Déontologie

Informations sur la décision

Résumé :

L’appelant faisait l’objet de deux allégations de contravention à l’article 8.1 du code de déontologie de la GRC pour avoir fourni une déclaration écrite fausse et trompeuse à un supérieur ou à une personne en situation d’autorité, alors qu’il participait en tant que membre visé à une enquête relative au code de déontologie. L’appelant aurait effacé un message texte d’un échange avant de soumettre la conversation à l’autorité disciplinaire et ensuite prétendu que le message texte offensant effacé avait été envoyé par un autre agent de la GRC à son insu.

L’appelant a contesté les deux allégations. Un comité de déontologie a conclu que les allégations étaient établies et ordonné à l’appelant de démissionner dans les 14 jours, sans quoi il serait congédié de la Gendarmerie. L’appelant a interjeté appel de cette décision.

En appel, l’appelant soutient que la conduite du comité a suscité une crainte raisonnable de partialité, que le comité a porté atteinte à son droit à l’équité procédurale en omettant de citer deux témoins cruciaux et en lui imposant une norme de preuve plus élevée qu’à la représentante de l’autorité disciplinaire, et que la décision du comité est déraisonnable parce qu’elle n’était pas étayée par la preuve. L’appelant soutient également que les méthodes employées par l’enquêteur ont porté atteinte à son droit à l’équité procédurale. Par conséquent, l’appelant demande une réintégration complète, avec paiement du salaire, des avantages sociaux et des heures supplémentaires qu’il aurait reçus depuis le prononcé de la décision.

L’appel a été renvoyé devant le Comité externe d’examen de la GRC (CEE) pour examen. Le CEE a conclu que le comité n’a pas suscité une crainte raisonnable de partialité et n’a pas manqué aux principes d’équité procédurale applicables, et que la décision du comité n’était pas manifestement déraisonnable.

Un arbitre a conclu que la décision du comité était étayée par le dossier et n’était pas manifestement déraisonnable, et qu’elle n’a pas été rendue en contravention des principes d’équité procédurale applicables. L’appel a été rejeté.

Contenu de la décision

Protégé A

Dossier 2019335821 (C-059)

2022 DAD 15

Logo de la Gendarmerie royale du Canada

GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

AFFAIRE INTÉRESSANT

un appel d’une décision du comité de déontologie interjeté au titre du paragraphe 45.11(1) de la

Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, LRC 1985, c R-10 (et ses modifications) et de la partie 2 des Consignes du commissaire (griefs et appels), DORS/2014-289

Entre :

Gendarme Daniel Kohl

Matricule no 56299

SIGRH no 000170275

(appelant)

et

Commandant de la Division O

Gendarmerie royale du Canada

(intimé)

(les parties)

DÉCISION D’APPEL EN MATIÈRE DE DÉONTOLOGIE


 

ARBITRE : Nicolas Gagné

DATE : Le 14 septembre 2022


SOMMAIRE 5

INTRODUCTION 6

CONTEXTE 7

Rapports d’enquête 9

Éléments du rapport d’enquête 11

Allégations 14

Conférences préparatoires 20

Pièces relatives à l’audience disciplinaire 21

AUDIENCE DU COMITÉ DE DÉONTOLOGIE 23

Audience relative aux allégations 24

Décision du comité de déontologie 35

Crédibilité et fiabilité des témoins 35

Caractère suffisant de l’enquête 39

Événements ayant conduit à la rencontre du 7 mars 2017 entre le serg. TG et Mme BB 40

Rencontre de l’appelant avec le s.é.-m. GS, l’off. resp. p. i. qui lui a signifié les documents d’enquête ayant trait aux allégations initiales relatives au code de déontologie 41

Conversation avec le s.é.-m. AB, l’off. resp. p. i. qui a parlé du surint. CL à l’appelant 42

Déclaration écrite du 2 avril 2018 42

Tentatives pour contacter le gend. KX 44

Conclusions sur les allégations 44

Allégation 1 45

Allégation 2 45

Mesures disciplinaires 46

Décision sur les mesures disciplinaires 48

APPEL 49

Observations de l’appelant 49

Observations de l’intimé 49

Observations en réplique de l’appelant 50

QUESTIONS PRÉLIMINAIRES 50

Admissibilité à un renvoi et présentation en temps opportun 50

Nouveaux éléments de preuve 50

Photo et affidavit 52

Courriel d’Air Canada indiquant l’heure à laquelle il est monté à bord de l’avion 53

FOND DE L’APPEL 54

Considérations en appel 54

Manquement à l’équité procédurale 55

Norme de contrôle 55

Crainte raisonnable de partialité 56

Le comité a commis une erreur en omettant de citer deux témoins 62

La décision du comité est manifestement déraisonnable et non étayée par la preuve 66

Norme de contrôle 66

Observations 69

Conclusions 75

DÉCISION 83

 

SOMMAIRE

L’appelant faisait l’objet de deux allégations de contravention à l’article 8.1 du code de déontologie de la GRC pour avoir fourni une déclaration écrite fausse et trompeuse à un supérieur ou à une personne en situation d’autorité, alors qu’il participait en tant que membre visé à une enquête relative au code de déontologie. L’appelant aurait effacé un message texte d’un échange avant de soumettre la conversation à l’autorité disciplinaire et ensuite prétendu que le message texte offensant effacé avait été envoyé par un autre agent de la GRC à son insu.

L’appelant a contesté les deux allégations. Un comité de déontologie a conclu que les allégations étaient établies et ordonné à l’appelant de démissionner dans les 14 jours, sans quoi il serait congédié de la Gendarmerie. L’appelant a interjeté appel de cette décision.

En appel, l’appelant soutient que la conduite du comité a suscité une crainte raisonnable de partialité, que le comité a porté atteinte à son droit à l’équité procédurale en omettant de citer deux témoins cruciaux et en lui imposant une norme de preuve plus élevée qu’à la représentante de l’autorité disciplinaire, et que la décision du comité est déraisonnable parce qu’elle n’était pas étayée par la preuve. L’appelant soutient également que les méthodes employées par l’enquêteur ont porté atteinte à son droit à l’équité procédurale. Par conséquent, l’appelant demande une réintégration complète, avec paiement du salaire, des avantages sociaux et des heures supplémentaires qu’il aurait reçus depuis le prononcé de la décision.

L’appel a été renvoyé devant le Comité externe d’examen de la GRC (CEE) pour examen. Le CEE a conclu que le comité n’a pas suscité une crainte raisonnable de partialité et n’a pas manqué aux principes d’équité procédurale applicables, et que la décision du comité n’était pas manifestement déraisonnable.

Un arbitre a conclu que la décision du comité était étayée par le dossier et n’était pas manifestement déraisonnable, et qu’elle n’a pas été rendue en contravention des principes d’équité procédurale applicables. L’appel a été rejeté.

INTRODUCTION

[1] Le gendarme (gend.) Daniel Kohl, numéro de matricule 56299 (appelant) interjette appel de la décision d’un comité de déontologie de la GRC (comité) ayant conclu que deux allégations (allégations) formulées contre l’appelant, pour avoir fourni une déclaration écrite fausse ou trompeuse en contravention de l’article 8.1 du code de déontologie, étaient établies. Compte tenu de cette conclusion, le comité a ordonné à l’appelant de démissionner dans les 14 jours, sans quoi il serait congédié.

[2] L’appelant soutient que la décision contrevient aux principes d’équité procédurale, suscite une crainte raisonnable de partialité, est entachée d’une erreur de droit et est, par ailleurs, manifestement déraisonnable (appel, p. 6-7). L’appelant demande une réintégration complète dans ses fonctions ainsi qu’une pleine indemnisation pour les sommes qu’il aurait reçues s’il n’avait pas été congédié, notamment le salaire de base, la valeur des avantages sociaux et les heures supplémentaires (appel, p. 292).

[3] L’appelant a également présenté une demande visant à faire déclarer l’allégation 1 prescrite ou, subsidiairement, à obtenir un arrêt des procédures. Cette demande a été rejetée par le comité et ne fait pas partie de l’appel.

[4] Conformément au paragraphe 45.15(1) de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, LRC 1985, c R-10 (Loi sur la GRC), l’appel a été renvoyé devant le Comité externe d’examen de la GRC (CEE) pour examen. Dans un rapport publié le 8 juin 2022 (CEE C-2021-004 (C-059)) (rapport), le président du CEE, M. Charles Randall Smith, a recommandé que l’appel soit rejeté.

[5] La commissaire peut, en vertu du paragraphe 45.16(11) de la Loi sur la GRC, déléguer son pouvoir de rendre des décisions définitives et exécutoires dans le cadre des appels en matière de déontologie. J’ai reçu une telle délégation.

[6] Pour rendre la présente décision, j’ai pris en considération les documents dont disposait le comité qui a rendu la décision faisant l’objet du présent appel (documents) ainsi que le dossier d’appel de 415 pages (appel) préparé par le Bureau de la coordination des griefs et des appels (BCGA), et le rapport, collectivement appelés le « dossier ».

[7] Pour les motifs qui suivent, l’appel est rejeté.

CONTEXTE

[8] Le CEE a résumé ainsi le contexte factuel qui a mené à l’audience disciplinaire (rapport, par. 6-13) :

[TRADUCTION]

[6] Le présent appel découle du comportement de l’appelant au cours d’une enquête relative au code de déontologie menée à la suite d’une plainte déposée par une citoyenne. L’appelant a répondu à un appel relatif à la circulation de Mme BB au sujet d’un camion circulant sur sa route qu’elle avait filmé au moyen de sa caméra de tableau de bord et qui, croyait-elle, dépassait les limites de gabarit. Après avoir parlé à Mme BB par courriel, l’appelant a recommandé à Mme BB de présenter une demande pour se joindre à la GRC et l’a informée qu’il croyait qu’elle devrait recevoir un prix pour son dévouement à la sécurité routière. L’appelant a informé Mme BB qu’il avait organisé une rencontre le 17 mars 2017 entre elle-même et son superviseur, le sergent (serg.) TG, pour discuter du prix.

[7] Pendant ce temps, l’appelant avait été transféré à une autre division et se préparait à changer de province. En fait, le serg. TG a déclaré que l’appelant ne l’avait jamais informé de la rencontre qu’il avait organisée avec Mme BB. Je souligne que l’appelant était censé quitter la province le 16 mars 2017.

[8] La date et l’heure du départ prévu de l’appelant ont changé pour le 17 mars 2017, à 13 h. Bien que son départ ait été reporté, il n’a pas assisté à la rencontre entre Mme BB et le serg. TG. Comme l’avait organisé l’appelant, Mme BB s’est présentée au bureau du District de Y à 11 h le 17 mars 2017 pour parler au serg. TG. Le serg. TG, qui n’était pas au courant de la rencontre, a dû être rappelé au bureau, car il se trouvait à l’extérieur chez un organisme partenaire. À son retour au bureau, le serg. TG a dû informer Mme BB que l’appelant aurait dû poser sa candidature pour le prix, que le délai pour remplir une demande pour ce prix était déjà expiré et qu’il n’était pas là pour lui remettre un prix.

[9] Mme BB a déposé une plainte contre l’appelant auprès de la Commission civile d’examen et de traitement des plaintes. Une enquête relative au code de déontologie a été ordonnée relativement aux actes de l’appelant concernant sa correspondance avec Mme BB et l’organisation de la rencontre entre elle-même et le serg. TG.

[10] Durant l’enquête relative au code de déontologie, l’appelant a fourni à l’enquêteur une copie des messages textes entre le serg. TG et lui-même, qui ont été échangés après que le serg. TG a rencontré Mme BB au bureau du District de Y, le 17 mars 2017. Cet échange de messages textes différait de celui fourni à l’enquêteur par le serg. TG. Selon la version de l’appelant, il manquait dans cet échange de messages textes un message désobligeant qu’il avait envoyé au serg. TG.

[11] En raison de cette divergence dans les messages textes, une seconde allégation au titre de l’article 8.1 du code de déontologie a été ajoutée à la procédure relative au code de déontologie, à savoir que l’appelant avait fourni des renseignements faux à l’enquêteur. En réponse à cette nouvelle allégation, l’appelant a fourni une lettre du gend. KX indiquant que c’était lui, le gend. KX, qui avait envoyé le message texte désobligeant et que l’appelant n’en savait rien puisqu’il avait effacé le message qu’il avait envoyé sans en parler à l’appelant.

[12] Le 5 avril 2018, l’autorité disciplinaire, le surintendant (surint.) CL, a indiqué que la seconde allégation serait traitée dans le cadre d’une nouvelle enquête relative au code de déontologie.

[13] Le 11 avril 2018, l’autorité disciplinaire a ordonné une enquête portant sur la seconde allégation afin de déterminer si l’appelant avait fourni des renseignements faux à l’enquêteur dans le cadre de l’enquête initiale relative au code de déontologie.

[9] La seconde enquête relative au code de déontologie a pris fin le 23 juillet 2018 (documents, 2 de 2, p. 111). Elle contenait l’allégation suivante :

[TRADUCTION]

Le 23 octobre 2017 ou aux alentours de cette date, dans la ville de W ou dans ses environs, dans la province de X, [l’appelant] a bel et bien fourni une déclaration écrite fausse et trompeuse à un supérieur ou à une personne en situation d’autorité, le serg. D.M., un enquêteur de l’Unité des normes professionnelles, alors qu’il participait en tant que membre visé à une enquête relative au code de déontologie, en contravention de l’article 8.1 du code de déontologie de la GRC.

Rapports d’enquête

[10] Le CEE a résumé ainsi le contenu des deux rapports d’enquête (rapport, par. 16-20) :

[TRADUCTION]

[16] Le rapport d’enquête comprenait le rapport d’enquête relatif à l’allégation initiale résultant de la plainte déposée par Mme BB, et ses annexes, ainsi que celui relatif à l’enquête complémentaire. Tous les documents relatifs au rapport d’enquête figurent dans les documents, 2 de 2, aux pages mentionnées ci-après.

[17] Le rapport d’enquête initial a été inclus dans le but d’établir une chronologie des événements du 17 mars 2017. L’enquête initiale comprend : la demande d’enquête relative au code de déontologie (pages 3-4); la note d’information pour le commandant divisionnaire (CD) (pages 5-6); le rapport d’enquête (pages 7-30); les notes informatisées concernant la réponse de l’appelant à l’incident de circulation (pages 35-50); les captures d’écran des messages textes envoyés par le serg. TG (pages 53-54); une requête concernant le livre dont le serg. TG est l’auteur (pages 56-59); des copies de la correspondance par courrier électronique entre Mme BB et l’appelant (pages 61-99); la réponse initiale de l’appelant à l’enquête (pages 101-105); une copie de la correspondance entre l’enquêteur et le serg. TG visant à préciser certaines des questions de l’enquêteur (pages 106-108). Il y avait également des déclarations audio de Mme BB et du serg. TG ainsi que des transcriptions (respectivement aux pages 326-339 et aux pages 340-343).

[18] Le second rapport d’enquête comprenait : la lettre de mandat datée du 11 avril 2018 (page 109); le rapport (pages 111-124); la lettre de mandat relative au code de déontologie initiale (page 125); une demande d’enquête relative au code de déontologie (page 129); les observations que l’appelant a présentées à l’autorité disciplinaire relativement à la rencontre disciplinaire initiale, y compris la déclaration du gend. KX (pages 131-134); une demande d’assistance de l’Unité des normes professionnelles (UNP) dans la province Y émanant de l’enquêteur (pages 135-138); l’itinéraire du billet électronique de réinstallation de l’appelant (pages 139-141); une déclaration du [sergent d’état-major (s.é.-m.)] GS, le commandant divisionnaire par intérim (c. div. p. i.) de la Division X qui a signifié à l’appelant les documents de l’enquête relative au code de déontologie concernant les allégations initiales (pages 142-144); la lettre de mandat pour mener une enquête relative au code de déontologie datée du 7 mai 2018, relativement à la fausse déclaration fournie par le gend. KX (pages 145-146); des rapports de transaction par carte concernant le gend. KX pour le 17 mars 2017 (page 147); la réponse de l’appelant aux allégations initiales (page 148). L’enquêteur a également eu un entretien avec le s.é.-m. AB, qui a été c. div. p. i. dans la Division X pendant un certain temps, et parlé avec l’appelant (transcription figurant aux pages 326-328). L’enquêteur a aussi obtenu les séquences vidéo filmées par les caméras placées au Détachement principal de Y et au bureau du District de Y afin de déterminer à quel moment le gend. KX est arrivé à ces bureaux et les a quittés […].

[19] Une enquête complémentaire a été menée et un rapport complémentaire a été fourni à l’autorité disciplinaire le 9 octobre 2018, lequel comprenait l’enquête initiale ainsi que des renseignements supplémentaires (pages 149-322). Seuls les nouveaux renseignements seront mentionnés. L’enquête complémentaire a été demandée par l’autorité disciplinaire le 31 juillet 2018 afin d’obtenir une chronologie analytique du 17 mars 2017 quant aux actes du serg. TG, de Mme BB, du gend. KX et de l’appelant, les registres d’accès par carte et les vidéos de surveillance du 17 mars 2017 concernant l’appelant, une confirmation indiquant si l’appelant avait encore accès aux bureaux du District de Y ce jour-là, une copie des carnets de service de l’appelant et du gend. KX pour le 17 mars 2017, et l’historique d’unité du véhicule de police assigné au gend. KX pour le 17 mars 2017 (pages 206-207).

[20] L’enquête complémentaire comprenait également la réclamation des frais de taxi de l’appelant concernant la réinstallation (pages 311-315), un journal de bord radio des agents émanant des bureaux de Y, y compris le journal du serg. TG (pages 316-318); une chronologie analytique des événements établie par le s.é.-m. ML, l’enquêteur dans la Division Y; sa réponse à l’enquêteur au sujet des renseignements supplémentaires demandés par l’autorité disciplinaire (pages 319-320); un organigramme représentant la localisation du serg. TG, de Mme BB, du gend. KX et de l’appelant, créé par un analyste à la demande de l’autorité disciplinaire (pages 321-322).

Éléments du rapport d’enquête

[11] Le CEE a présenté un résumé des aspects pertinents du contenu du rapport d’enquête qui sont essentiels au règlement du présent appel (rapport, par. 22-30) :

[TRADUCTION]

[22] Le 23 avril 2018, l’enquêteur a demandé et obtenu l’accès aux courriels et messages textes de l’appelant et du gend. KX, pour la période comprise entre le 26 janvier 2018 et le 23 avril 2018. Il a été informé, le 3 mai 2018, qu’aucun message n’avait été transmis sur les appareils Blackberry de l’appelant et du gend. KX et qu’on ne trouvait trace d’aucun message échangé entre eux dans le système (page 118).

[23] Le 26 avril 2018, l’enquêteur dans la Division Y a informé l’enquêteur principal que le gend. KX s’était vu signifier une lettre de mandat par courriel relativement à la tenue d’une enquête relative au code de déontologie parce qu’il avait fourni une fausse déclaration. Le gend. KX avait indiqué qu’il ne souhaitait ni se rendre au détachement ni rencontrer quelqu’un en personne pour recevoir signification de la lettre de mandat (page 118).

[24] Le 7 mai 2018, l’enquêteur dans la Division Y a également informé l’enquêteur qu’il s’était renseigné auprès de l’Administration canadienne de la sûreté du transport aérien (ACSTA) à l’aéroport de départ au sujet de la couverture vidéo des caméras de sécurité pour le 17 mars 2017, et qu’on l’avait informé que les vidéos n’étaient conservées que pendant 30 jours. Il a en outre déclaré que, parce que l’appelant s’était enregistré en ligne, Air Canada n’avait pas d’information concernant le moment où l’appelant s’était réellement enregistré à l’aéroport et avait déposé ses bagages (page 118).

[25] Le 15 mai 2018, l’enquêteur a envoyé un courriel à l’autorité disciplinaire pour l’informer que les tentatives de la Division Y pour contacter le gend. KX avaient été vaines. Il a demandé à l’autorité disciplinaire de tenter de contacter le gend. K.X. afin de lui demander où l’appelant et lui s’étaient rencontrés pour prendre un café et à quel moment (page 118). L’autorité disciplinaire n’a pas non plus réussi à contacter le gend. KX, et l’appelant n’avait pas de numéro de téléphone où on pouvait joindre le gend. KX.

[26] À l’aide des registres d’accès par carte et des vidéos de surveillance, l’enquêteur dans la Division Y a établi une chronologie approximative, en faisant remarquer qu’« [i]l y a seulement une surveillance vidéo couvrant la porte avant principale et la porte arrière réservée aux employés. Toutefois, aucune autre porte d’entrée et de sortie n’est normalement utilisée au bureau du District de Y » (pages 18-19) :

9 h 46 min 59 s – Le gend. KX a franchi la barrière pour véhicules du Détachement principal de Y.

9 h 50 min 54 s – Le gend. KX a franchi la porte d’entrée avant du Détachement principal de Y et traversé le couloir de la salle d’entrevue.

10 h 28 min 6 s – Le gend. KX a quitté le Détachement principal de Y par les portes du hall d’entrée principal. Le gend. KX transportait ce qui semblait être une tasse à café à emporter et un classeur noir.

10 h 39 – Le gend. KX a passé sa carte d’accès à la porte arrière du bureau du District de Y.

10 h 40 – Le gend. KX a franchi la porte arrière du bureau du District de Y en transportant ce qui semblait être la même tasse de café et un téléphone cellulaire seulement. Il a marché dans le couloir vers la zone des services généraux et le comptoir d’accueil.

11 h 01 – Mme BB s’est approchée du comptoir d’accueil du bureau du District de Y et a parlé à un employé du comptoir d’accueil, puis elle s’est assise sur un banc pour attendre.

11 h 22 min 38 s – Le serg. TG est venu au comptoir d’accueil et a parlé avec Mme BB.

11 h 26 min 51 s – Mme BB a serré la main du serg. TG et a quitté le comptoir d’accueil.

12 h 37 min 5 s – Le gend. KX s’est dirigé vers la porte arrière du bureau du District de Y en transportant seulement un téléphone cellulaire. Il s’est ensuite retourné et est revenu dans la zone des bureaux. Il ne portait pas de veste extérieure.

12 h 38 min 7 s – Le gend. KX a franchi la porte arrière du bureau du District de Y en portant sa veste extérieure.

12 h 55 min 20 s – Le gend. KX a franchi de nouveau la barrière pour véhicules du Détachement principal de Y.

12 h 57 – Le gend. KX a franchi la porte d’entrée avant principale.

[27] L’enquêteur dans la Division Y s’est servi de Google Maps pour déterminer la distance entre les emplacements. La distance la plus courte et le temps moyen de conduite à la plus haute vitesse constatés par l’enquêteur pour ces emplacements étaient les suivants (pages 120-121) :

· Détachement principal de Y au bureau du District de Y – 4,5 km, 9 minutes de route;

· Détachement principal de Y à l’aéroport international de Y – 33 km, 33 minutes de route;

· Bureau du District de Y à l’aéroport international de Y – 29 km, 36 minutes de route.

[28] L’enquêteur dans la Division Y s’est rendu au bureau du District de Y et a remarqué qu’il y avait trois autres portes menant vers l’extérieur. L’une d’elles se trouvait dans une zone de chargement nécessitant un accès par lecteur de carte de l’extérieur. Les deux autres étaient munies de barres de poussée de l’intérieur, mais ne présentaient pas d’accès de l’extérieur. L’enquêteur a constaté que, si quelqu’un sortait par n’importe laquelle des trois portes, il devait quand même entrer par une porte d’accès par carte ou par le comptoir d’accueil. Le gend. KX n’a été vu en train d’entrer et de sortir du bureau du District de Y qu’une seule fois. L’appelant n’a pas été vu en train d’entrer ou de sortir du bureau du District de Y entre-temps (page 121).

[29] L’enquêteur dans la Division Y a examiné les courriels du gend. KX pour la période comprise entre le 1er février 2017 et le 2 mai 2017, c’est-à-dire le dernier jour où il a ouvert ses courriels selon le système. On a constaté ce qui suit :

2017-02-24 -

L’appelant a transféré au gend. KX une copie de sa correspondance initiale avec Mme BB, dans laquelle il lui suggérait de se joindre à la GRC. L’appelant n’a fait aucun autre commentaire au gend. KX dans ce courriel.

2017-03-02 -

L’appelant a envoyé au gend. KX une copie mise à jour de sa correspondance avec Mme BB qui comportait la suite de la conversation dans laquelle il lui suggérait de se proposer pour un emploi dans la GRC. L’appelant n’a fait aucun autre commentaire au gend. KX dans ce courriel.

2017-03-02 -

Le gend. KX a répondu « Tout simplement énorme ».

2017-03-29 -

L’appelant a envoyé un courriel au gend. KX pour lui demander s’il était au travail. Le gend. KX n’a pas répondu avant le 2017-04-04, date à laquelle l’appelant lui a simplement demandé s’il pouvait l’appeler.

