Déontologie

Informations sur la décision

Résumé :

L’Avis d’audience disciplinaire original, daté du 28 juin 2021, contenait deux allégations de contravention à l’article 7.1 du Code de déontologie de la GRC et une allégation d’infraction à l’article 4.6 du Code de déontologie de la GRC. Le gendarme Picketts aurait conduit son véhicule de la GRC en état d’ébriété, causant des dommages au véhicule. On l’a trouvé endormi, derrière le volant, au service au volant d’un restaurant-minute. Son chien policier, la trousse d’entraînement en détection de drogues pour chien policier, son poste de travail mobile, sa carabine et ses munitions étaient également dans le véhicule. Il a refusé de fournir un échantillon d’haleine et a résisté à l’arrestation avant d’être placé en détention.

Avant l’audience disciplinaire, les deux parties ont soumis un Exposé conjoint des faits et une Proposition conjointe sur les mesures disciplinaires. Le Comité de déontologie a accepté ces deux documents. Les trois allégations ont été jugées fondées.

Les mesures disciplinaires suivantes ont été imposées : (1) une sanction pécuniaire de 30 jours, à retenir de la solde du gendarme Picketts; (2) le retrait de 15 jours de congé annuel; (3) une inadmissibilité à toute promotion d’une durée de trois ans à compter de la date de la présente décision; (4) une mutation hors des Services cynophiles; (5) une instruction de suivre un traitement médical tel que spécifié par l’agent des services de santé de la Division E; (6) une instruction de respecter les conditions énoncées dans l’entente de plan de suivi signée le 29 avril 2020; et (7) une instruction de présenter des excuses, en personne, aux agents ayant procédé à l’arrestation.

Contenu de la décision

Protégé A

2022 DAD 05

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GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

Affaire intéressant

une audience disciplinaire tenue en vertu de la

Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, L.R.C. (1985), ch. R-10

Entre :

le surintendant principal Michel Legault

Autorité disciplinaire de niveau III désignée, Division E

(Autorité disciplinaire)

et

le gendarme Blaise Picketts

Numéro de matricule 54959

(Membre visé)

Décision du Comité de déontologie

Christine Sakiris

Le 8 avril 2022

M. Denys Morel, représentant de l’autorité disciplinaire

Mme Cait Fleck, représentante du membre visé


TABLE DES MATIÈRES

RÉSUMÉ 3

INTRODUCTION 4

ALLÉGATIONS 5

EXPOSÉ CONJOINT DES FAITS 8

DÉCISION RELATIVE AUX ALLÉGATIONS 12

Allégation 1 : 12

Allégation 2 : 14

Allégation 3 : 15

MESURES DISCIPLINAIRES 15

Éventail des mesures disciplinaires possibles 17

Facteurs aggravants 18

Facteurs atténuants 20

Décision sur les mesures disciplinaires 21

CONCLUSION 23

 

RÉSUMÉ

L’Avis d’audience disciplinaire original, daté du 28 juin 2021, contenait deux allégations de contravention à l’article 7.1 du Code de déontologie de la GRC et une allégation d’infraction à l’article 4.6 du Code de déontologie de la GRC. Le gendarme Picketts aurait conduit son véhicule de la GRC en état d’ébriété, causant des dommages au véhicule. On l’a trouvé endormi, derrière le volant, au service au volant d’un restaurant-minute. Son chien policier, la trousse d’entraînement en détection de drogues pour chien policier, son poste de travail mobile, sa carabine et ses munitions étaient également dans le véhicule. Il a refusé de fournir un échantillon d’haleine et a résisté à l’arrestation avant d’être placé en détention.

Avant l’audience disciplinaire, les deux parties ont soumis un Exposé conjoint des faits et une Proposition conjointe sur les mesures disciplinaires. Le Comité de déontologie a accepté ces deux documents. Les trois allégations ont été jugées fondées.

Les mesures disciplinaires suivantes ont été imposées : (1) une sanction pécuniaire de 30 jours, à retenir de la solde du gendarme Picketts; (2) le retrait de 15 jours de congé annuel; (3) une inadmissibilité à toute promotion d’une durée de trois ans à compter de la date de la présente décision; (4) une mutation hors des Services cynophiles; (5) une instruction de suivre un traitement médical tel que spécifié par l’agent des services de santé de la Division E; (6) une instruction de respecter les conditions énoncées dans l’entente de plan de suivi signée le 29 avril 2020; et (7) une instruction de présenter des excuses, en personne, aux agents ayant procédé à l’arrestation.

INTRODUCTION

[1] Le 9 avril 2020 ou entre le 9 et le 10 avril 2020, le gendarme Picketts aurait conduit son véhicule de la GRC, en état d’ébriété, causant des dommages au véhicule. On l’a trouvé endormi, derrière le volant, au service au volant d’un restaurant-minute. Son chien policier, la trousse d’entraînement en détection de drogues pour chien policier, son poste de travail mobile, sa carabine et ses munitions étaient également dans le véhicule. Il a refusé de fournir un échantillon d’haleine et a résisté à l’arrestation avant d’être placé en détention.

[2] Le 26 mars 2021, l’autorité disciplinaire désignée a signé un Avis à l’officier désigné pour demander la tenue d’une audience disciplinaire par rapport à cette affaire. Le 29 mars 2021, j’ai été nommée au comité de déontologie en vertu du paragraphe 43(1) de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, L.R.C. (1985), ch. R-10 [la Loi sur la GRC].

[3] L’Avis d’audience disciplinaire original, daté du 28 juin 2021, contient deux allégations de contravention à l’article 7.1 du Code de déontologie de la GRC et une allégation d’infraction à l’article 4.6 du Code de déontologie de la GRC.

[4] Le 27 septembre 2021, le gendarme Picketts a fourni sa réponse aux allégations, conformément au paragraphe 15(3) des Consignes du commissaire (déontologie), DORS/2014-291 [les CC (Déontologie)]. Le gendarme Picketts a admis ces trois allégations et leurs détails. Il a fourni des explications supplémentaires concernant plusieurs détails.

