Déontologie

Informations sur la décision

Résumé :

L’Avis d’audience disciplinaire contient trois allégations de contravention au Code de déontologie de la Gendarmerie royale du Canada (GRC). L’allégation 1 porte sur le fait que la gendarme Moar, alors qu’elle n’était pas en service, a transporté une passagère non autorisée à des fins non opérationnelles dans un véhicule automobile de police de la GRC identifié. L’allégation 2 porte sur le fait que la gendarme Moar a intentionnellement pointé son arme à feu de service chargée vers la gendarme S.P. Enfin, l’allégation 3 mentionne que la gendarme Moar a eu recours à de la force physique pour poser des gestes sexuels non désirés à l’endroit de la gendarme S.P.

Le Comité de déontologie a conclu que l’allégation 1 était fondée et que les allégations 2 et 3 n’étaient pas fondées. Les parties ont présenté une proposition conjointe sur les mesures disciplinaires que le Comité de déontologie a acceptées : une réprimande et une sanction pécuniaire de 2 jours de rémunération.

Contenu de la décision

Protégé A

OGCA 202133829

2023 DAD 08

Logo de la Gendarmerie royale du Canada

GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

Affaire intéressant une audience disciplinaire tenue au titre de la

Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, L.R.C. (1985), ch. R-10

Entre :

Commandant de la Division F

(« autorité disciplinaire »)

et

Gendarme Kaylee Moar

Numéro de matricule 58353

(« membre visée »)

Décision du Comité de déontologie

Louise Morel

Le 21 septembre 2023

Sergent d’état-major Jonathan Hart, représentant de l’autorité disciplinaire

M. Darren Kraushaar, représentant de la membre visée


table des matières

SOMMAIRE 4

INTRODUCTION 4

ALLÉGATIONS 6

PREUVE 9

Détermination des faits établis par le Comité de déontologie 9

Faits relatifs à l’allégation 1 9

Faits relatifs à l’allégation 2 10

Faits relatifs à l’allégation 3 10

Principes juridiques applicables pour déterminer la crédibilité et la fiabilité de la preuve 10

Preuve du caporal M.H. 11

Preuve de la gendarme Moar 12

Preuve de la gendarme S.P. 12

ALLÉGATION 1 –USAGE ABUSIF D’UN VÉHICULE DE LA GENDARMERIE 16

Analyse des éléments de preuve concernant l’allégation 1 17

Conclusions sur l’allégation 1 18

ALLÉGATIONS 2 ET 3 – CONDUITE DÉSHONORANTE 18

Analyse des éléments de preuve concernant l’allégation 2 19

Témoignage de la gendarme S.P. 20

Témoignage du caporal M.H. 21

Témoignage de la gendarme Moar 22

Conclusions sur l’allégation 2 24

Analyse des éléments de preuve concernant l’allégation 3 25

Témoignage de la gendarme S.P. 25

Contre-interrogatoire de la gendarme S.P. 29

Témoignage du caporal M.H. 33

Témoignage de la gendarme Moar 34

Preuve documentaire 40

Conclusions sur l’allégation 3 43

MESURES DISCIPLINAIRES 45

Éventail des mesures disciplinaires possibles 47

Conclusion relative aux mesures disciplinaires 48

CONCLUSION 48

 

SOMMAIRE

L’Avis d’audience disciplinaire contient trois allégations de contravention au Code de déontologie de la Gendarmerie royale du Canada (GRC). L’allégation 1 porte sur le fait que la gendarme Moar, alors qu’elle n’était pas en service, a transporté une passagère non autorisée à des fins non opérationnelles dans un véhicule automobile de police de la GRC identifié. L’allégation 2 porte sur le fait que la gendarme Moar a intentionnellement pointé son arme à feu de service chargée vers la gendarme S.P. Enfin, l’allégation 3 mentionne que la gendarme Moar a eu recours à de la force physique pour poser des gestes sexuels non désirés à l’endroit de la gendarme S.P.

Le Comité de déontologie a conclu que l’allégation 1 était fondée et que les allégations 2 et 3 n’étaient pas fondées. Les parties ont présenté une proposition conjointe sur les mesures disciplinaires que le Comité de déontologie a acceptées : une réprimande et une sanction pécuniaire de 2 jours de rémunération.

INTRODUCTION

[1] L’Avis d’audience disciplinaire contient une allégation d’utilisation abusive de biens de la GRC en contravention de l’article 4.6 du Code de déontologie de la GRC et deux allégations de conduite déshonorante en contravention de l’article 7.1 du Code de déontologie de la GRC. Il a été signé par l’autorité disciplinaire le 3 février 2022 et a été signifié à la gendarme Moar le 17 mars 2022, en même temps que la trousse d’enquête relative au Code de déontologie.

[2] Deux des allégations concernent des événements s’étant produits dans le contexte d’une relation personnelle tumultueuse entre la gendarme Moar et la gendarme S.P. qui a débuté en novembre 2019 et s’est terminée vers novembre 2020.

[3] Le 5 février 2020, alors qu’elle était en service, la gendarme Moar a conduit la gendarme S.P. à l’hôpital de Moosomin. La gendarme S.P. affirme que, alors qu’elle était assise près du poste d’infirmières, en attendant d’être admise, et souffrant d’une migraine sévère, elle a dit quelque chose du genre [traduction] « mets fin à mes souffrances » à la gendarme Moar. La gendarme S.P. allègue que, en réponse à son commentaire, la gendarme Moar a dégainé son arme à feu chargée de la GRC et l’a pointée sur sa tête.

[4] Au petit matin du 15 février 2020, la gendarme Moar, alors qu’elle n’était pas en service, s’est rendue à la résidence de la gendarme S.P. La gendarme S.P. allègue qu’elles ont d’abord eu des relations sexuelles consensuelles; cependant, à un moment donné, la gendarme Moar a commencé à la pénétrer de façon agressive avec sa main, lui causant de la douleur physique. La gendarme S.P. affirme qu’en dépit de ses cris et de ses tentatives de s’éloigner de la gendarme Moar qui était sur elle, la gendarme Moar a continué à la pénétrer, sans son consentement.

[5] Le 29 novembre 2020, alors qu’elle n’était pas en service, la gendarme Moar a utilisé un véhicule automobile de police de la GRC identifié pour conduire M.B., une fonctionnaire, jusqu’à la résidence de cette dernière. Il est allégué que la gendarme Moar a fait un mauvais usage des biens de la GRC en transportant une passagère non autorisée à des fins non opérationnelles.