2017-04-05 -

L’appelant a envoyé un courriel au gend. KX et lui a demandé comment se passait sa journée. Le gend. KX a répondu que ce n’était pas une bonne journée et qu’il n’avait pas de nouvelles au sujet de son code.

2017-04-13 -

L’appelant a envoyé un courriel au gend. KX pour l’informer de son intérêt à l’égard d’une unité spécialisée. Il n’y avait rien dans ce courriel qui concernait leurs affaires relatives au code de déontologie.

[30] Le journal d’enquête, qui comprend ses tentatives de parler au gend. KX, notamment les fois où il s’est rendu chez lui, tel qu’il est mentionné dans ce journal d’enquête en particulier, a également été divulgué, et figure dans les documents d’appel, aux pages 255-278.

Allégations

[12] Compte tenu des enquêtes susmentionnées, le commandant de la Division X a émis un avis d’audience disciplinaire contenant deux allégations selon lesquelles l’appelant avait contrevenu au code de déontologie (documents, 1 de 2, p. 4-11). Voici les détails des allégations et de leurs précisions :

[TRADUCTION]

Allégation 1

Le 23 octobre 2017, à X ou dans ses environs, dans la province de X, [l’appelant] a omis de rendre compte de manière exacte et détaillée de l’exécution de ses responsabilités, de l’exercice de ses fonctions, du déroulement d’enquêtes, des agissements des autres employés et de l’administration et du fonctionnement de la Gendarmerie, en contravention de l’article 8.1 du code de déontologie de la Gendarmerie royale du Canada.

Précisions

[1] Pendant toute la période pertinente, vous étiez membre de la Gendarmerie royale du Canada (« GRC ») et étiez affecté à la Division Y, au Détachement de Y, dans la province de Y, puis à la Division X, au Détachement de X, dans la province de X.

[2] Le 22 février 2017, Mme B.B. a contacté la GRC pour signaler un véhicule surdimensionné circulant sur une route où la taille est limitée. Mme B.B. avait pris des vidéos du camion surdimensionné avec sa caméra « montée sur le pare-brise ». Le dossier EG XXX XXXX-XXXXX du Détachement de Y de la GRC a été créé, vous étiez l’officier assigné.

[3] Entre le 23 février 2017 et le 13 mars 2017, vous avez échangé des courriels avec Mme B.B., au départ concernant le dossier EG WW XXXX-XXX-XXXXX du Détachement de Y de la GRC.

i. Le 9 mars 2017, vous avez envoyé à Mme B.B. un courriel dans lequel vous déclariez : « Je pense qu’étant donné le travail que vous avez accompli, j’aimerais proposer votre candidature pour le Prix de l’officier responsable [...] Je vais en parler à mon sergent, si vous êtes intéressée, et nous allons voir comment remplir les documents de candidature. »

ii. Le 13 mars 2017, vous avez envoyé à Mme B.B. un courriel dans lequel vous déclariez : « J’ai pris rendez-vous pour que vous rencontriez le sergent T.G. le vendredi 17 mars à 11 h à notre bureau de district [...] Veuillez apporter certains des meilleurs exemples de vidéos prises avec votre caméra de tableau de bord pour le convaincre que vous méritez ce prix de l’officier responsable. Bonne chance! »

[4] Le 17 mars 2017, vous n’étiez pas au bureau du District de Y lorsque Mme B.B. est arrivée pour rencontrer le sergent (serg.) T.G. au sujet du Prix de l’officier responsable. Le serg. T.G. n’était pas au courant du rendez-vous et a dû expliquer à Mme B.B. qu’elle ne recevait pas de récompense. Mme B.B. n’était pas contente.

[5] À la suite de sa rencontre avec Mme B.B. le 17 mars 2017, vous et le serg. T.G. avez échangé les messages textes suivants :

Serg. T.G. (11 h 31) : « B.B. s’est pointée au DY aujourd’hui. T’es vraiment un connard. Si t’étais encore là, je te donnerais un 1004. »

Appelant (11 h 37) : « Nouveau téléphone. C’est qui? »

Serg. TG (11 h 48) : « C’est toi, Dan? »

Appelant (11 h 49) : « Non, j’ai ce numéro depuis hier. »

Serg. TG (11 h 51) : « Oh, désolé. »

Appelant (11 h 51) : « J’ai eu un téléphone gratuit quand j’ai acheté ce livre de merde “Dark Resolution”... j’ai jeté le livre mais j’ai gardé le téléphone. »

Appelant (11 h 51) : « Va te faire foutre, Kohl. »

Appelant (11 h 51) : « T’es vraiment un sale con. »

[6] « Dark Resolution » fait référence à un livre que le serg. T.G. a écrit.

[7] Le 19 avril 2017, Mme B.B. a déposé une plainte contre vous auprès de la Commission civile d’examen et de traitement des plaintes relatives à la GRC pour lui avoir fait perdre son temps et avoir menti sur l’organisation de la rencontre avec le serg. T.G. concernant le Prix de l’officier responsable.

[8] Le 2 juin 2017, en réponse à la plainte de Mme B.B., une enquête liée au code de déontologie a été ordonnée pour déterminer si vous aviez enfreint les articles 2.1 et 7.1 du code de déontologie (« dossier 2017 336384 de l’OGCA »).

[9] Le 6 septembre 2017, le serg. D.M. vous a envoyé un courriel pour vous demander de participer volontairement à un entretien avec le membre visé concernant le dossier 2017 336384 de l’OGCA.

[10] Le 23 octobre 2017, vous avez fourni une déclaration écrite au serg. D.M. concernant le dossier 2017 336384 de l’OGCA, qui contenait les comptes rendus faux et/ou trompeurs suivants au sujet du serg. T.G. :

a. « J’ai parlé au sergent T.G. de mes interactions avec B.B. et de sa passion pour la justice et je lui ai demandé s’il accepterait de la rencontrer pour discuter d’une possible candidature. Le sergent T.G. m’a posé des questions sur l’âge et l’apparence physique de B.B. et a accepté de la rencontrer si elle était “bien habillée” ».

b. « Le sergent T.G. a accepté la rencontre et je lui ai demandé si on pouvait fixer la date et l’heure, car nous étions à quelques jours de la date de mon transfert et je voulais y être également [...] Le sergent T.G. a accepté à la condition que je le lui rappelle lors mon dernier quart de travail, qui devait être le 12 mars ».

c. « Je ne doute aucunement du fait que j’ai parlé au sergent T.G. de cette rencontre et de son but ».

[11] En outre, dans le cadre de votre déclaration écrite du 23 octobre 2017 au serg. D.M. concernant le dossier 2017 336384 de l’OGCA, vous avez fourni une capture d’écran des messages textes que vous avez échangés avec le serg. T.G. le 17 mars 2017. La capture d’écran que vous avez soumise omettait le texte que vous avez envoyé à 11 h 51 (HNP) qui disait : « J’ai eu un téléphone gratuit quand j’ai acheté ce livre de merde “Dark Resolution”... j’ai jeté le livre mais j’ai gardé le téléphone ».

[12] Vous avez donc soumis des comptes rendus incomplets, inexacts, faux et/ou trompeurs au serg. D.M. dans votre déclaration écrite du 23 octobre 2017 concernant le dossier 2017 336384 de l’OGCA, en tant que membre visé par une enquête menée dans le cadre du code de déontologie.

Allégation 2

Le 2 avril 2018, à X ou dans ses environs, dans la province de X, [l’appelant] a omis de rendre compte de manière exacte et détaillée de l’exécution de ses responsabilités, de l’exercice de ses fonctions, du déroulement d’enquêtes, des agissements des autres employés et de l’administration et du fonctionnement de la Gendarmerie, en contravention de l’article 8.1 du code de déontologie de la Gendarmerie royale du Canada.

Précisions

[1] Pendant toute la période pertinente, vous étiez membre de la Gendarmerie royale du Canada (« GRC »), affecté à la Division Y, au Détachement de Y, dans la province de Y, puis à la Division X, au Détachement de X, dans la province de X.

[2] Entre le 23 février 2017 et le 17 mars 2017, vous avez travaillé avec le gend. K.X. au Détachement de Y.

[3] Entre le 23 février 2017 et le 13 mars 2017, vous avez échangé des courriels avec Mme B.B., au départ concernant le dossier EG XXXX-XXXX-XXXX du Détachement de Y de la GRC.

i. Le 9 mars 2017, vous avez envoyé à Mme B.B. un courriel dans lequel vous déclariez : « Je pense qu’étant donné le travail que vous avez accompli, j’aimerais proposer votre candidature pour le Prix de l’officier responsable [...] Je vais en parler à mon sergent, si vous êtes intéressée, et nous allons voir comment remplir les documents de candidature. »

ii. Le 13 mars 2017, vous avez envoyé à Mme B.B. un courriel dans lequel vous déclariez : « J’ai pris rendez-vous pour que vous rencontriez le sergent T.G. le vendredi 17 mars à 11 h à notre bureau de district [...] Veuillez apporter certains des meilleurs exemples de vidéos prises avec votre caméra de tableau de bord pour le convaincre que vous méritez ce prix de l’officier responsable. Bonne chance! »

[4] Le 24 février 2017 et le 2 mars 2017, vous avez transmis des courriels provenant de votre échange avec Mme B.B. au gend. K.X. Le 2 mars 2017, la réponse du gend. K.X. à l’échange de courriels transférés a été : « Tout simplement énorme. »

[5] Le 17 mars 2017, vous n’étiez pas au bureau du District de Y lorsque Mme B.B. est arrivée pour rencontrer le sergent (serg.) T.G. au sujet du Prix de l’officier responsable. Le serg. T.G. n’était pas au courant du rendez-vous et a dû expliquer à Mme B.B. qu’elle ne recevait pas de récompense. Mme B.B. n’était pas contente.

[6] À la suite de sa rencontre avec Mme B.B. le 17 mars 2017, vous et le serg. T.G. avez échangé les messages textes suivants :

Serg. T.G. (11 h 31) : « B.B. s’est pointée au DY aujourd’hui. T’es vraiment un connard. Si t’étais encore là, je te donnerais un 1004. »

Appelant (11 h 37) : « Nouveau téléphone. C’est qui? »

Serg. TG (11 h 48) : « C’est toi, Dan? »

Appelant (11 h 49) : « Non, j’ai ce numéro depuis hier. »

Serg. TG (11 h 51) : « Oh, désolé. »

Appelant (11 h 51) : « J’ai eu un téléphone gratuit quand j’ai acheté ce livre de merde “Dark Resolution”... j’ai jeté le livre mais j’ai gardé le téléphone. »

Appelant (11 h 51) : « Va te faire foutre, Kohl. »

Appelant (11 h 51) : « T’es vraiment un sale con. »

[7] « Dark Resolution » fait référence à un livre que le serg. T.G. a écrit.

[8] Le 19 avril 2017, Mme B.B. a déposé une plainte contre vous auprès de la Commission civile d’examen et de traitement des plaintes relatives à la GRC pour lui avoir fait perdre son temps et avoir menti sur l’organisation de la rencontre avec le serg. T.G. concernant le Prix de l’officier responsable.

[9] Le 2 juin 2017, en réponse à la plainte de Mme B.B., une enquête liée au code de déontologie a été ordonnée pour déterminer si vous aviez enfreint les articles 2.1 et 7.1 du code de déontologie (« dossier 2017 336384 de l’OGCA »).

[10] Le 6 septembre 2017, le serg. D.M. vous a envoyé un courriel pour vous demander de participer volontairement à un entretien avec le membre visé concernant le dossier 2017 336384 de l’OGCA.

[11] Le 23 octobre 2017, vous avez fourni une déclaration écrite au serg. D.M. concernant le dossier 2017 336384 de l’OGCA. Dans le cadre de votre déclaration écrite, vous avez fourni une capture d’écran des messages textes que vous avez échangés avec le serg. T.G. le 17 mars 2017. La capture d’écran que vous avez soumise omettait le texte que vous avez envoyé à 11 h 51 (HNP) qui disait : « J’ai eu un téléphone gratuit quand j’ai acheté ce livre de merde “Dark Resolution”... j’ai jeté le livre mais j’ai gardé le téléphone ».

[12] Le 27 mars 2018, vous avez reçu un avis de rencontre disciplinaire et une copie du rapport final lié au code de déontologie concernant le dossier 2017 336384 de l’OGCA. Dans l’avis de rencontre disciplinaire, l’autorité disciplinaire, le surint. C.L., vous a informé que les documents d’enquête contenaient suffisamment d’informations pour conclure que vous aviez également enfreint l’article 8.1 du code de déontologie, pour « avoir fourni une déclaration écrite fausse et trompeuse à un supérieur ou à une personne en situation d’autorité, en tant que “membre visé” dans une enquête menée dans le cadre du code de déontologie », en raison de divergences dans votre déclaration écrite du 23 octobre 2017 concernant le dossier 2017 336384 de l’OGCA. Vous avez eu la possibilité de présenter des observations écrites et de répondre aux allégations formulées à votre encontre.

[13] Le s.é.-m. G.S. a été informé qu’il manquait des extraits de la capture d’écran de vos messages textes échangés avec le serg. T.G. Le 27 mars 2018, alors qu’il vous signifiait l’avis de rencontre disciplinaire, le s.é.-m. G.S. vous a demandé si vous saviez qu’il y avait un problème dans la version que vous aviez soumise. Vous avez répondu au s.é.-m. G.S. que vous étiez au courant et que la raison pour laquelle il manquait quelques lignes à votre version était qu’il s’agissait d’une déclaration volontaire, et que les extraits manquants étaient embarrassants ou non professionnels et que vous avez donc décidé de ne pas les inclure. En ce qui concerne la procédure relative au code de déontologie, le s.é.-m. G.S. vous a dit d’être honnête avec le surint. C.L. et de ne pas mentir sur quoi que ce soit d’autre.

[14] Environ une semaine avant votre rencontre disciplinaire avec le surint. C.L., vous avez demandé au s.é.-m. A.B. « quel genre d’homme » ou « de type » était le surint. C.L. Le s.é.-m. A.B. vous a dit de « dire la vérité ». En ce qui concerne la divergence entre les versions des messages textes que vous avez envoyés et celles du serg. T.G., vous avez dit au s.é.-m. A.B. que votre enfant de six ans avait vu un gros mot dans le texte et l’avait effacé.

[15] Le 2 avril 2018, vous avez envoyé au surint. C.L. un courriel dont l’objet était « réponse aux allégations relatives au code de déontologie ». Le 5 avril 2018, lors de votre rencontre disciplinaire, vous avez été informé que, en fonction des documents que vous aviez fournis le 2 avril 2018, l’allégation concernant l’article 8.1 serait traitée dans une nouvelle enquête menée dans le cadre du code de déontologie (« dossier 2018 336257 de l’OGCA »). Une seconde rencontre disciplinaire s’est tenue le 11 avril 2018, qui a porté sur le dossier 2017 336384 de l’OGCA.

[16] Dans votre « réponse aux allégations relatives au code de déontologie » envoyée par courriel au surint. C.L. le 2 avril 2018, vous avez nié avoir tapé le message texte omis, avec l’explication fausse et/ou trompeuse suivante :

Un de mes anciens collègues à Y m’a avoué que c’était lui qui avait envoyé le message depuis mon téléphone lorsque je le lui ai brièvement remis dans un café. J’ai joint une déclaration signée de mon ancien collègue, qui explique la divergence. En fin de compte, je dois assumer la responsabilité du message texte. Bien que je n’en aie pas été l’auteur, il a quand même été envoyé depuis mon téléphone.

[17] Votre « réponse aux allégations relatives au code de déontologie » envoyée par courriel au surint. C.L. le 2 avril 2018 comprenait une déclaration écrite, signée par le gend. K.X., le 30 mars 2018, qui indiquait que c’était lui qui avait envoyé le message texte omis.

[18] La déclaration du gend. K.X. au surint. C.L. du 30 mars 2018 indiquait qu’il écrivait « au sujet de l’enquête menée sur [l’appelant] dans le cadre du code de déontologie ».

[19] La déclaration du gend. K.X. au surint. C.L. du 30 mars 2018 indiquait : « Si vous avez des questions, vous pouvez me contacter au XXX-XXX-XXXX ». Le surint. C.L. a tenté de contacter le gend. K.X. au sujet de cette déclaration, mais le gend. K.X. n’a jamais répondu au surint. C.L.

[20] La déclaration du gend. K.X. au surint. C.L. du 30 mars 2018 était fausse et/ou trompeuse. Le gend. K.X. n’était pas avec vous à 11 h 51 (HNP) lorsque le message texte omis « J’ai eu un téléphone gratuit quand j’ai acheté ce livre de merde “Dark Resolution”... j’ai jeté le livre mais j’ai gardé le téléphone » a été envoyé depuis votre téléphone. Plus précisément, les déclarations suivantes du gend. K.X. dans sa déclaration du 30 mars 2018 au surint. C.L. étaient fausses et/ou trompeuses :

« C’est moi qui ai envoyé ce message texte depuis le téléphone de [l’appelant]. »

« Nous prenions un café lorsque [l’appelant] a reçu des messages textes de T.G. »

« Je lui ai demandé de quoi il s’agissait et il a juste mentionné que lui et T.G. s’étaient disputés et qu’il essayait de l’éviter en disant qu’il avait obtenu un nouveau numéro. »

« [L’appelant] m’a tendu le téléphone pour me montrer la conversation, je l’ai trouvée marrante et j’ai rapidement tapé un message à T.G. dans lequel je faisais une blague sur l’un de ses bouquins. J’ai ensuite effacé le message pour que [l’appelant] ne le voie pas. »

« Il est impossible que [l’appelant] ait pu savoir que le message existait. »

[21] Les registres d’accès au bâtiment du Détachement de la GRC de Y et les vidéos de surveillance du 17 mars 2017 indiquent que le gend. K.X. est entré dans le bureau du District de Y à 10 h 39 (HNP) et en est ressorti à 12 h 38 (HNP). À 11 h 05 min 35 s (HNP), au moment où Mme B.B. attend le serg. T.G. dans le hall d’entrée du District de Y, on peut voir le gend. K.X. au comptoir d’accueil. Il n’y a aucune trace de votre entrée dans le bureau du District de Y le 17 mars 2017. Vous avez été transféré à la Division X et, le 17 mars 2017, vous étiez à bord du vol ACXXXX d’Air Canada à destination de X, qui a décollé de l’aéroport international de Y à 13 h (HNP). Dans votre déclaration écrite du 23 octobre 2017 concernant le dossier 2017 336384 de l’OGCA, vous avez décrit votre incapacité à prendre une voiture de location et votre manque de temps pour assister à la réunion de 11 h (HNP) parce que vous avez dû prendre un taxi pour vous rendre à l’aéroport à temps pour vous enregistrer pour votre vol de 13 h (HNP).

[22] En soumettant l’explication fausse et/ou trompeuse selon laquelle le gend. K.X. « a envoyé le message depuis [votre] téléphone lorsque [vous] lui [avez] brièvement remis dans un café », et en incluant la déclaration écrite du gend. K.X., datée du 30 mars 2018, dans votre « réponse aux allégations relatives au code de déontologie », vous avez soumis des comptes rendus faux et/ou trompeurs à une autorité disciplinaire, en tant que membre visé par une procédure relative au code de déontologie.

Conférences préparatoires

[13] Le comité a tenu trois conférences préparatoires (CP) le 10 avril, le 26 avril et le 21 mai 2019.

[14] Lors de la première CP, l’appelant a présenté une requête préliminaire visant à faire déclarer l’allégation 1 prescrite parce qu’elle avait été déposée hors délai ou, subsidiairement, à faire prononcer un arrêt des procédures, en raison du retard. Le 21 mai 2019, le comité a rejeté la requête. Il a conclu que la connaissance des faits par l’enquêteur n’était pas suffisante pour démontrer la connaissance des circonstances dans l’esprit de l’autorité disciplinaire. Le comité a également conclu que le retard lié au dépôt par l’UNP de son rapport d’enquête initial ne portait pas préjudice à l’appelant et ne constituait pas un abus de procédure. L’appelant n’interjette pas appel de la décision sur la requête préliminaire.

[15] Lors de la CP du 21 mai 2019, la représentante de l’autorité disciplinaire (RAD) a informé le comité qu’elle souhaitait citer le gend. KX comme témoin. L’appelant ne s’y est pas opposé. La RAD a précisé qu’il pourrait s’avérer impossible de faire témoigner le gend. KX parce qu’elle croyait qu’il vivait à l’étranger. Le comité a souligné qu’il pouvait délivrer une citation, mais qu’il pourrait être difficile de la faire respecter. De plus, le comité a exprimé des doutes quant à la [TRADUCTION] « valeur ajoutée » que pouvait apporter son témoignage; il a donc pris l’engagement d’examiner le dossier avant de décider s’il y avait lieu de citer le gend. KX (appel, p. 245). Lors de la même CP, les parties ont convenu qu’il n’était pas nécessaire de citer l’autorité disciplinaire et l’ont retiré de la liste des témoins (appel, p. 246). Plus tard, le 24 mai 2019, le comité a rejeté la demande de la RAD visant à citer le gend. KX comme témoin (appel, p. 244). L’appelant ne s’est pas opposé à cette décision.

[16] Entre-temps, l’appelant a présenté plusieurs autres demandes de communication de la part de la RAD. Le comité a ordonné que les éléments de preuve soient fournis et la RAD a obtempéré. La RAD a demandé une enquête complémentaire relativement à la [TRADUCTION] « porte du côté nord », mais le comité a conclu que le témoignage d’expert de M. RS, un expert en technologie de l’information de la GRC, suffirait. La RAD a également demandé le compte rendu de décision (CRD) relatif à la procédure disciplinaire visant le gend. KX, mais la demande a été rejetée par le comité (appel, p. 245-246).

Pièces relatives à l’audience disciplinaire

[17] Le CEE a résumé ainsi le contenu des pièces invoquées à l’audience (rapport, par. 36-45) :

[TRADUCTION]

a) Rapport d’enquête accompagné des pièces

[37] Le rapport d’enquête est abordé précédemment dans le présent rapport, à partir du paragraphe 14, et nous n’y reviendrons pas ici.

b) Évaluations annuelles de la GRC et prix

[38] L’appelant a présenté les évaluations annuelles que la GRC a effectuées à son égard de mars 2011 à mars 2018 (documents, 1 de 2, pages 721-752), les prix et reconnaissances qui lui ont été décernés par ses supérieurs pour appuyer son bon travail au sein de la GRC ainsi qu’une liste des dossiers dont il était responsable en 2018.

[39] Les prix et reconnaissances sont notamment les suivants : le prix Alexa de la sécurité routière gagné par l’appelant (documents, 1 de 2, pages 708-713); la reconnaissance que l’appelant et deux autres agents ont contribué à l’enquête visant une personne d’intérêt pour les autorités australiennes, qui ont envoyé des remerciements pour leur aide lors de l’enquête (documents, 1 de 2, page 714); la reconnaissance que l’appelant a grandement contribué à l’obtention de renseignements cruciaux de deux victimes d’agression sexuelle en détresse et d’éléments de preuve ayant mené à l’arrestation de deux suspects (documents, 1 de 2, pages 717-718); la reconnaissance du traitement favorable que l’appelant a réservé à un réfugié syrien victime de vol, qui l’a fait changer d’opinion sur la police, notamment la GRC (documents, 1 de 2, pages 719-720).

[40] Les évaluations de l’appelant sont généralement positives, et on y indique de façon constante qu’il est un très bon enquêteur qui cherche à améliorer ses compétences, nécessite peu de supervision, peut se voir confier des enquêtes complexes et a un bon rendement global. Toutefois, il est également mentionné dans certaines évaluations qu’il doit travailler son aptitude à communiquer et « adoucir » son approche à l’égard de certains clients, et que son intransigeance par rapport à certaines questions a été perçue comme une mauvaise attitude (documents, 1 de 2, pages 737, 742). Dans l’évaluation du rendement de mars 2012, il est indiqué qu’il a reçu une plainte du public, mais aucun détail sur cette plainte n’a été fourni (documents, 1 de 2, page 727).

[41] L’appelant a également présenté un courriel d’un bureau des relations avec les médias dans la Division Y qui le remerciait d’avoir rédigé un rapport détaillé concernant des voies de fait à caractère politique qui attiraient l’attention des médias (documents, 1 de 2, page 761).

[42] L’appelant a présenté un message d’un coordonnateur des communications de la GRC qui a transféré un message positif reçu sur Facebook au sujet de l’appelant qui avait été très gentil et aidant lors d’un incident au cours duquel un voisin avait heurté une voiture et quitté les lieux (documents, 1 de 2, page 762).