[5] L’audience disciplinaire de la présente affaire devait commencer le 22 février 2022. Le 24 décembre 2021, le représentant de l’autorité disciplinaire et la représentante du membre visé ont présenté au Comité de déontologie un Exposé conjoint des faits. Entre le 19 et le 26 janvier 2022, la représentante du membre visé a présenté des rapports médicaux d’experts. Le 7 février 2022, les parties ont informé le Comité de déontologie de leur intention de présenter une Proposition conjointe sur les mesures disciplinaires (la Proposition conjointe).

[6] Le 22 février 2022, les parties ont présenté leurs observations écrites à l’appui de la Proposition conjointe ainsi que des preuves documentaires d’accompagnement. Les parties ont demandé à obtenir une décision écrite fondée sur le dossier, et le Comité de déontologie a accepté leur demande. Par conséquent, l’audience disciplinaire dans cette affaire a été annulée.

[7] Les mesures disciplinaires suivantes ont été proposées conjointement : (1) une sanction pécuniaire de 30 jours, à retenir de la solde du gendarme Picketts; (2) le retrait de 15 jours de congé annuel; (3) une inadmissibilité à toute promotion d’une durée de trois ans à compter de la date de la présente décision; (4) une mutation hors des Services cynophiles; (5) une instruction de suivre un traitement médical tel que spécifié par l’agent des services de santé de la Division E; (6) une instruction de respecter les conditions énoncées dans l’entente de plan de suivi signée le 29 avril 2020; et (7) une instruction de présenter des excuses, en personne, aux agents ayant procédé à l’arrestation.

[8] J’accepte la Proposition conjointe des parties pour les raisons présentées ci-après. Les allégations 1, 2 et 3 sont établies. Les mesures disciplinaires proposées, avec de légères modifications pour s’harmoniser avec le libellé des articles 3, 4 et 5 des CC (Déontologie), sont imposées.

ALLÉGATIONS

[9] Les allégations sont les suivantes :

Allégation 1 :

Le ou vers le 10 avril 2020, à Maple Ridge ou à proximité, dans la province de la Colombie-Britannique, le gendarme Blaise Picketts a adopté un comportement contraire à l’article 7.1 du Code de déontologie de la Gendarmerie royale du Canada.

Énoncé détaillé de l’allégation 1 :

1. Pendant toute la période pertinente, vous étiez un membre de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) affecté aux Services cynophiles intégrés du Lower Mainland, au sein de la Division E.

2. Vous n’étiez pas en service et vous conduisiez votre véhicule de la GRC, une Chevrolet Tahoe 2014 non identifiée, portant la plaque d’immatriculation de la C.-B. [expurgée] (« véhicule de police »).

3. Votre chien policier était avec vous dans [votre véhicule de police]; votre poste de travail mobile, votre carabine, les chargeurs de votre carabine et la trousse d’entraînement en détection de drogues pour chien policier se trouvaient également à l’intérieur de [votre véhicule de police].

4. Le 9 avril 2020, vous vous êtes rendu aux résidences de deux collègues différents à Langley et à Surrey où vous avez consommé plusieurs boissons alcoolisées au cours de l’après-midi et de la soirée.

5. Le 10 avril 2020, vers 2 h 30 du matin, on vous a retrouvé endormi au volant de [votre véhicule de police] au service au volant du Burger King situé à [adresse expurgée].

6. La police s’est rendue sur place et a observé que vous montriez divers signes d’affaiblissement des capacités. La police a aussi trouvé une boisson alcoolisée ouverte dans votre véhicule.

7. On vous a demandé de souffler dans un appareil de détection approuvé, mais vous n’avez pas fourni un échantillon d’haleine approprié.

8. Vous avez été arrêté pour refus de fournir un échantillon d’haleine et conduite d’un véhicule à moteur avec facultés affaiblies.

9. Vous avez conduit un véhicule de police en état d’ébriété.

10. Vos actes constituaient une conduite déshonorante et ont mis en danger la sécurité du public et de votre chien policier.

Allégation 2 :

Le ou vers le 10 avril 2020, à Maple Ridge ou à proximité, dans la province de la Colombie-Britannique, le gendarme Blaise Picketts a adopté un comportement contraire à l’article 7.1 du Code de déontologie de la Gendarmerie royale du Canada.

Énoncé détaillé de l’allégation 2 :

1. Pendant toute la période pertinente, vous étiez un membre de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) affecté aux Services cynophiles intégrés du Lower Mainland, au sein de la Division E.

2. Vous n’étiez pas en service et vous conduisiez votre véhicule de la GRC, une Chevrolet Tahoe 2014 non identifiée, portant la plaque d’immatriculation de la C.-B. [expurgée] (« véhicule de police »).

3. Votre chien policier était avec vous dans [votre véhicule de police]; votre poste de travail mobile, votre carabine, les chargeurs de votre carabine et la trousse d’entraînement en détection de drogues pour chien policier se trouvaient également à l’intérieur de [votre véhicule de police].

4. Le 10 avril 2020, vers 2 h 30 du matin, on vous a retrouvé endormi au volant de [votre véhicule de police] au service au volant du Burger King situé à [adresse expurgée].

5. La police s’est rendue sur place et on vous a demandé de souffler dans un appareil de détection approuvé, mais vous n’avez pas fourni un échantillon d’haleine approprié.

6. Vous avez été arrêté pour refus de fournir un échantillon d’haleine et conduite d’un véhicule à moteur avec facultés affaiblies.

7. Pendant l’intervention de la police, vous étiez agressif verbalement et vous n’avez pas suivi les consignes des agents.

8. Vous avez résisté physiquement à votre arrestation et vous avez agressé les policiers.

9. Vos actes ont causé des blessures au [gendarme] Trevor Vandelft et au [gendarme] Michael Sorge et mis en danger la sécurité de tous les agents impliqués dans l’arrestation.

10. Une fois au détachement, vous avez continué d’être peu coopératif et agressif.

11. Le 18 juin 2021, vous avez plaidé coupable de l’accusation de résistance à l’arrestation et avez été condamné à trois mois de probation et à une amende de 1 000 $.

