisqu’aucune incidence n’a étécompromise.
  • Enfin, le RM est d’avis que l’allégation 5 est comparable à mentir à un superviseur et que la sanction normale pour un incident isolé où le membre montre un énorme manque de jugement dans une carrière qui est autrement très satisfaisante est de 15 à 20jours.

[23]  Le RM a présenté plusieurs décisions d’un comité d’arbitrage de la GRC au Comité, soutenant que l’intimé n’était pas motivé par l’appât du gain, mais cherchait plutôt à renforcer ses relations avec le service d’incendie. Le RM a souligné les évaluations de rendement positives de l’intimé, de nombreuses lettres de soutien, un certificat de reconnaissance et l’engagement auprès de la collectivité de l’intimé tout au long de sa carrière. En raison de ces facteurs atténuants, le RM propose une réprimande et la confiscation de 45 à 60 jours de solde.

c) Décision relative aux mesures disciplinaires

[24]  Le Comité a établi que l’intimé a donné la bière saisie au service d’incendie en geste de bonne volonté. Le Comité a déclaré que l’intimé savait qu’il ne se conduisait pas convenablement, puisqu’il n’a pas documenté ses actions correctement et a demandé au chef des pompiers de mentir pour lui. Le Comité a déterminé qu’il devait déterminer si ces actes constituaient un défaut de caractère irrécupérable et un degré de turpitude morale si élevé que le seul choix possible soit de congédier le membre après neuf années de service satisfaisant.

[25]  Le Comité a pris en considération les affaires mentionnées par le RAD et le RM et a souligné qu’en ce qui a trait aux questions d’honnêteté et d’intégrité, tout n’est pas noir ou blanc et qu’il faut examiner minutieusement le degré de turpitude morale impliqué. Le Comité a souligné que dans tous les cas mentionnés par le RAD, des accusations criminelles pour abus de confiance avaient été portées contre les employés de la GRC responsables du traitement de pièces à conviction. Par conséquent, ces cas étaient différents de l’affaire dont le Comité était saisi.

[26]  Le Comité a déterminé que les sanctions imposées dans les cas présentés allaient de la réprimande et une confiscation considérable de la solde à l’ordre de démissionner. Le Comité a conclu que le congédiement survenait seulement dans les cas où un membre cherchait ou avait obtenu un gain personnel et en l’absence de facteur atténuant d’importance.

[27]  Le Comité était d’avis que l’affaire 2016 DARD 2, résumée ci-après, était comparable (appel, page 60) :

[TRADUCTION]

Le membre intimé était visé par quatre allégations, car il voulait remettre le permis de conduire d’un conducteur dont les échantillons d’haleine montraient une alcoolémie de 90 mg par 100 ml et de 100 mg par 100 ml. Le membre intimé croyait que le conducteur perdrait son emploi si des accusations étaient portées. Des accusations auraient entraîné la suspension du permis de conduire pour une longue période, et le permis de conduire était requis pour l’emploi du conducteur.

Le membre intimé a falsifié un échange de courriels avec un procureur de la Couronne local appuyant la décision de ne pas porter d’accusation, puis il a fait des rapports de vive voix et par voie électronique expliquant ou répétant l’essentiel du courriel. Le courriel contrefait a été créé pour qu’un superviseur puisse clore le dossier. Il a accidentellement été transmis au procureur de la Couronne. Le membre intimé a été accusé au criminel de fabrication d’un faux document. Il a plaidé coupable et a reçu une absolution sous condition.

Une motion visant à fusionner les deux allégations de conduite déshonorante et les deux allégations concernant le courriel falsifié a été refusée lors d’une conférence préparatoire. Le membre intimé a avoué ses actes, et les quatre allégations ont été établies. En l’absence d’avantage personnel, la perte d’emploi a été considérée comme disproportionnelle. La malhonnêteté du membre intimé a eu une incidence sur l’exécution de la loi et a menacé la relation entre la GRC et la Couronne, ce qui nécessite une confiscation de la solde importante. Au total, on a imposé les mesures disciplinaires suivantes au membre intimé : on a confisqué 60 jours de solde, il est devenu inadmissible à toute promotion pendant deux années, il a reçu les soins psychologiques requis et a été muté ou réaffecté, selon ce que l’autorité disciplinaire considérait comme nécessaire.

[28]  Même si on a souligné que l’absence d’un avantage personnel est semblable entre les deux affaires, le Comité a également pris en considération les différences entre les deux affaires. Il a notamment fait remarquer que l’inconduite de l’intimé était moins grave, car aucune accusation criminelle n’a été portée contre lui, ses actes n’ont pas compromis d’enquêtes criminelles et il n’a pas compromis la relation entre la GRC et un partenaire de l’exécution de la loi.

[29]  Lorsqu’il a évalué les facteurs en jeu dans cette affaire, le Comité a déterminé les facteurs aggravants qui suivent (appel, page 62) :

  1. Puisque les allégations 2, 3 et 5 décrivent trois tentatives différentes d’induire en erreur, le Comité est d’avis que les actes de l’intimé ne constituent pas un écart de conduiteisolé.
  2. Les obligations de divulgation continue supposée par l’arrêtMcNeil.

[30]  Le Comité a déterminé les facteurs atténuants qui suivent (appel, pages 62 à 66) :

  1. La nature de la pièce à conviction. Le détachement a utilisé une méthode différente de traitement des pièces à conviction liées à l’alcool, comparativement à la méthode employée pour d’autres pièces àconviction.
  2. La relation aigre entre l’intimé et le commandant de détachement p.i.
  3. Le potentiel de réhabilitation del’intimé.
  4. L’engagement dans la collectivité constant de l’intimé.
  5. Les nombreuses lettres de recommandation décrivant l’intimé comme étant une personne compatissante etattentionnée.
  6. Les cas antérieurs où l’intimé a fait preuve de bravoure et le fait qu’il est extrêmement improbable que l’intimé ait recours à des pratiques trompeuses àl’avenir.

[31]  Le Comité a imposé les mesures disciplinaires suivantes (Appel, page 67) :

  • Pour chacune des allégations, une réprimande.
  • Pour l’allégation 1, la confiscation de trois jours de solde.
  • Pour l’allégation 2, la confiscation de huit jours de solde.
  • Pour l’allégation 3, la confiscation de huit jours de solde.
  • Pour l’allégation 4, la confiscation de trois jours de solde.
  • Pour l’allégation 5, la confiscation de 13 jours de solde.

[32]  Le Comité a confirmé une confiscation totale de 35 jours de solde, énonçant qu’il s’agissait d’une sanction pécuniaire considérable étroitement harmonisée avec la référence de 45 jours décrite dans le Guide des mesures disciplinaires comme la pénalité la plus sévère à l’exception du congédiement. L’intention du Comité était que l’effet cumulatif constitue un élément dissuasif à la fois précis et général et qu’il soit proportionnel à la gravité de l’inconduite de l’intimé.

APPEL

[33]  Le 18 avril 2016, le Comité a rendu une décision préliminaire partielle. En guise de réponse, le 22 avril 2016, l’appelante a présenté le formulaire 6437 – Déclaration d’appel au BCGA (appel, pages 4 et 5). Comme la décision finale du Comité n’avait pas encore été rendue, le BCGA a déterminé que la demande de l’appelante était prématurée.

[34]  La décision écrite finale est datée du 6 juin 2016, et le 8 juin 2016, l’appelante a présenté son formulaire 6437 à nouveau, soutenant que les mesures disciplinaires imposées par le Comité étaient manifestement déraisonnables, que la décision avait été prise d’une façon qui allait à l’encontre des principes d’équité procédurale applicables et que la décision était fondée sur une erreur de droit (appel, pages 22 et 23).

Soumission de l’appelante

[35]  L’appelante soulève 12 motifs d’appel. Ceux-ci sont résumés ci-après, sous les en-têtes « Erreurs de droit » et « Manifestement déraisonnable ».

Erreurs de droit

1. Le Comité a commis une erreur en minimisant l’incidence de l’arrêt McNeil à titre de facteur aggravant.

2. Le Comité a commis une erreur en déterminant que le risque de récidive de [l’intimé] est minimal.

3. Le Comité a commis une erreur en omettant de reconnaître la gravité de l’incidence de la conduite de [l’intimé] sur l’administration de la justice pénale.

4. Le Comité a commis une erreur en mettant un accent évident sur l’avantage personnel et la motivation et en considérant ces éléments comme des facteurs atténuants.

5. Le Comité a commis une erreur en déterminant que l’alcool constituant une pièce à conviction n’était pas « de seconde importance », puis en appliquant par erreur le principe selon lequel des mesures disciplinaires moindres devraient être imposées en lien avec sa manipulation.

6. Le Comité a commis une erreur en n’abordant pas la question de la glacière saisie, ce qui a entraîné un manquement à l’équité procédurale.