[43] L’appelant a présenté une lettre de remerciement d’un surintendant pour le travail acharné qu’il avait accompli pendant sa pause-repas pour trouver un vaporisateur de gaz poivré qui avait été lancé dans des buissons, et qui avait mené à l’arrestation d’un suspect ayant agressé trois personnes (documents, page 763).

c) Lettres de soutien

[44] L’appelant a présenté cinq lettres de soutien. Aucune de ces lettres ne mentionne expressément la nature des allégations dont faisait l’objet l’appelant, mais leurs auteurs ont généralement indiqué qu’ils savent qu’il fait l’objet d’allégations relatives au code de déontologie. Chacune des lettres est assez brève et ne traite pas expressément des allégations dont faisait l’objet l’appelant (documents, 1 de 2, pages 707, 715, 716, 760, 765-766).

d) Pièces présentées à l’audience

[45] Je souligne que certaines pièces ont été présentées au cours de l’audience. La RAD a présenté le « Plan d’évacuation en cas d’incendie », qui montre le plan d’étage du bureau du District Y, sur lequel le serg. T.G., l’enquêteur dans la Division Y, et l’appelant ont tous présenté des commentaires, en faisant leurs propres annotations (documents, 1 de 2, pages 548, 552, 553). La RAD a présenté un « Rapport sur le quart de nuit » au sujet duquel le s.é.-m. AB a été questionné (documents, 1 de 2, pages 549-551). L’appelant a également présenté un article portant sur un bénévole en sécurité à la GRC (documents, 1 de 2, pages 554-556).

AUDIENCE DU COMITÉ DE DÉONTOLOGIE

[18] Le comité a tenu une audience disciplinaire qui a duré quatre jours, du 25 au 28 juin 2019. Le comité a entendu des témoignages et les observations des parties, puis a rendu une décision orale le 27 juin 2019. Le comité a conclu que les deux allégations étaient établies, puis a entendu les observations, mais aucun témoignage, sur les mesures disciplinaires à imposer. Le 28 juin 2019, le comité a ordonné à l’appelant de démissionner dans les 14 jours, sans quoi il serait congédié, et prononcé oralement les motifs de sa décision (appel, p. 8-52).

Audience relative aux allégations

[19] L’appelant a nié les allégations (documents, 1 de 2, p. 801, 813). Par conséquent, sept témoins ont déposé à l’audience. Le CEE a résumé ainsi les parties pertinentes de la déposition de chaque témoin (rapport, par. 49-104) :

[TRADUCTION]

a) Le s.é.-m. DM - enquêteur dans la province X

[49] Le s.é.-m. DM a témoigné au sujet de son expérience au sein des services de police et de ses antécédents professionnels auprès de la GRC.

[50] Le s.é.-m. DM a déclaré que l’enquête portait sur la question de savoir si l’appelant avait ou non fait une fausse déclaration au cours de l’enquête concernant l’allégation initiale. Comme certains des renseignements relatifs à l’appelant se trouvaient dans une autre province, il a fait appel à l’UNP de l’autre province pour l’aider dans l’enquête. Le s.é.-m. DM a déclaré qu’il est possible d’obtenir un relevé de téléphone cellulaire qui pourrait indiquer de façon générale le lieu où se trouvait une personne à un moment précis, selon le nombre de tours que possédait le fournisseur de services cellulaires dans la région, et qu’il ne savait pas si l’appelant et le serg. TG avaient utilisé leurs téléphones de travail ou leurs téléphones personnels pour s’envoyer les messages textes.

[51] Le s.é.-m. DM a en outre déclaré que l’autre enquêteur a demandé des renseignements à Air Canada ainsi que des renseignements de sûreté aérienne concernant l’appelant. Ils n’ont pas demandé une ordonnance de production visant à obtenir d’autres renseignements d’Air Canada parce qu’ils ne seraient pas pertinents quant à l’affaire. À son avis, ils ne contenaient aucune information sur le moment où l’appelant a enregistré ses bagages à l’aéroport.

[52] Le s.é.-m. DM a déclaré avoir fait une entrevue enregistrée sur bande audio avec le s.é.-m. AB et obtenu une déclaration écrite du s.é.-m. GS, qui ont tous les deux été c. div. p. i. dans la Division X pour l’appelant. Il a en outre déclaré avoir obtenu tous les messages PIN ou textes échangés entre l’appelant et le gend. KX à partir de leurs téléphones de travail. Le s.é.-m. DM a déclaré avoir demandé au surint. CL de contacter le gend. KX parce que l’autre enquêteur et lui-même n’avaient pas réussi à le contacter. La lettre fournie par le gend. KX indiquait que le surint. CL pouvait le contacter s’il avait des questions. Le s.é.-m. DM a donc communiqué avec le surint. CL pour voir si le gend. KX le rappellerait afin d’obtenir certains renseignements sur la rencontre qu’il avait eue avec l’appelant. Le s.é.-m. DM a déclaré qu’il ne s’agissait pas de la procédure habituelle, mais qu’il estimait qu’en dehors des tentatives répétées, il était à court de solutions pour contacter le gend. KX (documents, 1 de 2, pages 843-851).

[53] Le s.é.-m. DM a déclaré que le surint. CL a demandé une autre enquête après avoir reçu le rapport d’enquête en juillet 2018, y compris une chronologie analytique des événements. Il a fait remarquer qu’il ne savait pas que la politique exigeait qu’elle soit terminée dans un délai de sept jours. Le s.é.-m. DM a reconnu qu’au moment où il a déposé le rapport d’enquête, ils n’avaient pas réussi à contacter le gend. KX. Il a en outre déclaré que les tentatives de l’enquêteur chargé de l’enquête relative au code de déontologie pour respecter la norme de signification de 90 jours et que les mesures prises dans le cadre d’une enquête relative au code de déontologie ne sont pas aussi considérables. Il a expliqué que cela dépendait d’un certain nombre de facteurs, notamment des ressources; toutefois, les affaires sont prises au sérieux et ils font ce qu’ils peuvent tout au long des étapes de l’enquête, notamment en permettant au membre de fournir une déclaration ainsi que des déclarations de suivi (documents, 1 de 2, pages 851-863).

[54] Le s.é.-m. DM a déclaré, en contre-interrogatoire, que l’enquête complémentaire comprenait une chronologie des événements pour le 17 mars 2017, qui a été établie par un analyste, ainsi que les registres d’accès et les carnets de l’appelant pour les bureaux situés dans la province Y. Il a déclaré qu’ils n’avaient toujours pas réussi à contacter le gend. KX et qu’après avoir communiqué avec le café où le gend. KX et l’appelant s’étaient rencontrés, ils ont été informés qu’ils ne conservaient pas leurs vidéos pendant plus de 30 jours. Le s.é.-m. DM a reconnu qu’il n’avait pas pensé à vérifier les tours cellulaires pour voir si le téléphone était situé dans la région du café au moment où le texte a été envoyé (documents, 1 de 2, pages 863-868).

[55] Le s.é.-m. DM a déclaré qu’il croyait que le statut de service du gend. KX aux alentours d’avril 2018 était qu’il était suspendu en raison d’une allégation relative au code de déontologie (documents, 1 de 2, page 870).

b) Le serg. TG – superviseur de l’appelant dans la Division Y

[56] Le serg. TG a témoigné au sujet de ses quelque 15 années d’expérience, dont la majeure partie s’est déroulée dans le Détachement de Y. Il a déclaré qu’il a supervisé le travail de l’appelant à plusieurs reprises au fil des ans et qu’il le connaissait depuis environ neuf ans. Il a déclaré que l’appelant n’était jamais en retard, qu’il était un enquêteur capable et qu’il lui avait donné des tâches difficiles qui devaient être exécutées avec compétence (documents, 1 de 2, pages 873-874).

[57] Le serg. TG a déclaré que le 17 mars 2017, il effectuait le quart de jour et avait commencé sa journée à un autre endroit. Il a déclaré qu’il a reçu un appel l’informant que Mme BB était au bureau du District de Y pour une rencontre avec lui et que, parce qu’il croyait que c’était pour se plaindre d’un membre, il s’est immédiatement rendu au bureau. À son arrivée au bureau du District de Y, il se souvient d’avoir reçu un courriel sur son téléphone de travail de Mme BB, qui lui avait envoyé une copie d’un courriel qu’elle avait envoyé à l’appelant au sujet d’un prix, et du fait qu’il n’était pas là pour la rencontrer, mais il ne se souvient pas des détails. Le serg. TG a déclaré que Mme BB a dit que l’appelant lui avait dit que le serg. TG allait lui remettre un prix et qu’il pouvait simplement aller de l’avant et le faire. Il a répondu qu’il ne pouvait pas le faire et que l’appelant aurait dû poser sa candidature lui-même. Il a également déclaré qu’elle lui a demandé pourquoi l’appelant ne répondait pas à ses courriels, à la suite de quoi il a indiqué qu’il avait quitté la province. Mme BB a été contrariée par cette information, et a demandé pourquoi l’appelant aurait dit qu’elle recevrait un prix, et a finalement quitté le détachement (documents, 1 de 2, pages 875-877).

[58] Le serg. TG a déclaré qu’il n’avait pas eu connaissance de la rencontre avant d’être rappelé au bureau. Il se rappelait avoir eu des interactions antérieures avec Mme BB quant à d’autres plaintes qu’elle avait déposées, mais jamais en personne. Le serg. TG a déclaré que Mme BB s’était déjà plainte du fait que le gend. KX n’avait pris aucune mesure dans une autre plainte relative à la circulation qu’elle avait déposée avec des images de caméra de tableau de bord à l’appui (documents, 1 de 2, pages 877-880).

[59] Le serg. TG a déclaré qu’après le départ de Mme BB du bureau du District de Y, il a envoyé une série de messages textes à l’appelant dans un accès de colère qui, de son propre aveu, était extrêmement inapproprié. Par conséquent, l’appelant a déposé contre lui une plainte de harcèlement pour laquelle le commandant divisionnaire l’a sanctionné par une obligation de suivre le cours sur le respect en milieu de travail ainsi que le cours à l’intention des autorités disciplinaires. Le serg. TG a ajouté qu’au moment des événements, il était visé par trois allégations d’inconduite découlant d’une relation inappropriée avec un subordonné et était affecté à des tâches administratives (documents, 1 de 2, pages 880-882).

[60] Le serg. TG a ensuite témoigné au sujet de l’aménagement du bureau du District de Y et des entrées et sorties du bâtiment, et dessiné une carte de l’aménagement du bureau qui a été ajoutée comme pièce A (documents, 1 de 2, page 548). Il a expliqué qu’il y a une couple de portes qui sont barrées de l’extérieur et que, bien qu’il soit possible de sortir par ces portes, elles ne constituaient pas une voie courante parce qu’elles donnaient sur des bureaux d’employés (documents, 1 de 2, pages 882-887).

[61] En contre-interrogatoire, le serg. TG a déclaré qu’à titre de sergent au bureau du District de Y, il aurait été responsable d’un groupe pouvant compter jusqu’à 19 personnes environ qui recevait en moyenne 200 appels de répartition par nuit, ce nombre fluctuant selon le jour. Il a reconnu qu’il avait probablement oublié ce que quelqu’un lui avait dit auparavant parce qu’il était très occupé lors de ses quarts de travail. Le serg. TG a expliqué que Mme BB se plaignait de façon chronique. Lorsqu’on lui a dit qu’elle était au bureau le 17 mars, il s’attendait à ce que ce soit une discussion difficile (documents, 1 de 2, pages 888-892).

[62] Le serg. TG a reconnu qu’il avait envoyé la chaîne de courriels de Mme BB à son superviseur, qui a laissé entendre qu’il se pouvait que l’appelant ait oublié de lui faire part de la rencontre. Le serg. TG a déclaré qu’il ne croyait pas qu’il s’agissait d’une mauvaise communication ou qu’il avait oublié la rencontre. Il a également déclaré qu’il ne savait pas si le gend. KX relevait de lui ce jour-là ni s’il était au bureau ce jour-là. Le serg. TG a déclaré que l’appelant aurait dû remettre son téléphone de travail lorsqu’il a quitté la Division Y. Cependant, il avait vu des personnes envoyer des messages au moyen d’autres comptes « GroupWise » (documents, 1 de 2, pages 894-899).

[63] Le serg. TG a reconnu que l’une des procédures relatives au code de déontologie dont il faisait l’objet comprenait l’omission d’être honnête avec son superviseur au sujet de sa relation avec un subordonné (documents, 1 de 2, pages 887-902).

[64] Lors du réinterrogatoire par la RAD, le serg. TG a précisé qu’il se serait souvenu de la rencontre si l’appelant et lui en avaient discuté précédemment. Le fait d’être appelé pour se rendre à la rencontre aurait ravivé le souvenir et il n’aurait pas répondu à l’appelant avec autant de « virulence » si la rencontre avait été prévue à l’avance (documents, 1 de 2, pages 904-905).

c) Le s.é.-m. AB – superviseur de l’appelant et c. div. p. i. dans la Division X

[65] Le s.é.-m. AB a déclaré qu’il a eu une brève conversation à bâtons rompus avec l’appelant au cours de laquelle celui-ci s’est renseigné sur le surint. CL. Il a informé l’appelant que le surint. CL était du genre « direct », car il avait été « dans le feu de l’action » et connaissait « le monde de la rue », et avait travaillé à l’UNP. Il a dit à l’appelant qu’il devait simplement l’admettre s’il n’avait pas fourni tous les messages textes au surint. CL et être honnête. Le s.é.-m. AB a déclaré que l’appelant lui a dit que son enfant de six ans avait effacé le texte en question parce qu’il avait vu un gros mot dedans (documents, 1 de 2, pages 907-912).

[66] Le s.é.-m. AB a déclaré que, pendant un certain temps, il a été le c. div. p. i. du bureau du District de X où l’appelant a été transféré, et qu’en moyenne, il était responsable de 105 personnes dans un bureau très fréquenté. En contre-interrogatoire, le s.é.-m. AB a déclaré que, bien qu’il n’ait pas pris de notes sur sa conversation avec l’appelant au sujet des messages textes, il était assez certain que l’appelant lui avait dit que son enfant de six ans avait effacé le message texte manquant. Il se souvenait de ce fait en raison de l’âge de l’enfant, qui était en mesure d’effacer un message texte. Il a également déclaré qu’il avait vu la divergence dans les messages textes fournis par l’appelant et que, s’il n’y avait pas eu de divergence, il n’y aurait pas eu de problème (documents, 1 de 2, pages 912-921, 925).

[67] Le s.é.-m. AB a déclaré qu’un rapport de service, déposé en tant que pièce B (documents, 1 de 2, page 549-551) à l’audience, indiquait que l’appelant était en congé de maladie le 15 juin, mais qu’il n’avait pas encore vérifié les données dans les autres systèmes, notamment le SIGRH, pour s’assurer que c’était exact, et a reconnu que le rapport de service pouvait être inexact. Le s.é.-m. AB a déclaré qu’il avait envoyé au s.é.-m. GS un courriel selon lequel il fallait « donner un coup de semonce » à l’appelant parce qu’il avait manqué deux jours de travail en raison d’un congé de maladie, mais que s’il ne s’agissait que d’un jour de congé de maladie, il changerait d’avis (documents, 1 de 2, pages 921-924).

d) M. RS – technicien en lecteur optique de cartes

[68] M. RS est un chef d’équipe en technologie de l’information (TI) pour la GRC dans la Division Y (affidavit - documents, 1 de 2, pages 771-774).

[69] M. RS a reconnu le plan d’évacuation d’étage comme étant le plan d’étage du bureau du District de Y (documents, 1 de 2, page 775). Il a déclaré que, si on ouvrait la porte de la salle de conférence, une alarme sonnait. Il a indiqué qu’il a vérifié que cette alarme fonctionnait le 17 mars 2017, en générant un rapport pour le mois de mars 2017, qui démontrait que la porte avait été ouverte la veille et le lendemain du 17 mars. Il a toutefois déclaré que le rapport n’indiquait aucun déclenchement d’alarme pour le 17 mars, ce qui signifiait que la porte n’avait pas été ouverte ce jour-là.

e) Le s.é.-m. GS - c. div. p. i. dans la Division X

[70] Le s.é.-m. GS a déclaré qu’il a signifié l’avis d’audience disciplinaire relatif à l’allégation initiale à l’appelant, car il était le c. div. p. i. du détachement à l’époque. Il avait discuté de l’incident avec l’ancien c. div. p. i., le s.é.-m. AB, qui avait indiqué qu’il semblait s’agir d’une blague qui avait mal tourné (documents, 1 de 2, pages 964-965).

[71] Le s.é.-m. GS a indiqué que lorsqu’il a rencontré l’appelant, la trousse d’enquête était ouverte sur son bureau aux pages concernant les messages textes contestés, qui pouvaient très bien être vus par l’appelant. L’appelant n’a montré aucune surprise et déclaré qu’il savait pourquoi il était là. Le s.é.-m. GS a déclaré que l’appelant lui avait dit qu’il n’avait pas inclus le message texte manquant parce qu’il était embarrassant et non professionnel (documents, 1 de 2, pages 946-949).

[72] Le s.é.-m. GS a déclaré que le surint. CL avait indiqué qu’il n’avait pas encore pris sa décision, mais qu’il envisageait d’imposer une suspension de deux jours en vertu du Guide des mesures disciplinaires. Le s.é.-m. GS a déclaré que l’appelant ne craignait pas d’être congédié puisque le s.é.-m. AB l’avait déjà informé qu’il risquait peut-être un ou deux jours. Le s.é.-m. GS n’a pas confirmé cette information, mais a indiqué qu’il ne risquait pas de perdre son emploi. Le s.é.-m. GS a informé l’appelant qu’il ne devait pas mentir, qu’il était très important de dire la vérité et d’« encaisser le coup ».

f) Le s.é.-m. ML - enquêteur dans la Division Y

[73] Le s.é.-m. ML a déclaré qu’il avait 22 ans d’expérience à titre de policier.

[74] Le s.é.-m. ML a reconnu le plan d’évacuation en cas d’incendie du bureau de la Division Y et indiqué qu’il y avait cinq caméras de sécurité sur le bâtiment. Il a dessiné une carte et indiqué où se trouvaient les caméras à l’intention du comité (documents, 1 de 2, page 552). Le s.é.-m. ML a déclaré que le gend. KX a été vu alors qu’il entrait dans le bureau du District de Y sur la caméra 1, en passant sa carte, et que la caméra 2 le montre ensuite à l’intérieur du bureau. Le s.é.-m. ML a déclaré que le gend. KX est entré et sorti par la même porte (documents, 1 de 2, page 973).

[75] Il a en outre déclaré que le gend. KX se trouvait aux « services du détachement », une unité de tâches administratives où les membres qui ne sont pas entièrement opérationnels sont affectés à des tâches restreintes. Cette unité est située dans le Détachement principal de Y, et non dans le bureau du District de Y où le gend. KX a été vu alors qu’il arrivait. Le s.é.-m. ML a déclaré qu’il y a également des vidéos du Détachement principal de Y qui montrent le gend. KX alors qu’il entre et sort de ce bureau quelques minutes avant d’entrer dans le bureau du District de Y (documents, 1 de 2, pages 977-978).

[76] Le s.é.-m. ML a déclaré qu’il s’est servi de Google Maps pour déterminer le temps de conduite approximatif entre le bureau du District Y et l’aéroport de Y, à savoir une distance de 29 kilomètres et un temps de conduite d’environ 36 minutes. Cette méthode visait uniquement à établir une approximation, car il était impossible de recréer exactement les conditions routières. Le temps de conduite en résultant concernait un déplacement dans des conditions routières idéales; et selon sa propre expérience de vie dans la région et près de l’aéroport, un temps de conduite de 36 minutes nécessiterait une conduite assez rapide (documents, 1 de 2, pages 978, 990, 1016).

[77] Le s.é.-m. ML a confirmé auprès d’Air Canada que l’appelant a enregistré un bagage, ce qui signifiait qu’il devait le déposer physiquement à l’aéroport. Il a en outre déclaré qu’Air Canada l’a informé que l’appelant s’était enregistré en ligne et avait enregistré physiquement un bagage.

Air Canada connaissait l’heure à laquelle l’appelant était monté à bord de l’avion, mais cette information ne pouvait être divulguée sans ordonnance de production. Une telle ordonnance n’a pas été demandée puisque le s.é.-m. DM, l’enquêteur dans la Division X, a décidé qu’une ordonnance de production n’était pas nécessaire (documents, 1 de 2, pages 978-982).

[78] Le s.é.-m. ML a déclaré qu’il existait en même temps une procédure disciplinaire connexe visant le gend. KX, ce qui explique pourquoi on trouve des renseignements se rapportant au gend. KX dans le journal d’enquête (documents, 2 de 2, pages 986-987).

[79] Le s.é.-m. ML a déclaré qu’il avait tenté à plusieurs reprises de parler au gend. KX au cours de l’enquête et qu’il s’était rendu à sa résidence, mais en vain. Tout au long de l’enquête et de l’enquête parallèle, ils ont eu de la difficulté à contacter le gend. KX; il avait à toutes fins utiles coupé les ponts avec la GRC. Le s.é.-m. ML a également déclaré qu’il s’était rendu à la résidence du gend. KX plus souvent que ce qui est indiqué dans le rapport, mais que cela est consigné dans l’autre dossier, et qu’il ne croyait pas qu’il était pertinent de le divulguer dans le présent dossier (documents, 1 de 2, page 996-1001, 1011).

[80] Le s.é.-m. ML a déclaré que l’appelant craignait que d’autres membres soient au courant du fait qu’il était visé par une enquête relative au code de déontologie. Aucune enquête officielle n’a été menée sur cette question. Les enquêteurs ont toutefois affirmé que personne ne pouvait expliquer comment cette information a pu faire l’objet d’une fuite (documents, 1 de 2, page 1007).

[81] Le s.é.-m. ML a déclaré qu’il croyait que le gend. KX se trouvait dans le bureau du District de Y le 17 mars 2017, à 11 h 51, en raison des heures auxquelles il est entré et sorti, et du fait qu’il a été vu au comptoir d’accueil vers 11 h (documents, 1 de 2, page 1015).

g) L’appelant

[82] L’appelant a déclaré qu’il s’est joint à la GRC en 2008 et qu’il a été affecté au Détachement de Y. Après que son épouse ait reçu un diagnostic de dépression et son fils un diagnostic d’autisme, il a demandé son transfert dans la province X pour se rapprocher de leurs familles. Il a été transféré dans la province X en mars 2017 (documents, 1 de 2, pages 1024-1025).

[83] L’appelant a déclaré que, s’il devait quitter le bâtiment du Détachement de Y, il utilisait l’une des trois sorties (documents, 1 de 2, page 553) selon l’endroit où sa voiture était stationnée ou sa destination, notamment par la porte de la salle de conférence qui, selon le témoignage de M. RS, était munie d’une alarme. L’appelant a déclaré que la porte était généralement déverrouillée et que l’on pouvait entrer et sortir par la porte sans utiliser de carte (documents, 1 de 2, pages 1026-1031). L’appelant a dessiné les sorties sur la carte à l’intention du comité.

[84] L’appelant a déclaré qu’il a demandé au serg. TG s’il accepterait de rencontrer un membre du public afin de poser sa candidature pour un prix de l’officier responsable s’il estimait qu’elle le méritait et que le serg. TG a accepté et lui a demandé de le lui rappeler lors de son dernier quart de travail. L’appelant a déclaré qu’il était certain qu’il lui avait dit, lors de l’un de ses derniers quarts de travail, que la rencontre était le 17 mars. Il a également déclaré qu’il a tenté de bien faire comprendre à Mme BB que c’était seulement pour discuter du prix, et que cela ne voulait pas dire qu’elle en recevait un (documents, 1 de 2, pages 1043-1045).

[85] L’appelant a indiqué qu’il devait être transféré en dehors de la province le 16 mars, mais qu’en raison d’un retard, il était parti le 17 mars. Il a déclaré qu’il n’a pas assisté à la réunion parce qu’il craignait qu’elle soit trop longue et qu’il ne voulait pas paraître impoli en partant au milieu de celle-ci. Il a également déclaré qu’il n’était pas vêtu de manière professionnelle, étant donné qu’il portait des vêtements de voyage. L’appelant a déclaré qu’il ne savait pas pourquoi le serg. TG croyait qu’il lui avait joué un mauvais tour, car il ne ferait jamais une telle chose à un superviseur (documents, 1 de 2, pages 1046).

[86] L’appelant a déclaré qu’il a envoyé un courriel de Mme BB au gend. KX parce que c’était « intéressant ». À son avis, le gend. KX a répondu « [t]out simplement énorme » parce qu’il trouvait que sa réponse « sortait du lot, était différente de ce que la plupart des gens répondent lorsqu’on leur recommande de poser leur candidature à la GRC ». Il a déclaré que le gend. KX et lui-même étaient des amis au travail, mais qu’ils ne se fréquentaient pas en dehors du travail. L’appelant a remis son téléphone cellulaire lors de son dernier quart de travail (le 13 mars 2017) et ne s’est servi que de son téléphone cellulaire personnel pour communiquer par la suite (documents, 1 de 2, pages 1048-1050).