[6] Le 28 octobre 2021, M. Gerry Annetts a été désigné pour constituer le comité de déontologie, conformément au paragraphe 43(1) de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, RSC, 1985, c R-10 [Loi sur la GRC]. Pour des raisons administratives, le 26 mai 2022, j’ai été désigné pour constituer le nouveau Comité de déontologie dans cette affaire.

[7] Le 30 mai 2022, la gendarme Moar a fourni sa réponse à l’Avis d’audience disciplinaire, aux termes du paragraphe 15(3) des Consignes du commissaire (déontologie), DORS/2014-291. Elle a nié les trois allégations.

[8] Conformément à l’article 45 de la Loi sur la GRC, je dois décider si chaque allégation est fondée selon la prépondérance des probabilités. Autrement dit, je dois déterminer, pour chaque allégation, s’il est plus probable qu’improbable que la gendarme Moar ait contrevenu au Code de déontologie de la GRC. Si je conclus qu’une ou plusieurs des allégations sont fondées, je dois imposer des mesures disciplinaires.

[9] L’audience disciplinaire de la présente affaire a eu lieu à Regina (Saskatchewan), au cours de la semaine du 22 février 2023. La décision de vive voix concernant les allégations a été rendue le 24 février 2023, dans laquelle j’ai conclu que l’allégation 1 était fondée selon la prépondérance des probabilités, et que les allégations 2 et 3 n’étaient pas fondées. La présente décision écrite intègre et approfondit ma décision rendue de vive voix.

[10] Les parties ont présenté une proposition conjointe sur les mesures disciplinaires consistant en une réprimande et une sanction pécuniaire de deux jours de paye pour l’allégation 1. J’ai accepté la proposition conjointe. Ainsi, les mesures disciplinaires, telles que proposées, sont imposées.

ALLÉGATIONS

[11] Les allégations énoncées dans l’Avis d’audience disciplinaire sont les suivantes :

Allégation 1

Le ou vers le 29 novembre 2020, à ou entre Grenfell et Kennedy, dans la province de la Saskatchewan, la gendarme Moar a adopté un comportement contraire à l’article 4.6 du Code de déontologie de la Gendarmerie royale du Canada.

Détails

1. Le ou vers le 29 novembre 2020, alors que vous n’étiez pas en service, vous avez utilisé un véhicule automobile de police (VAP) pour conduire [M.B.], une adjointe des services du Détachement de Kipling, à son domicile.

2. Vous avez fait un mauvais usage des biens de la GRC en transportant une passagère non autorisée à des fins non opérationnelles.

3. Il y a une vidéo WatchGuard montrant [M.B.] sortir de votre VAP personnel à sa résidence.

4. Vous avez admis au sergent [D.E.] avoir eu tort d’utiliser le VAP à des fins personnelles.

5. Vous avez fourni une déclaration écrite admettant que vous avez fait un mauvais choix en ayant [M.B.] dans le VAP et vous avez présenté des excuses.

6. Vous avez fait un mauvais usage des biens de la GRC en transportant une passagère non autorisée à des fins non opérationnelles.

Allégation 2

Entre le 1ᵉʳ février 2020 et le 29 février 2020, à ou près de Moosomin, dans la province de la Saskatchewan, la gendarme Moar a adopté un comportement contraire à l’article 7.1 du Code de déontologie de la Gendarmerie royale du Canada.

Détails

1. Le 4 février 2020, la gendarme [S.P.] ne se sentait pas bien et vers la fin de la journée, elle a été renvoyée chez elle.

2. Le 5 février 2020, alors que vous étiez en service, vous avez conduit la gendarme [S.P.] du bureau d’un médecin le 5 février 2020 jusqu’à l’hôpital.

3. À l’hôpital, la gendarme [S.P.] s’est présentée auprès d’un membre du personnel infirmier et a été invitée à s’asseoir près du poste de soins infirmiers. La gendarme [S.P.] souffrait d’une migraine sévère et vous a dit quelque chose du genre [traduction] « mets fin à mes souffrances », « mets-moi une balle entre les deux yeux ».

4. Vous avez par la suite dégainé votre pistolet de la GRC et l’avez pointé vers elle. La gendarme [S.P.] a réagi lorsque vous avez pointé une arme à feu chargée sur elle et vous avez dit quelque chose du genre : [Traduction] « Oh, ça va. C’est juste une putain de blague ».

5. Vous avez pointé une arme à feu chargée en direction de la gendarme [S.P.] de façon intentionnelle.

6. Vos actions étaient imprudentes.

7. Vous vous êtes conduite d’une manière qui discrédite la Gendarmerie.

Allégation 3

Entre le 1ᵉʳ février 2020 et le 29 février 2020, à ou près de Whitewood, dans la province de la Saskatchewan, la gendarme Moar a adopté un comportement contraire à l’article 7.1 du Code de déontologie de la Gendarmerie royale du Canada.

Détails

1. Aux premières heures du matin du 15 février 2020, la gendarme [S.P.] vous a permis d’entrer dans son appartement et sa chambre à coucher.

2. Vous avez ensuite enlevé vos vêtements et immédiatement pénétré la gendarme [S.P.] avec votre main ou vos doigts. La gendarme [S.P.] était choquée et a d’abord été excitée, mais cela a été de courte durée.

3. Pendant la pénétration, vous êtes allée trop loin et vous avez causé de la douleur physique à la gendarme [S.P.], ce qui l’a fait crier. À ce moment-là, la pénétration n’était plus consensuelle.

4. Malgré que la gendarme [S.P.] criait de douleur et luttait pour échapper à votre emprise, vous avez continué à la pénétrer agressivement.