12. Vos actes constituaient une conduite déshonorante.

Allégation 3 :

Le 9 avril 2020 ou entre le 9 avril 2020 et le 10 avril 2020, à Maple Ridge ou à proximité, dans la province de la Colombie-Britannique, le gendarme Blaise Picketts a adopté un comportement contraire à l’article 4.6 du Code de déontologie de la Gendarmerie royale du Canada.

Énoncé détaillé de l’allégation 3 :

1. Pendant toute la période pertinente, vous étiez un membre de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) affecté aux Services cynophiles intégrés du Lower Mainland, au sein de la Division E.

2. Vous n’étiez pas en service et vous conduisiez votre véhicule de la GRC, une Chevrolet Tahoe 2014 non identifiée, portant la plaque d’immatriculation de la C.-B. [expurgée] (« véhicule de police »).

3. Votre chien policier était avec vous dans [votre véhicule de police]; votre poste de travail mobile, votre carabine, les chargeurs de votre carabine et la trousse d’entraînement en détection de drogues pour chien policier se trouvaient également à l’intérieur de [votre véhicule de police].

4. Le 9 avril 2020, dans l’après-midi, vous avez utilisé [votre véhicule de police] pour vous rendre à un magasin d’alcool et acheter de l’alcool. Vous vous êtes ensuite rendu aux résidences de deux collègues différents à Langley et à Surrey où vous avez consommé plusieurs boissons alcoolisées au cours de l’après-midi et de la soirée.

5. Le 10 avril 2020, vers 2 h 30 du matin, on vous a retrouvé endormi au volant de [votre véhicule de police] au service au volant du Burger King situé à [adresse expurgée].

6. La police s’est présentée sur les lieux et vous a arrêté pour avoir refusé de fournir un échantillon d’haleine et pour conduite d’un véhicule à moteur avec facultés affaiblies. Pendant qu’ils étaient sur les lieux, les agents ont remarqué des dommages du côté passager et au pare-chocs arrière de [votre véhicule de police].

7. Vous avez utilisé [votre véhicule de police] pour des raisons personnelles et, en le faisant, vous avez endommagé le véhicule et mis en danger la sécurité du public et de votre chien policier.

8. Vous avez utilisé [votre véhicule de police] à des fins non autorisées.

[traduit tel que reproduit dans la version anglaise]

EXPOSÉ CONJOINT DES FAITS

[10] Les énoncés détaillés 1, 2 et 3 sont identiques dans chaque allégation et ne sont pas contestés. Les parties sont également d’accord sur les faits suivants.

[11] Le 9 avril 2020, le gendarme Picketts avait une journée de congé. Dans la matinée, il a conduit son véhicule de la GRC (« véhicule de police ») à Surrey et a rencontré le gendarme Dave Dolan et d’autres maîtres-chiens pour s’entraîner avec leurs chiens. Par la suite, le groupe a décidé de se rendre à la résidence d’un autre membre à Langley pour socialiser. Le gendarme Picketts a ramassé le gendarme Dolan et s’est rendu dans un magasin d’alcool où il a acheté de l’alcool, puis il a conduit jusqu’à la résidence du membre à Langley. Ils sont arrivés entre 13 h et 14 h. Pendant qu’il était chez ce membre à Langley, le gendarme Picketts a consommé de l’alcool.

[12] Le même jour, entre 15 h environ et 16 h, le gendarme Picketts est retourné à la résidence du gendarme Dolan avec son véhicule de police et a continué de consommer de l’alcool avec l’agent Dolan et d’autres membres de la GRC. Environ une heure plus tard, le gendarme Picketts est parti dans son véhicule de police pour ramasser plus d’alcool, est retourné à la résidence du gendarme Dolan et a recommencé à consommer de l’alcool.

[13] Le 10 avril 2020, vers 2 h, le gendarme Picketts a quitté la résidence du gendarme Dolan pour se rendre à Maple Ridge, à environ 25 kilomètres de là. En traversant le pont Golden Ears, le gendarme Picketts a éraflé son véhicule de police sur la barrière en béton sur le côté du pont, causant des dommages d’une valeur d’environ 7 000 $ à l’arrière et au côté passager du véhicule. Il est reconnu que le gendarme Picketts a remboursé à la GRC le coût total des réparations.

[14] Une fois à Maple Ridge, le gendarme Picketts a conduit son véhicule de police dans la voie du service au volant de Burger King et s’est endormi derrière le volant. Un des employés de Burger King a essayé de réveiller le gendarme Picketts, mais n’y est pas parvenu. Après avoir essayé pendant environ 20 minutes, l’employé a eu peur et a appelé le 911.

[15] À 2 h 58, le gendarme Matthew Wagner de la GRC de Maple Ridge est arrivé au Burger King. Le gendarme Wagner a repéré le gendarme Picketts endormi dans le siège du conducteur de son véhicule de police, le moteur allumé et une carte de crédit dans sa main droite. Le gendarme Wagner a observé l’équipement de police à l’intérieur du véhicule, y compris la carabine. Il a évalué le risque comme étant élevé, car il ne savait pas s’il avait affaire à un policier armé ou à quelqu’un qui avait volé un véhicule de police.

[16] Après plusieurs tentatives, le gendarme Wagner a pu réveiller le gendarme Picketts. Le gendarme Picketts a montré les signes suivants de facultés affaiblies par l’alcool :

  1. ses yeux étaient rouges et brillants;
  2. il n’arrivait pas à articuler et il y avait une odeur d’alcool dans son haleine;
  3. il était lent dans ses gestes;
  4. il n’était pas solide sur ses jambes;
  5. il avait du mal à marcher droit.

[17] Les gendarmes Michael Sorge et Trevor Vendelft sont arrivés sur les lieux après que le gendarme Picketts soit sorti du véhicule.

[18] Le gendarme Wagner a lu la demande d’échantillon d’haleine sur un appareil de détection approuvé au gendarme Picketts, qui a indiqué comprendre la demande. Toutefois, le gendarme Picketts a volontairement omis de fournir un échantillon d’haleine adéquat. On lui a donné plusieurs occasions de fournir un échantillon d’haleine, mais il a utilisé diverses tactiques pour refuser, notamment :

  1. en mordant la paille;
  2. en détournant la tête de l’appareil de détection approuvé;
  3. en ne soufflant pas assez fort.