[87] L’appelant a déclaré qu’il logeait à un hôtel près de chez lui du 14 au 17 mars; son reçu indique qu’il a quitté l’hôtel à 10 h 46. Il est allé dans un café pour rencontrer une couple de collègues de travail, notamment le gend. KX, arrivant vers 11 h 15. L’appelant a expliqué que, pendant qu’il se trouvait au café, le serg. TG lui a envoyé des messages textes hostiles dont il ne voulait pas s’occuper, de sorte qu’il a répondu « [n]ouveau téléphone. C’est qui? ». Il a dit au serg. TG qu’il avait le téléphone depuis un jour à peine et qu’il s’agissait des seuls messages que l’appelant lui avait envoyés. L’appelant a déclaré qu’il a montré les messages textes au gend. KX au café pour savoir s’il devrait déposer une plainte contre le serg. TG. Il a brièvement laissé son téléphone sur la table pour aller chercher sa commande, puis l’a pris et est parti pour l’aéroport vers 11 h 54 (documents, 1 de 2, pages 1051, 1055).

[88] L’appelant a déclaré qu’il s’était enregistré en ligne dès qu’il avait pu le faire, et s’était rendu à l’aéroport de Y à plusieurs reprises lors de précédents voyages. Lorsqu’il voyageait seul, il n’aimait pas arriver trop tôt à l’aéroport, peut-être une heure ou 45 minutes en avance, et son taxi conduisait assez vite, sans trafic. Il a déclaré que cela a pris environ 20 minutes, contrairement au témoignage de l’enquêteur dans la Division Y, selon lequel sa recherche sur Google a donné un temps approximatif de 36 minutes. Il a ajouté que la recherche de l’enquêteur datait de 2018, et que plusieurs modifications ont été apportées aux routes depuis 2017 (documents, 1 de 2, pages 1055-1062).

[89] L’appelant a oublié de demander un reçu parce qu’il s’agissait de la seule fois où il avait pris un taxi au cours de l’ensemble de sa réinstallation et qu’il avait l’habitude de louer une voiture lorsque c’était possible. L’appelant a déclaré qu’il a envoyé un message texte à son agent de réinstallation au sujet du reçu de taxi manquant à 12 h 20, alors qu’il se trouvait dans la file d’attente de l’ACSTA, à environ deux minutes de marche du point de débarquement pour les usagers du taxi.

[90] L’appelant a déclaré que le gend. KX a envoyé le message texte suivant au serg. TG : « J’ai eu un téléphone gratuit quand j’ai acheté ce livre de merde “Dark Resolution” » (documents, 1 de 2, page 1063).

[91] L’appelant a reçu un courriel de Mme BB, en avril 2017, dans lequel elle lui demandait pourquoi il n’était pas à la rencontre et pourquoi le serg. TG n’était pas au courant de celle-ci. On ne lui a pas reparlé de l’affaire jusqu’à ce que certains membres au sein de la Division Y lui disent que le serg. TG les avait informés qu’il avait fourni une déclaration à l’UNP concernant la plainte déposée par Mme BB et qu’une enquête relative au code de déontologie s’en venait.

[92] L’appelant a fait une déclaration au s.é.-m. DM et il a dit la vérité dans cette déclaration. Il a également déclaré qu’il a eu une conversation avec l’ancien c. div. p. i. à son bureau, au cours de laquelle le c. div. p. i. lui a dit d’être honnête avec le surint. CL à l’audience. Comme il ne voulait pas répondre au c. div. p. i. lorsqu’il lui a posé des questions sur la divergence dans les textes, l’appelant s’est éloigné du bureau. Le c. div. p. i. s’est mis à le suivre dans le couloir en lui posant d’autres questions, y compris quant à savoir qui avait effacé le message, et l’appelant lui a dit qu’il se pouvait que ce soit son fils de cinq ans, qui était connu pour avoir effacé des messages de son téléphone auparavant. Selon l’appelant, le c. div. p. i. l’a répété comme s’il s’agissait d’un fait et n’a manifestement pas entendu qu’il s’agissait d’une simple possibilité. L’appelant est ensuite entré dans les toilettes, mettant ainsi fin à leur conversation (documents, 1 de 2, pages 1065-1068).

[93] L’appelant a déclaré qu’au moment où il a parlé avec l’ancien c. div. p. i., il ne savait pas ce qu’il était advenu du message texte, et son fils avait cinq ans, pas six. L’appelant a déclaré qu’il s’était envoyé à lui-même un courriel au sujet de la conversation et qu’il n’avait pas remarqué que le c. div. p. i. n’avait pas pris de notes sur leur conversation. L’appelant se souvenait que le c. div. p. i. lui avait demandé comment son fils avait pu effacer le message, et l’appelant a déclaré que son fils se servait de son téléphone pour de nombreux programmes liés à son autisme. L’appelant a déclaré que son fils avait déjà effacé de son téléphone et de celui de son épouse des messages contenant des gros mots, comme le message qui contenait le mot « merde » (shitty), et qu’il ne connaissait pas les mots « connard », « foutre » et « sale con » (fuck), ce qui expliquait pourquoi il n’aurait pas effacé ces messages. L’appelant a ajouté qu’il n’avait jamais employé le mot « merde » dans un contexte professionnel (documents, 1 de 2, pages 1069-1070).

[94] L’appelant a déclaré que le s.é.-m. GS, le c. div. p. i. qui lui a signifié les documents de l’enquête relative au code de déontologie concernant les allégations initiales, a demandé à le voir pour lui signifier les documents de l’enquête relative au code de déontologie. Bien que le c. div. p. i. ait indiqué que l’appelant n’avait pas besoin d’être accompagné d’un représentant, il a déclaré que, lorsqu’il a rencontré le c. div. p. i., ce dernier lui a posé des questions sur des documents qu’il avait sur son bureau; ce à quoi l’appelant a répondu qu’il ne voulait pas en parler. Lorsque le c. div. p. i. lui a demandé s’il craignait d’être congédié, l’appelant a eu l’impression qu’il s’agissait d’une menace visant à obtenir sa collaboration. Contrairement au témoignage du c. div. p. i., l’appelant a déclaré que ce dernier lui a dit que le surint. CL avait indiqué que l’appelant se verrait imposer une confiscation de solde de quelques jours. L’appelant a cru qu’il s’agissait d’une mesure visant à l’inciter à aborder la question des messages textes. L’appelant a déclaré qu’il ne savait pas comment fonctionnait le processus disciplinaire et qu’il ne savait pas qu’ils pouvaient déterminer la punition avant l’audience.

[95] L’appelant a également déclaré que le c. div. p. i. a continué de lui poser des questions. Il lui a demandé s’il avait honte du message envoyé de son téléphone. L’appelant a répondu qu’il en avait honte et qu’il s’excuserait auprès du serg. TG. Bien que le c. div. p. i. ait déclaré qu’il s’agissait d’une conversation à bâtons rompus, il s’agissait plutôt d’un interrogatoire de 30 minutes par le c. div. p. i. (documents, 1 de 2, pages 1073-1074).

[96] L’appelant a confirmé qu’il n’a pas fait de fausses déclarations au cours de l’une quelconque des procédures disciplinaires (documents, 1 de 2, page 1076).

[97] L’appelant a déclaré qu’il n’est pas allé au bureau du District de Y le 17 mars 2017, et qu’il n’a pas vu le gend. KX entrer ou sortir du bâtiment (documents, 1 de 2, pages 1078-1079).

[98] En contre-interrogatoire, l’appelant a reconnu que, lors de sa rencontre avec l’ancien c. div. p. i., on lui a conseillé de dire la vérité au cours des procédures disciplinaires et il a expliqué qu’il se pouvait que son enfant ait effacé le message texte (documents, 1 de 2, pages 1080-1084).

[99] L’appelant a déclaré qu’il avait vu le rapport d’enquête de l’audience disciplinaire ayant trait à l’allégation initiale avant sa rencontre avec le c. div. p. i. et qu’il n’avait donc pas été surpris par la divergence dans les messages textes, mais il ne se souvenait pas où il avait vu le rapport d’enquête de l’audience disciplinaire. L’appelant a reconnu qu’une partie seulement de sa rencontre avec le c. div. p. i. lui avait semblé menaçante, c’est-à-dire quand il lui a demandé s’il craignait d’être congédié, et que le reste de la rencontre lui avait semblé intimidante (documents, 1 de 2, pages 1093-1095).

[100] L’appelant a déclaré qu’il a déposé une plainte de harcèlement contre le serg. TG en avril 2018 relativement aux messages textes que le serg. TG lui a envoyés le 17 mars 2017. Il a été surpris de recevoir les messages textes de sa part et que ce n’était pas professionnel de prétendre qu’il ne s’agissait pas de son téléphone, mais il souhaitait éviter tout conflit. L’appelant a reconnu qu’il n’a pas déclaré dans sa plainte de harcèlement que ce n’était pas lui qui avait envoyé le message texte ayant amené le serg. TG à jurer contre lui à deux reprises; il a toutefois expliqué qu’il a dû s’en tenir à la quantité de renseignements qu’il pouvait inclure en raison de la taille des cases du formulaire. Il a aussi déclaré qu’il était conscient de l’importance d’inclure les renseignements importants et reconnu que les policiers ne doivent pas mentir lors d’une enquête (documents, 1 de 2, pages 1095-1110).

[101] L’appelant a indiqué qu’il a rencontré plusieurs personnes au café le 17 mars, mais il a eu du mal à se rappeler leurs noms, et expliqué que c’était parce qu’ils n’utilisaient pas à la fois le nom et le prénom lorsqu’ils se parlaient. Il a également déclaré qu’il se souvenait d’y avoir vu d’autres personnes, mais lorsqu’il le leur a demandé par la suite, aucune d’elles ne se souvenait d’avoir été là (documents, 1 de 2, pages 1146-1147).

[102] L’appelant a également déclaré qu’il a tenté d’appeler le serg. TG le matin du 17 mars 2017, afin de lui rappeler la rencontre, mais qu’il n’a pas laissé de message vocal parce qu’il n’aime pas laisser des messages vocaux et qu’il ne lui est pas venu à l’esprit de lui envoyer un message texte. Il a aussi déclaré qu’il n’a pas envoyé de courriel au serg. TG parce que ce n’était pas un ami et qu’il ne voulait pas que le serg. TG ait son adresse de courriel personnelle (documents, 1 de 2, pages 1148-1149).

[103] L’appelant a déclaré qu’il croyait que tout cela « était en train de se résoudre » ce jour-là, car c’est ce que le surint. CL lui avait dit.

[104] L’appelant a déclaré qu’il est arrivé à l’aéroport vers 12 h 15 le 17 mars 2017, et au café à 11 h 15. Lorsqu’on lui a demandé pourquoi sa chronologie différait de celle figurant dans sa réponse aux allégations, qui indique 11 h 30, l’appelant a expliqué qu’il n’était pas certain de l’heure parce qu’il n’avait pas regardé sa montre, mais que c’était quelque part entre 11 h 15 et 11 h 30. L’appelant a déclaré qu’étant donné qu’il s’agissait d’un petit aéroport, il était possible qu’il se soit trouvé dans la file de contrôle de sécurité de l’aéroport à 12 h 20, heure à laquelle il a envoyé un courriel à son agent de réinstallation, après avoir quitté le taxi, obtenu les étiquettes de bagage et déposé son sac, ce qui, convient-il, a pris environ cinq minutes en tout (documents, 1 de 2, pages 1170-1172).

Décision du comité de déontologie

[20] Le 18 octobre 2019, le comité a rendu des motifs écrits portant à la fois sur les allégations et les mesures disciplinaires (appel, p. 8-52).

Crédibilité et fiabilité des témoins

[21] Le comité a d’abord énoncé le critère juridique applicable pour conclure qu’il y a eu violation de l’article 8.1 du code de déontologie, à savoir (appel, p. 20) :

  1. l’identité du membre visé;
  2. le membre visé a fourni un compte rendu de ses agissements au dossier;
  3. le compte rendu était faux, trompeur, inexact ou incomplet;
  4. le membre visé savait que le compte rendu était faux, trompeur, inexact ou incomplet.

[22] Le comité a souligné que, lors de l’évaluation de la déposition d’un témoin, il devait « examiner s’il dit la vérité et si sa déposition est fiable [et qu’il se pouvait qu’il] trouve que le témoignage d’un témoin [était] véridique, mais peu fiable » (appel, p. 23).

[23] Le comité a fait remarquer que, pour évaluer la crédibilité, il devait examiner l’ensemble de la preuve et « considérer les répercussions des incohérences dans cette preuve et si, lorsqu’elles sont prises dans leur ensemble dans le contexte de la totalité de la preuve, elles ont des répercussions sur la crédibilité du témoin » (appel, p. 23). Le comité a en outre fait observer que « [l]e juge des faits doit […] déterminer si le récit du témoin est conforme à l’interprétation la plus probable des faits connexes » (appel, p. 24).

[24] Le comité a préféré les dépositions des témoins de la RAD à celle de l’appelant. Le comité a conclu que l’enquêteur de la Division X était crédible, faisant remarquer qu’il « a répondu aux questions directement, n’a pas cherché à embellir et a reconnu qu’il ne se souvenait pas clairement de certains éléments. Son témoignage était cohérent avec les éléments de preuve figurant dans le dossier et avec celui des autres témoins » (appel, p. 24).

[25] Malgré ses conclusions générales, le comité a néanmoins eu quelques doutes quant à la fiabilité du témoignage de l’enquêteur relativement à certains sujets restreints : il ne se souvenait pas si les textes en question avaient été envoyés à partir du téléphone personnel ou professionnel de l’appelant et il ne se souvenait pas des détails des efforts de l’enquêteur de la Division Y pour contacter le gend. KX (appel, p. 24).

[26] Le comité a souligné que le serg. TG avait franchement reconnu qu’il était également visé par une procédure relative au code de déontologie, qui n’a aucun rapport avec la présente affaire, concernant une allégation au titre de l’article 8.1 du code, selon laquelle il aurait tenté d’éviter de devoir rendre des comptes en ne soumettant pas un rapport complet sur sa relation avec un subordonné. Il a également reconnu que les messages textes qu’il avait envoyés à l’appelant, le 17 mars 2017, n’étaient pas professionnels et qu’il avait reçu en conséquence un rapport de rendement négatif (appel, p. 25).

[27] Le comité s’est dit satisfait de la crédibilité du s.é.-m. AB, qui fut à un moment donné l’officier responsable par intérim (off. resp. p. i.) du détachement de l’appelant dans la Division X (appelé « c. div. p. i. » par le CEE). L’off. resp. p. i. a fourni sa déclaration à l’enquêteur de la Division X le 23 avril 2018. Son témoignage oral à l’audience était conforme à sa déclaration. Malgré la cohérence du témoignage de l’off. resp. p. i., le comité a eu quelques doutes quant à la fiabilité de son témoignage. Par exemple, le souvenir qu’il se faisait de la formulation précise utilisée par l’appelant n’était peut-être pas aussi exact qu’il l’affirmait avec insistance (appel, p. 25).

[28] Le comité a conclu que M. RS était crédible et fiable. Il a donné des réponses claires sur le fonctionnement des alarmes de portes et des contrôles d’accès au Détachement de Y et n’avait aucun intérêt personnel dans l’audience (appel, p. 26).

[29] Le comité a conclu que le s.é.-m. GS, l’ancien off. resp. p. i. qui a signifié à l’appelant les documents d’enquête ayant trait aux allégations initiales relatives au code de déontologie, avait été franc dans son témoignage, n’avait pas minimisé ou embelli son souvenir de ses interactions avec l’appelant, avait fourni un témoignage cohérent avec sa déclaration initiale à l’enquêteur et n’avait donné aucune raison de douter de sa crédibilité ou de sa fiabilité. Le comité a également conclu que l’ancien off. resp. p. i. avait été en mesure de relater avec exactitude et de manière très détaillée le ton et la longueur de sa conversation avec l’appelant et de bien expliquer ses agissements avant, pendant et après la conversation en question (appel, p. 26).

[30] Le comité n’a eu aucune inquiétude au sujet de l’enquêteur de la Division Y. Le comité a conclu que son attitude était neutre et ses réponses directes. Il n’a relevé aucun embellissement et il a reconnu les moments où sa mémoire n’était pas précise. Le comité a trouvé que son témoignage était fiable. L’enquêteur a fait référence à son journal d’enquête lorsqu’il a été dirigé vers des passages spécifiques par l’avocat, mais il ne s’y est pas fié outre mesure (appel, p. 27).

[31] Contrairement aux autres témoins, le comité a relevé plusieurs problèmes quant à la crédibilité de l’appelant et conclu qu’il était impossible d’énumérer toutes les incohérences recensées dans ses déclarations et son témoignage. Le comité a conclu que les incohérences dans le témoignage de l’appelant ne concernaient pas seulement son explication de la divergence relevée dans les messages textes qu’il a fournis par rapport à ce qui a été obtenu, mais aussi pratiquement tous les aspects de son témoignage. Le CEE a présenté brièvement quelques exemples qui illustrent l’ampleur du problème (rapport, par. 117) :

[TRADUCTION]

· Les comptes rendus de l’appelant ont changé d’une déclaration à l’autre, tant dans sa réponse à l’enquêteur que dans son témoignage oral. L’appelant a insisté sur le fait qu’il aurait rouvert l’enquête sur la plainte relative à la circulation déposée par Mme BB si elle avait été disposée à faire une déclaration. Cependant, un examen des courriels échangés entre Mme BB et l’appelant montre qu’elle a proposé à plusieurs reprises de faire une déclaration et que l’appelant n’a pas accusé réception de son offre. L’appelant a mis fin à son enquête dans les 16 minutes suivant la réception de l’appel, avec une note indiquant que Mme BB appelait de façon « chronique » pour faire des signalements (par. 49).

· L’appelant s’est contredit au moins deux fois sur son intention d’assister à la réunion du 17 mars 2017 avec Mme BB. Dans sa déclaration du 23 octobre 2017, il a déclaré qu’il avait l’intention d’assister à la réunion et expliqué que ce n’est que dans la matinée du 17 mars 2017, lorsqu’il n’a pas pu obtenir une voiture de location, qu’il a décidé de ne pas y assister par crainte de manquer son vol, tandis que dans son témoignage oral, il a affirmé qu’il n’avait jamais eu l’intention d’assister à la réunion, car il devait partir le 16 mars 2017 lorsqu’il avait organisé la réunion. Les comptes rendus sont incompatibles (par. 50).

· L’appelant a témoigné d’événements qui étaient souvent non étayés par la preuve, par exemple quant à la raison pour laquelle il n’a pas été surpris par les messages textes en parlant à l’ancien c. div. p. i., lorsqu’il a déclaré que c’était parce qu’il avait déjà lu le rapport, ce qui constituait une nouvelle révélation, non étayée par la preuve contenue dans le dossier. L’appelant ne se souvenait pas comment ni quand il avait pu accéder au rapport d’enquête avant qu’il ne lui soit signifié (par. 53).

· Dans sa réponse aux enquêteurs, l’appelant a déclaré que ses conversations avec les deux c. div. p. i. étaient des « interrogatoires », mais il n’a pas étayé cette qualification. Toutefois, dans son témoignage, il a déclaré que les rencontres étaient des « interactions agressives et conflictuelles », ce qui n’a pas été présenté aux témoins lors de leur témoignage (par. 54).

· L’appelant a fourni une chronologie très détaillée de ses activités le matin du 17 mars 2017 dans sa réponse aux enquêteurs, notant les heures avec précision, à la minute près. Dans son témoignage, cette chronologie a changé. Il était maintenant arrivé au café à 11 h 15, et non à 11 h 30. Il a déclaré avoir rencontré plusieurs personnes, pas seulement le gend. KX, mais a eu du mal à fournir leurs noms. L’appelant a déclaré être arrivé à l’aéroport à 12 h 15, avoir imprimé ses étiquettes de bagages, avoir déposé ses bagages au « dépôt de bagages » en libre-service et s’être rendu dans la file de l’ACSTA, de sorte que le courriel à son agent des services de réinstallation a été envoyé lorsqu’il était dans la file d’attente de l’ACSTA à 12 h 20, et non lorsqu’il est sorti du taxi à l’aéroport (par. 55).

· L’appelant a porté des accusations inexactes ou exagérées contre d’autres membres, accusant, par exemple, le serg. TG d’avoir fait des déclarations fausses ou trompeuses à l’enquêteur, mais lors du contre-interrogatoire, il s’est avéré que le serg. TG n’avait pas dissimulé ou déformé des informations. L’appelant a également laissé croire que le c. div. p. i. s’était comporté de manière inappropriée lors de l’examen d’un rapport. La preuve a montré que les déclarations de l’appelant concernant un comportement inapproprié étaient au mieux spéculatives (par. 56).

· L’appelant a omis le texte de 11 h 51 dans sa plainte pour harcèlement contre le serg. TG. La preuve indique qu’il est plus probable qu’improbable que cela a été fait pour donner plus de crédit à la position de l’appelant selon laquelle les textes du serg. TG ont été envoyés sans provocation.

· L’appelant a reconnu, lors du contre-interrogatoire, qu’il était conscient de la divergence entre les messages textes lorsqu’il a déposé cette plainte le 27 mars 2018, et son explication selon laquelle il y avait peu d’espace pour taper dans le formulaire est peu crédible (par. 57).

Caractère suffisant de l’enquête

[32] Le représentant du membre (RM) a laissé entendre que l’enquête était insuffisante, mais le comité a conclu que rien n’indiquait que les lacunes de l’enquête créaient un manquement à l’équité procédurale. Le RM a souligné plusieurs omissions perçues dans le processus d’enquête, faisant valoir qu’elles nuisaient à la thèse de la RAD. Le RM a souligné que le dossier ne contenait pas les relevés téléphoniques qui permettraient de prouver l’emplacement du téléphone de l’appelant, que la RAD n’avait pas obtenu d’ordonnance de production pour les renseignements d’Air Canada et que des efforts insuffisants avaient été faits pour obtenir une déclaration du gend. KX (appel, p. 31).

[33] Le comité a conclu qu’il serait inapproprié de porter un jugement sur l’enquête en l’absence d’une requête formelle concernant son caractère satisfaisant. Le comité a également souligné que la question était de savoir si la preuve examinée était suffisamment claire et convaincante pour étayer la conclusion selon laquelle les allégations étaient établies selon la prépondérance des probabilités. Le comité a conclu que les prétendues lacunes de la preuve décelées par le RM ne rendaient pas l’enquête insuffisante (appel, p. 31).

[34] Le comité a fait observer qu’on ignorait si les relevés du téléphone portable de l’appelant auraient été disponibles après deux ans et que, de toute façon (appel, p. 31) :

[A]u mieux, les informations qui auraient pu être recueillies auraient placé le téléphone [de l’appelant] dans une zone générale. Cela n’aurait pas résolu la question de savoir qui avait envoyé le message en question.

[35] Le comité a fait observer que l’appelant aurait pu demander une enquête complémentaire afin de recueillir les relevés du téléphone portable, ce qu’il n’a pas fait. En fait, l’appelant n’a même pas indiqué l’emplacement du café; il aurait pu expliquer pourquoi il ne l’a pas fait lors du contre-interrogatoire (appel, p. 31).

[36] Le comité a également conclu que l’élément de preuve qui pourrait être obtenu d’Air Canada ne serait pas utile, car l’information ne ferait que confirmer le moment où l’appelant s’est enregistré à la porte d’embarquement, et non celui où il est arrivé à l’aéroport (appel, p. 32).

[37] Le comité a reconnu que les mesures prises pour contacter le gend. KX ne figuraient pas toutes dans le rapport d’enquête et qu’il ne pouvait pas prendre en considération ce qui n’était pas mis en preuve. Le comité a néanmoins conclu que la preuve dont il disposait n’était pas problématique. Elle démontrait que l’enquêteur de la Division Y avait tenté de contacter le gend. KX chez lui pendant le jour, ce que le comité a jugé approprié parce que le gend. KX avait été suspendu et devait se présenter chaque semaine. Le comité a donc conclu qu’il n’était pas déraisonnable de s’attendre à ce qu’il soit chez lui en mi-journée pendant la semaine (appel, p. 32).