5. Le fait de pénétrer la gendarme [S.P.] sans son consentement constitue une agression sexuelle.

6. Le 18 février 2020, vous avez reconnu l’agression sexuelle et le fait que vous aviez blessé la gendarme [S. P.] lors d’un échange de messages textes entre vous-même et la gendarme [S. P.]. L’échange de messages textes était le suivant (nous soulignons) :

[Traduction]

Gendarme Moar, [0 h 42] – « Et pourquoi refuses-tu de parler? »

Gendarme [S.P.], [0 h 42] – « Pcq, il se peut que je doive en fait voir un putain de médecin à cause de ce que tu m’as fait. »

Gendarme Moar, [0 h 43] – « Esti de tabarnak! »

Gendarme Moar, [0 h 44] – « Et t’es fâchée contre moi pour ça. »

Gendarme [S.P.], [0 h 45] – « Eh bien, c’était quoi ça [gendarme Moar]? »

Gendarme Moar, [0 h 49] – « Je savais que tout allait se retourner contre moi, câlice. »

Gendarme [S.P.], [0 h 50] – « Et, tu l’as fait. »

Gendarme [S.P.], [0 h 52] – « Pourtant. »

Gendarme Moar, [2 h 23] – « Je ne me suis pas rendu compte que je te faisais mal. Ou je ne l’aurais pas fait. Super maintenant, je dois m’inquiéter de ça aussi. »

Gendarme Moar, [14 h 5] – « Allez bébé, parle-moi s’il te plaît. »

7. L’agression sexuelle a été une expérience très effrayante pour la gendarme [S.P.]. La gendarme [S.P.] a souffert physiquement, mentalement et émotionnellement en conséquence.

8. Vous vous êtes conduite d’une manière qui discrédite la Gendarmerie.

[traduit tel que reproduit dans la version anglaise]

PREUVE

[12] Le dossier dont je suis saisie comprend des transcriptions de la gendarme S.P. et de six autres témoins interrogés; une déclaration écrite du 11 janvier 2021 de la gendarme Moar en réponse aux allégations au titre du Code de déontologie; le rapport d’enquête sur le Code de déontologie du 14 avril 2021; et des copies de divers échanges de messages textes entre les gendarmes S.P. et Moar. Lors de l’audience disciplinaire, les deux gendarmes ont témoigné.

[13] Pour en arriver à mes conclusions de fait, j’ai étudié la Détermination des faits établis, datée du 10 février 2023, ainsi que les preuves orales reçues lors de l’audience disciplinaire.

Détermination des faits établis par le Comité de déontologie

[14] Le 10 février 2023, le Comité de déontologie a présenté une Détermination des faits établis, qui expose les faits incontestés suivants et auxquels les parties consentent.

[15] À toute date pertinente, la membre visée, la gendarme Moar, était membre de la Gendarmerie royale du Canada affectée au Détachement de Broadview, Division F, en Saskatchewan.

[16] La gendarme Moar est une membre régulière de la GRC depuis octobre 2009 et est affectée au Détachement de Broadview, en Saskatchewan, depuis mai 2016.

[17] La gendarme S.P., la plaignante dans cette affaire, est une membre régulière de la GRC depuis le 11 septembre 2019. À toute date pertinente, elle était affectée au Détachement de Broadview, en Saskatchewan.

[18] Les gendarmes Moar et S.P. se sont rencontrées pour la première fois en septembre 2019 et ont entamé une relation amoureuse en novembre 2019.

Faits relatifs à l’allégation 1

[19] Le ou vers le 29 novembre 2020, la gendarme Moar a utilisé un véhicule automobile de police pour conduire M.B., une adjointe des services du Détachement de Kipling, à son domicile.

[20] Il existe une vidéo WatchGuard, prise par la gendarme S.P., montrant M. B. sortant du véhicule de police de la gendarme Moar à sa résidence.

Faits relatifs à l’allégation 2

[21] La gendarme S.P. a été une patiente au Centre de soins intégrés du Sud-Est (hôpital de Moosomin) du 27 au 29 janvier 2020, puis de nouveau du 5 au 8 février 2020.

[22] Le 5 février 2020, alors qu’elle était en service, la gendarme Moar a été chercher la gendarme S.P. à sa résidence et l’a conduite à l’hôpital Moosomin, où la gendarme S.P. a été admise à 14 h 5.

Faits relatifs à l’allégation 3

[23] Au petit matin du 15 février 2020, après avoir terminé un quart de nuit, la gendarme Moar s’est rendue à l’appartement de la gendarme S.P. La gendarme S.P. l’a fait entrer dans le bâtiment à l’aide de l’interphone et est retournée dans sa chambre pour attendre la gendarme Moar.

[24] Les gendarmes Moar et S.P. ont eu des relations sexuelles aux petites heures du 15 février 2020.

Principes juridiques applicables pour déterminer la crédibilité et la fiabilité de la preuve

[25] J’ai entendu les témoignages de vive voix du caporal M.H., de la gendarme S.P. et de la gendarme Moar. Pour évaluer le témoignage d’un témoin, je dois déterminer s’il est véridique et s’il est fiable (c.-à-d. si le témoin est en mesure de percevoir et de se rappeler avec exactitude ce qu’il a observé). Il est possible que je considère les éléments de preuve offerts par un témoin comme étant sincères, mais non fiables. Je peux aussi accepter une partie, la totalité ou aucun des éléments de preuve apportés par un témoin au sujet d’un fait particulier[1].

[26] La Cour d’appel de la Colombie-Britannique[2] fait observer que le témoignage d’un témoin ne peut être évalué uniquement en fonction de son comportement, c’est-à-dire qu’il semble dire la vérité. Le juge des faits doit plutôt déterminer si le récit du témoin est conforme à l’interprétation la plus probable des circonstances.

[27] La question de savoir si le récit du témoin a une « apparence de vraisemblance » est subjective, mais pour y répondre, il faut prendre en considération l’ensemble de la preuve[3].

[28] Enfin, la Cour suprême note en outre que la conclusion selon laquelle le témoignage d’une partie est crédible peut fort bien être décisive, parce que le fait de croire une partie suppose explicitement ou non que l’on ne croit pas l’autre sur le point important en litige. C’est particulièrement le cas lorsque, comme en l’espèce, le défendeur nie en bloc les allégations[4].

[29] Pour évaluer la crédibilité des trois témoins qui ont témoigné devant moi, j’ai pris en considération la capacité des témoins de se souvenir de tous les détails des événements compte tenu du temps écoulé (environ trois ans). J’ai également examiné la totalité des éléments de preuve produits durant l’instance, sans m’appuyer sur aucune présomption.

Preuve du caporal M.H.

[30] Le caporal M.H. a été le superviseur de quart de la gendarme S.P. de l’été 2020 à novembre 2020 au Détachement de Broadview. Il était en service le 29 novembre 2020 lorsque la gendarme S.P. a suivi la gendarme Moar jusqu’à la résidence de M.B. et a signalé que la gendarme Moar avait une passagère non autorisée dans son véhicule automobile de police. À cette même date, il a aussi été la personne à qui la gendarme S.P. a divulgué l’agression sexuelle présumée et le fait que la gendarme Moar avait pointé une arme à feu vers elle.

