Déontologie

Informations sur la décision

Résumé :

L’Avis d’audience disciplinaire contient six allégations de contravention au Code de déontologie de la GRC. Quatre d’entre elles relèvent de l’article 7.1 du Code de déontologie. Les deux autres allégations relèvent de l’article 4.6 (mauvaise utilisation des biens fournis par l’État – transport et entreposage inadéquats du pistolet réglementaire fourni par la GRC) et l’article 9.1 (utilisation non autorisée de renseignements). Le Comité de déontologie a conclu que cinq des six allégations n’étaient pas établies. L’allégation touchant l’article 9.1 du Code de conduite a été établie. Le Comité de déontologie a accepté les observations conjointes des parties sur les mesures disciplinaires et a imposé une pénalité financière de 64 heures (8 jours) sur la solde du membre visé, une réduction de 56 heures (7 jours) de la banque de congés annuels et une réprimande.

Contenu de la décision

Protégé A

2022 DAD 09

Logo de la Gendarmerie royale du Canada

GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

Affaire intéressant

une audience disciplinaire tenue au titre de la

Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, LRC, 1985, ch. R-10

Entre :

le commandant, Division F

Autorité disciplinaire

et

le gendarme Trevor Sowers

Numéro de matricule 59005

Membre visé

Décision du Comité de déontologie

Kevin Harrison

Le 23 mai 2022

Sergent d’état-major Jonathan Hart, représentant de l’autorité disciplinaire

M. Brad Mitchell et M. Paul Wood, représentants du membre visé


TABLE DES MATIÈRES

RÉSUMÉ DES CONSTATATIONS 4

INTRODUCTION 4

ALLÉGATIONS 5

CRÉDIBILITÉ DES TÉMOINS 13

La chronologie des plaintes formulées par Mme J.S. à la GRC 14

Mes conclusions sur la crédibilité des témoins 19

FAITS QUI SOUS-TENDENT TOUTES LES ALLÉGATIONS 20

Les éléments de preuve 20

Mes conclusions 22

ANALYSE 24

Allégation 1 – Voies de fait contre Mme J.S. 25

Les éléments de preuve 25

Mes conclusions 26

Allégations 2 et 3 – Voies de fait contre Mme J.S. et transport et entreposage inadéquats du pistolet réglementaire 27

Les éléments de preuve 27

Mes conclusions 31

Allégation 4 – Agression sexuelle de Mme J.S. 35

Les éléments de preuve 35

Mes conclusions 39

Allégation 5 – Demande de PCU frauduleuse 41

Les éléments de preuve 41

Mes conclusions 44

Allégation 6 – Communication illicite et non autorisée de renseignements obtenus dans l’exercice de ses fonctions 45

Les éléments de preuve 45

Mes conclusions 46

Conclusion sur les allégations 48

MESURES DISCIPLINAIRES 48

Proposition conjointe quant aux mesures disciplinaires 48

La common law en matière de propositions conjointes 48

Décision concernant les mesures disciplinaires 50

CONCLUSION 53

 

RÉSUMÉ DES CONSTATATIONS

L’Avis d’audience disciplinaire contient six allégations de contravention au Code de déontologie de la GRC. Quatre d’entre elles relèvent de l’article 7.1 du Code de déontologie. Les deux autres allégations relèvent de l’article 4.6 (mauvaise utilisation des biens fournis par l’État – transport et entreposage inadéquats du pistolet réglementaire fourni par la GRC) et l’article 9.1 (utilisation non autorisée de renseignements). Le Comité de déontologie a conclu que cinq des six allégations n’étaient pas établies. L’allégation touchant l’article 9.1 du Code de conduite a été établie. Le Comité de déontologie a accepté les observations conjointes des parties sur les mesures disciplinaires et a imposé une pénalité financière de 64 heures (8 jours) sur la solde du membre visé, une réduction de 56 heures (7 jours) de la banque de congés annuels et une réprimande.

INTRODUCTION

[1] Le 12 janvier 2021, l’autorité disciplinaire de la Division F (l’autorité disciplinaire) a signé un Avis à l’officier désigné, dans lequel elle demandait la tenue d’une audience disciplinaire relativement à cette affaire. Le 19 janvier 2021, l’officier désigné m’a nommé au Comité de déontologie, conformément au paragraphe 43(1) de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, LRC (1985), ch. R-10 [la Loi sur la GRC].

[2] L’autorité disciplinaire a signé l’Avis d’audience disciplinaire le 2 février 2020. L’Avis d’audience disciplinaire contient six allégations. Quatre d’entre elles relèvent de l’article 7.1 du Code de déontologie. Les deux autres allégations concernent l’article 4.6 (mauvaise utilisation des biens fournis par l’État – transport et entreposage inadéquats du pistolet réglementaire fourni par la GRC) et l’article 9.1 (utilisation non autorisée de renseignements).

[3] Le gendarme Sowers a nié les six allégations.

[4] Pour ce qui est de l’étape des allégations de la présente instance, j’ai entendu des témoignages à Saskatoon, en Saskatchewan, entre le 18 et le 20 octobre 2021. Les parties ont présenté leur plaidoirie le 22 octobre 2021. J’ai rendu ma décision de vive voix sur les allégations par vidéoconférence, le 30 novembre 2021. J’ai conclu que l’autorité disciplinaire n’avait pas établi les allégations 1 à 5, mais qu’elle avait établi l’allégation 6 selon la prépondérance des probabilités.

[5] Les parties ont présenté des observations conjointes sur les mesures disciplinaires, qui comprenaient une pénalité financière de huit jours sur la solde du gendarme Sowers, la réduction de sept jours dans la banque de congés annuels et une réprimande. J’ai accepté les observations conjointes et imposé les mesures disciplinaires demandées par vidéoconférence le 21 décembre 2021.

[6] Ci-après se trouve ma décision écrite finale sur les allégations et les mesures disciplinaires.

ALLÉGATIONS

[7] L’Avis d’audience disciplinaire contient les six allégations et les énoncés détaillés de la façon suivante :

Énoncés détaillés communs à toutes les allégations

1. À toutes les dates pertinentes, vous étiez un membre de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) affecté à la Division F en Saskatchewan.

2. Le 13 octobre 2013, vous avez épousé Mme [J.S.]. Vous et Mme [J.S.] aviez déjà été mariés, et chacun de vous a des enfants d’une union précédente. Vous et Mme [J.S.] vous êtes séparés le ou vers le 10 novembre 2019.

3. Tout au long de votre mariage, Mme [J.S.] a résidé à Saskatoon et vous avez fait la navette – au besoin – vers votre lieu de travail. Votre première affectation a été au Détachement de la GRC de Humbolt, puis, le 22 juin 2015, vous avez été affecté au Détachement de la GRC de North Battleford. Vous et Mme [J.S.] étiez également propriétaire d’une résidence secondaire ou d’un chalet d’été (« chalet ») sur le lac Murray, près du village touristique de Cochin, en Saskatchewan.

4. Votre mariage avec Mme [J.S.] a été marqué de troubles familiaux et de violence psychologique envers Mme [J.S.] et ses enfants d’une union précédente :

[extrait de la transcription de l’entrevue omis]

5. Vous avez menacé Mme [J.S.] d’avoir des ennuis et de la quitter si jamais elle parlait de la violence conjugale à qui que ce soit.

[extrait de la transcription de l’entrevue omis]

6. Votre travail d’enquête est consigné dans le Système d’incidents et de rapports de police (« SIRP ») utilisé par la GRC dans la province.

7. Le 21 janvier 2020, le sergent d’état-major Devin Pugh (« Pugh ») a obtenu la première déclaration de Mme [J.S.].

8. Le 11 mars 2020, la caporale Brenda Diachuk (« Diachuk ») a obtenu une déclaration KGB de Mme [J.S.].

9. La caporale Ashley St. Germaine (« St. Germaine ») est enquêtrice à la Section des enquêtes générales de Prince Albert. Le sergent Chris Hansen (« Hansen ») est également enquêteur à la Section des enquêtes générales de Prince Albert. Le 18 mai 2020, ils ont obtenu la troisième déclaration de Mme [J.S.].

10. Le sergent Lyle Korczak (« Korczak ») est l’enquêteur du Groupe de la responsabilité professionnelle de la Division qui a été affecté à votre enquête en application du Code de déontologie.

Allégation 1

Entre le 1er juin et le 30 juin 2014, à Saskatoon ou dans les environs, dans la province de la Saskatchewan, le gendarme Trevor Sowers s’est comporté d’une manière susceptible de jeter le discrédit sur la Gendarmerie, en contravention à l’article 7.1 du Code de déontologie de la Gendarmerie royale du Canada.

Énoncé détaillé

1. Vous avez agressé Mme [J.S.] après qu’elle vous ait accusé de [avoir eu] une liaison avec une technicienne médicale d’urgence de Humboldt. Vous avez agrippé son bras gauche avec suffisamment de force pour laisser des ecchymoses [TRADUCTION] : « Comme la fois où il m’a attrapé par le bras si fort qu’il a laissé des ecchymoses et j’en ai parlé à son frère. » Mme [J.S.] a également décrit l’agression que vous avez commise à son endroit comme suit :

[extrait de la transcription de l’entrevue omis]

2. Mme [J.S.] a pris des photos des ecchymoses pour les envoyer à votre frère et lui a fait savoir que [TRADUCTION] : « ce n’est pas correct. » Les cinq (5) photographies des ecchymoses visibles prises par Mme [J.S.] sont incluses dans les éléments d’enquête.

3. Mme [J.S.] reconnaît que cet incident est la seule occasion où la violence familiale dont elle a été victime a laissé des ecchymoses sur sa personne :

[extrait de la transcription de l’entrevue omis]

Allégation 2

Le 28 février 2016 ou vers cette date, à North Battleford et à Cochin ou dans les environs, dans la province de la Saskatchewan, le gendarme Trevor Sowers s’est comporté de manière susceptible de jeter un discrédit sur la Gendarmerie, en contravention à l’article 7.1 du Code de déontologie de la Gendarmerie royale du Canada.

Énoncé détaillé

1. Vous avez passé la fin de semaine en Alberta pour rendre visite à vos enfants issus de votre première union et vous avez demandé à Mme [J.S.] de vous rencontrer à North Battleford avec tous vos [TRADUCTION] « trucs de police » puisque vous deviez travailler le lundi. Mme [J.S.] a accepté votre demande et a rassemblé tout ce dont vous auriez besoin pour travailler [TRADUCTION] : « Comme, son ceinturon de service, son arme et ses vêtements de police » et a tout mis dans un « bac Rubbermaid ».

2. Au départ, Mme [J.S.] avait l’intention de passer la nuit avec vous au chalet, mais en raison d’une chaude dispute pendant le souper, elle a tout simplement quitté le restaurant en voiture. Avant de quitter le restaurant, Mme [J.S.] a oublié par inadvertance de vous remettre votre équipement de police. Mme [J.S.] a décrit comment, en rentrant chez elle à Saskatoon, elle a remarqué que vous sembliez la pourchasser dans votre véhicule [TRADUCTION] : « Et tout d’un coup, je regarde derrière moi, et il est dans mon rétroviseur, il me suit de très près, et il me téléphone sans arrêt, et je me rends compte que j’ai ses trucs de police. » Mme [J.S.] a accepté de vous rencontrer au chalet pour vous remettre votre équipement de police.

3. Alors que Mme [J.S.] se rendait en voiture à votre chalet vers 21 h 30, elle s’est rendu compte que vous étiez encore en train de la [TRADUCTION] « pourchasser » et que vos actions [TRADUCTION] « me faisaient peur ». Mme [J.S.] a raté la sortie d’autoroute menant à votre chalet et était en train de faire demi-tour sur l’autoroute près du village de Cochin lorsque vous avez utilisé votre propre véhicule pour bloquer et arrêter celui de Mme [J.S.] sur l’autoroute. Vous avez ensuite agressé Mme [J.S.] en ouvrant de force la porte pour récupérer le bac Rubbermaid. Vos actions ont également mis en péril la sécurité personnelle de Mme [J.S.] et ont fini par lui causer de la douleur physique et de l’inconfort à la suite de l’agression. Mme [J.S.] a décrit ainsi vos actions dangereuses et vos comportements agressifs à son endroit :

[extrait de la transcription de l’entrevue omis]

4. Mme [J.S.] a décrit l’expérience comme étant « horrible » et s’est dite « terrifiée », principalement parce qu’elle tombait du camion en mouvement. Mme [J.S.] a ajouté que le véhicule était un camion F150 assez haut du sol, qu’il roulait un peu vers l’avant et que « la moitié de son corps pendait du camion » au moment où il s’est mis à avancer.

5. Mme [J.S.] a été blessée physiquement en raison de vos actes de violence et a ressenti de la douleur et de l’inconfort le lendemain :

[extrait de la transcription de l’entrevue omis]

Allégation 3

Le 28 février 2016 ou vers cette date, à North Battleford et à Cochin ou dans les environs, dans la province de la Saskatchewan, le gendarme Trevor Sowers n’a pas veillé à ce que l’équipement et les biens fournis par l’État soient utilisés ou transportés de façon sécuritaire et autorisée, en contravention à l’article 4.6 du Code de déontologie de la Gendarmerie royale du Canada.

Énoncé détaillé

1. Vous avez passé la fin de semaine en Alberta pour rendre visite à vos enfants issus de votre première union et vous avez demandé à Mme [J.S.] de vous rencontrer à North Battleford avec tous vos [TRADUCTION] « trucs de police » puisque vous deviez travailler le lundi. Mme [J.S.] a accepté votre demande et a rassemblé tout ce dont vous auriez besoin pour travailler [TRADUCTION] : « Comme, son ceinturon de service, son arme et ses vêtements de police » et a tout mis dans un « bac Rubbermaid ».