[19] Le gendarme Picketts a finalement été arrêté pour avoir omis de fournir un échantillon d’haleine et pour avoir conduit avec facultés affaiblies. Lors de son arrestation, le gendarme Picketts a refusé de se conformer aux exigences de la police et est devenu peu coopératif. Il a crié des mots à l’effet de [TRADUCTION] « va te faire foutre » et de [traduction] « je ne suis pas en état d’arrestation » aux agents.

[20] Le gendarme Picketts a résisté physiquement à l’arrestation et s’est montré agressif envers les agents procédant à l’arrestation, malgré leurs demandes qu’il cesse de résister. Ses actes comprenaient :

  1. crisper ses bras et son corps;
  2. placer ses bras sous son corps et refuser de les relâcher;
  3. agir de façon agressive, de sorte que, à un moment donné, il a soulevé son genou rapidement en direction de l’entrejambe du gendarme Wagner;
  4. saisir les menottes que les agents essayaient de lui mettre et ce faisant, blesser le pouce du gendarme Vandelft.

[21] Les agents ont utilisé le code 10-33 pour demander du renfort afin d’aider à arrêter le gendarme Picketts. Ce code n’est utilisé par la police que lorsque du renfort est nécessaire de façon urgente pour assurer la sécurité des agents. D’autres agents, dont le caporal Peter Westra, sont arrivés sur les lieux.

[22] Le gendarme Picketts a continué de résister après avoir été menotté. Il a fallu plusieurs agents pour le faire entrer à l’arrière d’un véhicule de police. Il s’est servi de ses pieds pour essayer de les empêcher de le faire.

[23] Les gestes du gendarme Picketts, depuis sa sortie du véhicule de police, sont enregistrés sur bande vidéo de la police.

[24] Le gendarme Sorge a sécurisé le véhicule de police du gendarme Picketts et a observé une canette d’alcool ouverte sur le tapis du côté conducteur. Il est admis que l’alcool trouvé à l’intérieur du véhicule était de la même marque que celui que le gendarme Picketts avait consommé plus tôt dans la journée.

[25] Le gendarme Sorge a remarqué le chien policier quand il a vérifié le siège arrière, alors il a immédiatement fermé la porte. Un agent des Services cynophiles a été appelé pour s’occuper du chien, car seuls ces agents sont formés pour le faire.

[26] Le gendarme Picketts a été emmené au bloc cellulaire de Maple Ridge où il a continué d’être peu coopératif. La vidéo montre que lorsque le gendarme Picketts était photographié au bloc cellulaire, il avait la tête baissée et levait son majeur vers l’appareil photo.

[27] En raison de son niveau d’ébriété, le gendarme Picketts a été placé dans une cellule pour lui permettre de se dégriser avant d’être relâché. La vidéo de la cellule montre le gendarme Picketts résistant physiquement lorsqu’il est placé dans une cellule. Les agents ont dû le menotter et le forcer physiquement à entrer dans la cellule.

[28] Le gendarme Picketts ne se souvient pas complètement de l’incident en raison de son niveau élevé d’ébriété.

[29] Le 18 juin 2021, le gendarme Picketts a comparu devant le tribunal relativement aux accusations criminelles qui ont résulté de l’incident. Il a plaidé coupable à une accusation de résistance à l’arrestation. Il a été condamné à une période de probation de 3 mois et à une amende de 1 000 $. Les poursuites relatives à l’accusation de refus de fournir un échantillon d’haleine ont été suspendues.

DÉCISION RELATIVE AUX ALLÉGATIONS

Allégation 1 :

[30] L’article 7.1 du Code de déontologie de la GRC est ainsi libellé : « Les membres se comportent de manière à éviter de jeter le discrédit sur la Gendarmerie ».

[31] Le critère à appliquer relativement à une « conduite déshonorante » selon l’article 7.1 du Code de déontologie nécessite que l’autorité disciplinaire établisse les quatre éléments suivants selon la prépondérance des probabilités :

  1. les actes qui constituent le comportement allégué;
  2. l’identité du membre qui aurait commis ces actes;
  3. si la conduite du membre est susceptible de jeter le discrédit sur la GRC;
  4. si la conduite du membre est suffisamment liée à ses devoirs et fonctions pour donner à la GRC un motif légitime de prendre des mesures disciplinaires.

[32] Compte tenu des aveux du gendarme Picketts dans l’Énoncé conjoint des faits, je conclus que les deux premiers volets du critère sont respectés. Je peux donc maintenant passer à la question de savoir si les troisième et quatrième éléments du critère sont remplis.

[33] Le gendarme Picketts admet avoir conduit son véhicule de police en état d’ébriété. Le personnel du restaurant l’a trouvé endormi au volant devant une fenêtre du service au volant, le moteur de son véhicule allumé. Son chien policier, sa trousse d’entraînement pour chien policier, son poste de travail mobile, sa carabine et ses munitions étaient également dans le véhicule. Préoccupé par son bien-être, le personnel du restaurant a appelé le 911.

[34] Après avoir été réveillé par la police et être sorti du véhicule, le gendarme Picketts a omis de fournir un échantillon d’haleine valide. La police a également trouvé de l’alcool dans le véhicule de police du gendarme Picketts.

[35] Les agents de police, c’est bien connu, sont tenus de respecter des normes plus élevées que le reste de la population. Les membres de la GRC doivent se conformer au Code de déontologie, qu’ils soient en service ou non. Bien que les actes du gendarme Picketts aient eu lieu alors qu’il n’était pas en service, je conclus que ses actes démontrent un sérieux manque de jugement et sont incompatibles avec les devoirs et les responsabilités d’un membre de la GRC, comme le précise l’article 37 de la Loi sur la GRC. Les agissements du gendarme Picketts portent sur des questions qui correspondent à un comportement face auquel les membres de la GRC doivent intervenir dans le cadre de leurs activités quotidiennes d’application de la loi. Les membres ne peuvent ignorer, dans leur vie privée, les lois mêmes qu’ils sont appelés à appliquer.

[36] Le gendarme Picketts reconnaît que ses actes ont eu une incidence négative sur la réputation de la GRC, surtout lorsque des membres du grand public ont été témoins de l’incident. Il reconnaît en outre que ses actes constituaient une conduite déshonorante et ont mis en danger la sécurité du public, de ses collègues policiers et de son chien policier [1] .