7. Le Comité a commis une erreur en accordant une trop grande importance à la relation entre [le commandant de détachement p. i.] et [l’intimé].

Manifestement déraisonnable

8. Le Comité a commis une erreur en évaluant la preuve.

9. Le Comité a commis une erreur en concluant que l’inconduite ne constitue pas la répudiation du contrat d’emploi.

10. Le Comité a commis une erreur en s’écartant considérablement du nouveau Guide des mesures disciplinaires (2014) de la GRC lorsqu’il a ordonné la confiscation totale de 35 jours de solde.

11. Le Comité a commis une erreur en omettant d’expliquer adéquatement pourquoi il n’a pas imposé la sanction pécuniaire proposée par le RM.

12. Le Comité a commis une erreur en ne concluant pas que le congédiement constituait la mesure disciplinaire appropriée dans cette affaire.

Soumission de l’intimé

[36]  L’intimé affirme que l’appelante a décrit erronément ses sept premières objections comme des erreurs de droit. Il soulève que ces objections sont toutes liées au caractère raisonnable de la décision et doivent être examinées en fonction de cette norme. Par conséquent, l’intimé affirme qu’il faut faire preuve de la déférence appropriée envers le Comité, en qualité de décideur administratif.

[37]  L’intimé s’oppose à chacune des objections soulevées par l’appelante et soutient que la décision du Comité correspond à la fourchette de résultats possibles, que le Comité a amplement justifié les mesures disciplinaires imposées et que la décision dans son ensemble respecte les exigences ayant trait à la justification, à la transparence et à l’intelligibilité (appel, page 269).

Réfutation de l’appelante

[38]  L’appelante affirme que l’intimé se trompe lorsqu’il suggère qu’elle a commis une erreur dans sa détermination de la norme de contrôle adéquate en appel. Elle soutient que le nouveau régime législatif de la GRC doit être pris en considération pour déterminer la norme de contrôle adéquate et que les précédents jurisprudentiels concernant les appels du droit administratif ont peu de valeur, puisqu’ils concernent des entités administratives différentes assorties de régimes législatifs différents (appel, page 360).

[39]  L’appelante soulève que puisque le CEE a l’autorité de convoquer une audience et de recevoir des nouveaux éléments de preuve, il n’est pas tenu de faire preuve de déférence à l’égard de la décision du Comité. L’appelante ajoute que la commissaire, en qualité de seule bénéficiaire de la recommandation du CEE, n’est pas tenue de faire preuve de déférence à l’égard de la décision du Comité non plus. De plus, la commissaire dispose du pouvoir discrétionnaire, en vertu de la Loi sur la GRC, d’imposer une autre mesure disciplinaire, ce qui confirme que la commissaire n’est pas tenue de faire preuve de déférence à l’égard de la décision du Comité. L’appelante affirme que la dernière étape du processus d’appel est le contrôle judiciaire de la décision de la commissaire par la Cour fédérale et que c’est seulement à cette étape que la norme de contrôle décrite dans l’arrêt Dunsmuir c. New Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190 s’applique.

[40]  L’appelante soutient que les exigences fondamentales d’un policier incluent l’obligation d’incarner les valeurs fondamentales d’honnêteté et d’intégrité. Elle ajoute que lorsqu’on détermine que l’intimé a menti et qu’il a demandé à un tiers de fournir de faux renseignements, celui-ci ne satisfait plus à ces exigences de base. L’appelante soutient que les conséquences sont évidentes et qu’aucune preuve additionnelle n’est requise.

[41]  L’appelante suggère que le comportement antérieur constitue le fondement approprié pour prédire le comportement futur et que le Comité a commis une erreur lorsqu’il a déterminé que la probabilité de récidive de l’intimé était minimale.

[42]  L’appelante réitère sa soumission initiale, soutenant que la décision de maintenir l’intimé en poste était manifestement déraisonnable.

COMITÉ EXTERNE D’EXAMEN

[43]  Le CEE a reçu l’appel le 7 décembre 2016 et a fourni son rapport le 8 août 2019, dans lequel il a recommandé que l’appel soit rejeté.

[44]  Le CEE est d’avis que l’appel a été renvoyé correctement en vertu de l’alinéa 45.15(1)a) de la Loi sur la GRC en qualité d’appel lié à des mesures disciplinaires incluant une sanction pécuniaire correspondant à plus d’une journée de la solde du membre.

[45]  Le CEE a déterminé que l’appelante a déposé son appel dans le délai statutaire de 14 jours et a souligné que l’appelante a reçu la décision le 7 juin 2016 et a déposé son appel le jour suivant. Le CEE a également déterminé que l’appelante a pris connaissance de l’identité de l’intimé le 13 août 2014 et a convoqué l’audience avant l’expiration du délai d’une année, conformément aux exigences du paragraphe 41(2) de la Loi sur la GRC.

[46]  Le CEE a souligné que les parties ne s’entendent pas sur la norme de contrôle applicable devant être employée par la commissaire et le CEE pour examiner les décisions du Comité de déontologie. Le CEE a précisé que le paragraphe 33(1) des CC (griefs et appels) établit le fondement de l’examen de la commissaire. Il énonce que « lorsqu’il rend une décision sur la disposition d’un appel, le commissaire évalue si la décision qui fait l’objet de l’appel contrevient aux principes de l’équité procédurale, est entachée d’une erreur de droit ou est manifestement déraisonnable ». Le CEE a déterminé que l’utilisation du terme « manifestement déraisonnable » signifie sur les caractéristiques essentielles de la déférence du CEE et de la commissaire et qu’elle est également conforme aux termes employés dans les recommandations du CEE, les décisions de la commissaire et les décisions judiciaires antérieures.

[47]  Le CEE a effectué une analyse approfondie fondée sur les arrêts Elhatton c. Canada (Procureur général), [2013] A.C.F. no 58, H.L. c. Canada (Procureur général), [2005] 1 R.C.S. 401 et Kalkat v. Canada (Procureur général), 2017 FC 794 (Kalkat) et a déterminé que les normes incluent une grande déférence. Lorsqu’il a pris en considération la décision du Comité à l’égard des mesures disciplinaires, le CEE a inclus une recommandation antérieure du CEE (D-121), les conclusions liées aux procédures intentées pour inconduite dans l’arrêt Barreau du Haut-Canada c. St. Fort [2001] L.S.D.D. no 67 et la décision de la Cour suprême dans l’affaire R. c. Lacasse, [2015], 3 R.C.S. 1089 (Lacasse). Le CEE a conclu qu’en l’absence d’une erreur manifeste et déterminante dans l’évaluation des faits, d’une omission de prendre en considération des facteurs atténuants pertinents et importants, d’une prise en considération de facteurs aggravants non pertinents ou de l’imposition de mesures disciplinaires manifestement disproportionnées, il faut faire preuve d’une grande retenue à l’égard du Comité.

[48]  Ensuite, le CEE a analysé les 12 motifs d’appel présentés par l’appelante.

1. Le Comité a commis une erreur en minimisant l’incidence de l’arrêt McNeil à titre de facteur aggravant.

[49]  Le CEE est d’avis que le Comité n’a commis aucune erreur manifeste et déterminante lorsqu’il a conclu qu’en dépit des implications de l’arrêt McNeil, on ne pouvait pas déterminer si la capacité de la Gendarmerie de maintenir en poste l’intimé était compromise (rapport, paragraphe 107). Le CEE a reconnu que les conséquences de l’arrêt McNeil n’étaient pas entièrement connues, mais il a précisé qu’il incombait à l’appelante de présenter des preuves, car c’est elle qui alléguait que l’intimé ne pouvait plus être employé par la Gendarmerie. De plus, le CEE a déterminé qu’en l’absence de telles preuves, le Comité pouvait tirer sa propre conclusion en ce qui a trait à l’incidence de l’arrêt McNeil sur le maintien en poste de l’intimé (rapport, paragraphe 108).

[50]  Le CEE n’est pas d’accord avec l’appelante en ce qui concerne le fait que les considérations relatives à l’arrêt McNeil empêchent l’intimé de témoigner. Le CEE a déterminé que même s’il y avait des exigences relatives à la divulgation, l’incidence réelle peut seulement être évaluée par le juge pendant le témoignage de l’intimé. Le CEE soutient qu’il est possible qu’un policier demeure crédible après avoir commis une inconduite et que d’autres preuves pourraient corroborer le témoignage du membre concerné dans tout procès.

2. Le Comité a commis une erreur en déterminant que le risque de récidive de [l’intimé] est minimal.

[51]  Le CEE a pris en considération les preuves présentées et a signalé que ni l’une ni l’autre des parties n’a présenté de preuve d’expert sur la question du récidivisme. Le CEE est d’avis qu’en l’absence de preuve montrant le contraire, le Comité devait fonder ses conclusions sur les renseignements présentés. Le CEE a souligné que le Comité avait déterminé que l’inconduite constituait un manque de jugement qui ne l’emportait pas sur les années de service satisfaisant de l’intimé.