2. Dans les « trucs de police » que Mme [J.S.] a transportés de Saskatoon à North Battleford – conformément à vos instructions – se trouvait votre pistolet réglementaire semi-automatique Smith & Wesson de 9 mm (« pistolet réglementaire ») fourni par la GRC. Mme [J.S.] a décrit la façon dont elle a transporté votre pistolet réglementaire et votre équipement de police dans un bac Rubbermaid comme suit :

[extrait de la transcription de l’entrevue omis]

3. Votre pistolet réglementaire est une arme à feu prohibée au sens du [paragraphe] 84(1) du Code criminel. Le Code criminel a établi des infractions précises visant à gérer la nature intrinsèquement dangereuse d’une arme à feu prohibée. En tant que membre actif de la GRC, on vous confie la possession d’une arme à feu prohibée. Toutefois, comme condition de possession, vous êtes tenu de vous assurer que l’arme à feu est manipulée de façon sécuritaire en tout temps. Vous avez manqué à votre devoir de veiller à ce que votre pistolet réglementaire soit transporté et manipulé de façon sécuritaire en tout temps. Vous avez fait preuve de négligence d’abord en laissant Mme [J.S.] transporter votre pistolet réglementaire dans un bac Rubbermaid, puis en laissant votre pistolet réglementaire sans surveillance dans son véhicule pendant que vous soupiez ensemble au restaurant Portabella.

4. Vos actions atteignent la limite d’écart tolérable par rapport à la norme de diligence d’un agent de police raisonnable dans des circonstances semblables en ce qui a trait au fait que vous avez laissé négligemment Mme [J.S.] être en possession et transporter votre pistolet réglementaire de cette façon.

Allégation 4

Le 11 août 2017 ou vers cette date, à Cochin ou dans les environs, dans la province de la Saskatchewan, le gendarme Trevor Sowers s’est comporté de manière susceptible de jeter un discrédit sur la Gendarmerie, en contravention à l’article 7.1 du Code de déontologie de la Gendarmerie royale du Canada.

Énoncé détaillé

1. Le soir du jeudi 10 août 2017, vous et Mme [J.S.] avez passé du temps avec des amis à leur résidence avant de retourner à votre propre chalet pour la nuit. Vous et Mme [J.S.] avez consommé de l’alcool tout au long de la soirée. Mme [J.S.] a décrit votre niveau d’intoxication et son propre niveau d’intoxication comme suit :

[extrait de la transcription de l’entrevue omis]

2. À votre retour au chalet, vous et Mme [J.S.] vous êtes couchés. Vous avez ensuite tenté d’amorcer une relation sexuelle avec Mme [J.S.] malgré le fait qu’elle vous ait dit à maintes reprises qu’elle ne voulait pas et d’arrêter. Enfant, Mme [J.S.] a été agressée sexuellement par deux cousins et, selon elle, vous [TRADUCTION] « n’avez jamais respecté le fait que j’ai été agressée sexuellement lorsque j’étais jeune ». Vous étiez tout à fait au courant de cette agression sexuelle antérieure que Mme [J.S.] a vécue lorsqu’elle était enfant.

3. Mme [J.S.] a décrit l’agression sexuelle que vous avez commise contre elle de la façon suivante :

[extrait de la transcription de l’entrevue omis]

4. Votre voisine, Mme [S.D.], a entendu la querelle entre vous et appelé le 911 :

[extrait de la transcription de l’entrevue omis]

5. Deux membres de la GRC de North Battleford se sont rendus à votre chalet. Le sergent Neil Tremblay (« Tremblay ») et le gendarme James McMahon (« McMahon »). Vous avez blâmé Mme [J.S.] pour ce qui s’est passé et vous lui avez répété que c’était sa [TRADUCTION] « faute ». Mme [J.S.] a accepté la responsabilité de ce qui s’est passé pour vous éviter des démêlés avec la police. Mme [J.S.] a admis ne pas avoir dit toute la vérité à la police à ce moment-là au sujet de vos actions et de ce qui s’était passé :

[extrait de la transcription de l’entrevue omis]

6. Lorsque le sergent Korczak a effectué une recherche dans le SIRP pour trouver le dossier de présence policière, il a appris qu’il avait déjà été supprimé. Le dossier lui-même a été classé comme une atteinte à l’ordre public et, après deux ans, il a été éliminé du SIRP. Les rapports d’incident du sergent Tremblay et du gendarme McMahon ont tous deux été supprimés après le nettoyage du système.

7. Mme [J.S.] soutient que le sergent Tremblay lui a dit sur les lieux [TRADUCTION] : « […] ne vous inquiétez pas, qu’il le ferait disparaître, et il l’a fait. Personne n’est revenu me voir par la suite ou n’a posé d’autres questions. Et il l’a tout simplement fait disparaître. » Mme [J.S.] a également décrit ses interactions avec la police sur les lieux comme suit :

[extrait de la transcription de l’entrevue omis]

Allégation 5

Entre le 1er avril et le 16 avril 2020, à Corbin et Saskatoon ou dans les environs, dans la province de la Saskatchewan, le gendarme Trevor Sowers s’est comporté d’une manière susceptible de jeter le discrédit sur la Gendarmerie, en contravention à l’article 7.1 du Code de déontologie de la Gendarmerie royale du Canada.

Énoncé détaillé

1. De l’avis de Mme [J.S.], vous éprouviez des difficultés financières qui ont eu une incidence sur votre prise de décisions financières. À titre d’exemple, Mme [J.S.] a déclaré qu’elle savait que vous aviez adhéré à un programme de consolidation de dettes en juin 2019. Mme [J.S.] a reconnu que sa connaissance de votre situation financière était limitée [TRADUCTION] « sauf que je reçois constamment des appels de la part d’agents de recouvrement et de banques parce que nos… beaucoup de nos choses sont séparées ». Au cours des mois de février et de mars 2020, Mme [J.S.] a commencé à informer vos créanciers de la laisser tranquille, car vous ne résidiez plus avec elle, et elle a également commencé à retourner le courrier que vous avez reçu à la résidence de Saskatoon.

2. Après le début de la pandémie de COVID-19, l’un des enfants de Mme [J.S.] avait droit à la Prestation canadienne d’urgence (PCU). En ouvrant le courrier, Mme [J.S.] a par erreur ouvert l’enveloppe d’un chèque de PCU qui vous était adressée, croyant qu’il s’agissait en fait d’un chèque pour son enfant :

[extrait de la transcription de l’entrevue omis]

3. Mme [J.S.] s’inquiétait de la légitimité de votre statut de bénéficiaire de la PCU et a envoyé un courriel à [sergent d’état-major] Pugh pour l’informer que [TRADUCTION] : « Je l’ai retourné au gouvernement, je ne veux pas faire partie de ça. »

4. Le 27 avril 2020, l’inspecteur Tom Beck (« Beck ») vous a rencontré en personne. Vous avez informé l’inspecteur Beck que vous aviez « présenté par inadvertance » une demande de PCU. Vous avez également informé l’inspecteur Beck que vous aviez déclaré faillite en février 2020.

5. Vous n’aviez pas le droit de demander la PCU, car vous n’avez jamais perdu votre emploi à la GRC et avez continué de recevoir votre salaire. Vous n’avez satisfait à aucune des conditions d’admissibilité à la PCU. Vous avez cherché, par la tromperie, le mensonge ou tout autre moyen frauduleux, à frauder le gouvernement du Canada pour obtenir le soutien financier de la PCU.

6. Vos actions frauduleuses, à savoir la présentation d’une demande de PCU à titre de soutien financier alors que vous étiez entièrement inadmissible constituent un abus de confiance.

Allégation 6

Le 20 septembre 2019 ou entre cette date et le 27 octobre 2019, à North Battleford ou dans les environs, dans la Première Nation de Mosquito et dans la Première Nation de Moosomin, toutes deux situées dans la province de la Saskatchewan, l’agent Trevor Sowers a communiqué à tort et sans autorisation des renseignements qu’il a obtenus dans l’exercice de ses fonctions en sa qualité de membre, en contravention à l’article 9.1 du Code de déontologie de la Gendarmerie royale du Canada.

Énoncé détaillé

1. Dans sa déclaration à la [caporale] St. Germaine, Mme [J.S.] a indiqué que vous lui communiquiez fréquemment des renseignements de nature délicate, y compris des « photos » de personnes décédées. Mme [J.S.] n’a pas conservé toutes les photos que vous lui avez envoyées, comme elle l’a dit :

[extrait de la transcription de l’entrevue omis]

2. Mme [J.S.] a reconnu que vous ne devriez pas lui communiquer de l’information de police et vous a quelques fois demandé d’arrêter :

[extrait de la transcription de l’entrevue omis]

3. Mme [J.S.] a déclaré que parfois, vous sembliez simplement « vous vanter ». Mme [J.S.] n’a conservé que les messages de septembre 2019 et les suivants, et a supprimé le reste. Vous envoyiez des renseignements et des photos non autorisés de la police à Mme [J.S.] au moyen de votre téléphone personnel et de votre téléphone de travail :

[extrait de la transcription de l’entrevue omis]

4. Le 20 septembre 2019, le dossier du SIRP 2019-144XXXX a été généré relativement à une affaire de mort subite en application de la Coroner’s Act. Vous étiez en service lorsque vous vous êtes présenté sur les lieux et avez aidé le gendarme Read [numéro du SIGRH] à mener l’enquête. Vous avez rempli un rapport d’incident supplémentaire concernant votre implication avec l’homme décédé. Sans motif ni justification, vous avez communiqué fautivement à Mme [J.S.] une photo du défunt, accompagnée de messages texte.

5. Le 29 septembre 2019, le dossier du SIRP 2019-148XXXX a été généré relativement à une plainte pour vol d’un véhicule utilitaire sport. Vous avez rempli un bref rapport de superviseur qui a été versé au dossier. Sans motif ni justification, vous avez communiqué fautivement à Mme [J.S.] une photo du véhicule volé récupéré accompagnée de messages texte concernant l’enquête.

6. Le 9 octobre 2019, le dossier du SIRP 2019-154XXXX a été généré relativement à une plainte pour conduite dangereuse d’un véhicule à moteur. Vous étiez l’enquêteur principal au dossier et avez rempli un rapport d’incident général détaillé pour le dossier. Sans motif ni justification, vous avez communiqué fautivement à Mme [J.S.] plusieurs photos d’enquête, y compris l’une du suspect et d’une arme à feu, accompagnées de messages texte concernant l’enquête.

7. Le 27 octobre 2019, le dossier du SIRP 2019-164XXXX a été généré relativement à une affaire de mort subite en application de la Coroner’s Act. Vous vous êtes rendu sur les lieux de l’incident et avez aidé le gendarme Genus [numéro du SIGRH] à mener l’enquête. Vous avez rempli un rapport d’incident supplémentaire concernant votre participation à l’enquête, y compris la prise de photos de l’homme décédé. Sans motif ni justification, vous avez communiqué fautivement à Mme [J.S.] plusieurs photos d’enquête, y compris l’une des photos de l’homme décédé, accompagnées de messages texte concernant l’enquête.

8. Le 9 septembre 2020, le sergent Korczak a examiné diverses captures d’écran de photos obtenues de Mme [J.S.] qui n’ont pas par la suite été directement associées à un dossier du SIRP. Sans motif ni justification, vous avez communiqué fautivement à Mme [J.S.] des photos d’enquête accompagnées de messages texte concernant les diverses enquêtes.

[traduit tel que reproduit dans la version anglaise]

[8] Il incombe à l’autorité disciplinaire d’établir l’allégation selon la prépondérance des probabilités. Cela signifie que je dois conclure qu’il est plus probable qu’improbable que le gendarme Sowers ait contrevenu à une disposition du Code de déontologie. L’autorité disciplinaire s’est acquittée de ce fardeau en présentant des éléments de preuve suffisamment clairs, convaincants et pertinents.

CRÉDIBILITÉ DES TÉMOINS

[9] Cinq témoins ont témoigné au cours de l’étape des allégations de la présente instance. Le témoignage de Mme J.S. et du gendarme Sowers constituait la preuve la plus importante, car il porte sur presque tous les faits importants se rapportant aux six allégations. Dans la plupart des cas, leur témoignage sur ces faits importants est contradictoire. Par conséquent, ma décision repose sur ma détermination de la crédibilité et de la fiabilité de ces deux témoins.

[10] La common law a largement traité de l’évaluation de la crédibilité des témoins. Les comités de déontologie de la GRC ont traité cette question de la même façon, conformément à la common law [1] . Je connais les principes généraux qui me guident. Je ne crois pas qu’il soit nécessaire de décrire en détail ces principes. Je me contenterai de dire que l’ensemble de la preuve et le bon sens dictent mes conclusions en l’espèce.

[11] Selon la théorie générale du gendarme Sowers, les allégations de Mme J.S. font partie d’un plan concerté et vindicatif visant à détruire sa réputation et sa carrière. L’avocat du gendarme Sowers suggère qu’un examen de la chronologie des divulgations et des plaintes de Mme J.S. au sujet de la conduite du gendarme Sowers et d’autres démontre qu’elle a largement inventé ou exagéré son témoignage. La position du gendarme Sowers à cet égard est que Mme J.S. n’est pas un témoin crédible. L’autorité disciplinaire s’est opposée à cette preuve au motif qu’il s’agissait d’une tentative de salissage de la réputation de Mme J.S. Le gendarme Sowers est d’avis que la preuve touche la crédibilité de Mme J.S. Je suis d’accord et je trouve la chronologie des événements très instructive, car elle fournit des éléments de preuve considérables à l’appui de la position du gendarme Sowers.

La chronologie des plaintes formulées par Mme J.S. à la GRC

[12] Le rapport d’enquête et les éléments à l’appui comprennent une note d’information de nature délicate datée du 3 février 2020. Le sergent d’état-major Pugh a rédigé le document. Le superviseur Donovan Fisher, chef du district central, a examiné et approuvé le contenu en consultation avec la superviseure Maureen Wilkie, adjointe à l’officier responsable des enquêtes criminelles de la Division F. La note d’information de nature délicate comprend un addenda rédigé par l’inspecteur Beck, lequel contient des renseignements concernant Mme J.S. qu’aucune des parties n’a vérifiés de manière significative au cours de l’audience disciplinaire, sauf s’ils étaient directement liés à l’une des six allégations.

[13] Le 5 janvier 2020, Mme L.S., l’épouse d’un membre du détachement, a communiqué avec le sergent d’état-major Darcy Woolfitt, un superviseur du détachement, au nom de Mme J.S. pour lui faire part des préoccupations de cette dernière au sujet des problèmes de colère du gendarme Sowers et de son bien-être. Mme J.S. aurait communiqué avec d’autres employées du Détachement de North Battleford pour obtenir des renseignements sur les relations de travail du gendarme Sowers.