[37] Je suis d’avis qu’une personne raisonnable dans la société, connaissant toutes les circonstances pertinentes, y compris les réalités du travail policier en général et celles de la GRC en particulier, considérerait les agissements du gendarme Picketts comme étant susceptibles de jeter le discrédit sur la Gendarmerie. Je suis aussi d’avis que ses gestes peuvent nuire à sa capacité de remplir les tâches d’un membre de la GRC avec impartialité, ou nuire à la confiance du public en cette capacité. Par conséquent, j’ai déterminé que les actes du gendarme Picketts sont suffisamment liés à ses devoirs et fonctions pour que la GRC ait un motif légitime de prendre des mesures disciplinaires.

[38] Par conséquent, l’allégation 1 est établie selon la prépondérance des probabilités.

Allégation 2 :

[39] L’allégation 2 est également contraire à l’article 7.1 du Code de déontologie. Encore une fois, en raison des aveux du gendarme Picketts dans l’Énoncé conjoint des faits, je conclus que les deux premiers volets du critère sont respectés.

[40] Comme je l’ai mentionné, la demande d’échantillon d’haleine au moyen d’un appareil de détection approuvé a été faite au gendarme Picketts; toutefois, ce dernier n’a pas fourni un échantillon d’haleine approprié. Une fois informé qu’il était en état d’arrestation, le gendarme Picketts a résisté et a été verbalement agressif. Il est devenu agressif, causant des blessures mineures à deux membres et obligeant ces derniers à utiliser le code 10-33 en raison de préoccupations concernant leur sécurité.

[41] Une fois au poste de police, le gendarme Picketts a continué d’être peu coopératif et agressif. Il s’est montré frustré par les tentatives de prendre sa photo à l’admission et a résisté physiquement son placement dans une cellule. Il a finalement plaidé coupable à une accusation de résistance à l’arrestation. Il a été condamné à une période de probation de 3 mois et à une amende de 1 000 $.

[42] Pour les mêmes raisons que celles énoncées aux paragraphes 35 à 37 de la présente décision, je conclus que l’allégation 2 est établie selon la prépondérance des probabilités.

Allégation 3 :

[43] L’article 4.6 du Code de déontologie stipule que les membres « utilisent les biens et le matériel fournis par l’État seulement pour les fins et les activités autorisées ». Les membres ne sont pas autorisés à utiliser du matériel et des biens de la GRC à des fins personnelles.

[44] Le gendarme Picketts a conduit son véhicule de la Gendarmerie en dehors de ses heures de travail et uniquement à des fins personnelles. Il a utilisé son véhicule de police pour se rendre à des activités sociales et en revenir, et pour acheter de l’alcool. De plus, il l’a fait alors qu’il était en état d’ébriété. Il a non seulement causé des dommages au véhicule, mais a aussi mis en danger la sécurité du public et celle de son chien policier.

[45] L’utilisation par le gendarme Picketts de son véhicule de police était non autorisée et dans un but inapproprié. Par conséquent, l’allégation 3 est établie selon la prépondérance des probabilités.

MESURES DISCIPLINAIRES

[46] Puisque les allégations 1, 2 et 3 ont été établies, j’ai l’obligation, au titre du paragraphe 45(4) de la Loi sur la GRC et au Guide des mesures disciplinaires de la GRC, d’imposer « une mesure juste et équitable selon la gravité de l’infraction, le degré de culpabilité du membre et la présence ou l’absence de circonstances atténuantes ou aggravantes ». Au titre de l’alinéa 36.2e) de la Loi sur la GRC, les mesures disciplinaires doivent être « adaptées à la nature et aux circonstances des contraventions aux dispositions du code de déontologie et, s’il y a lieu, des mesures éducatives et correctives plutôt que punitives ».

[47] Le représentant de l’autorité disciplinaire et la représentante du membre visé ont présenté des observations distinctes au sujet de la Proposition conjointe, en plus de preuves documentaires connexes et de la jurisprudence applicable. Ils proposent les mesures disciplinaires globales suivantes :

  1. une sanction pécuniaire de 30 jours (240 heures), à déduire de la solde du gendarme Picketts;
  2. le retrait de 15 jours de congé annuel (120 heures);
  3. une inadmissibilité à toute promotion pour une période de trois ans à compter de la date de cette décision écrite;
  4. une mutation hors des Services cynophiles;
  5. l’obligation de suivre un traitement médical selon les directives du médecin-chef;
  6. une instruction de respecter les conditions énoncées dans l’entente de plan de suivi signée le 29 avril 2020;
  7. une instruction de présenter des excuses, en personne, aux agents ayant procédé à l’arrestation : Le gendarme Wagner, le gendarme Sorge, le gendarme Vendelft et le caporal Westra.

[48] Lorsqu’un comité de déontologie reçoit une proposition conjointe de mesures disciplinaires, il existe peu de situations où il peut refuser d’accepter les mesures disciplinaires proposées.

[49] La Cour suprême du Canada a reconnu la valeur des discussions sur le règlement de litige, ainsi que celle des motifs des politiques qui favorisent fortement la promotion de la certitude pour les parties que les propositions seront acceptées quand une entente est conclue [2] . En général, les cours de justice et les tribunaux administratifs ne refusent pas les ententes conclues entre les parties, à moins que l’entente aille à l’encontre de l’intérêt public.

[50] Je dois donc déterminer si le fait d’accepter la Proposition conjointe irait à l’encontre de l’intérêt public. Il ne s’agit pas de déterminer si les mesures disciplinaires proposées sont celles que j’aurais imposées. Le critère du respect de l’intérêt public est beaucoup plus sévère.

[51] Dans l’arrêt Cook, la Cour suprême du Canada énonce les directives suivantes, qui s’appliquent aux tribunaux administratifs :

[…] il ne faudrait pas rejeter trop facilement une recommandation conjointe […] Le rejet dénote une recommandation à ce point dissociée des circonstances de l’infraction et de la situation du contrevenant que son acceptation amènerait les personnes renseignées et raisonnables, au fait de toutes les circonstances pertinentes, y compris l’importance de favoriser la certitude dans les discussions en vue d’un règlement, à croire que le système de justice [ou, dans notre cas, le processus disciplinaire] avait cessé de bien fonctionner [3] .