[52]  Le CEE a déclaré que le Comité a pris en considération la gravité des mensonges de l’intimé et a déterminé que même s’il s’agissait d’un facteur aggravant, l’ensemble de la preuve, les évaluations de rendement de l’intimé et son engagement dans la collectivité présentent une possibilité de réhabilitation. Par conséquent, le CEE est d’avis que le Comité n’a commis aucune erreur manifeste et déterminante en lien avec sa conclusion.

3. Le Comité a commis une erreur en omettant de reconnaître la gravité de l’incidence de la conduite de l’intimé sur l’administration de la justice pénale.

[53]  Le CEE a conclu que le Comité n’a pas commis une erreur lorsqu’il a évalué l’inconduite de l’intimé en fonction de son incidence sur l’administration de la justice; évaluation fondée sur la prise en considération par le Comité des conséquences de l’arrêt McNeil à titre de facteur aggravant et sur l’examen par le Comité de la jurisprudence portant sur l’honnêteté et l’intégrité des policiers qui conservent leur emploi. De plus, le CEE a souligné que l’appelante n’a pas signalé d’autres conséquences que la conduite de l’intimé pourrait avoir sur l’administration de la justice pénale.

[54]  Le CEE a recommandé que la commissaire n’intervienne pas, car à l’exception de l’objection de l’appelante à l’égard de l’importance accordée aux actions de l’intimé par le comité, il n’y a aucune preuve d’erreur manifeste et déterminante justifiant la modification de la décision du Comité.

4. Le Comité a commis une erreur en déterminant que l’appelante n’était pas motivée par l’obtention d’un avantage personnel.

[55]  Le CEE a déterminé que le Comité n’a pas commis d’erreur lorsqu’il a conclu qu’il n’y avait aucun avantage personnel pour l’intimé. Le CEE a souligné que le Comité n’a pas inclus l’absence d’avantage comme facteur atténuant distinct, mais les motifs à l’appui de la décision du Comité précisent clairement que ce facteur a joué un rôle déterminant dans l’examen des affaires antérieures.

[56]  Le CEE a conclu que l’argument de l’appelante selon lequel l’intimé pourrait s’attendre à recevoir un niveau de service plus élevé s’il devait un jour avoir recours au service d’incendie ou exiger un tel niveau de service relève tout au plus de la conjecture. De plus, le CEE a souligné que le Comité n’a reçu aucune preuve liée à l’argument conjectural de l’appelante, et l’appelante n’a pas interrogé l’intimé au sujet d’un éventuel avantage.

[57]  Le CEE est d’avis que l’évaluation du Comité concernant l’incidence de la malhonnêteté sur les mesures disciplinaires était conforme aux précédents établis au moyen de l’examen des affaires pertinentes (rapport, paragraphe 137).

5. Le Comité a commis une erreur en minimisant l’incidence de l’inconduite de l’intimé en raison de la nature des pièces à conviction.

[58]  Le CEE a déterminé que la preuve présentée au Comité établissait que la gestion de l’alcool comme pièce à conviction, en général, n’était pas effectuée conformément à la politique, et que les saisies d’alcool n’étaient pas traitées de la même façon que les saisies d’autres substances. Le CEE a également déterminé que l’appelante a omis d’expliquer pourquoi ce facteur atténuant devrait être ignoré, puisque les pratiques divergentes étaient généralisées au sein du détachement. Le CEE a conclu qu’en l’absence de toute erreur déraisonnable par le Comité, la commissaire devrait faire preuve de déférence et permettre au Comité de soupeser les divers facteurs aggravants et atténuants.

6. Les motifs du Comité sont insuffisants, puisque le Comité n’aborde pas la question de la glacière saisie.

[59]  Le CEE a déterminé qu’il n’est pas nécessaire d’aborder toutes les questions, mais les raisons doivent justifier et expliquer le résultat. Le CEE s’est appuyé sur l’arrêt Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c. Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), [2011] CSC 62, paragraphe 16 :

En d’autres termes, les motifs répondent aux critères établis dans Dunsmuir [justification, transparence et intelligibilité] s’ils permettent à la cour de révision de comprendre le fondement de la décision du tribunal et de déterminer si la conclusion fait partie des issues possibles acceptables.

[60]  Le CEE a également déterminé qu’il n’était pas nécessaire d’inclure la glacière saisie dans les facteurs aggravants, car les circonstances concernant la saisie de la glacière et de son contenu sont incluses dans l’allégation. Conformément à la définition du terme « aggravation » incluse dans le Black’s Law Dictionary et à la recommandation C-007 du CEE, le CEE a déterminé que le Comité n’a pas commis une erreur en omettant d’inclure la glacière saisie comme facteur aggravant.

7. Le Comité a commis une erreur en accordant une trop grande importance à la relation entre [le commandant de détachement p. i.] et l’intimé.

[61]  Le CEE a conclu que les conclusions du Comité sont problématiques, puisque la relation n’a rien à voir avec la question des mesures disciplinaires proportionnées (rapport, page 159).

[62]  Le CEE a déclaré qu’il n’y a aucune preuve devant le Comité montrant que d’autres membres du détachement ont mal géré ou donné des pièces à conviction. Par conséquent, on ne peut pas isoler l’intimé. De plus, le CEE a déterminé que le commandant p. i. avait le devoir d’agir en raison de l’éventuelle violation du Code de déontologie, et ce, sans égard à sa relation avec l’intimé.

[63]  Le CEE a conclu que même si le Comité a pris en considération un facteur atténuant non pertinent, ce dernier n’a pas servi à déterminer si l’intimé devait être congédié ou non. Le CEE a souligné que le Comité a pris en considération plusieurs autres facteurs atténuants, il a examiné les affaires d’autres comités d’arbitrage où des membres ont conservé leur emploi en dépit d’avoir été malhonnêtes et il a évalué le cadre de mesures au moyen du Guide des mesures disciplinaires.

[64]  Le CEE s’est fondé sur l’extrait suivant de l’arrêt Lacasse (rapport, paragraphe 160) :

À mon avis, la présence d’une erreur de principe, l’omission de tenir compte d’un facteur pertinent ou encore la considération erronée d’un facteur aggravant ou atténuant ne justifiera l’intervention d’une cour d’appel que lorsqu’il appert du jugement de première instance qu’une telle erreur a eu une incidence sur la détermination de la peine.

8. Le Comité a commis une erreur dans son évaluation des preuves.

[65]  Le CEE est d’avis que l’appelante a omis de justifier ce motif d’appel et a souligné que toutes les questions soulevées ont été abordées dans d’autres sections de l’analyse du CEE.

9. Le Comité a commis une erreur en concluant que l’inconduite ne constituait pas la répudiation du contrat d’emploi.

[66]  Le CEE a déterminé que l’appelante n’a fourni aucun fondement pour ce motif d’appel et a conclu que l’honnêteté et l’intégrité de l’intimé ainsi que les conséquences de l’arrêt McNeil ont déjà été abordées ailleurs dans le rapport (rapport, paragraphe 167).

[67]  Le CEE n’a trouvé aucune erreur manifeste et déterminante dans la conclusion du Comité selon laquelle la conduite de l’intimé ne mérite pas le congédiement. Le CEE a souligné que le Comité a pris en considération les violations établies, les documents et les soumissions des parties, la jurisprudence, les facteurs aggravants et atténuants ainsi que les considérations et les fourchettes de confiscation précisées dans le Guide des mesures disciplinaires (rapport, paragraphe 169).

10. Le Comité a commis une erreur en imposant la confiscation de 35 jours de solde au lieu d’ordonner la démission de l’intimé.

[68]  Le CEE a évalué les motifs d’appel figurant aux points 10 à 12 ensembles, puisqu’ils portent tous sur le caractère approprié des mesures disciplinaires imposées.

[69]  Le CEE est d’avis que le Comité a suivi la procédure appropriée lorsqu’il a déterminé les mesures disciplinaires à imposer. Le CEE a souligné la souplesse fournie au Comité et a conclu qu’il n’était pas tenu d’imposer les mesures suggérées.

[70]  Le CEE a déterminé que le Comité a pris en considération les preuves présentées, et lorsqu’il a établi les allégations, il a souligné son obligation d’imposer des mesures disciplinaires proportionnelles à la nature et aux circonstances de la contravention au Code de déontologie, conformément au paragraphe 24(2) des Consignes du commissaire (conduite), DORS/214-29, [CC (déontologie)].

[71]  Le CEE est d’avis que la décision est très bien écrite, bien justifiée et très juste étant donné les circonstances (rapport, paragraphe 184).