[14] Le 7 janvier 2020, la gendarme N.L., un membre féminin et collègue du gendarme Sowers, a informé l’inspecteur Beck, l’officier responsable du Détachement de North Battleford, qu’entre le 5 et le 7 janvier 2020, elle a reçu 19 appels d’un numéro de téléphone bloqué. La gendarme N.L. a appris, selon des rumeurs qui circulaient, au sein du détachement que Mme J.S. et Mme A.S., l’épouse d’un autre membre, ont fait ces appels. Mme J.S. soupçonnait apparemment que le gendarme Sowers et la gendarme N.L. avaient une liaison. La prétendue promiscuité de la gendarme N.L. a également fait l’objet d’une conversation sur une page Facebook gérée par Mme A.S. Le détachement a ouvert un dossier de harcèlement criminel. La GRC n’a pas porté d’accusation criminelle contre Mme J.S. Elle a plutôt émis un avertissement écrit et désactivé le laissez-passer de sécurité qu’elle détenait à titre de bénévole des Services aux victimes.

[15] Cette même note d’information de nature délicate indique également que le gendarme Sowers a dit à ses supérieurs de s’attendre à ce que Mme J.S. dépose une plainte de violence familiale contre lui.

[16] Le 14 janvier 2020, Mme K.H., une employée civile de la GRC d’Ottawa, a téléphoné au sergent-major Daryl Milo. Mme K.H. avait été en communication sur Facebook avec Mme J.S., et cette dernière avait soulevé plusieurs préoccupations que Mme K.H. se sentait obligée de transmettre. Voici certaines préoccupations de Mme J.S. :

  • Le gendarme Sowers a vécu dans un chalet sans chauffage ni eau pendant les deux derniers mois.
  • Le gendarme Sowers l’avait agressée.
  • Elle craignait également pour la sécurité de ses enfants.
  • Le gendarme Sowers souffrait du trouble de stress post-traumatique (TSPT).
  • Elle avait communiqué avec le Détachement de North Battleford pour demander qu’on l’appelle, mais personne ne l’a appelée.
  • Elle ne faisait confiance à personne au Détachement de North Battleford.

[17] Le 15 janvier 2020, Mme J.S. s’est entretenue avec le sergent d’état-major Pugh et a divulgué ce qui suit :

  • Le gendarme Sowers et elle vivaient des difficultés dans leur mariage depuis de nombreuses années.
  • Le gendarme Sowers avait d’importants problèmes de colère qu’elle a attribués à un TSPT non diagnostiqué.
  • Le gendarme Sowers n’avait jamais agressé Mme J.S. ou les enfants.
  • Le gendarme Sowers avait d’importants problèmes financiers.
  • Elle avait une vidéo du gendarme Sowers [TRADUCTION] « en panique » dans un véhicule de police en train de lui parler ou de parler à l’un des enfants au téléphone. Un membre du Détachement de North Battleford a enregistré la vidéo et l’a partagée avec plusieurs membres de la GRC.
  • Elle a communiqué avec les Services de santé de la Division F et a été informée qu’ils ne pouvaient rien faire pour aider le gendarme Sowers.

[18] Le 21 janvier 2020, Mme J.S. a présenté sa première déclaration au sergent d’état-major Pugh, dans laquelle elle a divulgué des renseignements concernant les allégations 1 à 4. Elle n’avait jamais divulgué cette information à qui que ce soit occupant un poste d’autorité. Elle a remis sa deuxième déclaration à la caporale Diachuk le 11 mars 2020.

[19] Le 16 avril 2020, Mme J.S. a envoyé un courriel au sergent d’état-major Pugh pour signaler la réception du chèque de la Prestation canadienne d’urgence (PCU) au nom du gendarme Sowers. Ce document a servi de fondement à l’allégation 5.

[20] Le 27 avril 2020, l’inspecteur Beck a donné suite à la plainte de Mme J.S. au sujet des conditions de vie du gendarme Sowers en effectuant une visite impromptue du chalet du gendarme Sowers, avec son consentement. Il a constaté que le chalet était propre et rangé.

[21] Le gendarme Sowers a également déclaré que Mme J.S. avait tenté de [TRADUCTION] « monter un coup afin de le pincer » pour des armes à feu mal entreposées. Malgré de nombreuses demandes pour qu’elle lui remette ses armes à feu pour le sport, elle a refusé, jusqu’à ce qu’un jour elle accepte mystérieusement. Il est allé les chercher. Elle a lui a remis les armes à feu emballées dans une couverture. Il était conscient qu’il devait ranger les armes à feu conformément à la loi, alors il a acheté une unité de rangement convenable en rentrant chez lui. Mme J.S. a plus tard appelé le détachement pour signaler que le gendarme Sowers avait mal rangé des armes à feu. Cela s’est produit avant le 27 avril 2020, car l’inspecteur Beck a indiqué dans son rapport que les armes à feu du gendarme Sowers étaient bien rangées lorsqu’il a inspecté le chalet.

[22] Mme J.S. a également signalé le gendarme Sowers pour un emploi secondaire non autorisé et la conduite d’une remorque utilitaire non immatriculée.

[23] Le 29 avril 2020, Mme J.S. a envoyé un courriel au sergent d’état-major Pugh. C’est ce qui a motivé l’allégation 6.

[24] Le 29 avril 2020 également, le gendarme Sowers a communiqué avec le Détachement de North Battleford pour signaler une introduction par effraction. Je n’ai pas beaucoup d’information sur cet incident, mais le gendarme Sowers a déclaré que deux de ses beaux-enfants sont entrés par effraction dans son chalet pour en retirer des biens. En raison de sa séparation d’avec Mme J.S., le chalet était sa résidence permanente. Selon le gendarme Sowers, les enfants de Mme J.S. croyaient qu’il avait une petite amie. Il a cité sa belle-fille qui a dit [TRADUCTION] : « Cette salope ne prendra pas nos affaires ». Elle a ensuite commencé à charger des biens dans des sacs. Pendant que le gendarme Sowers était au téléphone pour signaler l’introduction par effraction, Mme J.S. a composé le 911 pour signaler que ses enfants étaient en danger. Des policiers se sont rendus sur les lieux et ont mené une enquête. Aucune accusation au criminel n’a été portée.

[25] Le 30 avril 2020, Mme J.S. a envoyé un long courriel au ministre de la Sécurité publique, M. Blair, et à la commissaire de la GRC, Mme Lucki, dans lequel elle exposait sa version de toute cette affaire. Elle a présenté l’information comme s’il s’agissait de faits, alors qu’une grande partie de l’information était manifestement fausse.

[26] Le 18 mai 2020, Mme J.S. a fait sa troisième et dernière déclaration à la caporale St. Germaine et au sergent Hansen. En plus d’ajouter de nouveaux faits au sujet d’incidents déjà signalés, elle a déposé d’autres plaintes au sujet du gendarme Sowers. Les plaintes suivantes ont été examinées et jugées sans fondement ou ne justifiant pas la tenue d’une enquête officielle :

  • Le gendarme Sowers n’a pas remboursé une remorque qu’ils avaient achetée.
  • Mme J.S. recevait des appels de créanciers parce que le gendarme Sowers ne faisait pas les versements nécessaires pour payer le chalet.
  • Le téléphone cellulaire personnel du gendarme Sowers avait été coupé, de sorte qu’il se connectait par un « hot spot » ou un point d’accès sur son téléphone cellulaire de travail.
  • L’agent Sowers causait intentionnellement des frais pour provision insuffisante dans leur compte conjoint.

[27] Mme J.S. s’est également plainte d’autres personnes qui semblaient lui nuire ou qui n’avaient pas coopéré avec elle.

[28] M. T.S., le frère jumeau du gendarme Sowers, a déclaré qu’après qu’il ait déposé un affidavit devant le tribunal de la famille à l’appui du gendarme Sowers, Mme J.S. a déposé trois plaintes contre lui auprès de son employeur, le bureau du shérif de l’Alberta. Le bureau du shérif a enquêté sur les trois plaintes et les a jugées non fondées.

[29] Mme J.S. s’est plainte du sergent Tremblay et du gendarme McMahon. Elle a laissé entendre qu’ils avaient tenté de camoufler la plainte formulée dans l’allégation 4 parce qu’un collègue de la GRC était impliqué et que leur enquête était inadéquate. Elle a déposé cette plainte plusieurs années après l’incident d’août 2017 survenu dans leur chalet.

[30] Elle s’est plainte également que les membres qui sont intervenus dans le cade de la plainte d’introduction par effraction à la résidence du gendarme Sowers le 29 avril 2020 ont mené une enquête inadéquate.

[31] Dans le courriel qu’elle a envoyé au ministre de la Sécurité publique et à la commissaire de la GRC, elle s’est plainte de ce qui suit :

  • Les Services de santé de la Division F l’ont traitée comme un « yo-yo ».
  • Un opérateur des télécommunications a porté atteinte à sa vie privée et l’a mise en danger lorsqu’elle a appelé pour parler à l’inspecteur Beck.
  • Le personnel du bureau du Détachement de North Battleford l’a diffamée.
  • Une agente de la GRC l’a faussement accusée de harcèlement criminel.
  • Elle a communiqué avec un membre du personnel du Programme de soutien social aux victimes de stress opérationnel qui, au lieu de l’aider, a contribué à la rupture du mariage et donc, au départ du gendarme Sowers.
  • Ce membre du personnel l’a aussi réprimandée, a mis sa famille en danger et a enfreint les règles de confidentialité.

Mes conclusions sur la crédibilité des témoins

[32] Le gendarme Sowers était un témoin crédible. Il s’est qualifié de « chien battu » à plusieurs reprises au cours de l’audience disciplinaire. C’est ainsi qu’il s’est présenté lors de son témoignage. Parfois, il semblait vraiment déconcerté par les allégations. Néanmoins, il a été cohérent dans son témoignage tout au long du processus. Dans tous les aspects de la présente instance, son témoignage concorde mieux avec l’ensemble de la preuve.

[33] Le témoignage de Mme J.S. comporte des éléments de vérité; toutefois, je ne la trouve pas crédible dans aucun des aspects importants de la présente affaire. Je souscris à la position du gendarme Sowers selon laquelle les allégations de Mme J.S. s’inscrivent dans un plan concerté et vindicatif visant à détruire sa réputation et sa carrière. Comme l’a déclaré l’avocat du gendarme Sowers, Mme J.S. voulait que ses plaintes, en particulier le courriel envoyé au ministre de la Sécurité publique et à la commissaire de la GRC, causent le plus de dommages possible au gendarme Sowers. Il est absurde de penser que ses actes sont nés d’un souci pour son bien-être, comme le prétend Mme J.S. Compte tenu de ma conclusion, j’estime que je dois soupeser attentivement l’ensemble du témoignage de Mme J.S. de concert avec tous les autres éléments de preuve. Comme je vais le démontrer relativement aux allégations, une grande partie de son témoignage n’est pas corroboré, est contredit par des éléments de preuve indépendante ou est tout simplement détaché de la réalité.

FAITS QUI SOUS-TENDENT TOUTES LES ALLÉGATIONS

[34] L’Avis d’audience disciplinaire énumère 10 énoncés détaillés communs à toutes les allégations. Les énoncés détaillés 4 et 5 sont des aspects importants de toute cette affaire. L’énoncé détaillé 4 précise que le mariage a été marqué de troubles familiaux et que le gendarme Sowers a été violent psychologiquement et verbalement contre Mme J.S. et ses enfants issus d’une union précédente. Quant à l’énoncé détaillé 5, il indique le gendarme Sowers a menacé Mme [J.S.] d’avoir des ennuis et de la quitter si jamais elle parlait de la violence conjugale à qui que ce soit. Le gendarme Sowers et Mme J.S. ont des perspectives très différentes sur ces deux énoncés détaillés. Ces perspectives divergentes sont un bon point de départ.

Les éléments de preuve

[35] Mme J.S. a livré le témoignage suivant. Le gendarme Sowers était son meilleur ami, l’amour de sa vie et son partenaire de voyage. Il était aimant et bon. Son mariage avec le gendarme Sowers comportait de multiples facettes et émotions. D’un côté, elle était fière de ce qu’il faisait pour gagner sa vie. De l’autre côté, elle avait peur de ce à quoi il pourrait être confronté au travail ou de ce que son comportement serait à son retour à la maison.

[36] Au début du mariage, tout était fantastique; cependant, en 2014, elle a commencé à soupçonner qu’il avait une liaison avec une technicienne médicale d’urgence. C’était un moment décisif de leur mariage. Le gendarme Sowers a commencé à perdre le contrôle et la violence familiale a commencé à s’aggraver. Elle a attribué le changement de comportement du gendarme Sowers à son TSPT non diagnostiqué. Tous ses efforts, y compris les plaintes au sujet de sa conduite, visaient à assurer son bien-être et à lui fournir l’aide dont il avait besoin.

[37] Mme J.S. souffre d’un trouble de l’anxiété accompagné de crises occasionnelles. Elle et le gendarme Sowers ont participé à des séances de counselling familial pendant cinq ans au cours de leur mariage. On ne sait pas à quelles autres séances de counselling elle a assisté, le cas échéant.

[38] En contre-interrogatoire, Mme J.S. a admis avoir vérifié le téléphone du gendarme Sowers et avoir fait des suppressions.

[39] Le gendarme Sowers a livré le témoignage suivant. Lorsqu’il fréquentait Mme J.S., elle avait l’air d’une personne douce, gentille et bienveillante. Elle [TRADUCTION] « est devenue enceinte tout de suite ». Mme J.S. était une femme pieuse, alors elle a voulu se marier peu après.

[40] Immédiatement après leur mariage, l’anxiété de Mme J.S. a émergé et a complètement changé leur relation. Pour maîtriser son anxiété, elle a insisté pour savoir où il se trouvait en tout temps. Au début, il n’avait qu’à « se signaler » toutes les deux heures. Avec le temps, les choses ont empiré. S’il ne répondait pas à ses messages texte, elle lui téléphonait à répétition jusqu’à ce qu’il réponde. Il devait lui envoyer des photos pour prouver où il se trouvait. Avant de quitter le mariage en novembre 2019, il recevait jusqu’à 1 500 messages texte de sa part par jour.

[41] Mme J.S. l’accusait quotidiennement d’infidélité. En 2014, Mme J.S. soupçonnait qu’il avait une liaison avec une technicienne médicale d’urgence de la région. Il a catégoriquement nié avoir autre chose qu’une amitié avec la technicienne médicale d’urgence et sa fiancée. Cette amitié s’est développée dans le cadre de son travail bien avant qu’il ne rencontre Mme J.S. Mme J.S. a prétendu avoir une preuve de la liaison en 2015, mais elle ne l’a jamais fournie.