[52] Pour mieux déterminer si les mesures disciplinaires proposées vont à l’encontre de l’intérêt public, il est utile d’avoir une idée des autres mesures qui peuvent être imposées. À cet égard, le Guide des mesures disciplinaires est un excellent outil. Il est toutefois important de souligner que, comme son nom l’indique, le Guide des mesures disciplinaires n’est qu’un guide. Les lignes directrices qu’il énonce ne sont pas prescriptives.

[53] En outre, je note que le Guide des mesures disciplinaires prévoit une gamme de sanctions pécuniaires qui peuvent être envisagées. Lorsqu’il examine l’ensemble des circonstances, un comité de déontologie peut imposer des sanctions pécuniaires seules ou en conjonction avec d’autres mesures disciplinaires, conformément aux articles 3, 4 et 5 des CC (Déontologie).

Éventail des mesures disciplinaires possibles

[54] Les parties ont proposé une sanction globale. Étant donné que les trois allégations découlent des événements des 9 et 10 avril 2020, je conviens que cela est approprié. Comme l’ont fait remarquer les parties, le Guide des mesures disciplinaires, aux pages 50 à 52, décrit une sanction pécuniaire de l’ordre de 10 jours de la solde, pour les cas mineurs, de 25 à 45 jours, pour les cas graves, pour conduite avec facultés affaiblies. La représentante du membre visé fait valoir que, dans l’ensemble des circonstances, les agissements du gendarme Picketts se situent dans la fourchette des cas graves. Par conséquent, le seuil inférieur de la fourchette appropriée est une sanction pécuniaire de 25 jours de la solde, seule ou combinée à des mesures disciplinaires supplémentaires.

[55] Le représentant de l’autorité disciplinaire fait observer que les circonstances générales du cas présent élargiraient la fourchette jusqu’au renvoi. Je suis aussi de cet avis, et ce, pour les raisons qui suivent. Le gendarme Picketts a conduit son véhicule de la GRC à des fins personnelles et inappropriées, causant des dommages au véhicule. Sans tenir compte de son état d’ébriété, le Guide des mesures disciplinaires, aux pages 33 à 35, indique que ces faits seuls pourraient donner lieu à une sanction pécuniaire supplémentaire de 1 à 10 jours. De même, son comportement agressif doit être pris en compte. Le Guide des mesures disciplinaires, aux pages 53 à 55, précise l’éventail des mesures disciplinaires qui peuvent être imposées pour les voies de fait. Les mesures se situent dans la fourchette des cas mineurs de 1 à 2 jours pour les incidents mineurs; une fourchette des cas ordinaires de 3 à 10 jours; et de 15 jours au renvoi dans la fourchette des cas graves. Je reconnais que les blessures subies par le gendarme Vandelft et le gendarme Sorge (ce dernier a subi des égratignures à la main) étaient mineures. Toutefois, compte tenu du fait que plusieurs agents ont été nécessaires pour maîtriser le gendarme Picketts, nécessitant un appel de code 10-33 en raison de préoccupations pour la sécurité des agents, la fourchette des cas mineurs ne serait pas appropriée. La fourchette des cas ordinaires est plus applicable; par conséquent, une autre sanction pécuniaire de 3 à 10 jours pourrait être imposée. Lorsque l’on tient compte de ces facteurs, une fourchette de plus de 45 jours pourrait être envisagée. Le Guide des mesures disciplinaires, aux pages 3 à 8, prévoit que lorsqu’une sanction pécuniaire dépasse 45 jours, le renvoi est la sanction la plus appropriée. Par conséquent, je considère qu’une fourchette de 25 jours, seule ou en conjonction avec d’autres mesures de conduite, jusqu’au renvoi est appropriée.

[56] Je dois maintenant examiner les facteurs aggravants et atténuants.

Facteurs aggravants

[57] J’ai retenu les facteurs aggravants suivants parmi les nombreux facteurs proposés par les parties.

[58] Tout d’abord, le gendarme Picketts a mis le public et d’autres membres en danger. Il y avait un risque de préjudice grave pour lui-même, son chien policier, d’autres agents et le public. Les dommages causés au véhicule de police et son état, alors qu’il avait la garde et le contrôle du véhicule, sont révélateurs du risque grave qu’il présentait.

[59] Deuxièmement, des membres du public étaient impliqués. Les employés du Burger King ont essayé de le réveiller, en vain, puis ont appelé la police parce qu’ils avaient peur. Ils ont également observé les agissements du gendarme Picketts avec les membres présents. Bien qu’on ne sache pas si les témoins savaient que le gendarme Picketts est un agent de police, la confiance du public pourrait en pâtir.

[60] Troisièmement, il y avait de l’alcool en cause. Au cours de l’après-midi et de la soirée du 9 avril 2020, et au petit matin du 10 avril 2020, le gendarme Picketts s’est rendu deux fois dans un magasin d’alcool pour acheter de l’alcool. Il a consommé de l’alcool et a conduit après avoir consommé de l’alcool. De plus, une canette ouverte d’alcool a été trouvée dans la porte du côté conducteur de son véhicule de police.

[61] Quatrièmement, les agissements du gendarme Picketts étaient délibérés. Quand il a pris la décision de consommer de l’alcool, il l’a fait en sachant qu’il conduisait son véhicule de police, dans lequel se trouvaient son chien policier et sa carabine. Il avait la possibilité de loger là où il buvait, mais a choisi de rentrer chez lui en conduisant son véhicule.

[62] Cinquièmement, le gendarme Picketts a abusé de sa position privilégiée de maître-chien. En tant que maître-chien, il était autorisé à ramener son véhicule de police à la maison. Il ne l’a pas seulement utilisé à des fins non autorisées, mais l’a conduit en état d’ébriété, ce qui a causé des dommages au véhicule.