[31] Le caporal M.H. était un témoin neutre et indépendant. Son témoignage devant moi concordait avec la déclaration du 7 décembre 2020 qu’il a fournie dans le cadre de l’enquête prescrite par la loi. Il a répondu aux questions de façon claire et franche. J’estime que son témoignage est crédible et fiable. Toutefois, je note qu’il n’était pas présent pendant les incidents d’inconduite présumée.

Preuve de la gendarme Moar

[32] La gendarme Moar était un témoin clair, direct et franc. Elle a répondu aux questions de façon directe et claire. Je suis d’accord avec l’observation de la représentante de la membre visée selon laquelle la gendarme Moar n’a pas été ébranlée pendant le contre-interrogatoire; elle n’a pas choisi de dire par défaut [traduction] « je ne me souviens pas » lorsqu’il s’agissait de questions difficiles; et ses preuves n’ont pas changé pendant son témoignage.

[33] La gendarme Moar était pondérée lorsqu’elle s’exprimait, elle ne cherchait pas à embellir ou à exagérer ses réponses, et elle n’exprimait pas d’opinions ou de commentaires qui attaquaient ou dénigraient la gendarme S.P. Je conclus que son témoignage était crédible et fiable.

Preuve de la gendarme S.P.

[34] La gendarme S.P. s’est présentée dans son témoignage comme une personne bien articulée et confiante. Je reconnais qu’une victime d’inconduite, y compris, bien entendu, de nature sexuelle, peut avoir en elle une profonde colère ou d’autres sentiments négatifs envers son agresseur. Cela étant dit, j’estime que la gendarme S.P. a tenu à plusieurs reprises à dénigrer la gendarme Moar en prononçant des déclarations telles que : [Traduction] « [la gendarme Moar] est imprudente » et « [la gendarme Moar] fait des choses stupides », dans le but de renforcer la véracité de son récit.

[35] J’ai relevé des incohérences et des invraisemblances importantes dans son témoignage. Il y a de nombreuses divergences entre son témoignage au caporal M.H., sa déclaration à l’enquêteur lors de l’enquête liée au Code de déontologie et son témoignage devant moi.

[36] À titre d’exemple d’une incohérence, la gendarme S.P. a communiqué avec le caporal M.H. le 29 novembre 2020 pour signaler que la gendarme Moar avait sorti un véhicule de police du Détachement de Broadview avec M.B. sur le siège du passager et que la gendarme Moar conduisait M.B. jusqu’à sa résidence. Le caporal M.H. a témoigné qu’il avait ordonné à la gendarme S.P. de cesser de poursuivre le gendarme Moar et de retourner au détachement. Elle n’a pas obéi à l’ordre direct du caporal M.H.

[37] Au cours de son entrevue du 30 novembre 2020 avec le sergent G.S. dans le contexte de l’enquête sur les allégations prévue par la loi, la gendarme S.P. a déclaré qu’elle était assise dans le stationnement du détachement, écrivant ses notes, lorsqu’un véhicule de police est passé par là dans lequel elle a vu M.B. sur le siège passager du véhicule conduit par la gendarme Moar. La gendarme S.P. a déclaré qu’elle avait décidé de suivre la gendarme Moar parce qu’elle pensait que la gendarme Moar [traduction] « […] l’emmenait à l’hôpital, c’est ce que je pensais […][5] ».

[38] Je trouve difficile de concilier les diverses affirmations de la gendarme S.P. Pourquoi se serait-elle engagée dans la poursuite de la gendarme Moar si elle croyait que cette dernière conduisait M.B. à l’hôpital?

[39] La preuve établit que, le 29 novembre 2020, la gendarme Moar entretenait une relation amoureuse avec M.B. Lorsque j’examine l’ensemble de la preuve, j’estime qu’il est plus probable que la gendarme S.P. ait été contrariée par cette nouvelle relation. Par conséquent, j’estime que l’explication de la gendarme S.P. concernant sa poursuite manque de crédibilité.

[40] En ce qui concerne l’allégation selon laquelle la gendarme Moar a pointé une arme à feu chargée sur sa tête, dans sa communication au caporal M.H., la gendarme S.P. a déclaré que [traduction] « […] c’était peut-être par inadvertance […][6] ».

[41] Toutefois, lors de son entrevue du 30 novembre 2020 avec le sergent G.S., la gendarme S.P. a déclaré que, pendant qu’elle était à l’hôpital de Moosomin, elle était assise sur une chaise alors que la gendarme Moar, en uniforme complet, se tenait debout à côté d’elle. La gendarme S.P. a déclaré qu’elle avait dit à la gendarme Moar quelque chose du genre [traduction] « mets-moi une balle entre les deux yeux » ou « mets fin à mes souffrances », après quoi la gendarme Moar a dégainé son pistolet, l’a soulevé vers elle et l’a rengainé. La gendarme S.P. a déclaré qu’elle ne pensait pas que quelqu’un ait été témoin de cet incident. De plus, elle mentionne qu’après le 5 février 2020, alors qu’elle allait mieux et qu’elle a commencé à marcher, à [traduction] « faire des tours » à l’hôpital, elle a remarqué une caméra au plafond du poste des soins infirmiers[7].

[42] Au cours de son témoignage devant moi, le 22 février 2023, la gendarme S.P. a témoigné que, lorsqu’elle et la gendarme Moar sont arrivées au poste des soins infirmiers de l’hôpital de Moosomin le 5 février 2020, il n’y avait personne au poste. Il y avait une chaise dans le coin à côté du poste des soins infirmiers; elle s’y est assise et a constaté que [traduction] « […] il y a une caméra au-dessus de la chaise […][8] ».

[43] La gendarme S.P. a témoigné que la gendarme Moar se tenait devant elle, la chevauchant, alors qu’elle était assise la tête baissée, et qu’elle lui touchait le dessus de la tête. La gendarme S.P. s’est levée pour démontrer ce qui s’est passé et a déclaré que [traduction] « […] elle se tenait devant moi comme, vous savez, en attendant une infirmière, regardant autour de nous, mais elle me caressait la tête. Elle me caressait le dessus de la tête comme, “Bébé, que qu’est-ce que je peux faire? Comment je peux t’aider à te sentir mieux?”… Et donc je l’ai juste – je l’ai juste regardée, comme, “tu sais ce que je veux que tu fasses”. Ce que j’insinuais, c’est les choses que j’ai dites dans le passé au sujet des migraines et de l’inconfort […] » [9].