Mesure disciplinaire

[72]  Le CEE recommande que la commissaire rejette l’appel et confirme les mesures disciplinaires imposées (rapport, paragraphe 186).

QUESTIONS PRÉLIMINAIRES

Norme de contrôle applicable

[73]  Les principes directeurs à suivre pour ce qui est des appels en matière de déontologie sont décrits au paragraphe 33(1) des CC (griefs et appels) :

Lorsqu’il rend une décision sur la disposition d’un appel, le commissaire évalue si la décision qui fait l’objet de l’appel contrevient aux principes d’équité procédurale, est entachée d’une erreur de droit ou est manifestement déraisonnable.

[74]  L’appelante a présenté 12 motifs d’appel, précisant que sept d’entre eux sont des erreurs de droit et cinq d’entre eux sont manifestement déraisonnables. Je suis d’accord avec le CEE que les sept motifs considérés comme des erreurs de droit par l’appelante ne sont pas classifiés correctement; ils font en sorte que toutes les objections de l’appelante touchent des questions de fait ou de fait et de droit. En réalité, le terme « manifestement déraisonnable » constitue la norme de contrôle applicable.

[75]  Le terme « manifestement déraisonnable », qui est utilisé au paragraphe 33(1) des CC (griefs et appels) a été pris en considération par la Cour fédérale au paragraphe 62 de l’arrêt Kalkat :

Par conséquent, étant donné qu’il est expressément indiqué que la décision doit être « nettement déraisonnable » et prenant en compte la traduction de l’expression, je conclus que le Délégué n’a commis aucune erreur. Il est raisonnable d’interpréter la norme de la décision « nettement déraisonnable » comme si elle équivalait à la norme de la décision « manifestement déraisonnable » dans le contexte du plan législatif et sur celui des principes. Il s’ensuit que le Délégué doit faire preuve de retenue à l’égard d’une conclusion par l’autorité disciplinaire lorsqu’il estime simplement que la preuve est insuffisante pour étayer la conclusion (British Columbia Workers’ Compensation Appeal Tribunal c. Fraser Health authority, 2016 CSC 25).

[76]  La notion de retenue est bien établie dans bon nombre de recommandations du CEE, de décisions antérieures de la commissaire et de plusieurs décisions de la Cour fédérale et de la Cour suprême du Canada. Par conséquent, l’interférence est seulement justifiée dans un cas où le Comité a commis une erreur manifeste et déterminante. Même si je souligne que cet appel porte seulement sur la décision du Comité à l’égard des mesures disciplinaires imposées, les recommandations du CEE et les décisions de la commissaire antérieures soulignent qu’il faut faire preuve du même niveau de déférence à l’égard du Comité à cet égard. Comme le CEE le précise dans D-043 et D-121 :

[TRADUCTION]

Les sanctions sont intrinsèquement empreintes d’une subjectivité considérable, et le tribunal de première instance, celui qui entend directement l’affaire dont il est saisi, est le mieux placé pour faire preuve de subjectivité. Une erreur de principe, l’omission de prendre en considération des facteurs atténuants pertinents et importants, la prise en considération de facteurs aggravants non pertinents et l’imposition de mesures disciplinaires manifestement disproportionnées constituent des exemples de situations pouvant justifier l’accueil d’un appel portant sur des sanctions en général. Toutefois, les organes d’appel n’annuleront pas une sanction pour la simple raison qu’ils auraient effectué une évaluation subjective différente de celle qui a été faite par le tribunal de première instance. Ces principes, même s’ils ont été développés dans le contexte de la déférence accordée par les organes de contrôle judiciaire en appel aux décisions judiciaires de première instance, s’appliquent tout de même d’une façon équivalente aux normes appropriées pour les appels internes lorsqu’un tribunal administratif effectue le contrôle en appel de la décision du tribunal administratif de première instance.

[77]  Par conséquent, je conclus qu’il faut faire preuve d’une retenue considérable à l’égard du Comité en l’absence d’une erreur manifeste et déterminante.

Délai légal

[78]  Le délai légal pour la présentation d’un appel est prescrit à l’article 22 des CC (griefs et appels) :

L’appel devant le commissaire est fait dans les quatorze jours suivant la date de la signification au membre en cause d’une copie de la décision visée par l’appel par le dépôt auprès du BCGA d’une déclaration d’appel.

[79]  Même si l’appelante a d’abord présenté son appel lorsqu’elle a reçu une décision préliminaire partielle, elle a présenté à nouveau sa demande d’appel le jour après avoir reçu la décision finale le 7 juin 2016. Par conséquent, je conclus que l’appelante a suivi à l’exigence concernant le délai de 14 jours.

Rôle d’arbitre

[80]  Mon rôle ne consiste pas à réévaluer la décision du Comité afin de déterminer si j’aurais rendu la même décision. Comme l’explique le paragraphe 33(1) des CC (griefs et appels), je dois plutôt déterminer si la décision en appel allait à l’encontre des principes d’équité procédurale applicables, était fondée sur une erreur de droit ou était manifestement déraisonnable.

[81]  Aux termes du paragraphe 45.16(8) de la Loi sur la GRC, avant de rendre ma décision, je dois prendre en considération les conclusions ou les recommandations formulées dans le rapport du CEE. Même si je ne suis pas tenue de prendre des mesures en lien avec ces conclusions ou ces recommandations, je dois justifier la raison pour laquelle je ne prends aucune mesure à cet égard.

[82]  L’appelante interjette appel des mesures disciplinaires imposées par le Comité. Conformément aux alinéas 45.16(3)a) et b) de la Loi sur la GRC, je dois rejeter l’appel et confirmer les mesures disciplinaires ou accueillir l’appel et annuler les mesures disciplinaires ou imposer les mesures disciplinaires qui, selon moi, auraient dû être imposées par le Comité.

ANALYSE

[83]  Conformément à mon mandat et aux questions soulevées par l’appelante, mon analyse sera axée sur la détermination du caractère manifestement déraisonnable de la décision. Pour faciliter la consultation du présent document, je résumerai et aborderai les arguments de l’appelante un à la fois.

1. Le Comité a commis une erreur en minimisant l’incidence de l’arrêt McNeil à titre de facteur aggravant.

[84]  L’appelante soutient que le Comité a omis de prendre en considération adéquatement la mesure dans laquelle l’intimé peut conserver son emploi en qualité de policier en raison de l’arrêt McNeil (appel, page 155). L’appelante affirme que l’intimé ne satisfait plus aux exigences fondamentales d’un agent de la paix.

[85]  L’appelante soulève que le Comité n’a entendu aucune preuve concernant les éléments qui suivent : la GRC peut encore permettre à l’intimé d’occuper un poste de confiance; le bureau de la Couronne de l’Alberta peut traiter des affaires criminelles soumises par l’intimé; le barreau des avocats de la défense de l’Alberta acceptera le témoignage de l’intimé. Elle affirme que c’est le RM qui aurait dû présenter ces preuves. En l’absence de tels éléments de preuve, l’appelante est d’avis que le Comité a commis une erreur en tirant une conclusion sans preuve à l’appui.

[86]  L’intimé, quant à lui, affirme que même si la Couronne a le devoir de divulguer tout renseignement concernant tout cas d’inconduite, l’incidence est conjecturale et n’a pas été mise à l’épreuve. Il suggère que dans la plupart des cas, il y aurait peu de conséquences, ou il n’y en aurait aucune (appel, page 262).

[87]  L’intimé affirme que l’incidence de sa crédibilité serait limitée lorsqu’il y aurait d’autres preuves à l’appui de l’affaire en instance.

[88]  L’intimé est d’avis que c’est l’appelante qui était responsable de fournir des éléments de preuve pour appuyer sa propre affirmation. Il souligne qu’aucune preuve n’a été présentée au Comité à cet égard. L’intimé soutient que les répercussions relatives à la divulgation découlant de l’arrêt McNeil s’appliquent aux membres de la GRC qui font encore partie de la Gendarmerie.

[89]  L’intimé mentionne que le Comité a évalué la jurisprudence adéquatement lorsqu’il a déterminé le caractère proportionnel et la parité des mesures disciplinaires. Il a conclu que le Comité n’a commis aucune erreur lorsqu’il a affirmé qu’il reste à voir si la capacité de la Gendarmerie à déployer l’intimé sera compromise en raison des répercussions de l’arrêt McNeil (appel, page 263).

[90]  Le Comité reconnaît que le cadre des mesures disciplinaires pour les questions d’honnêteté et d’intégrité inclut le congédiement. Toutefois, le Comité n’est pas d’accord sur le fait que chaque affaire doit adopter le congédiement comme point de départ. Le Comité s’est appuyé sur des décisions de comités antérieures présentées par les parties et a reconnu les obligations continues en matière de divulgation découlant de l’arrêt McNeil.