[63] Sixièmement, le gendarme Picketts est un membre chevronné comptant 13 années de service au moment de l’incident et, selon ses évaluations du rendement, il occupait un poste de direction, supervisant d’autres agents et agissant comme sous-officier responsable par intérim des Services cynophiles intégrés de temps à autre. Il a fait preuve d’un comportement irrespectueux, peu coopératif et agressif et a résisté à son arrestation. Ses agissements ont causé des blessures mineures à deux agents procédant à l’arrestation. Un membre occupant de telles fonctions aurait dû se montrer plus avisé.

[64] Septièmement, les agissements du gendarme Picketts ont eu une incidence directe sur la conduite des opérations policières. Les agents présents ont dû émettre un code 10-33 pour demander du renfort en raison de son comportement. Ce code n’est utilisé qu’en situation d’urgence lorsqu’il y a des préoccupations pour la sécurité des agents.

[65] Huitièmement, le gendarme Picketts a été accusé au criminel et a plaidé coupable à une accusation de résistance à l’arrestation, et s’est vu imposer une période de probation. L’accusation de refus de fournir un échantillon d’haleine a été suspendue.

[66] Enfin, le gendarme Picketts a deux conclusions de mesures disciplinaires antérieures, bien que non reliées, qui ont toutes deux été imposées en 2015.

Facteurs atténuants

[67] J’ai retenu les facteurs atténuants suivants parmi les nombreux facteurs proposés par les parties.

[68] Tout d’abord, le gendarme Picketts a accepté la pleine responsabilité de ses actions et a fait tout ce qui était en son pouvoir pour régler cette affaire le plus rapidement possible. Il a admis les allégations et reconnu son inconduite dès que possible. De plus, il a immédiatement demandé à suivre un traitement et plaidé coupable à une accusation criminelle découlant de cet incident.

[69] Deuxièmement, le gendarme Picketts a fait preuve de remords sincères pour ses agissements. Les nombreuses lettres de recommandation qui décrivent sa réaction à cet incident en témoignent. Le gendarme Picketts a exprimé le désir de longue date de présenter ses excuses aux membres impliqués dans son arrestation. Il est reconnu qu’il n’aurait pas été approprié qu’il le fasse tant que les procédures criminelles et disciplinaires n’aient pas été résolues. Il demeure disposé à le faire maintenant. Il est également à noter que le gendarme Picketts a versé des réparations à la GRC pour les dommages causés au véhicule de police d’un montant de 7 000 $.

[70] Troisièmement, les évaluations du rendement du gendarme Picketts démontrent qu’il a acquis une réputation de membre fiable et proactif dès le début de son service. Il a une bonne réputation et, au cours des dix dernières années, il a constamment dépassé les attentes. Il est reconnu pour ses compétences supérieures en relations interpersonnelles et en leadership, ainsi que pour sa compétence en tant que maître-chien des Services cynophiles de la GRC. Le gendarme Picketts a également fourni de nombreuses lettres d’appui qui témoignent en détail de son caractère et de son dévouement en tant que membre de la GRC, y compris son engagement dans la collectivité et son appui au programme des Services cynophiles. Il convient de noter en particulier celles de son supérieur et de ses collègues les plus récents qui, en toute connaissance de cause de son inconduite, approuveraient son retour.

[71] Quatrièmement, les preuves médicales indiquent que le comportement du gendarme Picketts était lié à des conditions médicales sous-jacentes et non diagnostiquées auparavant, à savoir le trouble de stress post-traumatique et le trouble de l’usage de l’alcool. Je reconnais que le gendarme Picketts avait aussi des facteurs de stress personnels dans sa vie au moment de cet incident.

[72] Cinquièmement, la représentante du membre visé soutient que, bien qu’ils aient été le résultat d’un jugement extrêmement médiocre, les agissements du gendarme Picketts n’étaient pas malveillants. Même si je reconnais que le gendarme Picketts ne prévoyait pas, le matin du 9 avril 2020, de causer un préjudice, sa décision de conduire en état d’ébriété cet après-midi-là, et aux premières heures du 10 avril 2020, était délibérée et comportait une probabilité raisonnable de causer un préjudice. Par conséquent, je donne très peu, voire pas du tout, de poids à ce facteur.

[73] Enfin, et surtout, le gendarme Picketts a immédiatement cherché à se faire traiter. Il a pris des mesures concrètes et étendues pour traiter ses problèmes médicaux et maintenir sa sobriété. Celles-ci sont exposées en détail dans les documents à l’appui. Son dévouement à ce traitement et à sa santé continue est impressionnant. Ses praticiens traitants soulignent plusieurs facteurs qui favorisent un pronostic favorable pour son rétablissement continu, réduisant ainsi son risque de récidive.

Décision sur les mesures disciplinaires

[74] Le gendarme Picketts a commis une faute très grave. Ses agissements étaient imprudents et ont mis en danger la sécurité de ses proches et d’autres personnes, ainsi que celle de son chien policier. Le représentant de l’autorité disciplinaire fait valoir que, sans les efforts considérables déployés par le gendarme Picketts pour se réhabiliter, le renvoi serait une issue appropriée. Je suis d’accord avec cela.

[75] J’estime que les mesures proposées reconnaissent le principe juridique accepté selon lequel, lorsque l’inconduite d’un membre est causée au moins en partie par une invalidité, il convient qu’un comité de déontologie examine cette invalidité lorsqu’il détermine les mesures disciplinaires appropriées. Conséquemment, je dois tenir compte de l’obligation de la GRC d’adopter des mesures d’adaptation en milieu de travail pour déterminer les mesures disciplinaires appropriées.

[76] La preuve médicale démontre que les efforts considérables déployés par le gendarme Picketts pour obtenir un traitement et son engagement à l’égard de sa santé permanente favorisent un pronostic positif en vue d’un rétablissement durable. Un retour au travail justifié sur le plan médical. Cela dit, le potentiel de réadaptation du gendarme Picketts n’est pas le seul facteur que je dois prendre en considération pour déterminer si les mesures disciplinaires proposées ne sont pas contraires à l’intérêt public.

[77] La sanction pécuniaire proposée de 45 jours se situe à l’extrémité supérieure de la fourchette, juste avant le renvoi. Son incidence, bien qu’atténuée quelque peu par sa répartition entre une confiscation de la solde et une réduction des congés, est considérable.