Événements ayant conduit à la rencontre du 7 mars 2017 entre le serg. TG et Mme BB

[38] Le comité a conclu que la correspondance de l’appelant avec Mme BB ne semblait pas sincère. Il a exposé plusieurs motifs justifiant cette conclusion, lesquels sont résumés par le CEE (rapport, par. 123) :

[TRADUCTION]

  1. bien qu’il l’ait décrite comme étant une personne « qui appelait de façon chronique » dans le rapport général d’incident, il lui a suggéré d’entrer dans la GRC;

  2. il lui a suggéré de postuler à un poste de membre auxiliaire et lui a dit qu’il lui donnerait une recommandation, mais il n’a jamais contacté les personnes responsables du programme;

  3. il a transmis au gend. KX un courriel de Mme BB, avec une vidéo prise avec une caméra de tableau de bord en pièce jointe, auquel le gend. KX a répondu « Tout simplement énorme ». L’explication de l’appelant selon laquelle il s’agissait d’une réaction à la vidéo prise par Mme BB n’est pas crédible; il s’agissait probablement d’une réponse à l’échange entre Mme BB et l’appelant. Il semble s’agir d’une blague entre le gend. KX et l’appelant (appel, p. 32-33).

[39] Le comité a en outre conclu qu’il aurait été peu probable que le serg. TG accepte de soutenir la nomination de Mme BB pour un prix de l’officier responsable parce qu’il lui avait déjà donné un avertissement concernant sa manière de conduire et n’avait rien fait pour soutenir ses efforts pour signaler d’autres infractions au code de la route. Le comité a fait observer que c’était Mme BB qui avait mis en copie le serg. TG dans son échange de courriels avec l’appelant, et que l’appelant n’avait transmis aucune communication au serg. TG sur ce point.

[40] Le comité a conclu que l’explication du serg. TG quant à sa perception des événements était raisonnable. Il a déclaré que, s’il avait été informé de la rencontre, celle-ci lui serait [TRADUCTION] « revenue » lorsqu’on lui a dit que Mme BB était arrivée et l’attendait pour lui parler. Le serg. TG a aussi déclaré qu’il n’aurait pas été aussi en colère contre l’appelant s’il avait eu une connaissance préalable de la rencontre (appel, p. 33-34).

[41] Le comité a finalement conclu qu’il était plus plausible que l’appelant ait fait une farce au serg. TG et à Mme BB en organisant la rencontre, en n’y assistant pas et en n’informant pas le serg. TG de sa tenue (appel, pp 34).

Rencontre de l’appelant avec le s.é.-m. GS, l’off. resp. p. i. qui lui a signifié les documents d’enquête ayant trait aux allégations initiales relatives au code de déontologie

[42] L’appelant a déclaré que sa conversation avec l’ancien off. resp. p. i. avait été une [TRADUCTION] « interaction conflictuelle » et menaçante au cours de laquelle on lui avait ordonné de fermer la porte et de s’asseoir. Il a déclaré que l’ancien off. resp. p. i. l’avait contraint à donner une explication concernant les messages textes manquants sous la menace de perdre son emploi. Le comité a conclu que ce témoignage n’était pas crédible et fait observer qu’il était illogique que l’appelant « prenne le temps de consigner l’étendue des mesures mentionnées, mais qu’il ne fasse aucune remarque sur la nature d’une telle interaction prétendument intimidante » (appel, p. 36).

[43] L’appelant a déclaré qu’il avait déjà vu le rapport d’enquête et qu’il était conscient de la divergence dans les messages textes fournis par lui-même et par le serg. TG; il a toutefois déclaré qu’il ne se souvenait pas comment il était tombé sur le rapport d’enquête. Le comité n’a pas conclu que ce témoignage était crédible, et la version des faits de l’appelant n’a pas été présentée à l’ancien off. resp. p. i. lors du contre-interrogatoire. Le comité a plutôt conclu que la version des faits de l’off. resp. p. i. était plus plausible, compte tenu de son expérience antérieure en tant que représentant des relations fonctionnelles, de la préoccupation constante du comité quant à la crédibilité de l’appelant et de l’absence de preuve à l’appui de la prétention de l’appelant (appel, p. 37).

Conversation avec le s.é.-m. AB, l’off. resp. p. i. qui a parlé du surint. CL à l’appelant

[44] Le comité a conclu qu’il était « peu probable que le [s.é.-m. AB] ait poursuivi [l’appelant] de son bureau dans le hall, pendant l’heure du repas dans un bureau très fréquenté, en exigeant à plusieurs reprises de savoir quelque chose simplement pour satisfaire une curiosité banale ». Le comité a conclu que la version de l’appelant quant à son interaction avec l’off. resp. p. i. n’était pas crédible et que le fait de qualifier une rencontre d’« interrogatoire » n’en faisait pas un interrogatoire pour autant.

[45] Le comité a souligné qu’il avait des doutes quant à la formulation précise dont se souvenait l’off. resp. p. i. Par exemple, il n’a pas conclu que l’appelant avait déclaré « sans équivoque » que son fils avait effacé le message texte. Le comité a néanmoins conclu qu’il était « très peu probable » que l’off. resp. p. i. ait « deviné » que son fils avait peut-être supprimé le message texte, sans aucune allusion en ce sens de la part de l’appelant.

[46] Le comité a conclu qu’il était plus probable que l’appelant avait dit à l’off. resp. p. i. que son fils avait peut-être supprimé le message texte pour expliquer la divergence contenue dans sa déclaration du 23 octobre 2017 (appel, p. 38).

Déclaration écrite du 2 avril 2018

[47] Le comité a conclu que la chronologie des événements proposée par l’appelant pour le 17 mars 2018 n’était pas crédible. Le comité a conclu que le gend. KX n’avait pas quitté le bureau du District de Y pour rencontrer l’appelant dans un café et que l’appelant n’était pas allé dans un café avant d’arriver à l’aéroport. Le comité a en outre conclu que les déclarations de l’appelant quant à la raison pour laquelle il n’avait pas assisté à la rencontre qu’il avait organisée entre Mme BB et le serg. TG manquaient de crédibilité.

[48] Le CEE a résumé les déplacements du gend. KX, que le comité avait déterminés en se fondant sur le rapport d’enquête, la chronologie analytique et les images des caméras de sécurité (rapport, par. 130) :

[TRADUCTION]

[130] Le comité a conclu que le gend. KX se trouvait dans le bureau du District de Y à 11 h 51, et non dans un café avec l’appelant, tel qu’allégué. Le comité a conclu que, selon le rapport d’enquête, y compris la chronologie analytique et les images des caméras de sécurité, le gend. KX a franchi la barrière pour véhicules du Détachement principal de Y à 9 h 46 min 59 s et a quitté les lieux à 10 h 28 min 6 s. La preuve montrait également le gend. KX alors qu’il entrait dans le bureau du District de Y à 10 h 39, pour ensuite se diriger vers la zone des services généraux et de la réception. Le comité a souligné qu’il a été vu au comptoir d’accueil à 11 h 05 min 55 s et qu’il semblait regarder son téléphone alors qu’un membre régulier parlait à Mme BB. Le gend. KX a ensuite été vu alors qu’il se dirigeait vers la porte ouest à 12 h 37 min 5 s, pour ensuite se retourner et revenir avec sa veste. Il a quitté les bureaux à 12 h 38 min 7 s et est entré de nouveau dans le Détachement principal de Y à 12 h 57. Le comité a souscrit à l’évaluation de l’enquêteur dans la Division Y selon laquelle il était peu probable que le gend. KX ait quitté par une autre porte, ce qui l’aurait obligé à traverser le bureau de quelqu’un ou la salle de conférence. Le comité a en outre indiqué que, compte tenu de ses conclusions générales quant à la crédibilité de l’appelant, il ne trouvait pas crédible son affirmation selon laquelle la porte de la salle de conférence était souvent laissée déverrouillée. En fait, le comité a conclu que la preuve démontrait que « le rapport d’accès a montré que la porte de la salle de conférence n’a été ni ouverte ni fermée le 17 mars 2017 » (appel, pages 40-41).

[49] Le CEE a ensuite résumé les déplacements de l’appelant en se fondant sur son témoignage et les pièces pertinentes (rapport, par. 131-132) :

[TRADUCTION]

[131] Le comité a conclu que, le 15 mars 2017, l’appelant avait changé son vol de la province de Y à la province de X du 16 mars 2017 au 17 mars 2017. Le comité a conclu que les parties s’entendaient pour dire que la distance entre l’hôtel de l’appelant et le café était d’environ 10 kilomètres. Le comité a conclu que la chronologie des événements proposée par l’appelant dans sa réponse et fournie à l’enquêteur dans la Division X n’était ni crédible ni fiable. Les activités de l’appelant et la chronologie ont changé au cours du témoignage oral de l’appelant. Le comité a conclu que la chronologie de l’appelant selon laquelle il avait quitté l’hôtel à 10 h 46, était arrivé au café à 11 h 15, avait quitté le café à 11 h 53, était arrivé à l’aéroport à 12 h 15 et se trouvait dans la file d’attente de l’ACSTA à 12 h 20 n’était pas possible. Le comité a conclu que « [p]our que cela soit possible, [l’appelant] aurait dû payer le chauffeur de taxi, sortir du taxi, récupérer ses bagages, entrer dans l’aéroport, se rendre aux kiosques en libre-service où il a imprimé ses étiquettes à bagages et déposé son sac, et se tenir dans la file d’attente de l’ACSTA dans les cinq minutes suivant son arrivée à l’aéroport. Je ne pense pas que ce délai soit réaliste » (appel, page 42).

[132] Le comité a en outre conclu que l’appelant a affirmé qu’il n’a pas assisté à la réunion avec Mme BB et le serg. TG parce qu’il craignait de manquer son vol, tout en déclarant qu’il n’avait pas pour habitude d’arriver tôt à l’aéroport et qu’il y avait de nombreux autres vols disponibles dans l’après-midi s’il manquait son vol de 13 h. Le comité a conclu que le compte rendu de l’appelant quant à ses activités du matin du 17 mars 2017 n’était ni crédible ni fiable (appel, page 43).

Tentatives pour contacter le gend. KX

[50] Le comité a conclu que l’enquêteur de la Division Y avait fait plusieurs tentatives par téléphone, par courrier électronique et en personne pour contacter le gend. KX. Le comité a conclu que la preuve établissait que le gend. KX avait coupé les ponts avec la GRC à partir du 26 avril 2018. Il a entravé ou esquivé les efforts déployés par la GRC pour le contacter ou lui signifier des documents. Il n’a pas répondu aux courriels et n’a pas pu être joint au numéro de téléphone qu’il avait fourni. Le comité a indiqué qu’il n’était pas d’accord avec l’argument du RM selon lequel il fallait tirer une conclusion défavorable de l’incapacité de l’UNP à obtenir une déclaration du gend. KX. Le comité a accordé peu de poids au fait que le gend. KX n’avait pas été jugé crédible lors de sa propre audience disciplinaire (appel, p. 43-44).

Conclusions sur les allégations

[51] Le comité a conclu que les deux allégations selon lesquelles l’appelant avait contrevenu à l’article 8.1 du code de déontologie étaient établies selon la prépondérance des probabilités.

Allégation 1

[52] Le comité a conclu que, d’après l’ensemble des éléments de preuve, l’appelant avait sciemment fourni des renseignements inexacts ou incomplets à l’enquêteur dans le cadre d’une enquête relative au code de déontologie. Le comité a conclu que l’interaction de l’appelant avec le surint. CL établissait, selon la prépondérance des probabilités, qu’il avait délibérément omis le texte envoyé à 11 h 51 au serg. TG dans la déclaration qu’il avait faite à l’enquêteur de la Division X le 23 octobre 2017.

[53] Le comité a préféré le témoignage de l’off. resp. p. i. à celui de l’appelant, et a conclu que l’appelant avait spontanément admis avoir omis le texte en question, apparemment parce qu’il ne pensait pas qu’il était nécessaire de l’inclure dans une déclaration volontaire (appel, p. 44-45).

[54] Le comité a finalement conclu que l’appelant était au courant du message texte omis lorsqu’on lui a signifié l’avis de rencontre disciplinaire et le rapport d’enquête. L’affirmation de l’appelant lors du contre-interrogatoire, selon laquelle il aurait vu le rapport avant cette date, n’était pas étayée par la preuve. Par conséquent, le comité a conclu que l’appelant avait sciemment fourni un compte rendu faux, trompeur, inexact ou incomplet alors qu’il était le membre visé par une enquête relative au code de déontologie lorsqu’il avait délibérément omis le texte dans sa déclaration à l’enquêteur de la Division X.

Allégation 2

[55] Le comité a conclu qu’il disposait d’une preuve suffisamment fiable pour conclure, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelant avait fait une blague à Mme BB et au serg. TG, à la connaissance du gend. KX. Le comité a conclu que la preuve n’étayait pas la déclaration de l’appelant selon laquelle il avait rencontré le gend. KX dans un café avant son vol (appel, p. 45- 47). Le CEE a résumé la preuve ayant étayé les conclusions du comité (rapport, par. 138) :

[TRADUCTION]

a) Les enregistrements vidéo et le registre des cartes mentionnés dans le rapport d’enquête établissaient que le gend. KX était entré dans le bureau du District de Y vers 10 h 40, le 17 mars 2017. Il avait été vu au comptoir d’accueil à 11 h 05, au moment où Mme BB attendait le serg. TG, et on ne l’avait pas vu repartir avant 12 h 38. La fiabilité de cet élément de preuve n’a pas été remise en question.

b) Compte tenu de cet élément de preuve, on a raisonnablement déduit que le gend. KX et l’appelant ne s’étaient pas rencontrés le matin du 17 mars 2017. Par conséquent, l’explication fournie par l’appelant et la déclaration signée par le gend. KX étaient nécessairement fausses.

c) Il était plus probable qu’improbable que la rencontre entre Mme BB et le serg. TG était une blague organisée à l’intention du serg. TG, aux dépens de Mme BB, et le moment de l’échange de courriels entre le gend. KX et l’appelant, ainsi que le contenu des courriels transmis, faisaient qu’il était plus probable qu’improbable que le gend. KX était impliqué dans ce mauvais tour.

d) Il a préféré le témoignage de l’ancien c. div. p. i. concernant sa rencontre à celui de l’appelant.

e) Le c. div. p. i. était un témoin crédible et son souvenir du ton général et de la portée de sa conversation avec l’appelant était plus crédible et plus fiable.

Mesures disciplinaires

[56] Étant donné qu’aucun témoignage n’a été présenté à l’appui des mesures disciplinaires, le comité s’est fondé sur la preuve déposée avant l’audience.

[57] Dans ses observations sur les mesures, le RM a fait valoir que le Guide des mesures disciplinaires (GMD) établit une gamme allant de 21 jours au congédiement pour des contraventions au code comparables et que les mesures disciplinaires devaient se situer dans la catégorie des cas graves (documents, 1 de 2, p. 1293).

[58] Le RM a mis en opposition la situation de l’appelant et celles visées par la catégorie des cas graves dans le GMD, notamment le fait de compromettre une enquête ou de porter atteinte aux droits d’un tiers, dont aucune ne s’était produite en l’espèce. Il a en outre soutenu que n’importe quelle mesure se situant dans la catégorie des cas graves, en deçà de l’ordre de démissionner, serait appropriée dans les circonstances (documents, 1 de 2, p. 1295).

[59] Le RM a souligné que l’appelant était membre de la Gendarmerie depuis 11 ans, qu’il avait un excellent dossier de travail, qu’il n’avait jamais fait l’objet de mesures disciplinaires et que deux des témoins de la RAD avaient confirmé que l’appelant était très capable. Le RM a également présenté des lettres de soutien indiquant que l’appelant serait le bienvenu s’il devait travailler de nouveau avec les auteurs. Il a souligné que l’appelant avait profité de sa période de suspension pour faire du bénévolat auprès d’un organisme dans la Division X (documents, 1 de 2, p. 1296).

[60] Enfin, le RM a présenté deux décisions où les membres s’étaient livrés à une tromperie sans être congédiés, à l’appui de l’argument de l’appelant selon lequel le congédiement n’était pas justifié. Le RM a soutenu que le comité pouvait plutôt imposer une importante pénalité financière d’environ 60 jours de solde et prononcer une ordonnance selon laquelle l’appelant ne pouvait chercher à obtenir une promotion pendant plusieurs années (documents, 1 de 2, p. 1297).

[61] Pour sa part, la RAD a fait valoir que l’appelant devait démissionner dans les 14 jours ou être congédié. Elle a affirmé qu’il ne s’agissait pas d’un cas où l’imposition de mesures disciplinaires éducatives ou correctives était indiquée, compte tenu du fait qu’on avait conclu que l’appelant avait délibérément fourni un faux compte rendu à des supérieurs au cours d’une enquête interne. Les décisions présentées par la RAD démontrent que c’est inacceptable (documents, 1 de 2, p. 1283).

[62] La RAD a soutenu que l’appelant cherchait à éviter d’être tenu responsable de son inconduite dans deux enquêtes relatives au code de déontologie, de sorte qu’il pourrait tirer un avantage personnel de sa malhonnêteté. De plus, il a impliqué un autre membre dans sa tentative pour se soustraire à sa responsabilité (documents, 1 de 2, p. 1288). Vu que l’inconduite comportait deux allégations distinctes, la RAD a fait valoir que l’appelant avait présenté un mode de comportement délibéré, intentionnel et planifié; il ne s’agissait pas d’une décision prise [TRADUCTION] « sous l’impulsion du moment » (documents, 1 de 2, p. 1288).

[63] Enfin, la RAD a fait valoir que le comportement de l’appelant constituait une violation des valeurs fondamentales de la Gendarmerie, notamment les valeurs d’honnêteté, d’intégrité, de professionnalisme, de responsabilité et de respect. La RAD a soutenu que le caractère de l’appelant était incompatible avec son rôle d’agent de police, et que les circonstances atténuantes n’étaient pas suffisantes pour l’emporter sur les circonstances aggravantes (documents, 1 de 2, p. 1292).

Décision sur les mesures disciplinaires

[64] Le comité a d’abord déterminé l’éventail possible de mesures disciplinaires; il a ensuite examiné les circonstances atténuantes et aggravantes et appliqué les principes juridiques appropriés, y compris le principe de la proportionnalité.

[65] Le comité a consulté le GMD et les décisions présentées par les parties afin de déterminer la gamme de mesures disciplinaires qu’il convenait d’imposer. Il a conclu que la gamme se situait entre 21 jours de pénalité financière et le congédiement (appel, p. 49).

[66] Le comité a mis en balance les 11 ans de service et le rendement élevé de l’appelant avec les cas où il avait adopté « une mauvaise attitude » ou « un style de communication non professionnel » et a conclu que ces facteurs tempéraient la nature atténuante de son excellent dossier de service (appel, p. 50).

[67] Le comité a également conclu que les lettres de soutien présentées par l’appelant ne démontraient pas que les auteurs étaient conscients de la nature précise des contraventions. Par conséquent, le comité leur a accordé peu de poids (appel, p. 50). Le comité a néanmoins considéré les « efforts [de l’appelant] pour soutenir les collectivités dans lesquelles il vit, que ce soit par des initiatives policières proactives ou des activités bénévoles » comme une circonstance atténuante (appel, p. 50).

[68] Le comité a finalement conclu ce qui suit (appel, p. 51, par. 160) :

L’inconduite [de l’appelant] se situe essentiellement dans le cadre d’une enquête menée en vertu du code de déontologie, dont il était le membre visé, afin d’éviter qu’il ait à répondre de ses actes. L’importance du processus disciplinaire comme moyen de maintenir la confiance du public dans la GRC est exposée dans un certain nombre de décisions citées par les parties. Le processus disciplinaire sert de contrepoids aux vastes pouvoirs conférés aux agents de police. L’inconduite [de l’appelant] démontre un manque d’honnêteté, d’intégrité, de professionnalisme et de responsabilité. Que ce soit par omission ou en soumettant une fausse déclaration, [l’appelant] a délibérément cherché à saper le processus disciplinaire. Le caractère prolongé et la planification délibérée liés au comportement trompeur [de l’appelant] me préoccupent particulièrement. Ses actions témoignent d’un manque de respect, voire d’un mépris, pour le processus disciplinaire.

[69] Pour ces motifs, le comité a conclu qu’il ne pouvait maintenir l’appelant en tant que membre de la GRC et lui a ordonné de démissionner dans les 14 jours, sans quoi il serait congédié (appel, p.51). La décision écrite a été signifiée à l’appelant le 31 octobre 2019.

APPEL

[70] L’appelant a présenté sa déclaration d’appel au BCGA le 12 novembre 2019, et ses observations en appel le 16 juillet 2020 (appel, p. 3; appel, p. 109-182).

Observations de l’appelant

[71] L’appelant soutient que la conduite du comité a suscité une crainte raisonnable de partialité, que le comité a porté atteinte à son droit à l’équité procédurale en omettant de citer deux témoins cruciaux et en lui imposant une norme de preuve plus élevée qu’à la RAD, et que la décision du comité est déraisonnable parce qu’elle n’était pas étayée par la preuve. L’appelant soutient également que les méthodes employées par l’enquêteur ont porté atteinte à son droit à l’équité procédurale. Par conséquent, l’appelant demande une réintégration complète, avec paiement du salaire, des avantages sociaux et des heures supplémentaires qu’il aurait reçus depuis le prononcé de la décision.

Observations de l’intimé

[72] L’intimé a présenté ses observations au BCGA le 3 septembre 2020 (appel, p. 211-278).

[73] L’intimé soutient que le comité n’a pas suscité une crainte raisonnable de partialité et que l’appelant sort des parties de la décision de leur contexte. L’intimé soutient également que le comité n’a pas porté atteinte au droit à l’équité procédurale de l’appelant en omettant de citer deux témoins. De plus, l’intimé fait observer que l’appelant savait avant l’audience que les témoins ne seraient pas cités et qu’il ne s’y est pas opposé.

[74] Enfin, l’intimé soutient que le comité a correctement apprécié et examiné l’ensemble de la preuve et qu’il a rendu une décision raisonnable.

Observations en réplique de l’appelant

[75] L’appelant a présenté ses observations en réplique au BCGA le 6 octobre 2020 (appel, p. 288-299). Comme l’a indiqué le CEE (rapport, par. 155) :

[TRADUCTION]

L’appelant soutient que l’intimé qualifie mal la conclusion à laquelle est arrivé le comité dans sa décision, ne tient pas compte de certains motifs figurant dans la décision et formule des hypothèses qui ne sont pas étayées par la décision elle-même.

[76] L’appelant soutient également que l’intimé n’a pas réagi à l’omission des enquêteurs de communiquer des renseignements pertinents à l’appelant.

QUESTIONS PRÉLIMINAIRES

Admissibilité à un renvoi et présentation en temps opportun

[77] Je conviens avec le CEE qu’il n’y a aucune inquiétude dans la présente affaire quant à son admissibilité à un renvoi ou à sa présentation en temps opportun (rapport, par. 157).

Nouveaux éléments de preuve

[78] Parallèlement à ses observations en appel, l’appelant a présenté plusieurs renseignements supplémentaires, notamment une photo montrant supposément le moment où il a vu les messages textes, un affidavit produit après le fait attestant l’authenticité de la photo et un courriel d’Air Canada.

[79] L’appelant soutient que la photo, et l’affidavit y afférent, montre qu’il a vu les messages textes et l’allégation pour la première fois avec le s.é.-m. AB, l’off. resp. p. i. à l’époque, le 24 février 2018. Il présente cette photo afin de démontrer pourquoi il n’a pas été surpris lorsqu’il a ultérieurement vu le rapport avec le s.é.-m. GS, l’off. resp. p. i. qui le lui a signifié (appel, p. 133 et 294). L’affidavit a été ajouté en réponse à l’opposition de l’intimé à la présentation de la photo parce qu’aucune attestation de son authenticité n’était fournie (appel, p. 212). Le courriel d’Air Canada indique l’heure à laquelle l’appelant est monté à bord de l’avion le 17 mars 2017 (appel, p. 144).

[80] Le commissaire dispose d’un pouvoir discrétionnaire lorsqu’il s’agit de décider quels éléments de preuve accepter dans un appel en matière de déontologie. L’article 32 des Consignes du commissaire (griefs et appels), DORS/2014-289 (CC (griefs et appels)) prévoit que le commissaire « peut accepter tout élément de preuve produit par les parties ».

[81] Toutefois, le paragraphe 25(2) des CC (griefs et appels) restreint ce pouvoir discrétionnaire en disposant qu’un élément de preuve ou un renseignement qui n’a pas été présenté au décideur initial ne peut être déposé en appel, sauf si l’élément de preuve ou le renseignement n’était pas à la disposition de l’appelant au moment où la décision contestée a été rendue :

25 (1) Le BCGA accorde à l’appelant la possibilité de déposer des observations écrites et d’autres documents à l’appui de son appel.

(2) L’appelant ne peut :

a) déposer un document qui n’a pas été fourni à l’auteur de la décision qui fait l’objet de l’appel si le document était à la disposition de l’appelant au moment où la décision a été rendue;

b) inclure dans ses observations écrites tout nouveau renseignement qui était connu ou aurait pu raisonnablement être connu de l’appelant au moment où la décision a été rendue.