[44] La gendarme S.P. a témoigné que, tout au long de sa relation avec la gendarme Moar, lorsqu’elle souffrait d’une migraine, elle avait régulièrement fait des déclarations du genre [traduction] « mets juste fin à mes souffrances » ou « tire-moi une balle dans la tête ».

[45] La gendarme S.P. a poursuivi son témoignage en déclarant que [traduction] « […] je ne me souviens pas de quoi, ou même si j’ai dit quoi que ce soit ou si c’était juste l’apparence, “tu sais ce que tu dois faire”. Et dès que j’ai fait ça, elle était face à moi de cette façon, elle me chevauchait, elle a dit : “Quoi, comme ça?” Et puis elle a dégainé son pistolet, l’a pointé vers moi et l’a rengainé très rapidement […] » [10].

[46] Selon la gendarme S.P., immédiatement après cette interaction, une infirmière est arrivée et l’a invitée à entrer dans une pièce où elle a été admise. La gendarme Moar est restée avec elle [traduction] « […] pour s’assurer que tout allait bien […] Elle est restée jusqu’à ce que je sois installée […][11] ».

[47] La gendarme S.P. a témoigné qu’elle n’avait jamais parlé à la gendarme Moar de l’incident lié à l’arme à feu après qu’il eut eu lieu, car il n’y avait rien à dire. Selon la gendarme S.P., [traduction] « c’est juste [la gendarme Moar]… c’est ce qu’elle fait[12] ». Lorsqu’on lui a demandé si elle avait parlé de cet incident à quelqu’un au moment ou à peu près au moment où cela se serait produit, la gendarme S.P. a répondu : [Traduction] « […] Non. Comme je l’ai dit, j’étais du côté de [la gendarme Moar]. J’avais l’impression que la relation dans laquelle je me trouvais, je voulais la protéger […] Je ne voulais pas nuire à sa carrière. J’étais tout à elle. Je l’appuyais. J’étais de son côté […][13] ».

[48] La gendarme S.P. a poursuivi en disant que l’incident était effrayant, mais qu’elle avait fait [traduction] « une observation consciente » qu’il y avait une caméra derrière cette chaise et [traduction] « […] je l’ai en quelque sorte mis dans ma mémoire au cas où quelque chose se produirait alors j’aurais su qu’il y aurait eu des images de tout ça […][14] ».

[49] Dans le premier cas, au cours de sa communication au caporal M.H., la gendarme S.P. a déclaré que l’arme à feu avait été pointée [traduction] « peut-être par inadvertance ». On peut se demander comment on pourrait braquer une arme à feu chargée sur quelqu’un « par inadvertance ». Puis, dans sa déclaration du 30 novembre 2020, la gendarme S.P. a déclaré qu’elle ne croyait pas qu’il y avait quelqu’un au poste des soins infirmiers et qu’elle avait dit à la gendarme Moar quelque chose du genre [traduction] « mets fin à mes souffrances ». Puis, elle a déclaré que c’est après le 5 février 2020, alors qu’elle [traduction] « faisait des tours » à l’hôpital, qu’elle a remarqué une caméra au-dessus de la chaise où elle s’était assise.

[50] Au cours de son témoignage du 22 février 2023, elle a déclaré catégoriquement qu’il n’y avait personne au poste des soins infirmiers; elle a déclaré qu’elle n’avait qu’à regarder la gendarme Moar pour laisser entendre [traduction] « tu sais ce que tu dois faire »; et elle a immédiatement noté qu’il y avait une caméra au-dessus de sa chaise et a consciemment conservé cette information au cas où elle aurait besoin d’une preuve de l’incident.

[51] La version des événements de la gendarme S.P. a évolué depuis sa première divulgation au caporal M.H., sa déclaration au sergent G.S. le lendemain et son témoignage devant le comité de déontologie.

[52] Je note que la gendarme SP a été admise à l’hôpital de Moosomin le mercredi 5 février 2020 à 14 h 5. Il est inconcevable de croire qu’il n’y avait personne au poste des soins infirmiers ou que personne ne remarque une policière, en uniforme complet, dégainant son arme à feu dans un endroit public. Il n’y a tout simplement pas de « vraisemblance » dans le témoignage de la gendarme S.P.

[53] Comme le souligne l’arrêt McDougall[15], « […] une série de contradictions peuvent devenir assez importantes et peuvent faire naître un doute raisonnable dans l’esprit du juge des faits quant à la fiabilité du témoignage du témoin […] ».

[54] Lorsque je dois examiner l’ensemble des incohérences dans le témoignage de la gendarme S.P., j’ai de sérieux doutes quant à la fiabilité de son témoignage.

[55] De plus, le fait que j’ai conclu que le témoignage de la gendarme Moar était fiable et crédible, comme il a été mentionné dans McDougall, est déterminant et mène inévitablement à la conclusion que je ne crois pas le témoignage de la gendarme S.P.

ALLÉGATION 1 –USAGE ABUSIF D’UN VÉHICULE DE LA GENDARMERIE

[56] L’article 4.6 du Code de déontologie de la GRC stipule que « les membres utilisent les biens et le matériel fournis par l’État seulement pour les fins et les activités autorisées ».

[57] Le Guide des mesures disciplinaires[16] stipule ce qui suit : « La mauvaise utilisation d’un véhicule de la Gendarmerie inclut […] le transport de personnes non autorisées […] »

[58] Afin de déterminer si une allégation est fondée au titre de l’article 4.6 du Code de déontologie, l’autorité disciplinaire doit prouver chacun des éléments suivants selon la prépondérance des preuves :

  1. l’identité du membre;
  2. que le membre a utilisé des biens et du matériel fournis par l’État;
  3. que le membre a utilisé le matériel à des fins non autorisées ou non opérationnelles;
  4. que le matériel ou les biens ont été utilisés pour une raison personnelle.

Analyse des éléments de preuve concernant l’allégation 1

[59] Dans le processus disciplinaire, il incombe à une autorité disciplinaire de démontrer que les allégations sont fondées sur la base de la prépondérance des preuves. Un comité de déontologie est ensuite chargé de déterminer si cette obligation a été respectée.