[91]  Même si les exigences en matière de divulgation découlant de l’arrêt McNeil pourraient entraîner des discussions concernant l’honnêteté et l’intégrité de l’intimé pendant sa participation à un procès criminel, je suis d’accord avec le CEE que le résultat de ces discussions pourrait être différent dans chaque instance. Par conséquent, l’incidence de l’arrêt McNeil n’est pas entièrement connue. De plus, il incombait à l’appelante de présenter des preuves pour appuyer son affirmation selon laquelle l’intimé n’est plus employable. En l’absence de telles preuves, je suis également d’accord avec le CEE sur le fait que le Comité avait le droit de tirer ses propres conclusions concernant le maintien en poste de l’intimé au sein de la Gendarmerie. Par conséquent, je conclus que ce motif d’appel n’a pas établi que le Comité a commis une erreur manifeste et déterminante.

2. Le Comité a commis une erreur en déterminant que le risque de récidive de l’intimé est minimal.

[92]  L’appelante soutient que le Comité a tiré une conclusion sans preuve à l’appui et est d’avis qu’une telle opinion conjecturale constitue une erreur.

[93]  L’appelante affirme que la preuve montre que l’intimé a non seulement menti pendant plusieurs jours, mais a également incité le chef des pompiers à mentir pour lui, puis a menti au Comité sous serment. Puisque la preuve montre nettement un comportement répétitif, l’appelante répète que le Comité a commis une erreur lorsqu’il a analysé la probabilité de récidive de l’intimé.

[94]  L’intimé est d’avis que le Comité a présenté les trois tentatives délibérées d’induire en erreur avec exactitude; il a même considéré la tendance comme un facteur aggravant. Toutefois, il soutient que le Comité a adéquatement accepté les preuves atténuantes fournies pour évaluer le risque décelé, y compris deux évaluations de rendement positives récentes, des contributions positives au sein du détachement et de la collectivité, de nombreuses lettres de recommandation et les sincères excuses qu’il a présentées au Comité.

[95]  L’intimé soutient que l’absence de preuves concernant des mesures disciplinaires antérieures et les renseignements présentés au Comité démontrent qu’aucune erreur n’a été commise lorsque le Comité a déterminé que le risque de récidive de l’intimé était minimal.

[96]  Je suis d’accord avec le CEE que la présentation de preuves d’expert aurait aidé à déterminer le potentiel de réhabilitation de l’intimé et je souligne que ni l’une ni l’autre des parties n’a présenté de telles preuves. Par conséquent, le Comité a dû tirer une conclusion en s’appuyant sur les renseignements dont il disposait. Le Comité était d’avis que le manque de bon sens et de bon jugement de l’intimé ne contrebalançait pas ses années de service satisfaisant. Par conséquent, le Comité a conclu que l’intimé était prêt à continuer d’offrir des services bons et fiables.

[97]  Je suis d’accord avec le CEE que la conclusion du Comité selon laquelle le potentiel de réhabilitation de l’intimé ne contredit pas l’observation que l’intimé a tenté d’induire en erreur à trois reprises. Le Comité reconnaît que l’intimé était malhonnête lorsqu’il a menti dans son rapport du SIRP et dans le courriel envoyé à son superviseur et lorsqu’il a demandé au chef des pompiers de mentir pour lui. Même si le Comité a souligné que les tromperies découlent toutes de la tentative de cacher le fait qu’il a donné la bière saisie, le Comité a également évalué les soumissions considérables décrivant le caractère positif de l’intimé, ce qui appuie la détermination selon laquelle l’incident constitue un manque de jugement, et non un défaut de caractère permanent. Comme on n’a présenté aucune preuve du contraire, je suis d’accord avec le CEE que le Comité n’a commis aucune erreur manifeste et déterminante à cet égard.

3. Le Comité a commis une erreur en omettant de reconnaître la gravité de l’incidence de la conduite de l’intimé sur l’administration de la justice pénale.

[98]  L’appelante soutient que la conduite de l’intimé a irrémédiablement entaché la relation avec la Couronne, ce qui n’a pas été reconnu par le Comité.

[99]  L’appelante affirme qu’en déterminant que le comportement de l’intimé constitue une violation des compétences fondamentales d’honnêteté et d’intégrité, le Comité a commis une erreur en n’adoptant pas le congédiement comme point de départ.

[100]  Selon l’appelante, le Comité a implicitement affirmé que l’honnêteté et l’intégrité existent sur une échelle ayant divers niveaux de gravité. Elle soutient que le fait d’accepter que certains mensonges soient permis érode la confiance du public à l’égard de la GRC. Selon elle, l’intimé a rompu son contrat avec la GRC et a altéré à jamais sa capacité d’exercer ses fonctions en lien avec l’administration de la justice pénale.

[101]  L’intimé soutient que le RAD n’a pas tenté d’obtenir le témoignage d’un procureur ou de présenter des preuves à l’appui de l’idée que sa relation avec la Couronne avait été touchée, voire minée à jamais.

[102]  L’intimé affirme que le Comité n’a pas accepté le mensonge, comme le laisse entendre l’appelante. Le Comité a plutôt décrit un processus visant à déterminer les conséquences de l’inconduite.

[103]  L’intimé soutient que l’opinion selon laquelle tout membre qui a menti devrait être congédié n’est pas conforme à l’intention de la GRC, comme le montre le Guide des mesures disciplinaires, qui fournit une fourchette de mesures disciplinaires pour avoir menti à un supérieur.

[104]  Je suis d’accord avec le CEE que le Comité a évalué l’incidence de l’inconduite de l’intimé. Ce fait est évident dans la prise en considération par le Comité des conséquences de l’arrêt McNeil ainsi que l’examen approfondi des affaires impliquant des membres dont l’honnêteté et l’intégrité faisaient défaut. Je suis également d’accord qu’on n’a présenté aucune preuve montrant l’incidence de l’inconduite de l’intimé sur l’administration de la justice pénale, et le Comité n’a ignoré aucune preuve à cet effet.

[105]  Puisque le Comité a tenu compte des éléments de preuve présentés et en l’absence d’une erreur manifeste et déterminante, je ne trouve aucune raison de modifier la décision.

4. Le Comité a commis une erreur en déterminant que l’intimé n’était pas motivé par l’obtention d’un avantage personnel.

[106]  L’appelante soutient que le Comité a affirmé que le congédiement survient uniquement dans les cas où un avantage personnel est recherché ou obtenu. Toutefois, cette position n’a pas été mise à l’épreuve sur le plan judiciaire, et il est donc prématuré pour le comité de s’appuyer sur cette affirmation en qualité de principe juridique établi. De plus, l’appelante soutient que le Comité sait que l’affaire sur laquelle il s’est appuyé, à savoir 2016 DARD 2, faisait l’objet d’un appel.

[107]  L’appelante soutient que le Comité n’a pas fait la distinction entre les actions de l’intimé et les actions de membres qui ont été congédiés pour de fausses déclarations de la même gravité. L’appelante est d’avis que les conclusions du Comité contredisent son articulation des faits.

[108]  L’appelante soutient que le Comité a commis une erreur en expliquant que les actions de l’intimé étaient altruistes et elle affirme que le fait de donner des pièces à conviction saisies par la GRC ne peut absolument pas être considéré comme un intérêt désintéressé dans le bien-être d’autrui (appel, page 122).

[109]  L’appelante soulève que l’inconduite de l’intimé était motivée par la recherche d’un avantage personnel. Elle souligne que le témoignage de l’intimé montre que son intention consistait à obtenir un avantage personnel du service d’incendie local. L’appelante affirme que l’intimé a créé un avantage pour lui-même auquel il pourrait avoir recours à l’avenir.

[110]  L’appelante s’est appuyée sur les arrêts R c. Perreault, 1992 Carwell Que 2136, et R c. Boulanger, 2006 CSC 32 (Boulanger), soutenant que les actions de l’intimé constituent un abus de confiance et que le Comité a commis une erreur lorsqu’il a réduit l’importance de ses propres conclusions. De plus, l’appelante affirme que la conclusion qu’il y a eu abus de confiance ne nécessite pas l’obtention d’un avantage personnel, car un tel avantage n’est pas nécessaire pour qu’un abus de confiance constitue une infraction criminelle. Par conséquent, il serait incorrect de considérer la recherche d’un avantage personnel comme nécessaire dans une procédure disciplinaire interne.

[111]  L’intimé soutient qu’aucune preuve n’a été présentée démontrant qu’il a reçu un avantage personnel en donnant la bière. De plus, l’intimé affirme que le RAD a eu l’occasion de le contre-interroger lorsqu’il a témoigné ne pas avoir obtenu d’avantage personnel en donnant la bière, mais le RAD ne l’a pas fait.

[112]  L’intimé soulève qu’on ne l’a pas accusé d’abus de confiance et que le Comité n’a pas cherché à déterminer si une telle infraction avait été établie. Il soutient que cette expression est seulement utilisée par l’appelante et n’est donc pas pertinente dans cette affaire.