[42] Les soupçons de Mme J.S. à l’égard de son infidélité ont continué de s’intensifier. Elle l’a forcé à rompre les liens avec quiconque ne faisait pas partie de son cercle d’amis. Elle ne lui permettait pas de quitter la maison pendant ses jours de congé ou d’avoir un mot de passe sur son téléphone cellulaire. Mme J.S. estimait qu’elle pouvait regarder son téléphone quand elle le voulait, ce qu’elle faisait. Il se couchait après un quart de nuit; à son réveil, il la trouvait en train de fouiller dans son téléphone. Souvent, elle supprimait des numéros de téléphone de ses collègues féminines de ses contacts. Après sa mutation à North Battleford, Mme J.S. l’a accusé d’avoir eu une liaison avec une collègue.

[43] Mme J.S. a dit qu’il était violent et contrôlant. Il a nié cela et a dit que la personne violente et contrôlante dans la relation c’était Mme J.S. Elle criait constamment après lui. Elle l’a accusé d’avoir menti en le frappant à la poitrine avec ses poings [TRADUCTION] « comme un gorille ». Il craignait qu’elle le signale pour voies de fait. Pour éviter de telles accusations, il levait les bras en l’air, comme s’il renonçait. Il craignait tellement ces accusations qu’il a commencé à enregistrer leurs interactions sur son téléphone cellulaire. En août 2019, elle a supprimé toute une conversation qu’il avait enregistrée.

[44] Il a quitté le mariage à quatre reprises en 2019, et son dernier départ a eu lieu en novembre 2019. Il a dit qu’il se sentait comme un chien battu. Il est resté dans le mariage parce qu’il craignait de ne plus revoir leur fille s’il partait. Mme J.S. a demandé la garde exclusive de leur fille peu après son départ. Ses accusations contre lui ont commencé peu après.

Mes conclusions

[45] Voici mes conclusions de fait se rapportant à l’ensemble des six allégations.

[46] À toutes les dates pertinentes, le gendarme Sowers était membre de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) affecté à la Division F. Il a obtenu son diplôme de la Division Dépôt et est devenu membre de la GRC. Il est arrivé à sa première affectation, au Détachement de Humbolt, le 21 juin 2010.

[47] Le gendarme Sowers a déjà été marié. Il a deux enfants issus de ce mariage. Ces enfants vivent avec leur mère en Alberta.

[48] Mme J.S. a également été mariée deux fois auparavant. Elle a trois enfants issus de ces mariages. Ces enfants vivaient avec elle et, plus tard, avec le gendarme Sowers.

[49] Le gendarme Sowers et Mme J.S. se sont rencontrés et ont commencé à correspondre sur un site de rencontres en juin 2012. Leur première rencontre en personne a eu lieu en juillet 2012. Leur relation s’est poursuivie à partir de là. Mme J.S. est devenue enceinte au début de la relation. Leur fille, l’unique enfant issue de leur relation, est née en juin 2013. Le gendarme Sowers et Mme J.S. se sont mariés le 13 octobre 2013. Leur mariage n’était pas empreint de « bonheur conjugal ».

[50] Mme J.S. a défini la relation du couple de plusieurs façons. Elle souffrait d’anxiété. Elle suivait un traitement et une thérapie pour cette anxiété et les crises de panique qu’elle faisait. J’accepte l’affirmation du gendarme Sowers selon laquelle, immédiatement après leur mariage, l’anxiété de Mme J.S. a [TRADUCTION] « commencé à se manifester ». Leur relation a donc beaucoup changé. Elle était aussi obsédée par la fidélité du gendarme Sowers dans leur mariage. Afin de maîtriser son anxiété, Mme J.S. devait connaître les allées et venues du gendarme Sowers en tout temps.

[51] Elle a justifié le comportement du gendarme Sowers dans le mariage, qu’elle a déclaré être violent verbalement et psychologiquement, en insistant sur le fait que le gendarme Sowers souffrait de TSPT. Deux psychologues ont évalué le gendarme Sowers à la demande des Services de santé de la Division F. Ni l’un ni l’autre n’a diagnostiqué un TSPT chez lui. Malgré cela, Mme J.S. a persisté à croire que le gendarme Sowers souffrait de TSPT.

[52] Mme J.S. a démontré qu’elle exerçait un contrôle sur le mariage par leur mode de vie. Le gendarme Sowers lui a dit qu’il devait maintenir une résidence [TRADUCTION] « dans la région de son affectation ». Néanmoins, Mme J.S. a conservé la maison familiale à Saskatoon tout au long de leur mariage. Bien qu’il ait été affecté au Détachement de Humbolt, le gendarme Sowers s’est départi de sa résidence permanente après que Mme J.S. et lui se sont mariés. Par la suite, il a trouvé des endroits où loger, là où c’était possible, lorsqu’il faisait un bloc de quarts de travail. Il gardait des maisons de membres en leur absence, ou dormait simplement sur le canapé chez des membres. Il avait aussi un oreiller et une couverture au détachement, où il dormait souvent sur le canapé du bureau des Services d’aide aux victimes.

[53] En 2014, Mme J.S. soupçonnait que le gendarme Sowers avait une liaison avec une technicienne médicale d’urgence de la région. Elle a affirmé avoir reçu la confirmation de cette liaison à un moment donné en 2015. Je n’ai entendu aucun témoignage confirmant qu’il avait eu une liaison à quelque moment que ce soit pendant leur mariage.

[54] En juin 2015, le gendarme Sowers a été muté au Détachement de North Battleford. Au début, il est resté dans une caravane achetée par Mme J.S. et lui-même. Ils ont fini par acheter un chalet près de Cochin, un village touristique situé à l’intérieur des limites du Détachement de North Battleford. C’est devenu la résidence temporaire du gendarme Sowers pendant son quart de travail à North Battleford et sa résidence permanente en novembre 2019.

[55] Les conditions de vie temporaires à Humbolt et à North Battleford ont entraîné des séparations fréquentes entre le gendarme Sowers et sa famille. Ces séparations ont exacerbé l’obsession de Mme J.S. au sujet de sa fidélité. Les soupçons de Mme J.S. ont mené à des arguments, dont l’un fait l’objet de l’allégation 1.

[56] Le gendarme Sowers et Mme J.S. se sont officiellement séparés le 10 novembre 2019. Ils ont depuis intenté des poursuites devant le tribunal de la famille de la Saskatchewan. Mme J.S. a soumis ses premières allégations à la GRC peu après avoir demandé la garde exclusive de leur fille devant le tribunal de la famille.

[57] Je n’ai aucun doute que le gendarme Sowers était frustré et stressé par ce qui semblait être une situation conjugale insupportable. Ses frustrations se sont peut-être manifestées par des débordements émotifs. Je ne trouve aucune preuve démontrant que le gendarme Sowers a été violent sur le plan psychologique ou verbal à l’égard de Mme J.S. ou de ses enfants, et je n’estime pas non plus qu’il ait dit à Mme J.S. que, si elle parlait à quelqu’un de la violence conjugale, elle aurait des ennuis et qu’il la quitterait.

ANALYSE

[58] Quatre des six allégations relèvent de l’article 7.1 du Code de déontologie. Pour établir une allégation de contravention à l’article 7.1 du Code de déontologie, l’autorité disciplinaire doit établir, selon la prépondérance des probabilités, chacun des éléments suivants :

  1. les actes qui constituent le comportement présumé;
  2. l’identité du membre;
  3. le fait que le comportement du membre est susceptible de jeter le discrédit sur la GRC;
  4. la question de savoir si le comportement est suffisamment lié aux devoirs et fonctions du membre pour donner à la GRC un intérêt légitime à le discipliner.

[59] En ce qui concerne les deuxième et quatrième éléments, le gendarme Sowers a concédé que l’autorité disciplinaire a établi, selon la prépondérance des probabilités, son identité et que les comportements énoncés dans les allégations se rapportent suffisamment à ses fonctions pour donner à la Gendarmerie un intérêt légitime à lui imposer des mesures disciplinaires pour les six allégations.

Allégation 1 – Voies de fait contre Mme J.S.

[60] L’allégation 1 relève de l’article 7.1 du Code de déontologie et la période visée va du 1er au 30 juin 2014. Selon l’énoncé détaillé, il est soutenu qu’à une occasion à l’intérieur de la période précisée, le gendarme Sowers a agressé Mme J.S. en lui saisissant le bras.

Les éléments de preuve

[61] Mme J.S. a livré le témoignage suivant. Elle et le gendarme Sowers se disputaient intensément au sujet de ses soupçons d’infidélité et de la mère du gendarme Sowers. Le gendarme Sowers l’a agrippée par le bras avec une force telle qu’il lui a laissé des ecchymoses. Elle a pris des photos des ecchymoses ce soir-là; probablement après que le gendarme Sowers est parti au travail. C’était la seule occasion où il a utilisé la force physique contre elle pendant leur relation. Comme elle ne savait pas quoi faire au sujet de l’incident, elle s’est tournée vers M. T.S., le frère jumeau de gendarme Sowers. Elle avait déjà parlé à M. T.S. de l’escalade de la violence psychologique et verbale du gendarme Sowers. Elle lui a envoyé les photographies des ecchymoses.

[62] M. T.S. a déclaré qu’il se rappelait avoir reçu des photographies de Mme J.S. Les photos montraient le haut du bras ou de la cuisse. Elles montraient des marques qui n’étaient pas très claires. Il ne se souvenait pas de ce que Mme J.S. a dit au sujet des marques. Il n’a plus accès aux photographies et aux messages texte correspondants parce que le téléphone cellulaire sur lequel il les a reçues était endommagé.

[63] Le gendarme Sowers a catégoriquement nié avoir agressé Mme J.S. à quelque moment que ce soit pendant leur mariage. Il a dit que les querelles étaient fréquentes. Il n’y avait rien de particulièrement marquant à propos de cette dispute dont il se souvienne. Cependant, il a empêché Mme J.S. de se faire mal alors qu’elle faisait une crise d’anxiété. Dans ces cas, il l’attrapait habituellement par les poignets.

Mes conclusions

[64] La crédibilité de Mme J.S. me préoccupe beaucoup. Son témoignage n’est pas corroboré.

[65] En outre, Mme J.S. n’a pas mentionné la présence de son fils adulte lors de cet incident avant sa troisième déclaration. Lorsqu’on lui a demandé de s’expliquer en contre-interrogatoire, elle a dit qu’on lui avait dit de donner le plus de détails possible dans cette déclaration. Or, rien dans les documents n’indique que tel était le cas. La présence d’un témoin tiers est un fait important, qui n’est pas facilement oublié ou omis, même par un profane. Les enquêteurs n’ont pas interrogé le fils adulte. Même s’il n’a peut-être pas été témoin de la présumée agression, il aurait pu fournir des renseignements sur le contexte de la querelle ou sur ce que le gendarme Sowers et Mme J.S. ont dit au cours de celle-ci; s’il était effectivement présent.

[66] Les photographies prises par Mme J.S. ne fournissent aucune preuve de voies de fait, encore moins de cette présumée agression. Elles représentent simplement ce qui semble être une légère ecchymose sur un bras. Les marques auraient pu être causées par n’importe quoi à n’importe quel moment. Mme J.S. affirme qu’elle a pris les photos le soir de l’agression, après que le gendarme Sowers s’est rendu au travail. Les ecchymoses sont de couleur violet clair. Bien que je ne sois pas un expert médical, la couleur des bleus me porte à croire qu’ils ont plus de quelques heures, peut-être plus de quelques jours.

[67] Elle n’a pas signalé cette agression au service de police de Saskatoon, au service de police compétent ou à la GRC, à titre d’employeur du gendarme Sowers. Elle n’a divulgué l’incident au sergent d’état-major Pugh qu’en janvier 2020, près de six ans après avoir déclaré qu’il s’était produit. Le moment du signalement est suspect. J’estime que le long retard dans le signalement n’est pas attribuable au fait qu’elle était une épouse maltraitée; cela fait simplement partie de son plan de détruire le gendarme Sowers.

[68] Compte tenu de ce qui précède, je conclus que l’autorité disciplinaire n’a pas établi, selon la prépondérance des probabilités, le premier élément du critère de conduite déshonorante, soit les gestes qui constituent le présumé comportement. Ainsi, je conclus que l’allégation 1 n’est pas fondée.

Allégations 2 et 3 – Voies de fait contre Mme J.S. et transport et entreposage inadéquats du pistolet réglementaire

[69] Les allégations 2 et 3 ont trait au même incident qui s’est produit le 28 février 2016. L’allégation 2 relève de l’article 7.1 du Code de déontologie. Selon l’énoncé détaillé, il est soutenu que le gendarme Sowers a mis Mme J.S. en danger et qu’il l’a agressée. L’allégation 3 relève de l’article 4.6 du Code de déontologie. Selon l’énoncé détaillé, il est soutenu que le gendarme Sowers a fait preuve de négligence lorsqu’il a permis à Mme J.S. d’être en possession de son pistolet réglementaire et de le transporter.

Les éléments de preuve

[70] Mme J.S. a livré le témoignage suivant. Le gendarme Sowers est allé en Alberta pour la fin de semaine afin de rendre visite à sa famille. Il devait travailler le lundi matin. Le gendarme Sowers lui a demandé d’apporter son uniforme et d’autres éléments d’équipement à North Battleford. Il avait besoin de ces articles pour son prochain quart de travail. Elle transportait souvent son uniforme et son équipement pour lui dans ces circonstances. En contre-interrogatoire, elle a dit que le plan initial était que le gendarme Sowers retourne à Saskatoon pour récupérer son uniforme et son équipement.

[71] Le gendarme Sowers rangeait son uniforme et son ceinturon de service sur un [TRADUCTION] « support à couvertures » dans le placard de leur chambre à coucher. Sur son ceinturon de service, il y avait son pistolet réglementaire, ses menottes, un vaporisateur de poivre et les chargeurs supplémentaires. Il retirait habituellement le chargeur de son pistolet réglementaire. Le gendarme Sowers apportait parfois un pistolet Taser à la maison, mais pas cette fois.

[72] Ils ont accepté de se rencontrer pour souper à North Battleford. Elle allait passer la nuit à leur chalet. Mme J.S. a placé l’équipement dans un grand bac Rubbermaid et l’a placé sur le siège avant de sa camionnette, un Ford F150 à cabine double. Elle s’est rendue en voiture au restaurant de North Battleford.