[60] J’ai considéré comme un fait établi[17] que, le 29 novembre 2020, la gendarme Moar a utilisé un véhicule automobile de police pour conduire M.B., une adjointe des services du Détachement de Kipling, à sa résidence. Le dossier qui m’a été présenté contenait une vidéo de WatchGuard qui montre clairement un civil sortant du véhicule conduit par la gendarme Moar.

[61] Dans une déclaration du 22 janvier 2021, la gendarme Moar a admis avoir conduit dans son véhicule automobile de police sa petite-amie, M.B., une adjointe des services du détachement, de sa résidence jusqu’au Détachement de Broadview. Son intention était de changer de véhicule au Détachement de Broadview et de continuer sa route jusqu’à la résidence de M.B. dans son véhicule privé.

[62] Toutefois, en arrivant au Détachement de Broadview, la gendarme Moar a observé la gendarme S.P. dans le stationnement, près de son camion personnel. Afin d’éviter une possible confrontation avec la gendarme S.P., elle a décidé de poursuivre sa route pour aller déposer M.B. à sa résidence.

[63] La gendarme S.P. a suivi la gendarme Moar pendant environ 45 minutes, jusqu’à la résidence de M.B., en utilisant la vidéo WatchGuard de son véhicule de police pour consigner le fait que M.B. était passagère dans le véhicule de la gendarme Moar.

[64] À son retour au Détachement de Broadview, la gendarme Moar a admis au caporal M.H. qu’elle avait conduit, sans autorisation, M.B. à sa résidence dans un véhicule de police. Dans sa déclaration du 22 janvier 2021, elle s’est excusée pour ses actions. Dans sa Réponse à l’audience disciplinaire en vertu du paragraphe 15(3), elle a reconnu les détails de l’allégation 1.

[65] En outre, au début de l’audience disciplinaire, la gendarme Moar a admis cette allégation.

Conclusions sur l’allégation 1

[66] J’accepte l’admission de la gendarme Moar et, par conséquent, l’allégation d’usage abusif d’un véhicule de police est fondée selon la prépondérance des probabilités.

ALLÉGATIONS 2 ET 3 – CONDUITE DÉSHONORANTE

[67] L’article 7.1 du Code de déontologie de la GRC est ainsi libellé : « Les membres se comportent de manière à éviter de jeter le discrédit sur la Gendarmerie ». Le critère de « conduite déshonorante » a été élaboré par le Comité externe d’examen de la GRC et comporte quatre étapes.

[68] Aux étapes 1 et 2, une autorité disciplinaire doit établir, selon la prépondérance des probabilités, les actes constituant la conduite alléguée et l’identité du membre qui a commis ces actes. Pour établir l’acte ou les actes constituant le comportement allégué, il faut démontrer que les détails essentiels aux allégations se sont effectivement produits. Il n’est pas nécessaire d’établir chaque détail, il suffit que les détails établis atteignent le seuil de la conduite déshonorante.

[69] À l’étape 3, un comité de déontologie doit déterminer si la conduite du membre visé est susceptible de jeter le discrédit sur la GRC. Il s’agit de déterminer si une personne raisonnable dans la société, au fait de toutes les circonstances pertinentes, y compris les réalités de la police en général et de la GRC en particulier, considérerait la conduite comme déshonorante.

[70] Enfin, à l’étape 4, un comité de déontologie doit déterminer si le comportement est suffisamment lié aux tâches et fonctions du membre visé pour que la Gendarmerie ait un intérêt légitime à prendre des mesures disciplinaires à son encontre.

[71] L’étape 2 relative à l’identité de la gendarme Moar ne fait l’objet d’aucune contestation. Les trois autres étapes nécessitent une analyse plus approfondie.

Analyse des éléments de preuve concernant l’allégation 2

[72] Dans le processus disciplinaire, il incombe à une autorité disciplinaire de démontrer sur la base de la prépondérance des preuves que les allégations sont fondées. Un comité de déontologie est ensuite chargé de déterminer si cette obligation a été respectée.

[73] Comme l’a déclaré la Cour suprême du Canada dans McDougall, « […] la preuve doit toujours être claire et convaincante pour satisfaire au critère de la prépondérance des probabilités. […] »[18]. Toutefois, la Cour suprême reconnaît que « […] aucune norme objective ne permet de déterminer qu’elle l’est suffisamment […] »[19].

[74] L’Avis d’audience disciplinaire[20] allègue que, le 5 février 2020, la gendarme Moar a « intentionnellement » braqué son arme à feu de service chargée sur la tête de la gendarme S.P. Il est allégué que cela s’est produit au poste des soins infirmiers de l’hôpital de Moosomin alors que la gendarme S.P. attendait d’être admise.

[75] Il est incontesté que, le 5 février 2020, alors qu’elle était en service, la gendarme Moar a été chercher la gendarme S.P. à sa résidence et l’a conduite à l’hôpital de Moosomin, où la gendarme S.P. a été admise à 14 h 5.

Témoignage de la gendarme S.P.

[76] Dans son entrevue du 30 novembre 2020, la gendarme S.P. a déclaré que, le 5 février 2020, la gendarme Moar, qui était en service, l’a conduite à l’hôpital où elle a été admise. En attendant d’y être admise, la gendarme S.P. était assise sur une chaise, en face du poste des soins infirmiers, souffrant d’une migraine, et elle a dit quelque chose comme [traduction] « mets fin à mes souffrances » ou [traduction] « mets-moi une balle entre les deux yeux ». En réponse à son commentaire, la gendarme Moar, qui était debout devant elle, en uniforme complet, a dégainé son arme à feu de la GRC et l’a pointée vers elle et a dit : [Traduction] « quoi, comme ça? », puis a rengainé son arme à feu.

[77] Lors de son témoignage devant moi, elle ne peut se souvenir si elle a dit quelque chose à la gendarme Moar ou s’il s’agissait simplement d’un [traduction] « regard ». Elle a déclaré que la gendarme Moar lui faisait face, la chevauchait et lui caressait la tête, et lui a demandé : [Traduction] « Qu’est-ce que je peux faire pour que tu te sentes mieux? ». La gendarme S.P. a témoigné qu’elle avait regardé la gendarme Moar et que son [traduction] « regard » laissait entendre [traduction] « tu sais ce que je veux que tu fasses[21] ».

[78] La gendarme S.P. a témoigné que, après [traduction] « le regard », la gendarme Moar a déclaré : [Traduction] « quoi, comme ça? » et a dégainé son arme à feu, l’a pointée vers elle et l’a rengainée très rapidement[22]. Au cours de ce récit, la gendarme S.P. s’est tenue debout et a démontré comment la gendarme Moar aurait exécuté ce geste.