[113]  L’intimé souligne également que l’appelante a cité les arrêts Boulanger et Perreault, et qu’au paragraphe 45 de l’arrêt Boulanger, l’argument présenté dans l’arrêt Perreault est écarté :

L’exigence d’un avantage énoncée dans Perreault n’a pas été uniformément acceptée : voir l’arrêt R. c. Fisher (2001), 139 O.A.C. 96, dans lequel la Cour d’appel a refusé de se prononcer sur la question. Lorsqu’elle a été appliquée, elle a suscité des difficultés. On ne sait toujours pas avec certitude non plus s’il faut que le fonctionnaire ait touché un avantage réel ou s’il suffit qu’il ait cherché à l’obtenir et, dans sa dissidence en l’espèce, le juge Dalphond se demande si n’importe quel avantage, si minime soit-il, suffit pour qu’il y ait abus de confiance par un fonctionnaire au sens de l’article 122.

[114]  Le Comité a déterminé (appel, page 59) que lorsqu’on détermine qu’un membre a fait preuve de malhonnêteté ou d’un manque d’intégrité, le congédiement a habituellement seulement lieu lorsqu’un avantage personnel a été recherché ou obtenu et en l’absence de facteur atténuant d’importance. Je suis d’accord avec le CEE que l’appelante n’a pas expliqué la conclusion du Comité avec exactitude, puisqu’elle n’a pas reconnu que l’avantage personnel n’est pas considéré de façon distincte; il inclut plusieurs facteurs atténuants. Selon moi, le Comité a évalué les affaires présentées et les a comparées aux faits dans cette affaire afin de tirer une conclusion fondée sur ces renseignements.

[115]  De plus, je suis d’accord avec l’intimé qu’il n’a pas été accusé d’abus de confiance et que le Comité n’a pas tiré cette conclusion. Par conséquent, je conclus que les arguments de l’appelante concernant un abus de confiance ne sont pas pertinents.

[116]  Enfin, je suis d’accord avec le CEE que le RAD avait l’occasion de contre-interroger l’intimé lorsqu’il a témoigné ne pas avoir obtenu d’avantage personnel en donnant la bière et que sa seule intention consistait à renforcer la relation entre le détachement et le service d’incendie. Sans preuve du contraire, le Comité pouvait seulement prendre en considération les renseignements dont il disposait. Selon moi, la spéculation de l’appelante est sans fondement.

[117]  Même si le Comité n’a pas inclus l’absence d’avantage personnel de l’intimé à titre de facteur atténuant, je suis d’accord avec le CEE qu’il s’agit d’un acteur sous-jacent pris en considération par le Comité lorsqu’il a déterminé les mesures disciplinaires à imposer. Selon moi, une telle analyse démontre que le Comité a évalué tous les renseignements fournis et a tiré une conclusion qui correspond exactement aux renseignements présentés. Par conséquent, je conclus que l’appelante n’est pas parvenue à démontrer que le Comité a commis une erreur lorsqu’il a conclu que l’intimé n’était pas motivé par la recherche d’un avantage personnel.

5. Le Comité a commis une erreur en minimisant l’incidence de l’inconduite de l’intimé en raison de la nature des pièces à conviction.

[118]  L’appelante soutient que ni le RAD ni le RM n’ont classifié la manipulation des pièces à conviction (alcool) comme secondaire aux autres articles saisis. L’appelante est d’avis que le Comité a commis une erreur lorsqu’il a déterminé que la bière saisie n’était pas de seconde importance, puis a contredit cette affirmation en concluant que la manipulation de la bière par l’intimé méritait une mesure disciplinaire moindre.

[119]  L’intimé affirme que le Comité a résumé la façon dont le détachement manipule les pièces à conviction qui sont de l’alcool et souligne que même le commandant de détachement p. i. a témoigné que peu d’importance était accordée à ces pièces à conviction. Il soulève que le Comité a conclu qu’il serait injuste de punir indûment l’intimé lorsque l’ensemble du détachement manipule l’alcool constituant une pièce à conviction de façon inappropriée.

[120]  L’intimé soutient que le Comité n’a commis aucune erreur dans ses conclusions, puisque le Comité a pris en considération la parité et l’équité d’une mesure disciplinaire appropriée en fonction de la preuve fournie en ce qui concerne la façon acceptable de manipuler l’alcool saisi dans le détachement de l’intimé.

[121]  La preuve présentée au Comité a confirmé que l’alcool constituant une pièce à conviction n’était pas traité de la même façon que les autres pièces à conviction. Le commandant de détachement p. i. acceptait cette pratique et a déclaré que les accusations seraient retirées si l’alcool éliminé était requis en cour. Même si le Comité est d’avis que cette pratique est troublante et constitue un facteur atténuant dans son évaluation, il n’est pas d’avis que la pratique de donner tout type de pièce à conviction comme acceptable. Je suis d’accord avec le CEE que l’appelante n’a fourni aucun argument justifiant pourquoi ce facteur atténuant ne serait pas pertinent.

[122]  Comme l’appelante n’a pas établi qu’il y avait eu une erreur dans l’évaluation du Comité à l’égard de ce facteur atténuant, je n’ai aucune raison de modifier la décision.

6. Les motifs du Comité sont insuffisants, puisque le Comité n’aborde pas la question de la glacière saisie.

[123]  L’appelante soutient que le Comité n’a pas abordé la manipulation de la glacière par l’intimé et que le Comité aurait dû prendre cela en considération en qualité de facteur atténuant ou aggravant. L’appelante affirme que l’omission du Comité est déraisonnable et constitue un manquement à l’équité procédurale.

[124]  L’intimé soulève que l’appelante a omis de démontrer un manquement à l’équité procédurale.

[125]  Le fondement de l’allégation 1 concerne expressément la manipulation de la glacière. Les détails de la contravention incluent la saisie de la glacière, puis le traitement inapproprié de celle-ci. Je suis d’accord avec le CEE qu’il serait inapproprié de considérer la manipulation de la glacière en tant que facteurs atténuant ou aggravant, puisque ces faits constituent une partie intégrante de l’allégation établie. Ce point est expliqué au paragraphe 83 de la recommandation C-007 du CEE :

[TRADUCTION]

Même si la malhonnêteté est un facteur aggravant pertinent à prendre en considération dans l’imposition des mesures disciplinaires, il ne s’agit pas d’un facteur approprié dans cette affaire, puisque la considération des facteurs aggravants constitue la prise en considération des facteurs qui « vont au-delà des éléments essentiels » de l’inconduite (annexe 1-20 de la politique sur la déontologie de la GRC, page 77; R c. Flight, 2014 ABCA 380, paragraphe 4). Un manque d’honnêteté ne constitue pas un facteur aggravant approprié dans cette affaire, car les allégations sont elles-mêmes fondées sur la malhonnêteté.

[126]  Pour ce qui est de la détermination que le Comité n’a commis aucune erreur lorsqu’il a décidé de ne pas considérer la glacière comme un facteur établissant les mesures disciplinaires appropriées à imposer, l’argument de l’appelante selon lequel les motifs du Comité sont insuffisants est sans fondement.

7. Le Comité a commis une erreur en accordant une trop grande importance à la relation entre [le commandant de détachement p. i.] et l’intimé.

[127]  L’appelante soutient que le Comité a commis une erreur en spéculant que l’inconduite de l’intimé ne se serait pas nécessairement aggravée sans la relation aigre entre le commandant p. i. et l’intimé. L’appelante affirme que lorsque l’intimé a téléphoné au commandant p. i., il avait déjà donné la bière et a créé un faux rapport alléguant que toute conversation avec le commandant p. i. n’aurait pas changé ces faits. L’appelante est d’avis que la spéculation du Comité n’est pas fondée sur des faits et que le simple le fait de l’avoir suggéré était inapproprié.

[128]  L’intimé affirme que le Comité a conclu adéquatement que l’inconduite ne se serait pas nécessairement aggravée si elle avait été traitée plus rapidement. Il soutient que le Comité n’a jamais conclu que l’intimé n’était pas responsable de sa conduite; il a seulement affirmé que la relation entre le commandant p. i. et l’intimé constituait un facteur atténuant qui menaçait l’emploi de l’intimé.

[129]  Les circonstances atténuantes s’entendent d’un fait ou d’une situation qui n’a aucune incidence sur la culpabilité d’un défendeur, mais dont la cour tient compte au moment d’imposer une sanction, en particulier lorsqu’il s’agit de réduire la gravité d’une peine (Black’s Law Dictionary, 8e édition).

[130]  Le Comité a-t-il commis une erreur lorsqu’il a considéré un facteur atténuant? Le Comité a déclaré ce qui suit (appel, page 64) :

[TRADUCTION]

[154] (…) [Le commandant de détachement p. i.] a témoigné avoir une relation aigre de longue date avec [l’intimé].