[73] Pendant le souper, le gendarme Sowers l’a accusée de l’avoir empêché de se rendre en Alberta pour voir sa famille et faire la fête avec son cousin. La dispute s’est intensifiée, mais pas au point où les gens les regardaient. Elle a décidé qu’elle ne resterait pas la nuit et a quitté le restaurant. Elle est montée dans son véhicule et s’est mise à rouler vers Saskatoon. Elle s’est rendu compte qu’elle avait encore l’uniforme et l’équipement du gendarme Sowers avec elle.

[74] Le gendarme Sowers conduisait de façon erratique en la suivant de près. Il l’a aussi appelée à répétition au téléphone. Quand elle a répondu, il criait après elle et la traitait de noms. Il voulait son uniforme et son équipement. Elle a proposé qu’ils se rendent au chalet pour en parler et y passer la nuit. Elle s’est dirigée vers le chalet.

[75] Le trajet entre North Battleford et le chalet est d’environ 30 kilomètres et dure de 15 à 20 minutes. Le gendarme Sowers a continué de conduire de façon erratique et imprudente. À une occasion, il s’est approché de la voiture de Mme J.S. Il a également continué de l’appeler au téléphone. Encore une fois, elle ne répondait pas toujours, mais quand elle répondait, il criait. Il était hors de contrôle. Elle avait peur.

[76] Elle a manqué le virage vers le chalet. Ça lui arrivait assez souvent. Elle a décidé de continuer un peu, passé l’entrée, et de faire demi-tour. Elle a lentement fait demi-tour. Le gendarme Sowers l’a rejoint face à face et a placé son véhicule en angle pour l’immobiliser, dans ce qu’elle a décrit comme une tactique policière. Elle a dû arrêter rapidement son véhicule pour éviter une collision.

[77] Le gendarme Sowers a quitté son véhicule et s’est approché du côté conducteur du camion. Il est arrivé là si rapidement qu’elle n’a pas eu l’occasion de mettre son véhicule à la position « P ». Il a ouvert la porte du camion et a essayé de la tirer hors du chemin pour atteindre le bac Rubbermaid. Elle est tombée du camion, mais s’est accrochée au volant. Elle a tenté de mettre son pied sur le frein parce que le camion s’est mis à rouler. Le gendarme Sowers criait après elle. Il l’a traitée de noms et lui a dit qu’elle était folle. Elle lui a dit à plusieurs reprises d’arrêter parce que la situation était hors de contrôle. Elle lui a dit qu’il lui faisait mal. Le gendarme Sowers a pris le bac Rubbermaid, est retourné à son véhicule et a quitté les lieux. Elle a mis le véhicule à la position P. Elle pleurait. C’était la chose la plus effrayante qui lui soit arrivée dans sa vie. C’était tellement effrayant qu’elle continue d’en faire des cauchemars.

[78] Elle a appelé M. T.S. pour lui dire ce qui s’était passé. Après lui avoir parlé, elle s’est rendue en voiture au chalet parce qu’elle croyait que le gendarme Sowers s’y était rendu. Il n’était pas là, alors elle a attendu. Elle pensait qu’il se calmait les esprits et qu’il reviendrait éventuellement. Il n’est pas revenu. Elle savait qu’il ne retournerait pas à Saskatoon, alors elle a décidé de le chercher à North Battleford.

[79] Elle a trouvé le véhicule du gendarme Sowers stationné derrière un motel. Il était dans l’une des chambres. Il pleurait et ne voulait pas parler de l’incident. Elle a passé la nuit. Il lui a dit de se taire. Elle savait que si elle en parlait à quelqu’un, il aurait des ennuis. Elle craignait de perdre son mari.

[80] Le gendarme Sowers a déclaré qu’il n’était pas allé en Alberta pour la fin de semaine. Il était plutôt chez lui à Saskatoon. Lui et Mme J.S. ont décidé d’aller au chalet ensemble. C’est quelque chose qu’ils faisaient régulièrement. Mme J.S. n’a pas permis au gendarme Sowers d’y aller seul, parce qu’elle soupçonnait son infidélité.

[81] Au lieu de laisser son uniforme et son équipement à North Battleford, il l’a ramené chez lui pour s’assurer qu’il était propre et prêt pour ses prochains quarts de travail. Il a laissé son pistolet réglementaire au bureau, comme l’exigeait l’officier responsable du détachement. Il ramenait son pistolet réglementaire chez lui lorsqu’il avait des tâches liées au travail à Saskatoon, comme se rendre au centre de détention provisoire ou mener une entrevue. Il avait un casier à armes à feu pour ses fusils de chasse. Il était dans la chambre. Lorsqu’il a ramené son ceinturon de service à la maison, il a mis sous clé [TRADUCTION] « tout ce qui pouvait blesser quelqu’un ». Cela comprenait ses outils d’intervention. Ses menottes et sa lampe de poche sont restées sur son ceinturon de service, qu’il a accroché au [TRADUCTION] « support à couvertures ». Mme J.S. n’avait pas de clé pour le casier à armes à feu. Il a caché les clés parce qu’elle avait déjà menacé de se faire du mal et qu’il la sentait capable de lui faire du mal. Il a aussi verrouillé son pistolet réglementaire à cause de sa jeune fille, mais il était plus préoccupé par les adolescents dans la maison. Il n’a jamais apporté de Taser à la maison. Ils n’étaient pas remis aux membres. Il devait signer pour en avoir un au début d’un quart de travail et le retourner à la fin du quart.

[82] Il a mis son uniforme et son autre trousse dans un panier en plastique. Lui et Mme J.S. se sont rendus à North Battleford dans des véhicules distincts. Elle devait retourner à Saskatoon tôt le matin parce qu’elle devait travailler, tout comme lui. Son quart de travail a commencé à 6 ou 7 h.

[83] Ils sont allés dans un restaurant à North Battleford. Ils se sont querellés. Il ne se rappelait pas de quoi il s’agissait, car ils se disputaient toujours. Il a décidé de partir et d’aller au chalet, ce qu’il a fait. Mme J.S. l’a suivi. La dispute s’est poursuivie à l’extérieur du chalet. Il avait le panier avec son uniforme et son équipement dans les mains. Mme J.S. l’a frappé à la poitrine et l’a [TRADUCTION] « cuisiné » sans relâche. Il voulait tout simplement s’éloigner d’elle. Mme J.S. a saisi le panier et l’a mis dans son véhicule derrière le siège du conducteur. Il n’a pas essayé de l’empêcher de prendre le panier pour éviter une confrontation. Elle est partie sur l’autoroute. Il l’a suivie dans son véhicule. La limite de vitesse sur la route de gravier de 500 mètres menant à l’autoroute était de 20 kilomètres à l’heure. Il a appelé Mme J.S. à plusieurs reprises et l’a implorée d’arrêter. Il était contrarié et frustré parce qu’il ne voulait pas retourner jusqu’à Saskatoon.

[84] Mme J.S. a embarqué sur l’autoroute et s’est arrêtée sur l’accotement. Il s’est rangé derrière elle. Il s’est rendu au camion et a ouvert la porte du conducteur. La porte était déverrouillée parce que le véhicule était immobilisé à la position « P ». Mme J.S. portait sa ceinture de sécurité. Il devait ouvrir la porte du conducteur pour accéder à la poignée de la porte arrière. C’était une porte inversée qui s’ouvrait vers l’arrière du camion. Il n’a rien dit pendant qu’il récupérait son uniforme et son équipement. Il est retourné à son véhicule et s’est rendu à North Battleford. Il ne voulait plus se quereller. Il voulait simplement s’enfuir et se cacher. Il a loué une chambre à l’arrière d’un motel. Il était assis sur le lit après s’être enregistré lorsque Mme J.S. a frappé à la porte. Elle l’a aussi appelé au téléphone. Il l’a laissée entrer pour éviter de causer une scène. Il s’est couché sur le lit et n’a rien dit. Elle s’est aussi couchée. Ils sont restés là jusqu’au matin.

Mes conclusions

[85] Les témoignages du gendarme Sowers et de Mme J.S. sont tout à fait insolites et invraisemblables. Aucune de ces histoires n’est sans faille. Je n’ai trouvé aucune preuve à l’appui de leurs affirmations. Cependant, je vois plusieurs problèmes importants dans la version des événements de Mme J.S.

[86] Premièrement, aucun des deux arrangements que Mme J.S. a proposés ne me semble logique si le gendarme Sowers est allé en Alberta, comme elle l’a dit. C’était à la fin de février dans les Prairies. Tout peut arriver avec les conditions météorologiques. Je ne sais pas où le gendarme Sowers se serait rendu en Alberta, mais je suis certain que ce n’était pas au sud. North Battleford est à une heure et demie de route de Saskatoon, sur la route Yellowhead, qui se rend jusqu’à Edmonton. Son retour à Saskatoon pour ramasser son uniforme et son équipement aurait ajouté trois heures à son voyage. Il s’agissait aussi d’un voyage aller-retour de trois heures pour Mme J.S. L’option la plus logique aurait été que le gendarme Sowers prenne son uniforme avec lui et le dépose en route vers North Battleford. Même si passer la nuit avec son mari était raisonnable, faire un voyage aller-retour de trois heures simplement pour lui apporter son uniforme ne l’est pas, dans les circonstances.

[87] Deuxièmement, Mme J.S. a dit que, lorsqu’elle a quitté le restaurant pour retourner à Saskatoon, elle est partie par inadvertance avec l’uniforme et l’équipement du gendarme Sowers dans le grand bac Rubbermaid. Elle a dit que la boîte se trouvait à côté d’elle dans le véhicule. Par conséquent, elle n’aurait pas pu le manquer lorsqu’elle est entrée dans le véhicule.

[88] Troisièmement, le gendarme Sowers lui a téléphoné à de nombreuses reprises tout en la suivant de près derrière elle et en conduisant de façon erratique. Elle a finalement répondu au téléphone. Elle était terrifiée parce que c’était l’événement le plus effrayant de sa vie. Le gendarme Sowers voulait son uniforme et son équipement. Pourquoi ne pas simplement s’arrêter et le lui donner; le [TRADUCTION] « cauchemar » se serait terminé là. Au lieu de cela, elle offre de se rendre au chalet, à 30 kilomètres en voiture, pour [TRADUCTION] « en parler ». De plus, si elle acceptait de donner au gendarme Sowers son uniforme et son équipement au chalet et qu’elle allait dans cette direction, pourquoi continuerait-il à la poursuivre dangereusement, tout en criant après elle au téléphone?

[89] Quatrièmement, lorsqu’elle est arrivée au chalet, elle a manqué un virage sur le chemin qu’elle a probablement emprunté des centaines de fois. Le gendarme Sowers l’a ensuite coupée en faisant une [TRADUCTION] « tactique policière d’immobilisation », risquant ainsi de faire une collision et d’endommager leurs deux véhicules au milieu de nulle part.

[90] Cinquièmement, lorsque le gendarme Sowers a arrêté Mme J.S., il est arrivé à son véhicule et a ouvert la porte du conducteur si rapidement qu’elle n’a pas eu l’occasion de mettre le véhicule en position « P ». Pendant le contre-interrogatoire, l’avocat du gendarme Sowers l’a interrogée au sujet de la porte déverrouillée alors que le véhicule était encore embrayé. Elle a répondu que le gendarme Sowers avait déverrouillé la porte en entrant un code sur le clavier.

[91] Le gendarme Sowers a déclaré qu’il ne connaissait pas le code par cœur parce qu’il s’agissait du véhicule de Mme J.S. Même s’il le savait, il aurait dû mettre son véhicule à la position « P », retirer sa ceinture de sécurité et sortir du véhicule. Selon la façon dont il l’aurait arrêtée, la porte du conducteur du véhicule du gendarme Sowers aurait dû être en face de la porte du conducteur du véhicule de Mme J.S., donc soit il a couru entre les deux véhicules, soit il a couru derrière l’un d’eux pour se rendre à la porte du conducteur du véhicule de Mme J.S. L’entrée du code au clavier aurait ajouté du temps à ce processus, de sorte que le gendarme Sowers n’aurait pas pu ouvrir la porte du conducteur du véhicule de Mme J.S. trop rapidement, avec ou sans avoir à entrer le code. Cela m’amène au problème suivant.

[92] Pourquoi le gendarme Sowers est-il allé à la porte du véhicule de Mme J.S.? Le bac Rubbermaid n’allait pas être dans le siège du conducteur; Mme J.S. était là. Elle devait se trouver du côté passager du siège avant ou dans le compartiment arrière. Pourquoi ne pas aller du côté passager; du côté le plus proche de lui lorsqu’il a quitté son véhicule? S’il s’était rendu du côté passager du véhicule, il aurait évité de toucher Mme J.S. pour récupérer la boîte.

[93] Le gendarme Sowers a également déclaré que Mme J.S. s’asseyait habituellement avec son siège ramené très près du volant. C’est logique, étant donné la taille du véhicule. Compte tenu de ce fait, le gendarme Sowers a-t-il pu atteindre le banc de l’autre côté de Mme J.S., même après l’avoir dégagée du chemin, ou bien est-ce que la boîte se trouvait sur le siège arrière, comme l’a dit le gendarme Sowers? Comme la porte arrière était une porte inversée, il aurait fallu que le gendarme Sowers ouvre la porte du conducteur pour accéder au siège arrière.

[94] Mme J.S. a convenu en contre-interrogatoire que si elle portait sa ceinture de sécurité, il lui aurait été impossible de tomber du véhicule comme elle l’a dit. C’est logique.

[95] Mme J.S. dit qu’elle a téléphoné à M. T.S. après le départ du gendarme Sowers. M. T.S. a confirmé qu’elle lui a téléphoné; cependant, cela ne favorise pas une version des événements par rapport à l’autre parce ce fait ne s’inscrit dans ni l’une ni l’autre des versions.

[96] Enfin, Mme J.S. a déclaré que lorsqu’elle a manqué le virage vers le chalet, elle a parcouru une courte distance sur la route pour faire demi-tour. Après avoir fait demi-tour, elle a roulé un certain temps vers le chalet et c’est à ce moment que le gendarme Sowers l’aurait arrêtée. Elle ne pouvait pas être si loin du virage vers le chalet; pourtant, elle a dit qu’elle pensait que le gendarme Sowers s’était rendu au chalet et qu’elle s’y était rendue aussi pour finalement constater qu’il n’était pas là. Je dois poser la question suivante : [TRADUCTION] « Comment n’a-t-elle pas vu que le gendarme Sowers n’a pas tourné pour se rendre au chalet, alors qu’il a poursuivi sa route devant elle? »

[97] Comme pour les autres allégations, Mme J.S. n’a signalé cet incident à personne en position d’autorité jusqu’à ce qu’elle fournisse sa déclaration au sergent d’état-major Pugh en janvier 2020. La raison pour laquelle le signalement a été retardé était qu’elle ne voulait pas perdre son mari. Je n’accepte pas cette explication. Le moment de la divulgation correspond à ses efforts pour détruire le gendarme Sowers.