[78] En outre, le gendarme Picketts se préparait à assumer un plus grand rôle de leadership et avait présenté sa candidature pour au moins une possibilité de promotion. En raison de son inadmissibilité à la promotion, il devra attendre trois ans pour poursuivre ces objectifs.

[79] Les parties attirent particulièrement l’attention sur l’incidence de la mutation proposée du gendarme Picketts. Le gendarme Picketts a consacré près d’une décennie de travail acharné et de formation supplémentaire pour atteindre son objectif de devenir un maître de chien policier; des efforts tous déployés au-delà de l’exercice de ses fonctions habituelles. Ses évaluations du rendement et ses lettres d’appui montrent très clairement qu’il est passionné et extrêmement dévoué à ce travail. Sa mutation hors des Services cynophiles de la GRC est une mesure disciplinaire importante, et celle-ci, tel qu’elle est présentée, sera profondément ressentie par le gendarme Picketts.

[80] Collectivement, les mesures proposées sont importantes et proportionnelles à la gravité de l’inconduite. Elles comprennent des mesures correctives et des mesures sérieuses et tiennent compte des facteurs atténuants et aggravants du cas présent. Elles auront un effet dissuasif sur le gendarme Picketts et serviront aussi d’avertissement aux autres membres. Elles aident aussi le gendarme Picketts à demeurer en bonne santé, ce qui sera important pour veiller à ce que son inconduite ne se reproduise plus. De plus, j’ai examiné les affaires citées par les parties. Bien que deux des trois décisions citées par les parties reflètent les recommandations communes, et soient donc d’une aide limitée, je suis convaincue que les mesures proposées démontrent la parité des sanctions et établissent un équilibre approprié avec les objectifs de l’article 36.2 de la Loi sur la GRC.

[81] En conciliant ces facteurs, je ne peux pas conclure que les mesures disciplinaires proposées vont à l’encontre de l’intérêt public. Au contraire, je suis d’avis que l’intérêt public est servi par les mesures proposées. Il est bien connu que l’intérêt public est servi par la bonne gouvernance des opérations de la GRC. L’administration appropriée du processus disciplinaire constitue une façon dont on assure l’existence de cette gouvernance au public.

[82] L’administration appropriée du processus disciplinaire requiert l’examen, par un comité de déontologie, des répercussions de l’invalidité d’un membre sur son inconduite, en plus de l’examen de la capacité de la GRC d’accommoder cette invalidité lorsque l’on évalue les mesures disciplinaires appropriées. Cela correspond aux principes directeurs du processus disciplinaire, établis à l’article 36.2 de la Loi sur la GRC. Le fait de ne pas mener cet examen va à l’encontre de l’intérêt public, puisqu’il peut priver le public de membres qui peuvent recommencer, de façon sécuritaire, à apporter une contribution importante à la GRC et aux collectivités qu’elle dessert. Cela peut aussi inciter des membres qui sont aux prises avec des problèmes de santé mentale à dissimuler leurs problèmes et à ne pas obtenir l’appui dont ils ont besoin pour maintenir leur santé.

[83] J’accepte donc les mesures disciplinaires proposées.

CONCLUSION

[84] Après avoir conclu que les allégations 1, 2 et 3 étaient établies, et conformément à la proposition conjointe présentée par le représentant de l’autorité disciplinaire et la représentante du membre visé, les mesures disciplinaires suivantes sont imposées :

  1. conformément à l’alinéa 5(1)j) des CC (Déontologie), une sanction pécuniaire de 30 jours (240 heures), à déduire de la solde du gendarme Picketts;
  2. conformément à l’alinéa 5(1)i) des CC (Déontologie), le retrait de 15 jours (120 heures) de congé annuel;
  3. conformément à l’alinéa 5(1)b) des CC (Déontologie), l’inadmissibilité à la promotion pour une période de trois ans à compter de la date de la présente décision écrite;
  4. conformément à l’alinéa 5(1)g) des CC (Déontologie), une mutation à un autre lieu de travail. En vertu de la proposition conjointe, la commandante a indiqué son intention de muter le gendarme Picketts hors des Services cynophiles de la Division E;
  5. conformément à l’alinéa 3(1)d) des CC (Déontologie), l’obligation de suivre un traitement médical selon les directives du médecin-chef;
  6. conformément au paragraphe 3(2) des CC (Déontologie), une instruction de respecter les conditions énoncées dans l’entente de plan de suivi signée le 29 avril 2020;
  7. conformément au paragraphe 3(2) des CC (Déontologie), une instruction de présenter des excuses, en personne, aux agents ayant procédé à l’arrestation : Le gendarme Wagner, le gendarme Sorge, le gendarme Vendelft et le caporal Westra. Le gendarme Picketts doit le faire dans un délai de six mois à compter de la date de la présente décision écrite et doit aviser l’autorité disciplinaire lorsqu’il a donné suite à l’instruction.

[85] On permet au gendarme Picketts de poursuivre sa carrière au sein de la GRC. On s’attend à ce qu’il respecte les normes établies par le Code de déontologie et les valeurs fondamentales de la GRC. Toute infraction subséquente au Code de déontologie sera évaluée de près par l’autorité disciplinaire appropriée et pourrait mener à son congédiement de la Gendarmerie.

[86] Toute mesure provisoire mise en place doit être réglée, rapidement, conformément à l’article 23 du Règlement de la Gendarmerie royale du Canada, 2014, DORS/2014-281.

[87] L’une ou l’autre des parties peut interjeter appel de cette décision en déposant une déclaration d’appel auprès de la commissaire dans le délai de prescription prévu au paragraphe 45.11 de la Loi sur la GRC.

 

 

Le 8 avril 2022

Christine Sakiris

Comité de déontologie

 

Date

 



[1] Exposé conjoint des faits, aux paragraphes 25 et 26.

[2] Voir, par exemple, l’arrêt Rault c. Law Society of Saskatchewan, 2009 SKCA 81 (CanLII), au paragraphe 19; et l’arrêt R. c. Anthony-Cook, 2016 CSC 43 [Cook].

[3] Cook, précité (note 2), paragraphe 34.

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