[82] L’article 5.3.1.5 du chapitre II.3 « Griefs et appels » du Manuel d’administration (politique sur les appels) comporte la même restriction que celle énoncée aux alinéas 25(2)a) et b) des CC (griefs et appels) :

5.3.1.5. Si l’appelant soumet des observations écrites, il ne peut présenter aucun nouvel élément de preuve ni aucune nouvelle information qui n’a pas été présenté à l’intimé pendant les procédures précédant l’appel.

EXCEPTION: L’élément de preuve ou l’information n’était pas, et ne pouvait raisonnablement pas être, connu de l’appelant au moment où la décision écrite faisant l’objet de l’appel a été prise.

[83] Les critères applicables pour déterminer s’il y a lieu d’admettre un nouvel élément de preuve en appel sont énoncés dans la jurisprudence dans l’arrêt Palmer c la Reine, [1980] 1 RCS 759 (Palmer). Selon l’arrêt Palmer, le nouvel élément de preuve peut être admis en appel si :

  1. il serait dans l’intérêt de la justice de le faire;
  2. il n’aurait pas pu raisonnablement être présenté à l’audience;
  3. il est pertinent quant à une question en litige;
  4. il est plausible;
  5. on peut raisonnablement penser que, si l’on y ajoute foi, il aurait influé sur la décision du comité.

[84] Tous ces critères doivent être respectés pour que l’élément de preuve supplémentaire puisse être examiné en appel (Fondation David Suzuki c Canada (Santé), 2018 CF 379, par. 13-19).

Photo et affidavit

[85] Je conviens avec le CEE que la photo et l’affidavit ne sont pas admissibles (rapport, par. 169).

[86] L’appelant n’a présenté aucune observation initiale sur la photo. Il n’a fait que l’inclure dans son appel au moyen d’une note en bas de page dans son argument relatif à la façon dont il a eu connaissance de la divergence relevée dans les messages textes, afin de démontrer qu’il avait pris une photo de celle-ci lors d’une rencontre avec l’off. resp. p. i. en février 2018.

[87] En réponse, l’intimé fait observer que l’appelant n’a présenté aucune explication au sujet de la photo et soutient qu’il était raisonnable de présumer que l’appelant connaissait l’existence de la photo avant que le comité rende sa décision. De plus, l’intimé souligne que l’appelant n’a fourni aucune attestation concernant l’authenticité de la photo dans ses observations antérieures. Enfin, l’intimé affirme qu’il est illogique d’admettre que l’appelant ait pu être [TRADUCTION] « intrigué » au point de prendre une photo, sans toutefois présenter la moindre explication dans le cadre des réponses détaillées qu’il a fournies avant ou lors de l’audience disciplinaire (appel, p. 212).

[88] En réplique, l’appelant soutient que cet élément de preuve devrait être admis parce qu’il étaye son témoignage et réfute la conclusion du comité selon laquelle il manquait de crédibilité quant à sa connaissance antérieure de l’existence des textes (appel, p. 289).

[89] En appliquant les critères de l’arrêt Palmer exposés ci-dessus, je conclus que le document est pertinent et probant quant à l’appel; cependant, l’appelant n’a pas satisfait aux exigences de la diligence raisonnable et de la plausibilité. L’appelant aurait pu présenter la photo au comité avant l’audience ou avant que les mesures disciplinaires ne soient établies. Il avait la photo en sa possession lorsqu’il a répliqué à l’enquête en mars 2019, et n’a pas expliqué suffisamment pourquoi il n’a pas présenté le document avant cette étape-ci. De plus, la plausibilité de la photo et l’affidavit n’ont pas été vérifiés. Compte tenu de la myriade de préoccupations soulevées à l’égard de la crédibilité de l’appelant, le document ne saurait être automatiquement présumé plausible.

Courriel d’Air Canada indiquant l’heure à laquelle il est monté à bord de l’avion

[90] Je conviens avec le CEE que le courriel n’est pas admissible (rapport, par. 175). Les parties n’ont présenté aucune observation sur la question de savoir si le courriel devait être admis, mais elles ont parlé de sa pertinence.

[91] La plausibilité du courriel n’est pas contestée, car il a été envoyé par Air Canada à l’appelant.

[92] L’appelant n’a pas satisfait à l’exigence de la diligence raisonnable parce qu’il savait que la chronologie du 17 mars 2017 était mise en question. L’appelant avait le rapport d’enquête en sa possession avant l’audience disciplinaire et il aurait pu demander les renseignements contenus dans le courriel s’il souhaitait les soumettre au comité.

[93] Il n’a pas satisfait non plus aux exigences de la pertinence et de la force probante. Le courriel indique l’heure à laquelle l’appelant est monté à bord de l’avion le 17 mars 2017, mais il ne dit rien au sujet des aspects de la chronologie qui sont contestés, quant à savoir d’où le message texte a été envoyé, qui l’a envoyé et où se trouvait l’appelant à 11 h 51.

[94] Comme les éléments de preuve présentés par l’appelant en appel ne satisfont pas aux critères énoncés dans l’arrêt Palmer, je ne les prendrai pas en considération aux fins du présent appel.

FOND DE L’APPEL

Considérations en appel

[95] Le processus d’appel dans les affaires disciplinaires n’est pas un processus où l’appelant a la possibilité de faire examiner son cas de novo devant un nouveau décideur. C’est plutôt une occasion de contester une décision déjà rendue. Lorsqu’il examine un appel d’une décision rendue dans une affaire disciplinaire, le rôle de l’arbitre est régi par le paragraphe 33(1) des CC (griefs et appels), qui prévoit ce qui suit :

33 (1) Lorsqu’il rend une décision sur la disposition d’un appel, le commissaire évalue si la décision qui fait l’objet de l’appel contrevient aux principes d’équité procédurale, est entachée d’une erreur de droit ou est manifestement déraisonnable.

[96] Le rôle de l’arbitre se limite à déterminer si la décision portée en appel a été rendue en contravention des principes d’équité procédurale applicables, est entachée d’une erreur de droit ou est manifestement déraisonnable.

[97] Lorsqu’il s’agit d’un appel portant sur une mesure disciplinaire, le paragraphe 45.16(3) de la Loi sur la GRC prévoit les résultats possibles :

(3) Le commissaire peut, lorsqu’il est saisi d’un appel interjeté contre une mesure disciplinaire imposée par le comité de déontologie ou l’autorité disciplinaire :

a) soit rejeter l’appel et confirmer la mesure disciplinaire;

b) soit accueillir l’appel et annuler la mesure disciplinaire imposée ou, sous réserve des paragraphes (4) ou (5), imposer toute autre mesure disciplinaire.

[98] Conformément à l’article 5.6.2 de la politique sur les appels, l’arbitre doit tenir compte des documents suivants dans sa prise de décision :

5. 6. 2. L’arbitre étudie le formulaire relatif à l’appel; la décision écrite faisant l’objet de l’appel; les documents sur lesquels se fonde la décision, qui auront été fournis par la personne qui a pris la décision; les observations et toute autre information soumise par les parties; dans le cas où l’appel a été renvoyé au [CEE], le rapport du [CEE] concernant l’appel.

[99] L’appelant a indiqué dans sa déclaration d’appel qu’il est d’avis que la décision du comité a été rendue en contravention des principes de procédure applicables, est entachée d’une erreur de droit et est manifestement déraisonnable. Je vais maintenant apprécier chaque motif d’appel dans l’ordre indiqué par le CEE et, au besoin, j’énoncerai la norme de contrôle correspondante.

Manquement à l’équité procédurale

[100] Lorsqu’il prétend que la décision du comité ne respecte pas les principes d’équité procédurale applicables, l’appelant doit démontrer que le comité n’a pas suivi une procédure adéquate pour rendre sa décision, en établissant qu’au moins un des droits suivants a été violé :

  • le droit de savoir quelle question sera tranchée et le droit d’avoir une occasion équitable de faire valoir son point de vue sur cette question;
  • le droit à une décision rendue par un décideur impartial;
  • le droit à une décision rendue par la personne qui entend l’affaire;
  • le droit de connaître les motifs de la décision.

Norme de contrôle

[101] En appel, l’équité procédurale est appréciée selon la norme de contrôle stricte de la décision correcte, comme l’a indiqué la Cour fédérale du Canada dans Garcia Diaz c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 321 :

À l’égard des questions d’équité procédurale, la norme de contrôle est celle de la décision correcte. Plus précisément, qu’il soit question de la norme de contrôle de la décision correcte ou de l’obligation de la Cour de s’assurer que le processus a été équitable sur le plan procédural, le contrôle judiciaire d’une question relative à l’équité procédurale ne laisse aucune marge de manœuvre à la cour de révision ni n’autorise cette dernière à faire preuve de déférence. La question fondamentale demeure celle de savoir si la partie visée connaissait la preuve à réfuter et si elle a eu une occasion réelle et équitable d’y répondre : voir Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée c Canada (Procureur général), 2018 CAF 69 [2019] 1 RCF 121 [CFCP] (le juge Rennie), particulièrement aux para 49, 54 et 56; Baker, au para 28. Dans l’arrêt Association canadienne des avocats en droit des réfugiés c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2020 CAF 196, le juge de Montigny a affirmé que « [c]e qui importe, en fin de compte, c’est de savoir si l’équité procédurale a été respectée ou non » (au paragraphe 35).

[102] L’appelant invoque deux arguments en matière d’équité procédurale : une crainte de partialité et l’omission de citer certains témoins.

Crainte raisonnable de partialité

[103] L’appelant met en doute le paragraphe 161 de la décision du comité, qui se lit ainsi (appel, p. 51) :

Tout au long de cette procédure, j’ai écouté, mais je n’ai entendu aucune preuve que [l’appelant] est conscient de lui-même, qu’il reconnaît la gravité de ses actes ou qu’il assume une quelconque responsabilité personnelle dans les circonstances qui ont conduit à cette audience. Au contraire, il a perpétué son comportement trompeur pendant l’audition en affirmant des faits nouveaux, non reçus auparavant, que j’ai jugés non étayés par les preuves. Je n’ai aucune garantie que [l’appelant] tirera des leçons de cette expérience et qu’elle ne se reproduira pas.

[104] L’appelant cite l’arrêt de la Cour suprême du Canada (CSC) Bande indienne Wewayakum c Canada, 2003 CSC 45, à l’appui de l’argument selon lequel une personne raisonnable, en voyant ce paragraphe, croirait que le comité n’avait pas l’esprit ouvert lorsqu’il a tranché les allégations et n’a pas rendu une décision juste.

[105] L’appelant soutient également que le comité a commis une erreur en concluant que l’appelant avait fait une blague aux dépens de Mme BB. Il affirme que le comité aurait plutôt dû suivre la décision rendue par le surint. CL lors de la première rencontre disciplinaire, selon laquelle l’appelant avait été respectueux dans ses échanges avec Mme BB. De plus, l’appelant soutient que le comité a « écouté » l’appelant reconnaître que la rencontre était une blague et utilisé l’absence d’un tel aveu comme circonstance aggravante lors de la détermination des mesures disciplinaires. L’appelant ajoute qu’en « écoutant » l’appelant reconnaître qu’il avait fait une blague, le comité a suscité une crainte raisonnable de partialité, car il avait décidé à l’avance qu’il avait violé le code de déontologie (appel, p. 114). Enfin, il soutient que la conclusion selon laquelle il avait fait une blague a servi à renforcer la conclusion du comité en matière de crédibilité (appel, p. 115).

[106] Pour sa part, l’intimé soutient que le paragraphe 161 de la décision ne suscite aucune crainte raisonnable de partialité et que l’appelant sort ce paragraphe de son contexte. L’intimé convient que l’appelant a énoncé le bon critère pour déterminer si une crainte raisonnable de partialité a été suscitée.

[107] L’intimé souligne que, lorsqu’il s’agit d’apprécier une allégation de crainte raisonnable de partialité, les propos du décideur doivent être examinés dans leur contexte. Il fait observer que le paragraphe 161 figure sous la rubrique « Décision sur les mesures disciplinaires ». L’appelant a choisi de ne pas témoigner à l’étape de l’audience relative aux mesures disciplinaires, laissant plutôt au comité le soin de s’appuyer, notamment, sur le témoignage fourni par l’appelant à l’étape relative aux allégations. L’intimé soutient également que la conclusion du comité quant aux circonstances atténuantes et aggravantes commande un degré élevé de déférence (appel, p. 214).

[108] L’intimé soutient que la procédure suivie par le comité n’amènerait pas une personne raisonnable et bien renseignée à conclure qu’il était peu probable que le comité rende une décision juste et que le dossier ne renferme aucun élément étayant l’allégation de partialité de l’appelant.

[109] L’intimé soutient que le comité n’a pas [TRADUCTION] « tranché de nouveau l’allégation initiale ». Les événements ayant précédé le texte manquant, envoyé à 11 h 51, le 17 mars 2017, étaient pertinents quant aux allégations contenues dans l’avis d’audience disciplinaire. Selon l’intimé, l’allégation selon laquelle l’appelant avait fourni des renseignements faux ou trompeurs dans le cadre d’une enquête relative au code de déontologie se rapportait nécessairement à l’enquête elle-même. Par conséquent, l’intimé soutient que le comité pouvait tenir compte de l’ensemble du dossier et examiner tous les éléments de preuve comme bon lui semblait (appel, p. 215).

[110] En réplique, l’appelant soutient que le comité n’a pas nuancé les propos qu’il a tenus au paragraphe 161, par exemple en indiquant qu’il avait examiné la preuve de l’appelant relative à une reconnaissance de culpabilité seulement après avoir décidé que les allégations étaient établies. Le comité a plutôt indiqué qu’il avait écouté une reconnaissance de « responsabilité personnelle » « [t]out au long de [la] procédure », et non après avoir abordé l’étape relative aux mesures disciplinaires. L’appelant affirme que cela prouve l’existence d’une détermination à l’avance et d’une partialité (appel, p. 290).

[111] Enfin, l’appelant soutient que le comité n’est pas autorisé à tirer une conclusion supplémentaire voulant qu’il ait eu un « comportement trompeur » en se fondant uniquement sur l’affirmation selon laquelle il a présenté des « faits nouveaux […] non étayés par les preuves », comme il l’a fait au paragraphe 161.

[112] Je conviens avec le CEE que le contenu du paragraphe 161, de même que la décision dans son ensemble, ne suscitent aucune crainte raisonnable de partialité (rapport, par. 197).

[113] Les parties ont correctement énoncé le critère applicable en matière de crainte raisonnable de partialité, tel que confirmé par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Commission scolaire francophone du Yukon c Yukon (Procureure générale), [2015] 2 RCS 282 :

[20] Le critère applicable pour déterminer s’il existe une crainte raisonnable de partialité n’est pas contesté et il a été formulé pour la première fois par notre Cour en ces termes :

. . . à quelle conclusion en arriverait une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique. Croirait-elle que, selon toute vraisemblance, [le décideur], consciemment ou non, ne rendra pas une décision juste? […]

[21] Ce critère — à quelle conclusion en arriverait une personne raisonnable et bien renseignée — a été constamment approuvé et précisé par notre Cour

[…]

[22] L’objectif du critère est d’assurer non seulement l’existence, mais l’apparence d’un processus décisionnel juste. La question de la partialité est donc inextricablement liée au besoin d’impartialité. Dans l’arrêt Valente, le juge Le Dain a fait le lien entre l’absence de préjugé et l’impartialité, concluant que « [l]’impartialité désigne un état d’esprit ou une attitude du tribunal vis-à-vis des points en litige et des parties dans une instance donnée » et « connote une absence de préjugé, réel ou apparent » : p. 685. Les notions d’impartialité et d’absence de préjugé sont devenues des exigences tant juridiques qu’éthiques. Les juges doivent — et sont censés — aborder toute affaire avec impartialité et un esprit ouvert […]

[…]

[25] Puisqu’il y a une forte présomption d’impartialité judiciaire qui n’est pas facilement réfutable […], le critère servant à déterminer s’il existe une crainte raisonnable de partialité exige une « réelle probabilité de partialité » et que les commentaires faits par le juge pendant un procès ne soient pas considérés isolément […]

[26] Par conséquent, l’analyse de la question de savoir si le comportement du décideur suscite une crainte raisonnable de partialité est intrinsèquement contextuelle et fonction des faits, et le fardeau d’établir la partialité qui incombe à la partie qui en allègue l’existence est donc élevé […]

[114] Par ailleurs, dans l’arrêt R c S(RD), [1997] 3 RCS 484, au paragraphe 111, la Cour suprême a défini le critère applicable en matière de crainte raisonnable de partialité de la façon suivante :

[…] C’est ce critère qui a été adopté et appliqué au cours des deux dernières décennies. Il comporte un double élément objectif : la personne examinant l’allégation de partialité doit être raisonnable, et la crainte de partialité doit elle-même être raisonnable eu égard aux circonstances de l’affaire […] La personne raisonnable doit de plus être une personne bien renseignée, au courant de l’ensemble des circonstances pertinentes […]

[115] Il est établi dans la jurisprudence qu’une présomption d’impartialité s’applique aux décideurs (voir, par exemple, les décisions de la Cour fédérale et de la Cour d’appel fédérale dans Britton c Gendarmerie royale du Canada, 2012 CF 1325, au paragraphe 36; Zündel c Citron, [2000] 4 FC 225, aux paragraphes 36-37 [Zündel]; Beno c Canada (Commissaire et président de la Commission d’enquête sur le déploiement des Forces armées canadiennes en Somalie), [1997] ACF no 509 (CA), aux paragraphes 27 et 29. Il incombe donc à l’appelant d’établir l’existence d’une crainte raisonnable de partialité.

[116] Le paragraphe mis en cause par l’appelant figure à la page 44 de la décision du comité, sous la rubrique « Mesures disciplinaires ». Le comité a clairement indiqué qu’il était passé à l’étape de la détermination des mesures disciplinaires appropriées, après avoir établi que les allégations étaient prouvées selon la prépondérance des probabilités. Le GMD mentionne comme éventuelle circonstance atténuante l’acceptation de la responsabilité de ses actes, et comme circonstance aggravante l’absence de remords. Une personne raisonnable, informée des circonstances, conclurait que ces considérations font partie de la détermination appropriée des mesures disciplinaires. Par conséquent, elles ne révèlent aucunement une détermination à l’avance de la culpabilité par le comité.

[117] Comme l’a fait observer l’intimé, l’appelant n’a pas témoigné à l’étape de l’audience relative aux mesures disciplinaires (documents, 1 de 2, p. 1196 et 1282). Le comité a donc dû s’appuyer sur les éléments de preuve présentés à l’étape relative aux allégations. Je conviens avec le CEE que c’est ce que voulait dire le comité lorsqu’il a affirmé avoir [TRADUCTION] « écouté tout au long » (rapport, par. 195).

[118] Le comité est tenu d’examiner l’ensemble de la preuve. En l’absence de témoignage de l’appelant au sujet des mesures disciplinaires, notamment quant à savoir s’il acceptait la responsabilité de ses actes, le comité n’avait d’autre choix que d’examiner la partie de son témoignage fournie à l’étape relative aux allégations. Cela ne démontre aucunement l’existence d’une crainte raisonnable de partialité de la part du comité.

[119] Le comité a pris soin de soupeser soigneusement et explicitement les circonstances atténuantes et aggravantes en l’espèce et a expliqué pourquoi les dernières l’emportaient sur les premières, contribuant ainsi à la conclusion selon laquelle le congédiement était la sanction appropriée (appel, p. 50, par. 157). Le comité a souligné que la malhonnêteté constante de l’appelant constituait un élément central de la détermination des mesures disciplinaires. Le comité a fait remarquer que sa malhonnêteté était incompatible avec les éléments essentiels des valeurs fondamentales d’un membre que sont notamment l’honnêteté, l’intégrité, le professionnalisme, la compassion, la responsabilité et le respect (appel, p. 51, par. 159-160). La mûre réflexion à laquelle s’est livré le comité quant aux circonstances atténuantes et aggravantes démontre qu’il a procédé à un examen complet des mesures disciplinaires à imposer, sans susciter de crainte de partialité.

[120] De plus, le comité n’a pas [TRADUCTION] « tranché de nouveau » les allégations initiales, comme le soutient l’appelant; au contraire, il a examiné la preuve avant de tirer des conclusions sur les allégations. Comme l’a fait remarquer le CEE (rapport, par. 197) :

[TRADUCTION]

[…] Une partie de cette décision visait la conclusion selon laquelle l’appelant n’était pas au bureau du District de Y lors de la rencontre entre Mme BB et le serg. TG. Le serg. TG a déclaré qu’il n’était pas au courant de la rencontre et qu’il avait dû expliquer à Mme BB qu’elle ne recevait pas de récompense – ce qui l’avait contrariée – qui constituait la précision 4 de l’allégation 1 (appel, page 46, par. 132) […]

[121] L’allégation initiale se rapportait à la question de savoir si l’appelant avait enfreint l’article 2.1 du code de déontologie parce qu’il n’avait pas eu une conduite empreinte de respect et de courtoisie envers autrui. L’autorité disciplinaire a conclu dans ce cas que l’appelant avait organisé une rencontre entre Mme BB et le serg. TG sans informer le serg. TG que la rencontre aurait lieu. Les actes de l’appelant avaient mis Mme BB et le serg. TG dans l’embarras et fait naître une méfiance envers l’appelant. L’autorité disciplinaire a conclu qu’il avait manqué de courtoisie envers le serg. TG. Le comité n’a pas procédé à un réexamen des conclusions de l’autorité disciplinaire dans sa décision, étant donné surtout que la précision 4 de l’allégation 1 indiquait simplement que le serg. TG avait dû expliquer à Mme BB qu’elle ne recevait pas de récompense, ce qui l’avait contrariée. Une personne raisonnable, informée du contexte, ne conclurait pas à l’existence d’une crainte raisonnable de partialité sur la base de l’examen de la preuve pertinente par le comité.

[122] Enfin, comme l’a indiqué le CEE [TRADUCTION] « [l]’argument de l’appelant selon lequel le comité ne peut conclure à un “comportement trompeur” en se fondant sur son appréciation de la crédibilité de l’appelant à l’audience doit être rejeté » (rapport, par. 198). Le comité tentait simplement de déterminer s’il pouvait considérer le remords ou l’« acceptation de responsabilité » comme une circonstance atténuante. Le comité a finalement conclu qu’il n’avait pu déceler aucun remords, car il n’y avait eu aucune preuve de l’existence de cette circonstance atténuante tout au long de la procédure. Une personne raisonnable, informée de la situation, qui examinerait l’ensemble des actes du comité, ne conclurait pas à l’existence d’une crainte raisonnable de partialité.

Le comité a commis une erreur en omettant de citer deux témoins

[123] L’appelant soutient que la décision du comité de ne pas citer le gend. KX et le surint. CL constitue un manquement à l’équité procédurale.

[124] L’appelant affirme que le gend. KX était un témoin clé parce que sa déclaration écrite fait partie intégrante de l’allégation 2. Il soutient que l’omission de citer le gend. KX repose entièrement sur la déclaration non étayée de la RAD selon laquelle il vivait à l’étranger. L’appelant soutient que le comité aurait dû acquiescer à la demande de la RAD visant à citer le gend. KX et délivrer une citation à cette fin, même s’il aurait été « difficile de [la] faire respecter ».

[125] L’appelant souligne également que le surint. CL a été cité, mais qu’il a informé le comité quelques mois avant l’audience qu’il n’était pas en mesure de témoigner, sans fournir de justification. L’appelant soutient que le comité n’aurait pas dû permettre une telle chose, car le témoignage du surint. CL était crucial. Par exemple, l’appelant a insisté sur la nécessité d’un témoignage au sujet du courriel dont le surint. CL a envoyé une copie conforme à l’enquêteur disciplinaire, selon lequel [TRADUCTION] « le congédiement devrait être envisagé ou demandé dans la présente affaire ».

[126] L’appelant soutient que la décision du comité de ne pas citer ces deux témoins a empêché l’appelant de présenter un élément de preuve pouvant étayer sa défense.

[127] Pour sa part, l’intimé soutient que le comité n’a pas commis d’erreur en décidant de ne pas citer le gend. KX ou le surint. CL parce que l’appelant n’a jamais fait ressortir le caractère « crucial » de leur témoignage à l’audience. L’intimé souligne que l’appelant n’a proposé aucun témoin et que son RM a affirmé qu’il n’y avait [TRADUCTION] « aucun élément de preuve contesté dans le rapport d’enquête et [que] la déclaration du gend. KX [n’était] contredite par aucun élément de preuve admissible » (appel, p. 231).

[128] L’intimé fait observer qu’après que la RAD a indiqué qu’elle n’avait plus besoin du témoignage oral du surint. CL, l’appelant a aussi déclaré qu’il n’avait pas besoin de l’interroger (appel, p. 246).