[98] À tous égards, la version du gendarme Sowers me semble bien plus logique. La seule chose qui me préoccupait, c’était de savoir comment ou pourquoi il a permis à Mme J.S. de lui prendre le bac ou le panier en plastique. Je reconnais qu’il voulait simplement éviter une confrontation physique. J’ai déduit de son témoignage qu’il était prêt à faire le trajet jusqu’à Saskatoon pour le récupérer, si c’est ce qu’il fallait faire pour éviter une accusation de voies de fait.

[99] Compte tenu de ce qui précède, je conclus que l’autorité disciplinaire n’a pas établi, selon la prépondérance des probabilités, que le gendarme Sowers a mis Mme J.S. en danger ou l’a agressée. Le premier élément du critère de conduite déshonorante, les gestes qui constituent le comportement présumé, n’a pas été satisfait. Ainsi, je conclus que l’allégation 2 n’est pas fondée.

[100] En ce qui concerne l’allégation 3, l’énoncé détaillé 3 indique clairement les obligations du gendarme Sowers à l’égard de son pistolet réglementaire. Il s’agit d’une obligation permanente, mais l’allégation ne se rapporte pas à la fin de semaine complète où le gendarme Sowers aurait laissé le pistolet réglementaire sans le mettre dans un endroit verrouillé, alors que Mme J.S. et les cinq enfants avaient un accès exclusif à la maison. L’allégation concerne simplement la possession et le transport du pistolet réglementaire par Mme J.S. le dimanche 28 février 2016.

[101] Le fait de laisser le pistolet réglementaire dans un endroit non verrouillé, de la façon dont Mme J.S. l’a affirmé, n’a pas non plus de sens pour plusieurs raisons. Premièrement, l’officier responsable du Détachement de North Battleford a interdit aux membres du détachement d’apporter leur pistolet réglementaire à la maison. Malgré cette directive, le gendarme Sowers n’avait aucune raison de rapporter son pistolet réglementaire à la maison s’il devait partir pour la fin de semaine. Je doute fort qu’il ait ramené le pistolet réglementaire à la maison, mais s’il l’a fait, il avait un casier à armes à feu dans le placard, juste à côté de l’endroit où Mme J.S. a dit qu’il avait suspendu le ceinturon de service non sécurisé, qui contenait le pistolet. Cela n’a aucun sens qu’il ne l’ait pas mis sous clé.

[102] Le gendarme Sowers a déclaré que Mme J.S. n’avait pas de clé pour le casier à armes à feu. En contre-interrogatoire, elle a insisté sur le fait qu’elle avait une clé, même si elle avait dit aux enquêteurs le 18 mai 2020 qu’elle n’en avait pas. Encore une fois, sa version des faits ne coïncide pas avec la preuve.

[103] Compte tenu de ce qui précède, je conclus également que l’autorité disciplinaire n’a pas établi, selon la prépondérance des probabilités, que le gendarme Sowers a permis à Mme J.S. d’être en possession de son pistolet réglementaire et de le transporter. Ainsi, je conclus que l’allégation 3 n’est pas fondée.

Allégation 4 – Agression sexuelle de Mme J.S.

[104] L’allégation 4 relève de l’article 7.1 du Code de déontologie et concerne un incident qui s’est produit au chalet des Sowers au petit matin, le 11 août 2017. L’autorité disciplinaire allègue que le gendarme Sowers a agressé sexuellement Mme J.S.

Les éléments de preuve

[105] Mme J.S. a livré le témoignage suivant. Le gendarme Sowers était en état d’ébriété lorsqu’ils sont retournés dans leur chalet après avoir rendu visite à des amis dans le secteur. Elle a bu beaucoup moins que lui ce soir-là. À leur retour au chalet, ils se sont engagés dans des préliminaires et ont décidé de se coucher. Le gendarme Sowers était nu. Elle portait encore sa petite culotte.

[106] Un membre de sa famille l’a agressée sexuellement alors qu’elle était enfant. Elle avait dit au gendarme Sowers que, par conséquent, elle n’aimait pas qu’il mette sa main sous sa culotte et qu’il insère ses doigts dans son vagin. Néanmoins, il l’a fait à plusieurs reprises pendant leur mariage. Il l’a fait ce soir-là. Elle s’est fâchée et a éclaté en sanglots, alors elle est sortie du lit. Le gendarme Sowers est devenu furieux et a commencé à crier après elle. Ses cris ont provoqué chez elle une crise d’anxiété. Il était si contrarié qu’il a frappé le mur et fait un trou à l’arrière de la porte de la chambre. Elle s’est finalement calmée et ils sont retournés au lit. Peu après, leur fille est entrée dans la chambre à coucher et leur a dit que la police était à la porte. Le gendarme Sowers est allé leur parler. Elle est restée au lit, avec seulement sa petite culotte.

[107] Le gendarme McMahon, qu’elle connaissait du détachement, est entré dans la chambre à coucher pour lui parler. Il a quitté brièvement la chambre pendant qu’elle enfilait sa robe de chambre. À son retour, elle lui a dit que le gendarme Sowers l’avait touchée sexuellement d’une façon qui l’avait rendue anxieuse. Elle n’a pas donné de précisions. Bien qu’elle n’ait pas utilisé les mots « agression sexuelle », elle lui a dit que le gendarme Sowers l’avait touchée d’une manière qu’elle ne voulait pas. Le gendarme McMahon a insisté pour qu’elle lui dise d’où lui venait cette marque au visage et que, si elle ne le lui disait pas, il serait obligé d’arrêter le gendarme Sowers. Elle lui a dit qu’elle s’était blessée pendant sa crise d’anxiété.

[108] Le gendarme Tremblay est entré dans la pièce. Il lui a assuré que l’incident ne serait pas connu de tous au détachement. Il allait rendre le dossier confidentiel. Elle ne devait pas s’inquiéter parce qu’il ferait disparaître le dossier.

[109] Ni le gendarme Tremblay ni le gendarme McMahon ne lui ont dit qui avait appelé la police, mais il n’était pas difficile de comprendre que c’était leur voisine, Mme S.D. Le lendemain, elle a envoyé à Mme S.D. un message texte dans lequel elle tentait de camoufler ou de minimiser l’incident.

[110] Personne de la GRC n’a fait de suivi auprès d’elle après cette soirée. Elle ne s’est pas rendu compte qu’elle avait été agressée sexuellement avant de fournir sa déclaration au sergent d’état-major Pugh en janvier 2020. Elle a fourni plus de détails dans des déclarations subséquentes parce que son entrevue avec le sergent d’état-major Pugh l’a prise au dépourvu. Elle pensait qu’elle allait lui parler du TSPT de l’agent Sowers.

[111] En contre-interrogatoire, Mme J.S. a convenu que le gendarme Sowers avait indiqué dans un affidavit déposé au tribunal de la famille que son oncle l’avait agressée sexuellement lorsqu’elle était enfant. Elle a confirmé que ce n’était pas son oncle, mais un autre membre de sa famille qui l’avait agressée sexuellement.

[112] Le gendarme Sowers a livré le témoignage suivant. Il a consommé de l’alcool ce soir-là, mais il n’était pas en état d’ébriété. Lorsque lui et Mme J.S. sont retournés au chalet, les enfants dormaient. Ils ont eu des relations sexuelles consensuelles, et à ce moment, Mme J.S. a eu une crise d’anxiété soudaine. Elle était [TRADUCTION] « en panique ». Elle a pris une lampe et l’a lancée. Il a replacé la lampe avant l’arrivée de la police. Elle s’est roulée en boule et a commencé à s’arracher les cheveux et à se frapper au visage. Elle avait régulièrement des crises d’anxiété ou de panique. Ses actions de cette nuit-là étaient typiques de ces attaques.

[113] Il lui a crié de s’arrêter. Quand elle s’est calmée, il a entendu frapper à la porte. Il a répondu. Il a laissé le sergent Tremblay et le gendarme McMahon entrer dans le chalet et a dirigé le gendarme McMahon vers la chambre à coucher pour parler à Mme J.S. Il est resté dans la pièce principale avec le sergent Tremblay.

[114] Il savait qu’un ou des membres de la famille de Mme J.S. l’avaient agressée sexuellement lorsqu’elle était enfant. Il croyait que c’était un oncle. Elle ne lui a jamais dit qu’un doigt inséré dans son vagin déclenchait une crise d’anxiété. Elle ne lui a jamais dit non plus qu’elle n’avait pas consenti à ce qu’il le fasse, que ce soit avant ou le soir de l’incident.

[115] Le gendarme McMahon a livré le témoignage suivant. Il s’est présenté au chalet des Sowers. Lorsqu’il est arrivé vers 4 h 43, le gendarme Sowers l’a rencontré à la porte et l’a invité à entrer dans le chalet. Il connaissait un peu le gendarme Sowers en raison de son travail au détachement.

[116] Comme il s’agissait d’un conflit familial, il cherchait précisément des éléments de preuve pertinents. Il n’a rien vu qui l’aurait alerté qu’un conflit familial avait eu lieu. Il a vu plusieurs enfants dormir dans la pièce principale du chalet. Le gendarme Sowers l’a dirigé vers la chambre où il a parlé avec Mme J.S., qui avait l’air contrariée. Ses yeux étaient gonflés. Son visage était rouge autour des yeux. De toute évidence, elle avait pleuré. Il s’est informé à ce sujet. Au départ, Mme J.S. ne s’est pas montrée coopérative, mais elle a fini par s’ouvrir. Elle lui a dit que le gendarme Sowers avait tenté d’amorcer des relations sexuelles avec elle. Elle a eu une mauvaise réaction en raison d’un traumatisme passé. Elle souffrait d’anxiété et de dépression. Elle a [TRADUCTION] « serré ses poings » et s’est frappée au visage. Elle a pleuré et s’est mise en boule pour se protéger. Elle a démontré ces choses pour lui. Le gendarme Sowers essayait de l’empêcher de se frapper. Il lui criait de s’arrêter.

[117] Elle l’a convaincu que rien de criminel ne s’était produit. Il a continué de la calmer. Il a expliqué le processus de verrouillage d’un dossier. Il lui a dit que personne au bureau, à part l’inspecteur, ne serait au courant de l’appel. Il s’est entretenu avec le sergent Tremblay, qui ne lui a fourni aucun autre renseignement qui l’aurait amené à croire qu’une infraction criminelle avait été commise.

[118] De l’avis du gendarme McMahon, le gendarme Sowers et Mme J.S. ne montraient aucun signe d’intoxication. Il n’a constaté aucun dommage sur la porte de la chambre. Il ne s’est pas rendu chez Mme S.D. pour obtenir une déclaration, bien qu’il ait pu lui téléphoner au moment où ils quittaient le secteur. D’après ce qu’il a appris au cours de l’enquête, il a catégorisé l’appel comme une plainte pour bruit. Il a préparé son rapport d’incident dans Word plutôt que dans le SIRP en raison du verrouillage du dossier. Il n’a pas fait de suivi auprès de Mme J.S. en sa capacité de policier. Il l’a peut-être fait dans un message texte personnel destiné à la fois au gendarme Sowers et à Mme J.S.

[119] Mme S.D., la voisine qui a déposé la plainte en composant le 911, n’a pas témoigné. Sa déclaration figure dans le rapport d’enquête. Aucune des parties n’a contesté le contenu de la déclaration. J’en tire les conclusions suivantes.

[120] Vers 3 h 30, elle a entendu des cris en provenance du chalet des Sowers. Cela l’a incitée à composer le 911. Plus précisément, elle a entendu ceci :

  • L’agent Sowers criait. Elle l’a notamment entendu dire « arrête de frapper ta câlice de tête » et « arrête de te frapper le visage » ou des mots en ce sens.
  • Mme J.S. pleurait.
  • Une jeune fille, peut-être la fille des Sowers, qui pleurait et criait « Arrêtez de vous battre ».

[121] À la suite de l’incident, elle a reçu un message texte de Mme J.S. Le message texte visait principalement à l’informer que Mme J.S. était mécontente parce qu’elle avait appelé la police. Le message texte se trouve dans le rapport d’enquête. Il contient essentiellement les mêmes renseignements que ceux que Mme J.S. a fournis au gendarme McMahon.

Mes conclusions

[122] La preuve n’appuie pas la version des faits de Mme J.S. En général, la preuve indique que tout pouvait déclencher les crises d’anxiété de Mme J.S. Selon Mme J.S., ce sont les cris du gendarme Sowers à son endroit qui ont déclenché la crise d’anxiété à cette occasion, et non l’acte sexuel non consensuel présumé. Le témoignage de Mme S.D. appuie la version des faits du gendarme Sowers en ce qui concerne ce qu’elle l’a entendu crier.

[123] Bien que Mme J.S. ait dit au gendarme McMahon que le gendarme Sowers avait fait quelque chose de sexuel qui a déclenché son attaque de panique, elle n’a dit ni au sergent Tremblay ni au gendarme McMahon que ce qu’il avait fait était non consensuel. Mme J.S. a répété la même information dans son message texte à Mme S.D. Elle n’a pas divulgué l’absence de consentement avant sa déclaration au sergent d’état-major Pugh en janvier 2020, près de deux ans et demi après l’incident. Je n’accepte pas la raison du report de signalement, à savoir qu’elle ne s’est pas rendu compte avant janvier 2020 qu’elle avait été agressée sexuellement.

[124] L’erreur dans l’affidavit du gendarme Sowers pour le tribunal de la famille peut sembler insignifiante, mais elle ajoute de la crédibilité à son affirmation selon laquelle il n’en savait que très peu sur l’agression sexuelle subie par Mme J.S. pendant son enfance. Cela ajoute également de la crédibilité à son allégation selon laquelle Mme J.S. ne lui a jamais dit que le fait d’insérer un doigt dans son vagin avait déclenché ses crises d’anxiété et qu’elle lui avait dit de ne pas le faire.