[155] (…) [L’intimé] n’était évidemment pas le seul membre au détachement dont la manipulation des pièces à conviction laissait à désirer, mais il a probablement fait l’objet d’une attention spéciale en raison de cette relation aigre.

[156] (…) L’antipathie du [commandant de détachement p. i.] à l’égard de [l’intimé] était palpable, et je ne suis pas surpris qu’il ait immédiatement signalé la situation impliquant la glacière de bière au sous-officier consultatif de district au lieu de s’en occuper lui-même au niveau du détachement.

[157] En soirée le 25 juillet 2014, [l’intimé] a téléphoné au [commandant de détachement p. i.], mais ce dernier n’a pas répondu parce qu’il a vu que les appels provenaient du téléphone personnel de [l’intimé]. [Le commandant de détachement p. i.] savait que [l’intimé] était de service lorsque les appels ont été faits. Si leur relation n’avait pas été si aigre, une discussion aurait eu lieu plus tôt et la situation ne se serait pas aggravée jusqu’à ce que [l’intimé] risque de perdre son emploi.

[131]  Les témoignages du commandant p. i. et de l’intimé n’ont laissé aucun doute sur le fait que leur relation était tendue. De plus, comme le Comité a pu entendre leur témoignage, il n’y a aucune raison de remettre en question son observation selon laquelle l’antipathie du commandant p. i. à l’égard de l’intimé était palpable. Même si le Comité n’a pas pris en considération la relation aigre lorsqu’il a établi les allégations, il l’a soulignée dans les facteurs atténuants. Ce faisant, conformément au Guide des mesures disciplinaires (page 9), il aide à expliquer l’inconduite ou à réduire la gravité des actions de l’intimé.

[132]  Je suis d’accord avec le CEE que les inférences effectuées par le Comité posent problème. D’abord, même s’il semble que la manipulation de l’alcool constituant une pièce à conviction était douteuse en général, l’incident qui a entraîné les allégations porte expressément sur le fait d’avoir donné des pièces à conviction. Aucune preuve n’a été présentée que d’autres employés du détachement ont donné des pièces à conviction. Selon moi, en l’absence de telles preuves devant le Comité, la conclusion que l’intimé a été traité différemment en raison de la relation aigre n’a aucune valeur probante.

[133]  Ensuite, le commentaire du Comité portant sur les appels téléphoniques pose également problème. Les parties n’ont présenté aucune preuve montrant ce qui se serait passé si le commandant de détachement p. i. avait répondu aux appels de l’intimé le 25 juillet 2014. Ce qu’on sait avec certitude, c’est que l’intimé avait déjà donné la bière et la glacière. Même si l’intimé avait téléphoné au commandant p. i. pour répondre aux questions posées dans le courriel envoyé à l’ensemble du détachement, il n’y a aucune preuve montrant que l’intimé aurait fourni des renseignements autres que ceux qu’il a inclus dans le courriel qu’il a envoyé au commandant p. i. la même soirée. Bien que je ne sois pas d’accord avec le fait que le commandant p. i. ait ignoré les appels de l’intimé, la suggestion que le fait d’avoir répondu à ces appels aurait modifié la conduite de l’intimé relève tout au plus de la conjecture.

[134]  En outre, dans le paragraphe 157 de sa décision, le Comité semble dire que si le commandant p. i. avait eu une meilleure relation avec l’intimé, il aurait réglé le problème au niveau du détachement au lieu de discuter avec le sous-officier consultatif de district. Encore une fois, ce commentaire n’est pas fondé sur la preuve. Je suis d’accord avec le CEE que lorsque le commandant p. i. a appris qu’une pièce à conviction avait été donnée au service d’incendie, il avait le devoir d’enquêter sur une possible contravention au Code de déontologie. Aucune preuve ne montre que le commandant p. i. a traité cette éventuelle contravention d’une façon différente de celle qu’il a employée pour traiter toute éventuelle contravention au Code de déontologie antérieure. De plus, qu’il consulte le sous-officier consultatif de district ou non, le commandant de détachement p. i. était tenu, en vertu de l’alinéa 37e) du Code de déontologie, de « s’assurer que toute conduite irrégulière ou illicite d’un membre quelconque n’est dissimulée ni tolérée ».

[135]  La question qui reste est la suivante : la prise en considération erronée d’un facteur atténuant par le Comité a-t-elle eu une incidence sur sa décision lorsqu’il a déterminé les mesures disciplinaires à imposer? Dans ma détermination de l’importance accordée à ce facteur atténuant par le Comité, je tiens à souligner que le Comité a pris en considération plusieurs autres facteurs atténuants, a examiné les décisions antérieures de comités d’arbitrage et a évalué le cadre des mesures disciplinaires fourni dans le Guide des mesures disciplinaires. Comme on l’explique au paragraphe 44 de l’arrêt Lacasse : « (…) l’omission de tenir compte d’un facteur pertinent ou encore la considération erronée d’un facteur aggravant ou atténuant ne justifiera l’intervention d’une cour d’appel que lorsqu’il appert du jugement de première instance qu’une telle erreur a eu une incidence sur la détermination de la peine ».

[136]  Le Comité a fait une spéculation concernant l’incidence possible de la relation aigre, mais il ne s’agissait pas d’un facteur déterminant dans la conclusion du Comité que l’intimé ne devrait pas être congédié. Selon moi, le Comité a accordé une grande importance sur sa conclusion que l’intimé n’a tiré aucun avantage de l’inconduite, ce qui rend cette différente de toutes les autres où le congédiement était mérité. Par conséquent, je suis d’accord avec le CEE que même si le Comité a pris en considération un facteur atténuant non pertinent, il ne s’agit pas d’une erreur déterminante. Par conséquent, je ne vois aucune raison de modifier la décision du Comité.

8. Le Comité a commis une erreur dans son évaluation des preuves.

[137]  L’appelante n’a présenté aucun argument. Elle a plutôt présenté un énoncé général affirmant que le Comité a commis une erreur lorsqu’il a évalué la preuve et que cette erreur a entraîné l’imposition de mesures disciplinaires qui sont manifestement déraisonnables.

[138]  L’intimé est d’avis que le Comité a imposé des mesures disciplinaires qui sont permises en vertu du règlement connexe.

[139]  Puisque l’appelante n’a fourni aucun fondement à l’appui du motif d’appel, je suis d’accord avec le CEE que l’évaluation de la preuve effectuée par le Comité est abordée dans les autres sections de la présente analyse. Par conséquent, je n’aborderai pas cette objection davantage pour le moment.

9. Le Comité a commis une erreur en concluant que l’inconduite ne constituait pas la répudiation du contrat d’emploi.

[140]  L’appelante soutient que le manque de crédibilité de l’intimé le rend incapable de témoigner en cour et de consigner des renseignements dans ces dossiers, et que ces tâches sont nécessaires pour que l’intimé puisse conserver son emploi comme agent de la paix. L’appelante soutient que l’inconduite de l’intimé fait en sorte qu’il est incapable de satisfaire aux exigences fondamentales du poste d’agent de la paix et présente un risque trop élevé pour que la GRC puisse la garder comme employé.

[141]  L’intimé soulève qu’aucune preuve n’a été présentée appuyant l’affirmation « audacieuse » de l’appelante. En fait, contrairement à l’affirmation de l’appelante, l’intimé souligne que les affaires prises en considération pendant l’audience démontrent que d’autres membres ont conservé leur emploi malgré être visés par les conséquences de l’arrêt McNeil.

[142]  L’intimé affirme qu’une incidence de consignation incorrecte d’un incident ne le rend pas incapable de consigner des renseignements correctement dans tous les dossiers futurs.

[143]  Même si je suis d’accord avec l’appelante qu’un membre qui est incapable de satisfaire aux exigences fondamentales requises pour être un agent de la paix devrait probablement être congédié, la preuve dans cette affaire n’appuie pas le fait que l’intimé soit incapable de satisfaire à ces exigences. Comme on l’a mentionné auparavant, le dossier ne fournit aucune preuve montrant que l’intimé est incapable de témoigner ou de saisir des renseignements de façon appropriée dans ses dossiers. Il y a des membres assujettis aux conséquences de l’arrêt McNeil dans l’ensemble de l’organisation, et l’appelante n’a fourni aucune preuve pour démontrer que le témoignage de l’intimé ne serait pas accepté. Chaque cas est un cas d’espèce, et le témoignage de l’intimé pourrait avoir une incidence ou non sur le résultat de toute instance future. En l’absence de preuve provenant d’un organisme responsable de poursuites précisant que le témoignage futur de l’intimé serait dénoncé, je conclus que l’affirmation de l’appelante est sans fondement.