[129] L’intimé soutient que l’appelant a eu amplement l’occasion, notamment dans le cadre de sa réponse, lors des conférences préparatoires ou à tout moment au cours de la procédure relative au code de déontologie, de mettre en lumière la nécessité des témoins. Il ne l’a jamais fait.

[130] Enfin, en réplique, l’appelant soutient qu’il ne lui incombait aucunement de citer le gend. KX comme témoin; c’était plutôt à l’intimé qu’il incombait de prouver ses prétentions.

[131] L’appelant ajoute que le comité aurait dû citer le gend. KX afin de démontrer que sa déclaration était un mensonge. Selon l’appelant, le comité s’est plutôt appuyé sur une déclaration non étayée selon laquelle le témoin se trouvait « à l’étranger ». Par conséquent, l’appelant soutient que le comité n’a pas satisfait au [TRADUCTION] « degré élevé d’équité procédurale » auquel a droit un membre exposé à une éventuelle ordonnance de licenciement (appel, p. 291).

[132] Il incombait à l’appelant de soulever toute question de procédure à la première occasion (Zündel). Ce principe a été énoncé dans plusieurs décisions, notamment dans Chrétien c Canada (Procureur général), 2005 CF 925, où la Cour fédérale a affirmé que la partie qui a éprouvé, par exemple, une crainte raisonnable de partialité de la part du décideur, doit soulever immédiatement cette question de procédure devant le tribunal « au lieu de ne sortir de son silence que si le résultat de l’instance ne lui est pas favorable ».

[133] Dans Zündel, la Cour d’appel fédérale a conclu ce qui suit :

[4] ...toute la manière d’agir d’EACL devant le Tribunal constituait une renonciation implicite de toute affirmation d’une crainte raisonnable de partialité de la part du Tribunal. La seule manière d’agir raisonnable pour une partie qui éprouve une crainte raisonnable de partialité serait d’alléguer la violation d’un principe de justice naturelle à la première occasion. En l’espèce, EACL a cité des témoins, a contre-interrogé les témoins cités par la Commission, a présenté un grand nombre d’arguments au Tribunal et a engagé des procédures devant la Division de première instance et cette Cour sans contester l’indépendance de la Commission. Bref, elle a participé d’une manière complète à l’audience et, par conséquent, on doit tenir pour acquis qu’elle a implicitement renoncé à son droit de s’opposer.

[…]

[8] L’appelant fait valoir en outre qu’il n’a pas renoncé à son droit de s’opposer et que, dans les faits, il s’est empressé d’agir après que l’arrêt Bell Canada, précité, eut été rendu. J’accepte que, pour être valide, une renonciation doit avoir été faite en toute liberté et en toute connaissance de cause des faits pertinents quant à la décision de renoncer ou de ne pas renoncer : Ex parte Pinochet Ugarte (No. 2), [1999] 2 W.L.R. 272 (H.L.) [...] Il me semble, par conséquent, qu’il ne s’agit pas là d’un prétexte justifiant l’omission de l’appelant de soulever au départ la question de l’indépendance institutionnelle. Plutôt que de faire cela, l’appelant, qui était représenté par un avocat tout au long du procès, a pris part à l’audience devant le tribunal sans jamais soulever la moindre opposition jusqu’au moment où il a déposé la requête du 31 mars 1998.

[134] L’appelant était représenté par un RM tout au long de la procédure. L’appelant et son RM n’ont pas soulevé la question selon laquelle le surint. CL ou le gend. KX devraient être tenus de comparaître devant le comité, alors qu’ils avaient été informés environ un mois avant l’audience qu’ils ne seraient pas cités comme témoins (appel, p. 244-246).

[135] L’appelant a plutôt choisi de ne citer aucun témoin et convenu qu’il n’était pas nécessaire de contre-interroger le surint. CL quand il a été informé que la RAD n’avait plus besoin de le citer comme témoin (documents, 2 de 2, p. 924). L’appelant a convenu de ne pas faire témoigner le surint. CL; par conséquent, il n’y a pas eu manquement à l’équité procédurale.

[136] La RAD a d’abord demandé que le gend. KX comparaisse comme témoin, mais a laissé entendre que cela pourrait être difficile à réaliser parce qu’on le croyait à l’étranger (documents, 2 de 2, p. 924). L’appelant affirme maintenant que la déclaration de la RAD était incorrecte parce qu’elle n’a pas été vérifiée. L’appelant a été informé le 24 mai 2019 que le comité avait décidé qu’il n’avait pas besoin d’entendre le témoignage du gend. KX. L’appelant aurait pu s’opposer à la décision du comité à ce moment-là, mais a choisi de ne pas le faire.

[137] L’appelant a participé à l’audience sans s’opposer à l’absence du témoignage crucial du surint. CL ou du gend. KX. Il a présenté des observations au sujet de la déclaration écrite du gend. KX et de l’absence de témoignage oral, encore une fois sans s’opposer à son absence. L’appelant a soutenu que la lettre du gend. KX faisait reposer sur la RAD le fardeau de prouver que l’appelant avait envoyé le message texte contesté, mais n’a pas affirmé, à l’époque, que l’omission de citer le gend. KX constituerait un manquement à l’équité procédurale.

[138] Je conviens avec le CEE que l’appelant a renoncé à son droit d’alléguer un manquement à l’équité procédurale quant aux mesures prises à l’égard de ces deux témoins. L’appelant a participé [TRADUCTION] « aux conférences préparatoires, aux audiences disciplinaires, au contre-interrogatoire des témoins, à son propre témoignage et à la présentation d’observations » (rapport, par. 214). L’appelant ne peut maintenant alléguer un abus de procédure alors qu’il a omis de soulever la question devant le comité et qu’il n’est pas satisfait de l’issue de l’audience.

[139] L’appelant soutient également qu’il ne lui incombait pas de citer le gend. KX ou le surint. CL comme témoins. Il soutient que le comité aurait dû citer les membres, alors que c’est aux parties qu’il incombe de le faire. L’article 18 des Consignes du commissaire (déontologie), DORS/2014-291 (CC (déontologie)) prévoit que les parties doivent fournir une liste des témoins qu’elles désirent citer, et que le comité établit ensuite une liste des témoins qu’il entendra en exposant les raisons pour lesquelles il a accepté ou rejeté l’un des témoins demandés. C’est exactement ce qu’a fait le comité en mai 2019.

[140] Le CEE s’est penché sur cette question dans C-2016-005 (C-017). L’arbitre a convenu avec le CEE que le comité de déontologie n’est pas tenu de citer des témoins au nom des parties. En l’espèce, l’appelant a eu de nombreuses occasions de contester la décision du comité de ne pas délivrer une citation pour le gend. KX, mais a choisi de ne pas le faire. Lorsqu’il a appris que la RAD n’avait plus l’intention de citer ces témoins, l’appelant aurait pu demander lui-même qu’ils soient cités. L’appelant ne peut plus soulever cette question comme moyen d’appel parce qu’il ne s’y est jamais opposé lors des CP, dans ses observations ou au cours de l’audience elle-même.

La décision du comité est manifestement déraisonnable et non étayée par la preuve

Norme de contrôle

[141] Bien que l’appelant soutienne que la décision du comité est à la fois entachée d’une erreur de droit et manifestement déraisonnable, j’estime que les arguments ayant trait aux conclusions du comité portent entièrement sur l’appréciation des faits du comité et les inférences qu’il en a tirées. De plus, l’appelant présente son argument selon lequel le comité lui a imposé un fardeau de preuve plus lourd comme une question d’équité procédurale. J’estime que cet argument concerne également l’appréciation des faits du comité. La norme établie au paragraphe 33(1) des CC (griefs et appels) en ce qui concerne les questions de fait et les questions mixtes de fait et de droit consiste à savoir si la décision est manifestement déraisonnable. Je vais maintenant examiner la norme de contrôle applicable.

[142] Dans Canada (Procureur général) c Zimmerman, 2015 CF 208, au paragraphe 45, la juge McVeigh de la Cour fédérale pose comme principe que « [l]e caractère raisonnable d’une décision tient à sa justification, à sa transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles et acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9; Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12) ».

[143] En examinant l’arrêt de la Cour suprême Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 (Vavilov), le juge Norris de la Cour fédérale, dans Bell Canada c Hussey, 2020 CF 795, s’est penché sur la notion de décision raisonnable, soulignant ce qui suit, au paragraphe 30 :

Le contrôle judiciaire selon la norme de la décision raisonnable s’intéresse « à la décision effectivement rendue par le décideur, notamment au raisonnement suivi et au résultat de la décision » (Vavilov, au par. 83). Une décision raisonnable « doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti » (Vavilov, au par. 85). Les motifs du décideur doivent être lus à la lumière du dossier et en tenant compte du contexte administratif dans lequel ils ont été fournis (Vavilov, aux par. 91-95). Lorsqu’elle décide si une décision est raisonnable, la cour de révision « doit donc se demander si la décision possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité, et si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle-ci » (Vavilov, au par. 99).

[144] Toutefois, le paragraphe 33(1) des CC (griefs et appels) exige que je détermine si la décision est « manifestement déraisonnable », et non pas simplement « déraisonnable ». En quoi consiste exactement cette norme du caractère « manifestement déraisonnable »? La Cour fédérale, dans Kalkat c Canada (Procureur général), 2017 CF 794, et la Cour d’appel fédérale, dans Smith c Canada (Procureur général), 2021 CAF 73, ont toutes deux reconnu que le terme « clearly unreasonable » (manifestement déraisonnable) employé dans les CC (griefs et appels) est en fait l’équivalent de la norme du caractère « patently unreasonable » (manifestement déraisonnable), qui est reconnue depuis longtemps dans la jurisprudence.

[145] Il y a une distinction à faire entre la décision « déraisonnable » et celle qui est « manifestement déraisonnable », cette dernière constituant le critère applicable aux appels en matière de déontologie en vertu des CC (griefs et appels). Dans l’arrêt Canada (Directeur des enquêtes et recherches) c Southam Inc., [1997] 1 RCS 748, la Cour suprême a formulé les observations suivantes au sujet de cette différence :

[56] Je conclus que cette troisième norme devrait être fondée sur la question de savoir si la décision du Tribunal est déraisonnable. Ce critère doit être distingué de la norme de contrôle qui appelle le plus haut degré de retenue, et en vertu de laquelle les tribunaux doivent dire si la décision du tribunal administratif est manifestement déraisonnable. Est déraisonnable la décision qui, dans l’ensemble, n’est étayée par aucun motif capable de résister à un examen assez poussé. En conséquence, la cour qui contrôle une conclusion en regard de la norme de la décision raisonnable doit se demander s’il existe quelque motif étayant cette conclusion. Le défaut, s’il en est, pourrait découler de la preuve elle-même ou du raisonnement qui a été appliqué pour tirer les conclusions de cette preuve. Un exemple du premier type de défaut serait une hypothèse qui n’avait aucune assise dans la preuve ou qui allait à l’encontre de l’essentiel de la preuve. Un exemple du deuxième type de défaut serait une contradiction dans les prémisses ou encore une inférence non valable.

[57] La différence entre « déraisonnable » et « manifestement déraisonnable » réside dans le caractère flagrant ou évident du défaut. Si le défaut est manifeste au vu des motifs du tribunal, la décision de celui-ci est alors manifestement déraisonnable. Cependant, s’il faut procéder à un examen ou à une analyse en profondeur pour déceler le défaut, la décision est alors déraisonnable mais non manifestement déraisonnable. Comme l’a fait observer le juge Cory dans Canada (Procureur général) c. Alliance de la fonction publique du Canada, [1993] 1 R.C.S. 941, à la p. 963, «[d]ans le Grand Larousse de la langue française, l’adjectif manifeste est ainsi défini : “Se dit d’une chose que l’on ne peut contester, qui est tout à fait évidente” ». Cela ne veut pas dire, évidemment, que les juges qui contrôlent une décision en regard de la norme du caractère manifestement déraisonnable ne peuvent pas examiner le dossier. Si la décision contrôlée par un juge est assez complexe, il est possible qu’il lui faille faire beaucoup de lecture et de réflexion avant d’être en mesure de saisir toutes les dimensions du problème. […] Mais une fois que les contours du problème sont devenus apparents, si la décision est manifestement déraisonnable, son caractère déraisonnable ressortira.

[146] Dans l’arrêt Barreau du Nouveau-Brunswick c Ryan, 2003 CSC 20, au paragraphe 52, la Cour suprême a affirmé que la décision manifestement déraisonnable est celle qui est « clairement irrationnelle », « de toute évidence non conforme à la raison » ou « à ce point viciée qu’aucun degré de déférence judiciaire ne peut justifier de la maintenir ».

[147] Je dois en l’espèce déterminer si l’appelant a établi que le comité, en se fondant sur la preuve (ou l’absence de preuve) utilisée pour arriver à sa conclusion, a rendu une décision manifestement déraisonnable. Dans cette appréciation, je m’inspire des propos des juges majoritaires dans l’arrêt de la Cour suprême Colombie-Britannique (Worker’s Compensation Appeal Tribunal) c Fraser Health Authority, 2016 CSC 25 (CB (WCAT)). Dans cette affaire, la Cour suprême était appelée à déterminer si la décision d’un tribunal était « patently unreasonable » (manifestement déraisonnable), le terme employé à l’article 58 de l’Administrative Tribunals Act, S.B.C. 2004, c.45, de la Colombie-Britannique. Plus précisément, la Cour suprême a examiné la question de savoir à quel moment le recours d’un tribunal à un élément de preuve peut entrer dans le champ de la décision « manifestement déraisonnable ».

[148] Dans l’arrêt BC (WCAT), la Cour suprême a conclu ce qui suit, au paragraphe 30 :

En concluant que le cancer du sein dont étaient atteintes les employées constituait une maladie professionnelle causée par la nature de leur emploi, le Tribunal a tiré une conclusion de fait (Ediger c. Johnston, 2013 CSC 18, [2013] 2 R.C.S. 98, par. 29). Cette conclusion commande donc la retenue, sauf si Fraser Health démontre son caractère manifestement déraisonnable, à savoir que « les éléments de preuve, perçus de façon raisonnable, ne peuvent étayer les conclusions de fait du tribunal » (Conseil de l’éducation de Toronto (Cité), par. 45). Étant donné que la cour doit faire preuve de retenue lorsque les éléments de preuve peuvent étayer (par opposition à démontrer de façon concluante) une conclusion de fait, le caractère manifestement déraisonnable n’est pas établi lorsque la cour de révision estime simplement que la preuve est insuffisante (Speckling c. Workers’ Compensation Board (B.C.), 2005 BCCA 80, 209 B.C.A.C. 86, par. 37). En d’autres termes, selon cette norme de contrôle, la cour de révision doit s’abstenir d’apprécier de nouveau la preuve, de rejeter les conclusions que le juge des faits en avait tirées ou de substituer ses propres conclusions à celles du juge des faits.

[En italique dans l’original; je souligne.]

[149] Enfin, dans sa Recommandation C-013, le CEE a conclu que [TRADUCTION] « la question de savoir si une décision portée en appel était manifestement déraisonnable aux fins du paragraphe 33(1) des CC (griefs et appels) dans le contexte d’une allégation d’erreur de fait ou d’erreur mixte de fait et de droit par une autorité disciplinaire consiste à déterminer si l’erreur était une erreur claire ou manifeste qui a été déterminante dans la décision portée en appel ». Le CEE reconnaît donc la déférence qui doit être accordée au décideur qui tire des conclusions fondées sur une appréciation des faits.

[150] Je dois donc m’abstenir de modifier la décision, à moins que l’appelant n’établisse que la décision du comité est entachée d’une erreur claire, manifeste et déterminante, démontrant ainsi que la décision est manifestement déraisonnable. Il ne suffit pas de démontrer que les motifs fournis sont insuffisants. L’appelant doit non seulement prouver que le comité a commis une erreur, mais aussi que l’erreur est telle que je n’ai d’autre choix que d’annuler la décision. C’est là la norme imposée par les CC (griefs et appels). Par conséquent, je dois faire preuve d’une grande déférence à l’égard de la décision du comité.

Observations

[151] L’appelant soutient que la décision du comité était manifestement déraisonnable pour deux raisons :

  1. le comité a commis une erreur en lui imposant une norme de preuve plus élevée que celle appliquée aux témoins de la RAD (appel, p. 116);
  2. le comité a commis une erreur en tirant des conclusions non étayées par la preuve.

[152] L’appelant présente plusieurs arguments à l’appui de son observation selon laquelle on lui a imposé une norme de preuve plus élevée. D’abord, il souligne que le comité n’a pas cru son compte rendu des rencontres avec l’off. resp. p. i. parce qu’il n’a pas pris de notes sur celles-ci, alors qu’il n’a pas mis en doute les propos des autres témoins qui n’ont pas fourni de notes sur les mêmes rencontres.

[153] Ensuite, il souligne que le comité s’est fondé sur de légères divergences (des différences de 15 minutes, un an plus tard) pour tirer ses conclusions défavorables en matière de crédibilité. En revanche, le comité n’a pas fait cas des problèmes semblables que posaient certains témoins, notamment l’off. resp. p. i., qui aurait fait de faux relevés concernant le congé de l’appelant.

[154] L’appelant soutient également que le comité n’a pas pris acte du fait que le s.é.-m. DM, un enquêteur dans la Division X, et l’off. resp. p. i. ont omis de le mettre en garde avant de recueillir ses déclarations.

[155] L’appelant soutient qu’il était déraisonnable pour le comité d’affirmer qu’il serait inapproprié de critiquer les méthodes d’enquête employées en l’absence d’une requête formelle. Il a mis cette décision en contraste avec le fait que le comité a critiqué l’appelant pour avoir présenté de nouveaux éléments de preuve à l’audience et leur a attribué peu de poids parce qu’ils n’avaient pas été divulgués antérieurement.

[156] Le CEE a résumé plusieurs autres arguments avancés par l’appelant quant aux conclusions tirées par le comité et à leur absence de fondement, rendant la décision manifestement déraisonnable (rapport, par. 221) :

[TRADUCTION]

· Mme BB a proposé à plusieurs reprises de faire une déclaration, et l’appelant n’a pas accusé réception de son offre (par. 49), alors qu’un courriel entre l’appelant et Mme BB montre que l’appelant lui a demandé une déclaration, qu’elle n’a jamais fournie;

· l’appelant n’avait pas eu l’intention d’assister à la rencontre qu’il avait organisée entre Mme BB et le serg. TG (par. 50), alors qu’il a déclaré avoir eu l’intention d’y assister, et a fait abstraction de son témoignage selon lequel c’était son incapacité à obtenir une voiture de location qui l’avait empêché d’assister à la rencontre;

· l’appelant n’a pas pu expliquer en contre-interrogatoire comment il était arrivé sur les lieux de la plainte relative à la circulation de Mme BB (par. 51), alors qu’il n’a pas été questionné sur ce fait en contre-interrogatoire;

· son témoignage oral au sujet de sa chronologie du 17 mars 2017 était incompatible avec les renseignements qu’il avait fournis dans sa réponse au rapport d’enquête (par. 55), alors que la chronologie fournie dans sa réponse ne comportait que des heures approximatives;

· l’appelant a eu du mal à se rappeler les noms des personnes qu’il a rencontrées au café, en plus du gend. KX (par. 55), alors qu’en réalité, il a hésité sur un seul nom parce qu’il avait l’habitude de s’adresser à ce gendarme par son prénom et qu’ils n’utilisaient généralement pas les noms de famille;

· la conclusion selon laquelle les relevés du téléphone portable n’auraient pas résolu la question de savoir qui avait envoyé le texte était déraisonnable (par. 63), car ces relevés auraient démontré que l’appelant se trouvait là où il prétendait être et renforcé sa crédibilité;

· la conclusion selon laquelle l’heure à laquelle l’appelant s’est enregistré à la porte d’embarquement n’aurait pas aidé à établir sa chronologie était déraisonnable (par. 65), car elle aurait démontré à quel moment il est monté à bord de l’avion et aurait pu corroborer sa chronologie;

· le c. div. p. i. n’aurait pas suivi l’appelant pendant l’heure du repas dans un bureau très fréquenté, en exigeant à plusieurs reprises de savoir quelque chose pour satisfaire une « curiosité banale » (par. 91), alors que ni le c. div. p. i. ni l’appelant n’ont déclaré que le bureau était très fréquenté. De plus, il ne s’agissait pas d’une « curiosité banale », mais d’une question qui était au cœur de l’affaire disciplinaire de l’appelant, car cela contredisait directement le témoignage de l’appelant selon lequel le s.é.-m. AB l’avait suivi dans le hall en le questionnant sur ce qu’il était advenu du message;

· la conclusion selon laquelle le témoignage de l’enquêteur dans la Division Y au sujet du temps que le gend. KX a passé au bureau du District de Y était exact (par. 102-103), alors que la séquence vidéo sur laquelle portait son témoignage n’a jamais été divulguée et qu’elle aurait pu montrer le gend. KX qui sortait du bureau pour rencontrer l’appelant, comme l’a déclaré l’appelant dans son témoignage, était déraisonnable;

· la conclusion selon laquelle l’appelant a parcouru à pied les 10 kilomètres qui séparent l’hôtel du café avec ses bagages à la traîne (par. 107), alors qu’en fait l’appelant a déclaré qu’il avait pris un taxi pour se rendre au café, et qu’on ne l’a pas questionné davantage sur ce trajet, était déraisonnable;

· l’enquêteur dans la Division Y a confirmé que, selon Google Maps, le temps de conduite entre le bureau du District de Y et l’aéroport était d’environ 36 minutes (par. 109), alors que la recherche dans Google Maps a été effectuée un an après le voyage de l’appelant, et que d’importantes modifications ont été apportées aux routes depuis lors, ce dont a fait fi le comité, même si l’appelant a témoigné à leur sujet;

· il serait déraisonnable que l’appelant se soit trouvé dans la file de contrôle de sécurité de l’aéroport dans les cinq minutes suivant son arrivée en taxi pour que sa chronologie soit exacte (par. 110), alors que l’appelant a déclaré qu’il s’agissait d’un petit aéroport, comptant un seul terminal, et que le comité n’a fourni aucune justification quant à savoir pourquoi il n’a pas cru le témoignage de l’appelant;

· il a tenu des propos incohérents en déclarant qu’il ne s’était pas préoccupé de l’heure de son départ du café parce qu’il n’aimait pas arriver tôt à l’aéroport (par. 111). L’appelant a déclaré qu’il ne voulait pas être impoli s’il devait quitter plus tôt la réunion avec Mme BB et qu’il n’était pas vêtu de manière professionnelle, étant donné qu’il portait des vêtements confortables de voyage, non adaptés à une réunion;

· l’enquêteur dans la Division Y a tenté à plusieurs reprises, mais en vain, de contacter le gend. KX (par. 114), alors qu’en fait l’enquêteur a parlé au gend. KX lorsqu’il l’a appelé et que tout ce que le s.é.-m. ML lui a dit, c’est qu’il avait des documents à lui remettre; il n’est donc pas surprenant que le gend. KX n’ait pas donné suite à cet ordre vague et imprécis.

[157] L’intimé soutient que les conclusions du comité sont raisonnables et étayées par la preuve. Le comité a apprécié la crédibilité et la fiabilité de chacun des témoins de la RAD et examiné à fond l’ensemble de la preuve dont il disposait.

[158] L’intimé soutient que le comité a imposé tant à la RAD qu’à l’appelant le fardeau de preuve approprié, à savoir celui de la prépondérance des probabilités. Il soutient que la raison pour laquelle le comité a rejeté le compte rendu de l’appelant tenait à son caractère évolutif et changeant. L’intimé souligne que les divergences dans la chronologie de l’appelant ne sont pas légères, étant donné que la défense de l’appelant reposait sur sa capacité de rencontrer le gend. KX dans un très court laps de temps.

[159] L’intimé réfute l’affirmation de l’appelant voulant que l’on ait conclu que l’off. resp. p. i. avait [TRADUCTION] « fait de faux relevés ». L’intimé fait remarquer que l’off. resp. p. i. a reconnu que les relevés qu’il tenait sur le congé de l’appelant n’étaient peut-être pas exacts lorsqu’on l’a questionné au sujet de leur exactitude (documents, 1 de 2, p. 923).

[160] L’intimé fait observer que l’appelant n’a pas invoqué l’argument selon lequel il n’avait pas été mis en garde avant de faire des déclarations au moment où le comité a été saisi de l’affaire.

[161] L’intimé fait également observer que l’appelant a eu amplement l’occasion de présenter une requête concernant le caractère de l’enquête et que le dossier révèle que le comité était conscient des lacunes de l’enquête et a tenu compte de l’incidence de ces lacunes sur la preuve.

[162] L’intimé affirme que le comité pouvait considérer que les incohérences dans les déclarations et le témoignage de l’appelant nuisaient à sa crédibilité.