[125] Mme J.S. a rompu tous les liens avec Mme S.D. dans son message texte après l’incident lorsqu’elle a dit à Mme S.D. qu’elle ne pourrait plus jamais être en sa présence. Fait intéressant, Mme J.S. a communiqué de façon proactive avec Mme S.D. en janvier 2020, juste avant de fournir sa déclaration au sergent d’état-major Pugh. Bien que Mme J.S. ait déclaré que le but premier du contact renouvelé était de rétablir la relation pour le bien de sa fille, elle a commencé par dire à Mme S.D. qu’elle et le gendarme Sowers s’étaient séparés parce qu’il la maltraitait.

[126] Enfin, Mme J.S. ne s’est pas plainte de la tentative du sergent Tremblay et du gendarme McMahon de camoufler l’incident et de le faire disparaître ni de la pertinence de leur enquête jusqu’en janvier 2020. Elle a laissé entendre que si les membres avaient effectué un suivi approprié et l’avaient interviewée sans la présence du gendarme Sowers, elle aurait divulgué l’aspect non consensuel de l’incident. Cela contredit son affirmation selon laquelle elle n’a pas réalisé avant janvier 2020 que le gendarme Sowers l’avait agressée sexuellement.

[127] Encore une fois, le moment du dépôt de la plainte est suspect. Je conclus que les actions du sergent Tremblay et du gendarme McMahon étaient raisonnables dans les circonstances. D’après les renseignements que Mme J.S. leur a fournis ce soir-là et les autres éléments de preuve qu’ils ont recueillis, l’appel était, comme le gendarme McMahon l’a catégorisé, essentiellement une plainte pour bruit. La « notation » du dossier comme une atteinte à l’ordre public et la suppression correspondante du dossier dans les deux ans suivant l’incident étaient raisonnables. Leur façon de gérer la [TRADUCTION] « paperasse » était également raisonnable. La plainte concernait un membre du détachement et sa famille. Il n’était pas nécessaire que tout le bureau soit mis au courant. Mme J.S. était heureuse à l’époque qu’ils ne le sachent pas. Le fait de classer le dossier dans la liste de contrôle d’accès (LCA) [2] , était un moyen approprié de le traiter. Les membres ont traité le dossier conformément à la politique et ne l’ont pas fait disparaître, comme Mme J.S. l’a laissé entendre.

[128] Compte tenu de ce qui précède, je conclus que l’autorité disciplinaire n’a pas établi, selon la prépondérance des probabilités, que le gendarme Sowers a agressé sexuellement Mme J.S. et que, par conséquent, il n’a pas établi que le premier élément du critère de conduite déshonorante, soit les gestes qui constituent le comportement présumé, est satisfait. Ainsi, je conclus que l’allégation 4 n’est pas fondée.

Allégation 5 – Demande de PCU frauduleuse

[129] L’allégation 5 relève de l’article 7.1 du Code de déontologie. L’énoncé détaillé allègue que le gendarme Sowers a demandé frauduleusement une aide financière sous la forme de la PCU alors qu’il n’y avait pas droit. L’autorité disciplinaire soutient qu’il s’agit d’un abus de confiance.

Les éléments de preuve

[130] Mme J.S. a témoigné de ce qui suit. Malgré leur séparation, elle a continué de recevoir le courrier du gendarme Sowers au domicile familial de Saskatoon. Vers Noël 2019, elle a commencé à retourner le courrier du gendarme Sowers à l’expéditeur. En avril 2020, sa fille attendait un chèque de PCU. C’était aussi le temps de la TPS, alors la famille recevait beaucoup de courrier du gouvernement. Elle a ramassé le courrier avec une de ses filles. Elles sont restées dans la voiture dans le stationnement de l’épicerie et Mme J.S. a demandé à sa fille d’ouvrir le courrier. Elle a trouvé un chèque du gouvernement adressé au gendarme Sowers. Elle était bouleversée. Avant de sceller de nouveau l’enveloppe, elle a photographié le chèque et a envoyé la photo au sergent d’état-major Pugh. Elle a retourné le chèque au gouvernement.

[131] Le gendarme Sowers a témoigné de ce qui suit. Un collègue du Détachement de North Battleford a suggéré qu’il se renseigne sur l’admissibilité aux prestations de la PCU. Il a suivi le conseil du membre et a appelé le numéro sans frais pour parler à un représentant du gouvernement afin de déterminer s’il était admissible à une aide financière par l’entremise de la PCU. Au lieu de parler à une personne, il a écouté un message vocal automatisé.

[132] Le 27 avril 2020, il a rencontré l’inspecteur Beck. Au cours de la rencontre, il a dit à l’inspecteur Beck qu’il avait demandé par inadvertance la PCU. Il a essayé d’interrompre les paiements futurs, mais il n’a pas pu le faire parce qu’il n’arrivait qu’à joindre le système automatisé.

[133] En avril 2020, il avait des comptes bancaires distincts de ceux de Mme J.S. ou d’autres comptes familiaux. Il avait aussi sa propre adresse postale à North Battleford parce que c’était son adresse permanente à l’époque.

[134] En contre-interrogatoire, il a déclaré avoir produit sa déclaration de revenus de 2018 avec son adresse de Saskatoon. Il n’a pas produit personnellement sa déclaration de revenus de 2019. BDO Dunwoody a produit sa déclaration de revenus en même temps que sa faillite. Il ne connaissait pas l’adresse qu’ils avaient fournie pour lui.

[135] À ma demande, l’autorité disciplinaire a obtenu cinq versions du message vocal automatisé utilisé par l’Agence du revenu du Canada pour fournir aux appelants des renseignements sur l’admissibilité à la PCU et le processus de demande. Ce sont les seules versions du message automatisé. Bien qu’il ne soit pas possible de déterminer lequel de ces messages le gendarme Sowers a entendu, les cinq versions ont des éléments communs qui sont pertinents à cette allégation. En voici quelques-uns :

  • L’obligation pour l’appelant d’entrer son numéro d’assurance sociale.
  • Une déclaration indiquant que le paiement pourrait être effectué par dépôt direct si l’appelant est admissible.
  • Pour recevoir le paiement par dépôt direct, l’appelant devait confirmer son identité en entrant sa date de naissance.
  • Une déclaration indiquant que le paiement pourrait être effectué par chèque si l’appelant est admissible.
  • Pour recevoir le paiement par chèque, l’appelant devait confirmer les derniers caractères de son code postal.
  • L’obligation de confirmer ce qui suit pour recevoir un paiement :
    • L’appelant résidait au Canada.
    • L’appelant a cessé de travailler pour des raisons liées à la COVID-19 pendant au moins 14 jours consécutifs au cours de la période de quatre semaines pour laquelle la demande est présentée.
    • L’appelant n’avait pas quitté son emploi volontairement.
    • L’appelant n’avait pas fait de demande de PCU ni reçu de PCU ou de prestation d’assurance-emploi pour la même période d’admissibilité.
    • L’appelant a gagné un minimum de 5 000 $ dans les 12 mois précédant la période de demande.
  • L’obligation de certifier que les renseignements fournis étaient exacts et une reconnaissance du fait qu’une fausse déclaration constitue une infraction criminelle.

[136] Les éléments suivants ressortent clairement des facteurs communs des messages automatisés :

  1. L’appelant était au courant des critères d’admissibilité à la PCU.
  2. L’appelant a été informé que le fait de faire une fausse déclaration constitue une infraction criminelle.
  3. Pour recevoir un chèque de PCU, l’appelant devait fournir son numéro d’assurance sociale et confirmer son code postal.

[137] Le gendarme Sowers a été contre-interrogé au sujet des cinq messages automatisés. Il ne pouvait pas dire quel message il avait entendu. Il ne se souvenait pas beaucoup du contenu du message qu’il avait entendu.

Mes conclusions

[138] Au début de 2020, le gendarme Sowers a éprouvé des difficultés financières. Il a déclaré faillite en février 2020.

[139] En mars ou en avril 2020, le gouvernement canadien a annoncé le programme de PCU. Peu importe la version, les critères d’admissibilité à la PCU sont clairement énoncés dans le message vocal automatisé. Le gendarme Sowers a écouté le message et aurait dû raisonnablement comprendre les critères d’admissibilité.

[140] Le 15 avril 2020, le gouvernement du Canada a émis un chèque de PCU de 2 000 $ au nom de Trevor Sowers. L’adresse sur le chèque est celle de la maison familiale des Sowers à Saskatoon.

[141] Bien qu’il ait été suspendu avec solde, le gendarme Sowers était membre de la GRC le 15 avril 2020. À cette époque, il n’était pas admissible à la PCU. Le fait que le gouvernement ait émis un chèque de PCU en son nom ne prouve pas, dans les circonstances, qu’il a demandé la PCU, par inadvertance ou autrement.

[142] Les cinq messages vocaux montrent que toute personne qui connaît le numéro d’assurance sociale d’une personne et qui peut confirmer son code postal peut demander la PCU au nom de cette personne. Selon sa déclaration de revenus, son adresse à l’Agence du revenu du Canada était la maison familiale à Saskatoon. Le bon sens me dit que si le gendarme Sowers avait l’intention de recevoir la PCU, il ferait déposer le paiement directement dans son compte bancaire personnel ou il ferait envoyer un chèque à son adresse de North Battleford. Il savait que Mme J.S. retournait son courrier depuis plus de quatre mois. Le fait que le chèque ait été émis à l’adresse de Saskatoon n’a aucun sens parce qu’il était peu susceptible de le recevoir.

[143] De plus, Mme J.S. avait déjà déposé de nombreuses plaintes à la GRC au sujet de sa conduite. Elle savait qu’il travaillait toujours pour la GRC et qu’il n’était donc pas admissible à la PCU. Si elle recevait le chèque et qu’elle se rendait compte qu’il s’agissait d’un paiement de la PCU, il risquait de faire l’objet d’une autre plainte.

[144] Même si j’admets qu’il a présenté la demande, la seule preuve dont je dispose est qu’il l’a peut-être fait par inadvertance. Il n’a pas reçu d’autres chèques de PCU.

[145] Compte tenu de ce qui précède, je conclus que l’autorité disciplinaire n’a pas établi, selon la prépondérance des probabilités, que le gendarme Sowers a présenté une demande de PCU, et encore moins qu’il l’a fait de façon frauduleuse; par conséquent, l’autorité disciplinaire n’a pas satisfait au premier élément du critère de conduite déshonorante, à savoir les gestes qui constituent le comportement présumé. Ainsi, je conclus que l’allégation 5 n’est pas fondée.

Allégation 6 – Communication illicite et non autorisée de renseignements obtenus dans l’exercice de ses fonctions

[146] L’allégation 6 relève de l’article 9.1 du Code de déontologie. Selon l’énoncé détaillé, il est soutenu qu’entre le 20 septembre et le 27 octobre 2019, le gendarme Sowers a communiqué à Mme J.S., fautivement et sans autorisation, des renseignements qu’il a obtenus dans l’exercice de ses fonctions.

Les éléments de preuve

[147] Mme J.S. a témoigné de ce qui suit. Tout au long de leur mariage, le gendarme Sowers a envoyé des messages texte et des photos [TRADUCTION] « au sujet de ce qui se passait au travail, ou même de sa chasse, ou de l’endroit où il se trouvait ». Ils échangeaient plusieurs messages texte chaque jour. Ces échanges se sont aggravés vers la fin de leur mariage. Parfois, le gendarme Sowers disait [TRADUCTION] « Regarde où je suis » et « se vantait un peu de ce qu’il faisait ». D’autres fois, le matériel était plus explicite. Elle voyait bien qu’il était [TRADUCTION] « certainement bouleversé par ce qui se passait ». À l’occasion, le gendarme Sowers a envoyé des photographies en raison de son anxiété et de ses préoccupations liées à l’infidélité. Elle a souvent sollicité les photographies, mais elle a dit au gendarme Sowers de cesser d’envoyer les plus sanglantes.

[148] Le gendarme Sowers a témoigné de ce qui suit. Il a souvent partagé des photographies liées au travail avec Mme J.S. parce qu’il devait lui montrer ses allées et venues en tout temps étant donné qu’elle soupçonnait son infidélité. Il ne se souvenait pas des circonstances entourant chaque photo. Des échanges de textes accompagnaient chaque photo. Il croyait que Mme J.S. avait une autorisation de sécurité valide en raison de son travail bénévole auprès des Services d’aide aux victimes.

[149] M. T.S. a déclaré qu’il recevait lui aussi d’innombrables messages texte et appels téléphoniques de Mme J.S. chaque jour. Ces messages portaient sur le comportement abusif de plus en plus fréquent du gendarme Sowers. Mme J.S. l’a informé qu’elle exigeait de connaître les allées et venues du gendarme Sowers et qu’il lui envoie ses messages texte en réponse. Lorsque le gendarme Sowers lui a rendu visite en Alberta, il a fourni à Mme J.S. des mises à jour [TRADUCTION] « minute par minute » sur ce qu’il faisait. Ces mises à jour comprenaient souvent des photographies pour montrer ce qu’il faisait. Le gendarme Sowers semblait frustré par cette exigence.

[150] Les documents que Mme J.S. a fournis au sergent d’état-major Pugh ne comprennent pas tout l’échange de textes relatifs aux photographies en question. Certains comprennent seulement la photographie, tandis que d’autres comprennent une partie des messages texte entourant l’envoi des photographies.

Mes conclusions

[151] Le paragraphe 9.1 du Code de déontologie se lit comme suit :

Les membres accèdent aux renseignements qu’ils obtiennent à ce titre, les utilisent et les communiquent uniquement aux fins de l’exercice de leurs fonctions et respectent tous les serments auxquels ils sont assujettis en tant que membres.

[152] Les membres de la GRC prêtent trois serments lorsqu’ils sont assermentés à la GRC. L’un de ces serments est le Serment du secret [3] . Le Serment du secret est libellé comme suit :

Je, {nom du membre}, je jure (ou j’affirme solennellement) que je ne révélerai ni ne communiquerai, sans y avoir été dûment autorisé(e), à quiconque n’y a pas légitimement droit ce qui est parvenu à ma connaissance ou les renseignements que j’ai obtenus dans le cadre des fonctions que j’exerce en vertu de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada [4] .

[153] Les parties des messages texte déposés en preuve démontrent que Mme J.S. a participé à part entière aux échanges de textes entourant les photographies des quatre dossiers mentionnés. Certaines des photographies représentent des personnes décédées. Ces photos sont peut-être considérées comme sanglantes, mais je ne vois pas que Mme J.S. a dit au gendarme Sowers de ne pas les envoyer ou de ne pas en envoyer d’autres de ce type.