10. Le Comité a commis une erreur en ne suivant pas le Guide des mesures disciplinaires.

11. Le Comité a commis une erreur en n’imposant pas les mesures disciplinaires proposées par le RM.

12. Le Comité a commis une erreur en ne concluant pas que le congédiement constituait la mesure disciplinaire appropriée dans cette affaire.

[144]  Les trois dernières objections seront prises en considération ensemble, puisqu’elles portent toutes sur les mesures disciplinaires, et tout particulièrement sur l’imposition de la confiscation de 35 jours de solde au lieu du congédiement.

[145]  L’appelante soutient que le Comité n’a pas considéré comme un facteur aggravant la tentative par l’intimé d’éviter toute responsabilité. Elle affirme que l’intimé a demandé au chef des pompiers de mentir pour l’aider à dissimuler son inconduite. L’appelante est d’avis que le Guide des mesures disciplinaires considère un tel comportement comme un facteur aggravant, mais que le Comité a choisi de ne pas prendre en considération.

[146]  L’appelante soulève que le Comité était obligé d’expliquer pourquoi il n’avait pas adopté la présentation du RM visant l’imposition d’une confiscation de 45 à 60 jours de solde. Elle affirme également que la mesure disciplinaire imposée, à savoir la confiscation de 35 jours de solde, est erronée, car elle ne respecte pas le Guide des mesures disciplinaires.

[147]  L’appelante conclut que le Comité a omis d’évaluer correctement la preuve, les facteurs aggravants et atténuants ainsi que le Guide des mesures disciplinaires, ce qui rend manifestement déraisonnable la décision d’imposer comme mesure disciplinaire la confiscation de 35 jours de solde.

[148]  L’intimé affirme que les mesures disciplinaires imposées par le Comité correspondaient à la fourchette décrite dans le Guide des mesures disciplinaires. Il s’est appuyé sur le passage suivant, qui figure à la page 7 du Guide :

Un maximum « ferme » équivalent à la confiscation de la solde pour une période de 31 à 45 jours pour les infractions graves où le congédiement est une possibilité. Ce maximum ferme est à envisager lorsque l’autorité disciplinaire hésite entre le maintien en poste et le congédiement d’un membre, mais décide de maintenir le membre en poste, à la lumière de toutes les circonstances aggravantes et atténuantes. Un membre qui se voit imposer une sanction de 45 jours devrait être soulagé d’avoir pu conserver son emploi à la fin de la rencontre disciplinaire.

[149]  L’intimé soutient qu’il a présenté plusieurs décisions rendues dans le cadre de l’ancien régime où une conduite semblable a été établi et a souligné que ces décisions ont entraîné une confiscation de la solde correspondant au milieu de la fourchette de sanctions, à l’exception d’une affaire où la sanction la plus sévère à l’exception du congédiement. Par conséquent, il a proposé des sanctions pouvant être appropriées au titre du nouveau régime non éprouvé tout en sachant que le Comité était libre de prendre une décision à cet égard.

[150]  L’intimé affirme que le Comité a pris en considération tous les facteurs et a justifié sa décision adéquatement. L’intimé conclut que le Comité a fourni une analyse approfondie et qu’il a présenté des motifs détaillés expliquant pourquoi le congédiement n’était pas approprié et justifiant les mesures disciplinaires imposées. L’intimé soutient que la décision est suffisamment justifiée, transparente et intelligible.

[151]  Dans la 6e édition du Black’s Law Dictionary, on définit le terme « circonstances aggravantes » comme suit : [TRADUCTION] « Circonstances de la perpétration d’un crime ou d’un délit qui augmentent la culpabilité ou la gravité ou qui ajoutent aux conséquences préjudiciables, mais qui vont au-delà des éléments essentiels du crime ou du délit en soi ». Les détails de l’allégation 5 comprennent la demande au chef des pompiers de fournir de faux renseignements concernant l’élimination de l’alcool. Par conséquent, je conclus que le fait d’avoir demandé au chef des pompiers de mentir constitue un facteur sous-jacent nécessaire pour établir que l’intimé a tenté d’éviter la responsabilité; ces détails sont nécessaires pour confirmer la conduite déshonorante alléguée décrite à l’allégation 5. En qualité d’éléments essentiels de l’allégation, ces circonstances ne peuvent pas être considérées comme un facteur aggravant.

[152]  Après avoir déterminé que les cinq allégations contre l’intimé étaient établies, le Comité a déclaré que son obligation consistait à imposer des mesures disciplinaires appropriées et proportionnelles, conformément au paragraphe 24(2) des CC (déontologie) (appel, page 58). Le Comité a examiné les affaires citées et a reconnu que le cadre des mesures disciplinaires concernant la malhonnêteté vont de la réprimande de te l’imposition d’une confiscation de la solde importante à une ordonnance de démission. Le Comité a souligné que les cas de malhonnêteté dans les affaires fournies incluaient un avantage personnel. Il a donc conclu que cette affaire était différente des autres pour cette raison (appel, page 60).

[153]  Le Comité a ensuite pris en considération le principe de la parité des sanctions et a conclu que le congédiement, dans cette affaire, serait disproportionnellement sévère en raison de l’absence de l’obtention d’un avantage personnel. Le Comité a pris en considération des affaires portant sur le potentiel de réhabilitation, la viabilité de la relation de travail, l’aptitude à demeurer un employé et le congédiement comme dernier ressort. En tenant des comptes des faits propres à cette affaire, le Comité a déterminé que les actions de l’intimé constituaient une erreur de jugement grave, et non un défaut de caractère irrécupérable (appel, page 62). Le Comité n’a trouvé aucune raison de soupçonner que l’intimé commettrait une autre inconduite semblable et a déterminé que l’organisation n’en était pas à son dernier ressort pour ce qui est de la réhabilitation de l’intimé.

[154]  Ensuite, le Comité a pris en considération les facteurs aggravants et atténuants et s’est appuyé sur le Guide des mesures disciplinaires pour imposer la confiscation de 35 jours de solde. Je suis d’accord avec le CEE que l’imposition par le Comité des mesures disciplinaires susmentionnées était raisonnable en fonction des circonstances. Je souligne qu’il faut faire preuve d’un degré élevé de retenue à l’égard du Comité, puisqu’il s’agit du tribunal de première instance et, par conséquent, le mieux placé pour faire preuve de la subjectivité considérable qui est associée au processus. Je suis également d’accord avec le CEE que la décision du Comité reflète une compréhension totale de la preuve présentée, de la gravité de l’inconduite, des circonstances entourant l’inconduite ainsi que des exigences législatives et des considérations stratégiques applicables aux comités de déontologie lorsqu’ils imposent des mesures disciplinaires (rapport, paragraphe 180).

[155]  Le Comité n’est pas tenu de suivre les recommandations de l’une ou l’autre des parties, conformément à la page 3 du Guide des mesures disciplinaires :

L’autorité disciplinaire peut imposer une mesure à l’extérieur des cadres suggérés, qu’elle soit plus sévère ou moins sévère, mais elle doit expliquer les circonstances de l’inconduite qui justifient un tel écart du cadre habituel.

[156]  De plus, dans cette affaire, le cadre suggéré était la confiscation de 31 à 45 jours de solde. La confiscation cumulative de 35 jours imposée figure évidemment dans la fourchette suggérée. Comme le Guide des mesures disciplinaires constitue un instrument flexible et que le Comité a fourni des raisons détaillées pour justifier que les mesures disciplinaires étaient appropriées en fonction des circonstances, je suis d’accord avec le CEE que l’appelante n’est pas parvenue à démontrer qu’une erreur manifeste et déterminante a été commise dans la décision du Comité.

[157]  Le CEE a souligné qu’une des principales questions concernant l’imposition du congédiement comme mesure disciplinaire est la détermination que la conduite du membre démontre qu’il est non réhabilitable et qu’il n’est plus apte à exercer ses fonctions. Je suis d’accord avec le CEE que le dossier montre que l’intimé a un rendement satisfaisant, jouit d’une bonne réputation, n’a jamais fait l’objet de mesures disciplinaires auparavant et reçoit encore l’appui d’une collectivité au sein de laquelle il est grandement engagé. Le Comité a reconnu les défis auxquels l’intimé est confronté parce qu’il a menti, mais il a pris en considération l’ensemble des renseignements et a déterminé que l’intimé a un potentiel de réhabilitation. En l’absence de toute erreur déterminante dans la décision du Comité, je conclus qu’il n’y a aucune raison de modifier cette dernière.

DÉCISION

[158]  Compte tenu des motifs qui précèdent, je conclus que l’appelante n’a pas déterminé que le Comité a commis une erreur déterminante. Par conséquent, conformément au paragraphe 45.16(3) de la Loi sur la GRC, je rejette l’appel et confirme les mesures disciplinaires imposées par le Comité de déontologie.

 

 

28 novembre 2019

Jennie Latham

Arbitre

 

Date

 

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