[79] La gendarme S.P. a témoigné qu’elle a alors levé la tête et a fait la déclaration suivante [traduction] « viens-tu de pointer un – c’est un pistolet chargé. Tu viens de… viens-tu de pointer vers moi une arme chargée? », à laquelle la gendarme Moar aurait répondu : [Traduction] « Oh, ça va. C’est juste une putain de blague. Relaxe[23] ».

[80] La gendarme S.P. a ensuite témoigné qu’elle avait confronté la gendarme Moar parce qu’elle n’en revenait pas de ce qui venait de se produire et elle a poursuivi en déclarant : [Traduction] « Je sais que [la gendarme Moar] a fait beaucoup de conneries, et elle est un peu imprudente, mais – je ne sais pas. Je - Je veux dire, le fait que je n’ai pas réagi vous montre en quelque sorte que j’étais habituée aux choses qu’elle faisait… Et elle l’a juste sorti, pointé, et puis mis de côté comme si c’était quelque chose qui était normal pour elle. Donc j’étais en état de choc. Comme je l’ai dit, je n’y croyais pas, mais je pense que mon manque de réaction était en quelque sorte la preuve que c’est le genre de personne qu’elle est. Elle fait des conneries. Elle s’en fout[24] ».

[81] La gendarme S.P. a déclaré qu’après son commentaire initial à la gendarme Moar, elle n’a jamais mentionné à nouveau ce prétendu braquage d’une arme à feu chargée sur elle.

[82] La gendarme S.P. a témoigné que, bien qu’elle n’ait vu personne au moment de l’incident, il se peut qu’il y ait eu quelqu’un assis derrière le comptoir du poste des soins infirmiers; elle a expliqué que l’on ne peut pas voir les membres du personnel lorsqu’on se trouve assis dans cette zone.

Témoignage du caporal M.H.

[83] Le caporal M.H. a témoigné que lorsque la gendarme S.P. a divulgué le fait que la gendarme Moar aurait pointé une arme à feu, elle a mentionné qu’elle ne savait pas si elle avait été intentionnellement pointée vers elle. Il a déclaré ce qui suit :

[Traduction]

Oui, je m’en souviens. Je m’en souviens bien. Je ne sais pas si c’était volontaire de sa part ou non, mais « c’était pointé sur ma tête » ou quelque chose du genre[25].

[84] Le témoignage du caporal M.H. devant moi était conforme à sa déclaration du 7 décembre 2020 au sergent G.S. Lorsqu’il a relaté la divulgation faite par la gendarme S.P. le 29 novembre 2020 des contraventions alléguées, il s’est rappelé que la gendarme S.P. a déclaré ce qui suit :

[Traduction]

[…] « Elle a pointé une arme à feu chargée sur… vers moi. » Elle a… elle a dit quelque chose comme… c’était peut-être par inadvertance ou… mais euh… elle l’a fait en public et c’était à l’hôpital […][26]

Témoignage de la gendarme Moar

[85] La gendarme Moar a témoigné que, le 5 février 2020, la gendarme S.P. l’a appelée par téléphone pour l’aviser qu’elle devait être admise à l’hôpital de Moosomin et demander si la gendarme Moar pouvait l’y conduire.

[86] La gendarme Moar a expliqué qu’elle devait travailler de nuit et a appelé le sergent d’état-major du Détachement de Broadview pour obtenir l’autorisation de conduire la gendarme S.P. à l’hôpital de Moosomin. Le sergent d’état-major a accepté et la gendarme Moar est allée chercher la gendarme S.P. à sa résidence, à Whitewood, et l’a conduite à l’hôpital de Moosomin.

[87] La gendarme Moar a témoigné qu’elle était en uniforme, qu’elle portait son arme à feu de service et qu’elle se trouvait dans un véhicule de police. Elle se souvient qu’elle a quitté sa résidence de Grenfell vers 13 heures et qu’elle est arrivée à l’hôpital avec la gendarme S.P. entre 14 heures et 14 h 30.

[88] La gendarme Moar a déclaré que l’hôpital de Moosomin est l’un des plus grands hôpitaux du Sud-Est de la Saskatchewan avec 27 lits d’hospitalisation, un service de radiographie, des capacités de laboratoire et d’échographie, deux grandes salles d’attente, une aile de soins de longue durée et un service d’urgence. Elle a déclaré qu’elle s’était rendue à cet hôpital plus de 100 fois en raison de son affectation à Moosomin pendant six ans avant son transfert au Détachement de Broadview.

[89] La gendarme Moar a témoigné que, le 5 février 2020, un jour de semaine au milieu de l’après-midi, l’hôpital connaissait une journée [traduction] « très occupée » comme à l’habitude.

[90] La gendarme Moar a rappelé que, lorsqu’elles sont arrivées à l’hôpital, elles sont entrées par l’entrée principale, se sont arrêtées au bureau d’enregistrement pour s’enregistrer, où la gendarme S.P. s’est vue remettre une feuille rose avec la consigne de se diriger vers l’arrière à l’endroit où se trouve la zone des services aux hospitalisés. Elles ont traversé le hall jusqu’au poste des soins infirmiers.

[91] La gendarme Moar se souvient qu’il y avait une chaise à côté d’une sorte de coin bureau où l’on pouvait s’asseoir avec une infirmière et passer en revue les papiers à remplir. Elle se souvient qu’elle ne s’est pas assise sur la chaise, mais ne peut pas se rappeler si la gendarme S.P. l’avait fait.

[92] Lorsqu’on lui a demandé s’il y avait une infirmière ou un infirmier au poste des soins infirmiers, elle a déclaré qu’il y avait des gens partout dans la zone et que s’il n’y avait eu personne à l’hôpital, cela aurait suscité des préoccupations chez elle[27].

[93] La gendarme Moar ne se rappelait pas avoir vu des caméras de sécurité autour du poste des soins infirmiers, mais elle a déclaré qu’elle avait connaissance des caméras aux entrées de l’hôpital en raison de son affectation à Moosomin.

[94] La gendarme Moar a témoigné qu’elle ne se rappelait pas ce qui s’est réellement passé lorsqu’elles sont arrivées au poste des soins infirmiers, mais elle savait qu’elles n’étaient pas restées dans l’aire ouverte pendant très longtemps avant d’être déplacées vers une pièce.