[154] Mme J.S. contrôlait ce qu’elle fournissait à la GRC. Ce qu’elle a fourni est commode parce que ça n’indique pas si elle a amorcé les conversations. Rien n’indique que les gestionnaires ou les enquêteurs de la GRC lui ont demandé d’en fournir davantage, malgré des lacunes ou des omissions flagrantes dans la documentation. Par conséquent, je ne comprends pas entièrement ce qui s’est passé. C’est regrettable.

[155] Le gendarme Sowers a obtenu dans l’exercice de ses fonctions les connaissances ou les renseignements envoyés à Mme J.S. Mme J.S. n’avait légalement droit à aucun des renseignements qui lui avaient été fournis. Il n’avait aucune raison opérationnelle ni autorité pour envoyer l’information à Mme J.S. Bien que je comprenne la raison pour laquelle le gendarme Sowers a envoyé les photographies et les messages texte liés au travail à Mme J.S., il aurait pu trouver un autre moyen de fournir la preuve de ses allées et venues sans communiquer des renseignements liés à ses fonctions.

[156] Compte tenu de ce qui précède, je conclus que l’autorité disciplinaire a établi l’allégation 6 selon la prépondérance des probabilités.

Conclusion sur les allégations

[157] D’après l’analyse qui précède, l’autorité disciplinaire a établi l’allégation 6 selon la prépondérance des probabilités. L’autorité disciplinaire n’a pas établi les allégations 1 à 5.

MESURES DISCIPLINAIRES

[158] Ayant conclu qu’une allégation est établie, je suis tenu, en application du paragraphe 45(4) de la Loi sur la GRC, d’imposer au moins une des mesures disciplinaires qui y sont énoncées. Ces mesures disciplinaires comprennent le congédiement, l’ordre de démissionner ou l’imposition « [d’]une ou [de] plusieurs mesures disciplinaires prévues dans les règles ». Les mesures disciplinaires « prévues dans les règles » se trouvent aux articles 3 (mesures disciplinaires simples), 4 (mesures disciplinaires correctives) et 5 (mesures disciplinaires graves) des Consignes du commissaire (déontologie), DORS/2014-291 [CC (déontologie)].

Proposition conjointe quant aux mesures disciplinaires

[159] Comme je l’ai mentionné précédemment, les parties m’ont présenté une proposition conjointe sur des mesures disciplinaires globales. La proposition conjointe comprenait les mesures disciplinaires suivantes :

  1. une pénalité financière de 8 jours sur la solde du gendarme Sowers;
  2. la réduction de 7 jours dans la banque de congés annuels;
  3. une réprimande.

La common law en matière de propositions conjointes

[160] La Cour suprême du Canada, dans l’arrêt R. c. Anthony-Cook [5] , au paragraphe 25, a reconnu que des propositions conjointes visant des sanctions criminelles ne constituent pas seulement une pratique acceptée et tout à fait souhaitable; elles sont « essentielles au bon fonctionnement de notre système de justice pénale et de notre système de justice en général ». La Cour a ajouté que la plupart de ces ententes n’ont rien « d’exceptionnel » et sont facilement approuvées d’emblée par les juges. Cependant, pour diverses raisons, les juges ne sont pas tenus de donner suite à ces propositions conjointes. Ces notions sont également applicables aux arbitres en matière de déontologie sous le régime disciplinaire de la GRC [6] .

[161] Dans l’arrêt Anthony-Cook, au paragraphe 31, la Cour suprême déclare que le critère à appliquer dans l’examen d’une communication conjointe est le critère de l’« intérêt public ». La question à laquelle il faut répondre consiste à savoir si la peine proposée jetterait le discrédit sur l’administration de la justice ou si elle porterait atteinte à l’intérêt public.

[162] Pour déterminer si une présentation conjointe jettera le discrédit sur l’administration de la justice ou si elle porte atteinte à l’intérêt public, la Cour suprême a déterminé des énoncés prononcés par la Cour d’appel de Terre-Neuve-et-Labrador comme saisissant l’essence du critère de l’« intérêt public ». Les énoncés sont les suivants [TRADUCTION] :

[…] malgré les considérations d’intérêt public qui appuient l’imposition de la peine recommandée, celle-ci « correspondent si peu aux attentes d’une personne raisonnable informée des circonstances de l’affaire que celle-ci estimerait que la proposition [fait échec] au bon fonctionnement du système de justice pénale ». […] [7] [caractères gras ajoutés]

et

[…] les juges de première instance devraient « éviter de rendre une décision qui ferait perdre au public renseigné et raisonnable sa confiance dans l’institution des tribunaux ». […] [8] [caractères gras ajoutés]

[163] Pour appliquer la directive de la Cour suprême à la présente décision, je dois déterminer si la proposition conjointe sur les mesures disciplinaires jettera le discrédit sur l’administration de la justice ou le régime disciplinaire de la GRC ou si elle porte atteinte à l’intérêt public. Pour ce faire, je dois examiner si les mesures disciplinaires proposées correspondent si peu aux attentes d’une personne raisonnable informée des circonstances de l’affaire que celle-ci estimerait que la proposition fait échec au bon fonctionnement du régime disciplinaire de la GRC.

Décision concernant les mesures disciplinaires

[164] Dans le cadre de mon examen, je dois également suivre le cadre d’analyse établi par le Comité externe d’examen de la GRC en vertu de l’ancien régime disciplinaire de la GRC. Ce cadre demeure pertinent dans les instances disciplinaires en vertu de la Loi sur la GRC modifiée. En vertu de ce cadre, je dois déterminer l’éventail des mesures disciplinaires appropriées et passer ensuite en revue les facteurs atténuants et les facteurs aggravants, afin de déterminer les mesures disciplinaires qui conviennent dans le cas en l’espèce. Cette démarche est conforme aux dispositions énoncées au chapitre XII.1.11.15 du Manuel d’administration.

[165] Mon point de départ pour établir les mesures disciplinaires appropriées est le Guide des mesures disciplinaires. Celui-ci contient un éventail de mesures disciplinaires recommandées pour toute infraction au Code de déontologie. Les décisions antérieures prises par les arbitres et les comités de déontologie peuvent aussi aider à la prise de décision.

[166] Le Guide sur les mesures disciplinaires traite spécifiquement de l’article 9.1 du Code de déontologie, qui qualifie une violation de cet article de contravention au Serment du secret. L’éventail de sanctions pour les cas mineurs comprend les mesures disciplinaires simples pouvant aller jusqu’à la confiscation d’une journée de solde. Les facteurs pris en compte dans cet éventail comprennent la communication accidentelle, l’incidence minimale sur les opérations et les renseignements de nature moins délicate. L’éventail de sanctions pour les cas ordinaires prévoit une sanction pécuniaire équivalant à de 2 à 10 jours de solde. L’éventail de sanctions pour les cas graves comprend les cas où l’information est hautement classifiée; des personnes sont à risque; la communication a compromis les enquêtes; l’information est donnée à l’élément criminel ou est fournie pour un gain monétaire. La recommandation dans cet éventail se situe entre une sanction pécuniaire de 11 jours et le congédiement.

[167] Le Guide des mesures disciplinaires indique que la gamme des mesures à prendre en cas de violation de l’article 9.1 du Code de déontologie est plus large que la plupart des autres parce que la gravité de la contravention dépend de divers facteurs, notamment :

  • le type de renseignements communiqués;
  • l’intention du membre derrière la communication;
  • le destinataire des renseignements;
  • l’incidence réelle sur les opérations ou la sécurité publique.

[168] Les énoncés détaillés 4, 5, 6 et 7 de l’allégation 6 font état de quatre cas précis où le gendarme Sowers a communiqué à Mme J.S. des renseignements qu’il a obtenus dans l’exercice de ses fonctions. Les 18 [TRADUCTION] « captures d’écran » dans les documents appuient ces détails. L’énoncé détaillé 8 indique qu’un examen des 18 captures d’écran a permis de déterminer que certains ne pouvaient pas être associés à un fichier SIRP particulier.

[169] Mme J.S. a déclaré que, bien qu’elle ait reçu des photographies du gendarme Sowers tout au long de leur mariage, elle n’a commencé à les enregistrer qu’en septembre 2019. Le gendarme Sowers ne se rappelait pas avoir envoyé les photographies qui lui avaient été présentées pendant l’audience, mais il a admis avoir envoyé les photographies et avoir échangé des messages texte avec Mme J.S. à leur sujet.

[170] Tous les renseignements contenus dans le SIRP sont de niveau Protégé B, ce qui correspond à la classification de sécurité moyenne.

[171] Dans la plupart des photographies qui incluent des personnes, il semble que le gendarme Sowers ait tenté de cacher leur identité. Une photographie est celle d’une personne décédée. Quoi qu’il en soit, les photographies concernent des personnes vulnérables et sont de nature très personnelle. Le gendarme Sowers a partagé les photographies sans le consentement des personnes qui y figuraient. Dans les messages texte, le gendarme Sowers a tenté de minimiser l’intrusion en fournissant à Mme J.S. des détails sommaires de ce qu’il faisait au travail; il ne nomme pas les personnes sur les photographies. Ses gestes constituent une violation importante de la vie privée des personnes figurant sur les photographies, ce que je considère comme un facteur aggravant important.

[172] J’accepte le motif invoqué par le gendarme Sowers pour fournir les photographies et les messages texte. Le gendarme Sowers et M. T.S. ont tous deux déclaré que le gendarme Sowers avait envoyé des photographies à Mme J.S. pour prouver ses allées et venues afin de dissiper ses soupçons d’infidélité. Le gendarme Sowers a déclaré qu’à la fin de leur mariage, il recevait jusqu’à 1 500 messages texte par jour de Mme J.S. S’il ne répondait pas aux messages texte, elle lui téléphonait à répétition jusqu’à ce qu’il réponde. Cela devait être très stressant et devait perturber sa journée de travail.

[173] L’intention du gendarme Sowers était d’envoyer les photographies pour des raisons personnelles et non pour des gains financiers.

[174] Le gendarme Sowers a déclaré qu’il croyait que Mme J.S. avait une autorisation de sécurité valide en raison de son travail auprès des Services d’aide aux victimes. Je ne sais pas quel genre d’autorisation de sécurité elle avait, mais je sais qu’elle avait accès à l’immeuble du Détachement de la GRC de North Battleford jusqu’à ce que la GRC révoque cet accès en mars 2020. Compte tenu de ce fait, elle avait une certaine forme d’autorisation de sécurité, même s’il ne s’agissait que d’une cote de fiabilité approfondie. Quoi qu’il en soit, Mme J.S. ne faisait certainement pas partie de l’élément criminel, ce qui constituerait un facteur aggravant important.

[175] L’information communiquée par le gendarme Sowers n’a compromis aucune enquête.

[176] Le principal facteur aggravant présenté par l’autorité disciplinaire était la durée et la fréquence de la conduite du gendarme Sowers.

[177] À la lumière de la proposition conjointe sur les mesures disciplinaires et par entente, le gendarme Sowers ne m’a fourni aucune lettre d’appui.

[178] La combinaison des mesures disciplinaires place les sanctions proposées à l’extrémité inférieure de l’éventail des sanctions pour les cas graves. Ma seule préoccupation au sujet de la proposition était la déduction de huit jours sur la solde. Le gendarme Sowers a déclaré faillite en février 2020. Compte tenu de sa situation financière, je craignais que l’importante déduction salariale ne soit excessivement onéreuse et ne nuise potentiellement aux objectifs éducatifs et de réadaptation des mesures disciplinaires. J’ai soulevé cette préoccupation lors d’une conférence préparatoire. Son avocat m’a assuré qu’il avait abordé la question avec le gendarme Sowers et que ce dernier était convaincu qu’il pouvait gérer la pénalité financière.

[179] Compte tenu de l’ensemble de l’affaire, j’estime que les mesures disciplinaires comprises dans la proposition conjointe ne sont pas nettement incompatibles avec les attentes de la personne raisonnable informée des circonstances de l’affaire au point où elles jetteraient le discrédit sur l’administration de la justice ou le régime disciplinaire de la GRC ou porteraient atteinte à l’intérêt public. Par conséquent, je ne vois aucune raison de m’écarter de la recommandation conjointe qui m’a été présentée.

CONCLUSION

[180] En ce qui concerne l’allégation 6, la seule allégation établie, j’impose les mesures disciplinaires suivantes :

  1. pénalité financière de 64 heures (8 jours) de la solde du gendarme Sowers, conformément à l’alinéa 4d) des CC (déontologie);
  2. la réduction de 56 heures (7 jours) de la banque de congés annuels conformément à l’alinéa 4e) des CC (déontologie);
  3. réprimande en vertu de l’alinéa 3(1)i) des CC (déontologie); cette décision constituera la réprimande.

[181] La présente décision constitue la décision écrite qui doit être signifiée aux parties aux termes du paragraphe 25(3) des CC (Déontologie). L’une ou l’autre des parties peut interjeter appel auprès du commissaire en déposant une déclaration d’appel dans les 14 jours suivant la signification de la décision conformément à l’article 45.11 de la Loi sur la GRC.

Signature

 

23 mai 2022

Kevin Harrison

Comité disciplinaire

 

 

 



[1] Voir Commandant de la Division E c. gendarme Irvine, 2019 DRAD 03, aux paragraphes 28 à 33.

[2] La politique de la GRC, à l’article 47.5.2.1 du Manuel des opérations, se lit comme suit [TRADUCTION] : « Une liste de contrôle d’accès (LCA) est un outil qui permet de restreindre l’accès à l’information. Il permet de n’accorder l’accès qu’à des groupes, des unités, des personnes en particulier, ou à une combinaison de ceux-ci. »

[3] Voir le paragraphe 45.45(1) de la Loi sur la GRC.

[4] Voir l’article 1 du Règlement prévoyant le serment du secret (DORS/2014-280)

[5] R c. Anthony-Cook, 2016 CSC 43 [Anthony-Cook].

[6] Voir Rault c. Law Society of Saskatchewan, 2009 SKCA 81, au paragraphe 28.

[7] R. c. Druken, 2006 NLCA 67, 261 Nfld & PEIR 271, au paragraphe 29.

[8] R c. B.O.2, 2010 NLCA 19 (CanLII), au paragraphe 56.

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