[163] L’intimé soutient également que le comité n’a pas commis d’erreur dans son appréciation du témoignage de l’off. resp. p. i. Il n’a pas pris de notes sur sa rencontre avec l’appelant, mais il a fait une déclaration dans le mois qui a suivi la conversation et son témoignage concordait avec sa déclaration; l’intimé fait valoir que l’appréciation du témoignage de l’off. resp. p. i. est une question mixte de fait et de droit, qui commande la déférence.

[164] L’intimé ajoute que le comité n’a pas commis d’erreur en concluant que Mme BB avait proposé de faire une déclaration, une offre dont l’appelant n’a pas tenu compte, comme le démontre la preuve (appel, p. 252).

[165] L’intimé soutient que le comité n’a pas commis d’erreur en concluant que les déclarations et le témoignage de l’appelant étaient incohérents, et que le comité a suffisamment justifié ses conclusions concernant les allées et venues du gend. KX le 17 mars 2017. L’intimé souligne que le comité disposait d’une preuve concrète sur ce point, notamment une vidéo de surveillance et un registre des cartes d’accès indiquant que le gend. KX se trouvait dans le bureau de la Division Y à 11 h 51 le 17 mars 2017.

[166] L’intimé soutient que le comité n’a pas commis une erreur manifeste et déterminante en ce qui a trait à sa conclusion sur la façon dont l’appelant est arrivé au café. L’appelant a déclaré qu’il était arrivé en taxi, mais le comité avait des raisons de douter de son témoignage.

[167] L’intimé rappelle que le comité a reconnu les limites du témoignage de l’enquêteur au sujet de Google Maps. L’enquêteur avait souligné qu’il était impossible de recréer les conditions de déplacement en vigueur ce jour-là; par conséquent, Google Maps n’a été utilisé qu’à titre d’estimation du temps de déplacement.

[168] L’intimé soutient que le comité était en droit de se fonder sur le bon sens pour rejeter le témoignage de l’appelant concernant la file de contrôle de sécurité de l’aéroport. L’intimé affirme que la déférence est de mise à l’égard de la décision du comité de rejeter la déclaration de l’appelant selon laquelle il ne voulait pas être en retard à la rencontre avec Mme BB alors qu’il s’était montré désinvolte à l’idée de manquer son vol.

[169] De plus, l’intimé soutient que le comité n’a pas commis d’erreur en ce qui a trait à sa conclusion selon laquelle les tentatives de l’enquêteur pour contacter le gend. KX étaient adéquates et conformes au journal d’enquête.

[170] En réplique, l’appelant affirme que l’intimé tente d’interpréter le « bon sens » comme une justification à l’égard de la conclusion du comité, alors que le comité n’a jamais invoqué le bon sens comme motif à l’appui de sa conclusion relative à la chronologie prétendument insensée de l’appelant quant au 17 mars 2017.

[171] Enfin, l’appelant soutient que l’intimé n’a pas abordé l’omission de l’enquêteur de divulguer la séquence vidéo de la porte avant principale du bureau de district du 17 mars 2017. Selon l’appelant, il s’agit d’une grave erreur, car elle a été mentionnée dans le rapport d’enquête, qui indiquait qu’aucune autre porte d’entrée et de sortie n’est normalement utilisée au bureau à l’exception des portes de sortie de secours munies d’une alarme.

Conclusions

[172] Je conviens avec le CEE que le comité n’a pas commis d’erreur dans son évaluation de la crédibilité des parties (rapport, par. 244). Le comité a souligné à juste titre qu’il lui incombait de déterminer si la RAD avait établi les allégations selon la prépondérance des probabilités, et qu’il n’existe pas de critère objectif de la suffisance; la décision doit plutôt être fondée sur une preuve claire et convaincante (F.H. c McDougall, 2008 CSC 53) (appel, p. 20, par. 16 et 17).

[173] Dans Huang c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 940 (Huang), la Cour fédérale du Canada s’est penchée à nouveau sur le principe qui a été examiné à fond dans Ferguson c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 1067 (Ferguson) concernant le lien entre le poids, la suffisance et la crédibilité de la preuve. Au paragraphe 42 de la décision Huang, la Cour fédérale a affirmé ce qui suit :

Le terme « crédibilité » est souvent utilisé à tort dans un sens élargi pour signifier que les éléments de preuve ne sont pas convaincants ou suffisants. Il s’agit toutefois de deux concepts différents. L’évaluation de la crédibilité est liée à la fiabilité de la preuve. Lorsqu’on conclut que la preuve n’est pas crédible, on conclut que l’origine de la preuve (par exemple, le témoignage du demandeur) n’est pas fiable. La fiabilité de la preuve est une chose; cependant, la preuve doit aussi avoir une valeur probante suffisante pour satisfaire à la norme de preuve applicable. L’évaluation de la suffisance porte sur la nature et la qualité des éléments de preuve qu’un demandeur doit présenter pour obtenir réparation, sur leur valeur probante et sur l’importance que le juge des faits doit accorder aux éléments de preuve, qu’il s’agisse d’une cour ou d’un décideur administratif. Le droit de la preuve utilise un système binaire où deux possibilités existent : soit un fait existe, soit il n’existe pas. Lorsqu’un doute persiste dans l’esprit du juge des faits, le doute est résolu par la règle selon laquelle il incombe à une partie de démontrer que la preuve présentée pour corroborer l’existence ou la non-existence d’un fait est suffisante pour satisfaire à la norme de preuve applicable. Dans […] [McDougall], la Cour suprême du Canada a conclu qu’il n’existe qu’une seule norme civile de preuve au Canada, celle de la prépondérance des probabilités : « le juge du procès doit examiner la preuve attentivement » et « la preuve doit toujours être claire et convaincante pour satisfaire au critère de la prépondérance des probabilités ».

[174] Au paragraphe 44, la Cour fédérale a ajouté ceci :

...lorsqu’un juge des faits évalue le poids et la suffisance de la preuve, il dit simplement que « la preuve qui a été présentée n’a pas de valeur probante suffisante, soit en elle-même, soit combinée aux autres éléments de preuve, pour établir, selon la prépondérance de la preuve, les faits pour lesquels elle est présentée » [(Ferguson, au para 27)]. Il n’est pas nécessaire que la preuve satisfasse au critère de fiabilité (c.-à-d. preuve crédible) pour en évaluer le poids et le caractère suffisant. Le juge des faits peut très bien évaluer le poids et la valeur probante des éléments de preuve sans en examiner au préalable la crédibilité (Ferguson, au para 26). Cela se produira lorsque le juge des faits estime qu’on doit accorder peu ou pas de poids à la preuve, même si celle-ci a été considérée comme fiable.

[175] Avant d’analyser l’ensemble du raisonnement du comité, je souligne que la décision du comité comporte deux erreurs de fait.

[176] D’abord, le comité a conclu que l’appelant n’avait pas expliqué comment il s’était rendu de son hôtel au café. Le comité a présumé qu’il avait marché et souligné qu’il était peu probable que l’appelant ait parcouru 10 kilomètres, avec ses bagages, en 30 minutes (appel, p. 42, par. 107). En réalité, l’appelant a déclaré qu’il avait pris un taxi de son hôtel au café, mais n’avait erronément réclamé qu’une seule course en taxi vers l’aéroport. Aucune autre question n’a été posée à l’appelant à ce sujet à l’audience disciplinaire (documents, 1 de 2, p. 1052).

[177] Ensuite, le comité a conclu que l’appelant n’avait pas pu expliquer comment il était arrivé, dans les 50 secondes ayant suivi la réception de l’appel, sur les lieux de l’accident de la route signalé par Mme BB (appel, p. 28, par. 51). En réalité, l’appelant n’a jamais été questionné sur cette question particulière. Selon le rapport d’incident, l’appelant a reçu l’appel à 15 h 56 min 41 s et est arrivé sur les lieux à 15 h 57 min 50 s, puis a classé l’appel à 16 h 11 min 24 s (documents, 2 de 2, p. 41). L’appelant a été questionné sur le rapport et a déclaré que quelqu’un d’autre avait saisi les renseignements dans le système en son nom (documents, 1 de 2, p. 1124-1125).

[178] On trouve un exemple de la norme au regard de laquelle je dois déterminer si le comité a procédé à une analyse appropriée pour étayer sa conclusion dans Victoria Times Colonist c Communications, Energy and Papeworkers, 2008 BCSC 109 (confirmé dans 2009 BCCA 229), au paragraphe 65, où la Cour d’appel de la Colombie-Britannique a affirmé ce qui suit :

[TRADUCTION]

Lorsqu’elle est appelée à se prononcer sur le caractère manifestement déraisonnable d’une décision, la cour ne doit pas se demander si elle est convaincue par le raisonnement que le tribunal a suivi pour rendre sa décision; elle doit simplement se demander si, lorsqu’on examine la décision dans son ensemble, il y a une analyse soutenable ou rationnelle étayant la décision, de sorte que la décision n’est pas clairement irrationnelle ou, pour reprendre la formulation employée dans Ryan, si la décision est à ce point viciée qu’aucun degré de déférence judiciaire ne peut justifier de la maintenir […]

[179] En l’espèce, les deux erreurs qui ont été relevées ne font pas en sorte qu’il n’y a pas d’« analyse soutenable » étayant la décision. Ces deux erreurs se rapportent aux conclusions du comité quant à la crédibilité de l’appelant; cependant, comme je l’ai déjà mentionné, le comité a recensé plusieurs raisons de douter de sa crédibilité. Le CEE a résumé les nombreuses divergences dans les déclarations et le témoignage de l’appelant qui ont amené le comité à faire une appréciation défavorable de sa crédibilité (rapport, par. 248) :

[TRADUCTION]

a) l’appelant a fourni une chronologie très détaillée de ses activités le matin du 17 mars 2017, dans sa réponse au titre du paragraphe 15(3), notant les heures avec précision, à la minute près, et dans son témoignage oral, cette chronologie a varié de 15 minutes. Le comité a conclu que ce témoignage évolutif de l’appelant n’était pas crédible (décision, par. 55, 106, 110);

b) l’appelant n’était pas crédible au sujet de ses interactions avec le c. div. p. i. qui lui a signifié les documents de l’enquête relative au code de déontologie concernant les allégations initiales, le s.é.-m. GS, car lorsqu’on l’a questionné sur sa réponse au s.é.-m. GS lorsque celui-ci lui a montré les divergences dans le rapport, il a déclaré qu’il l’avait déjà vu, mais n’a pas pu expliquer comment ni quand, ce qui n’était pas étayé par la preuve au dossier (décision, par. 53). Le comité a également conclu que le fait que l’appelant ait vu la divergence contenue dans les messages textes avant que le rapport lui ait été signifié aurait constitué un manquement au processus d’enquête, et le comité n’a pas cru l’appelant lorsqu’il a déclaré qu’il l’avait vu avant sa rencontre avec le s.é.-m. GS (décision, par. 85);

c) après sa rencontre avec le s.é.-m. GS, le c. div. p. i. qui lui a signifié les documents de l’enquête relative au code de déontologie concernant les allégations initiales, l’appelant s’était envoyé à lui-même un courriel où il mentionnait que le s.é.-m. GS avait indiqué que l’appelant s’exposait à des mesures de l’ordre de deux à trois jours. Il n’a pas pu expliquer pourquoi il n’avait pas mentionné le fait qu’il se serait agi d’un interrogatoire au cours duquel il s’était senti contraint de donner une explication su sujet des messages textes sous la menace de perdre son emploi. L’appelant a déclaré que c’était parce qu’il avait dû partir chercher ses enfants. Le comité a conclu qu’il était « incroyable » que l’appelant ait mentionné les mesures de l’ordre de deux à trois jours, sans faire état de la nature conflictuelle de la rencontre (décision, par. 84). Le comité a conclu que la version des faits du s.é.-m. GS était plus plausible, compte tenu de l’objet de la réunion, de l’expérience antérieure du s.é.-m. GS et des autres préoccupations quant à la crédibilité de l’appelant;

d) le témoignage de l’appelant selon lequel le s.é.-m. AB, le c. div. p. i. qui avait discuté de l’autorité disciplinaire avec lui, avait jugé nécessaire de s’engager dans une telle « interaction vigoureuse » parce qu’il ne pensait pas que le s.é.-m. AB « savait comment des messages étaient effacés [du] téléphone ou comment c’était possible. Je ne sais pas s’il est très doué avec la technologie » était peu probable, et qu’il était plus probable que l’interaction s’était déroulée comme l’avait décrite le s.é.-m. AB, ne trouvant pas crédible la version de l’appelant (décision, par. 89-92).

[180] Je conviens avec le CEE que les divergences mises en évidence par le comité et le caractère changeant du témoignage de l’appelant démontrent clairement l’existence d’une analyse soutenable et rationnelle étayant une conclusion selon laquelle l’appelant manque de crédibilité. Les deux erreurs qui ont été relevées ne minent pas la décision à tel point qu’il faille maintenant la considérer comme irrationnelle. L’analyse de la crédibilité de l’appelant ne repose pas entièrement sur ces deux conclusions erronées, si bien qu’elles ne constituent pas des lacunes fatales de la décision du comité prise dans son ensemble.

[181] Il convient également de souligner que l’appelant a reconnu que les témoins que la RAD a cités à comparaître à l’audience étaient crédibles et qu’il a expressément reconnu la crédibilité de chaque témoin (documents, 1 de 2, p. 1224). Il a même fait observer que le rapport d’enquête était tout à fait crédible et fiable (documents, 1 de 2, p. 1232).

[182] L’argument de l’appelant voulant que le rapport soulève des problèmes de crédibilité contredit les observations qu’il a présentées à l’audience disciplinaire. L’appelant n’a pas contesté la crédibilité des témoins à l’audience. Par conséquent, il ne peut maintenant affirmer en appel qu’ils n’auraient pas dû être jugés crédibles ou qu’on a imposé à leur égard une norme de preuve différente après avoir reconnu le contraire.

[183] Le comité a expressément reconnu qu’il devait déterminer si les témoins disaient la vérité et si leur témoignage était fiable, selon la prépondérance des probabilités, compte tenu de l’ensemble de la preuve. Le comité a affirmé que, lorsque des incohérences ont des répercussions sur la crédibilité d’un témoin, la probabilité des faits déclarés sous serment ne peut être évaluée uniquement en fonction du comportement du témoin, mais doit aussi l’être en se demandant si sa déclaration a une apparence de vraisemblance, de sorte qu’elle a un « clair air de vérité » (appel, p. 16-17, par. 25-30).

[184] Le comité a conclu que les off. resp. p. i. étaient tous les deux crédibles et l’appelant l’a lui-même reconnu. Je conclus qu’il était raisonnable pour le comité de tirer cette conclusion, compte tenu de la cohérence entre les réponses qu’ils ont données un mois après les interactions et celles qu’ils ont données de nouveau devant le comité.

[185] Bien que l’appelant affirme le contraire, le comité a clairement examiné la crédibilité du témoignage de l’un des off. resp. p. i., à savoir le s.é.-m. AB. Le comité a exprimé des doutes quant au souvenir qu’il se faisait de la formulation utilisée par l’appelant lors de leur rencontre (appel, p. 25, par. 40), ce qui démontre que le comité a bel et bien apprécié la crédibilité de chaque témoin et imposé à leur égard la même norme de preuve que celle imposée à l’appelant. De plus, la déclaration de l’appelant voulant que l’on ait conclu que le s.é.-m. AB avait [TRADUCTION] « fait de faux relevés » n’est pas étayée par le dossier. Ce dernier a simplement reconnu que ses relevés n’étaient peut-être pas exacts lorsqu’on l’a questionné au sujet de leur exactitude (documents, 1 de 2, p. 923). Manifestement, le s.é.-m. AB n’essayait pas de tromper le comité au sujet de ces relevés, qui ne se rapportaient pas non plus aux allégations. Les relevés concernaient les présences de l’appelant; le s.é.-m. AB a déclaré qu’il ne savait pas si on en avait encore vérifié l’exactitude. Aucune erreur n’a été commise dans l’analyse du comité relative à la crédibilité du s.é.-m. AB. La tentative de l’appelant de décrire cette digression comme un établissement de [TRADUCTION] « faux relevés » est erronée.

[186] L’appelant soutient maintenant que le comité a accordé plus de poids aux témoins de la RAD et omis d’aborder les failles perçues dans l’enquête. Pourtant, au cours de l’audience, le RM n’a soulevé que trois problèmes concernant l’enquête, à savoir l’omission des enquêteurs de faire ce qui suit :

[TRADUCTION]

[O]btenir les relevés téléphoniques de l’appelant; obtenir des renseignements d’Air Canada; et omission de consigner les fois qu’ils ont tenté de contacter le gend. KX dans le rapport d’enquête, qui n’indique que les tentatives s’étant produites la semaine et pendant les heures de travail.

[187] Le comité a abordé ces « lacunes perçues » soulevées par le RM à l’audience et dans sa décision. Le comité a conclu que ces lacunes n’étaient pas aussi cruciales que l’affirmait le RM (appel, p. 31, par. 61-66).

[188] L’appelant aurait pu citer de nouveau les témoins de la RAD à l’audience afin d’aborder toute autre question découlant de son propre témoignage. Il a choisi de ne pas le faire. Il ne peut maintenant reprocher au comité de ne pas avoir cité de nouveau les témoins alors qu’ils n’étaient ni requis ni nécessaires. Le comité n’a commis aucune erreur à cet égard. Le comité a apprécié la preuve et il ne m’appartient pas d’apprécier de nouveau cette preuve en appel. L’appelant doit démontrer que le comité a commis une erreur concernant la déposition du témoin et l’appelant ne s’est pas acquitté de ce fardeau.

[189] Il était raisonnable pour le comité de tirer une conclusion défavorable de la chronologie changeante fournie par l’appelant lorsque l’on compare son témoignage avec sa réponse écrite au titre du paragraphe 15(3) des CC (déontologie) (appel, p. 29, par. 55). L’appelant peut affirmer que sa réponse n’était qu’approximative, mais la chronologie est au cœur de son moyen de défense contre l’allégation selon laquelle il a faussement nié avoir envoyé le message texte contesté. Il a changé plusieurs aspects de sa chronologie, notamment une incohérence de 15 minutes, l’endroit d’où il avait envoyé un courriel à son agent de réinstallation ainsi que l’identité et le nombre des personnes qui étaient avec lui au café. Le comité n’a pas commis d’erreur en concluant que le témoignage de l’appelant avait changé au fil du temps.

[190] Le comité n’avait pas à invoquer le « bon sens » pour conclure que le témoignage de l’appelant n’était pas crédible, compte tenu de l’analyse approfondie et détaillée de ses évaluations de crédibilité (appel, p. 41, par. 104-111). Selon la Cour fédérale (Aguilera c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 507, par. 40, citant R.K.L. c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 116, [2003] A.C.F. no 162 (QL), par. 9-11) :

[N]ormalement, la Commission peut à bon droit conclure que le demandeur n’est pas crédible à cause d’invraisemblances contenues dans la preuve qu’il a présentée, dans la mesure où les inférences qui sont faites ne sont pas déraisonnables et que les motifs sont formulés « en termes clairs et explicites ».

[191] Par exemple, le comité disposait de suffisamment d’éléments de preuve pour étayer la conclusion selon laquelle Mme BB avait proposé de faire une déclaration à l’appelant. Le dossier révèle que Mme BB a demandé à l’appelant de lui confirmer s’il avait besoin d’un rapport; l’appelant n’a jamais répondu à sa demande (documents, 2 de 2 p. 87, 88). Le dossier révèle que l’appelant a fait abstraction de la question. Par conséquent, l’affirmation de l’appelant selon laquelle il a demandé une déclaration sans jamais recevoir de réponse est directement contredite par la preuve. Le comité n’a pas commis d’erreur dans sa conclusion à cet égard et n’a pas non plus commis d’erreur en se fondant, en partie, sur cette conclusion pour tirer une inférence défavorable quant à la crédibilité de l’appelant.

[192] Le comité n’a pas non plus commis d’erreur dans sa façon de traiter les relevés du téléphone portable. L’appelant aurait pu contester leur absence avant l’audience disciplinaire, car il avait déjà demandé une enquête complémentaire distincte (appel, p. 31, par. 63, 64). Le comité a souligné à juste titre que ces relevés n’auraient peut-être pas été disponibles après deux ans et que, de toute façon, ils n’auraient pas résolu la question ultime de savoir qui avait envoyé le message texte. L’appelant peut maintenant affirmer qu’ils auraient renforcé sa crédibilité, mais il lui incombait de les demander, et il n’était pas déraisonnable pour le comité de conclure que ces relevés n’auraient pas permis de résoudre le moindre différend relatif à la preuve.

[193] Je conviens également avec le comité que la confirmation de l’heure à laquelle l’appelant s’est enregistré à la porte d’embarquement ne renforcerait pas sa crédibilité. Personne n’a contesté le moment où l’appelant se trouvait dans l’avion. La question pertinente est de savoir où se trouvait l’appelant entre 10 h 45 (au moment où il a quitté son hôtel) et 12 h 20 (au moment où il a envoyé un courriel à son agent de réinstallation de l’aéroport. Un élément de preuve établissant qu’il est monté à bord de l’avion à 12 h 35 ne dit rien sur l’intervalle pertinent. Le comité n’a pas commis d’erreur en concluant que l’élément de preuve émanant d’Air Canada n’était pas pertinent (appel, p. 32, par. 65).

[194] La déclaration de l’appelant selon laquelle ni lui ni le s.é.-m. AB, l’off. resp. p. i., n’ont déclaré que le bureau était très fréquenté lors de leur rencontre est inexacte. Le s.é.-m. AB a déclaré qu’il s’agissait d’un grand bureau très fréquenté, à l’aéroport le plus achalandé au Canada (documents, 1 de 2, p. 915). Par conséquent, le comité n’a pas commis d’erreur en concluant que la journée où l’appelant et le s.é.-m. AB se sont rencontrés était bien occupée. Le comité n’a pas non plus commis d’erreur en concluant qu’il était peu probable que les s.é.-m. AB ait poursuivi l’appelant pour satisfaire une « curiosité banale », étant donné qu’il n’avait pas participé personnellement à l’affaire disciplinaire en cours relativement à l’allégation initiale.

[195] L’appelant soutient que l’enquêteur n’a pas divulgué toutes les vidéos. Le 31 janvier 2022, le CEE a demandé des précisions sur cette question. Le 18 février 2022, on l’a informé de ce qui suit (correspondance avec le BCGA, 18 févr. 2022) :

[TRADUCTION]

[Q]ue [le serg. D.H.] a[] creusé la question et croit qu’il y a peut-être eu un malentendu dans ce cas-ci au sujet des séquences filmées par les caméras de surveillance. L’expression « surveillance vidéo couvrant la porte avant principale » a été employée dans son sens général par l’enquêteur dans son rapport pour décrire les séquences. La liste des séquences vidéos provenant des caméras de surveillance qui est mentionnée dans le courriel de l’avocat de l’appelant est la liste complète des vidéos qui existent dans cette affaire, lesquelles ont déjà toutes été divulguées à l’appelant.

[196] Le comité a clairement expliqué qu’il se fondait sur le rapport d’enquête ainsi que sur les enregistrements audio et vidéo soumis. Le comité a conclu que cette preuve était plus crédible que le témoignage de l’appelant (appel, p. 40-43). La preuve étaye la conclusion du comité et je ne vois, par conséquent, aucune erreur à cet égard.

[197] La conclusion du comité selon laquelle le gend. KX a délibérément omis de répondre aux enquêteurs et à la GRC est étayée par le dossier (appel, p. 255-278). Je conviens avec le CEE que l’appelant cherche à justifier le comportement du gend. KX sans présenter la moindre preuve pour réfuter la conclusion du comité selon laquelle le gend. KX s’est délibérément rendu non disponible.

[198] Enfin, l’appelant n’a jamais soulevé au cours de l’audience disciplinaire l’argument selon lequel il n’avait pas reçu de mise en garde avant de faire des déclarations. Il n’a présenté aucune observation sur cette question, de sorte que le comité n’a jamais eu l’occasion de la trancher. Comme je l’ai mentionné précédemment, l’appelant est tenu d’invoquer ses arguments en première instance. L’appelant ne peut les passer sous silence pour ne les invoquer qu’en appel. Il lui est interdit de le faire; je ne me prononcerai donc pas sur cet argument.

[199] Compte tenu de ce qui précède, je conclus que la décision du comité était étayée par la preuve. Par conséquent, elle n’était pas manifestement déraisonnable.

DÉCISION

[200] Conformément à l’alinéa 45.16(1)a) de la Loi sur la GRC, l’appel est rejeté et la mesure disciplinaire imposée par le comité est confirmée.

[201] Si l’appelant n’est pas d’accord avec ma décision, il peut exercer un recours auprès de la Cour fédérale en vertu de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales.

 

 

Le 14 septembre 2022

Nicolas Gagné

Arbitre des recours, appels et examens

 

Date

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.