[95] Elle ne se souvient pas de conversations avec la gendarme S.P., mais elle a fait remarquer que la gendarme S.P. souffrait manifestement et qu’elle essayait de la consoler autant qu’elle pouvait.

[96] La gendarme Moar a nié avoir sorti son arme à feu et l’avoir pointée vers la gendarme S.P. Elle a indiqué que, tout au long de sa carrière, elle n’avait jamais sorti son arme à feu pour plaisanter. De plus, elle a nié que la gendarme S.P. l’ait jamais confrontée au fait d’avoir dégainé son arme ou qu’elle ait eu une conversation avec elle au sujet du fait d’avoir dégainé son arme à feu et de l’avoir pointée sur elle. De plus, elle a témoigné que la gendarme S.P. ne lui avait jamais envoyé de message texte ou de courriel à ce sujet.

[97] La gendarme Moar a témoigné qu’elle a appris l’incident allégué pour la première fois en novembre 2020 lorsque la gendarme S.P. a fait l’allégation.

Conclusions sur l’allégation 2

[98] Il s’agit d’un cas de témoignage opposé à un autre. Je note qu’il y a des incohérences entre le témoignage du caporal M.H. au sujet de la divulgation par la gendarme S.P. du prétendu braquage de l’arme à feu comme ayant possiblement eu lieu « par inadvertance » et son témoignage. Elle a catégoriquement nié avoir fait cette déclaration lors de son témoignage devant moi.

[99] J’estime que l’accusation de la gendarme S.P. est un récit non corroboré d’un événement invraisemblable. Je ne peux pas, par exemple, croire qu’une policière, en uniforme complet, à 14 heures au poste des soins infirmiers d’un hôpital puisse sortir son arme à feu, la pointer sur un patient, et passer inaperçue. Cela défie la logique et le bon sens.

[100] Il n’y a pas de « vraisemblance » dans le témoignage de la gendarme S.P. et j’estime que sa version de ce qui s’est produit a changé et évolué depuis le 29 novembre 2020 jusqu’à son témoignage devant moi. L’ensemble des divergences m’amène à conclure que le témoignage de la gendarme S.P. n’est pas fiable et je préfère le récit fourni par la gendarme Moar.

[101] Le représentant de l’autorité disciplinaire n’a pas établi, selon la prépondérance des probabilités, l’acte constitutif de l’inconduite alléguée. C’est-à-dire que la gendarme Moar a « intentionnellement ou non » dégainé son arme à feu de service et l’a pointée sur la gendarme S.P.

[102] L’allégation 2 n’est pas fondée.

Analyse des éléments de preuve concernant l’allégation 3

[103] L’Avis d’audience disciplinaire[28] affirme que, au petit matin du 15 février 2020, la gendarme Moar s’est rendue à l’appartement de la gendarme S.P. Il est allégué que la gendarme Moar a pénétré la gendarme S.P. avec sa main ou ses doigts et que, initialement, la gendarme S.P. était excitée. Cependant, pendant la pénétration, la gendarme Moar est allée trop loin et a causé de la douleur physique à la gendarme S.P. qui l’a fait crier et se débattre pour se dégager de la gendarme Moar qui était sur elle. Il est de plus allégué que cela constitue une agression sexuelle.

[104] C’est un fait non contesté que la gendarme Moar s’est rendue à l’appartement de la gendarme S.P. au petit matin du 15 février 2020. Ce qui s’est réellement passé est en cause.

[105] Comme il a été mentionné précédemment dans le contexte de l’allégation 2, il incombe à l’autorité disciplinaire de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que l’allégation est fondée et que, conformément à la décision de la Cour suprême du Canada dans McDougall[29], « […] la preuve doit toujours être claire et convaincante pour satisfaire au critère de la prépondérance des probabilités […] ».

Témoignage de la gendarme S.P.

[106] La gendarme S.P. a témoigné qu’avant le 15 février 2020, sa relation avec la gendarme Moar était tendue. Selon elle, le problème était que la gendarme Moar était sur le point de partir en vacance pendant une semaine à Las Vegas avec son ex-conjointe. La gendarme S.P. était contrariée et a confronté la gendarme Moar à propos de ce voyage.

[107] La gendarme S.P. se souvient qu’elles s’adressaient des messages de part et d’autre, et la gendarme Moar a indiqué qu’elle passerait après son quart de travail, ce qu’elle a accepté. À l’arrivée de la gendarme Moar, la gendarme S.P. est restée dans son lit, nue et l’a fait entrer dans le bâtiment à l’aide de son téléphone cellulaire. Elle dit avoir entendu la gendarme Moar entrer dans l’appartement et enlever ce qu’elle présume être sa ceinture de service.

[108] La gendarme S.P. a souligné que toutes les lumières étaient éteintes dans l’appartement et qu’elle était dans l’obscurité totale. La gendarme Moar a ouvert la porte de sa chambre, est entrée et n’a pas dit un mot. Selon la gendarme S.P., la gendarme Moar s’est immédiatement couchée, a soulevé la moitié inférieure du drap qui la recouvrait et [traduction] « instantanément elle s’est mise sur moi et elle a inséré ses doigts en moi[30] ».

[109] La gendarme S.P. a témoigné que la pénétration était au départ une chose agréable, mais que pendant la deuxième pénétration avec ses doigts, la gendarme Moar est allée trop profondément en elle, [traduction] « elle a juste poussé sa main plus loin. J’ai ressenti que c’était intentionnel[31] ».

[110] La gendarme S.P. a témoigné qu’elle avait commencé à hurler et qu’elle a bougé ses hanches, mais que la gendarme Moar n’a pas réagi et que [traduction] « c’était comme si elle était en transe[32] ». Elle a continué en disant qu’elle avait levé une jambe pour essayer de la faire sortir d’elle, en criant et en pleurant, mais la gendarme Moar a simplement mis tout son poids sur elle pour continuer à la pénétrer avec sa main.

[111] La gendarme S.P. a déclaré qu’elle avait l’impression que ses entrailles enflaient, qu’elle avait l’impression qu’elles étaient déchirées. À un moment, elle a laissé son corps devenir mou et la gendarme Moar l’a relâchée.

[112] Selon la gendarme S.P., elle s’est alors éloignée de la gendarme Moar, a relevé ses genoux et s’est mise à sangloter. La gendarme S.P. se souvient avoir déclaré à la gendarme Moar : [Traduction] « si tu sais que tu m’as fait mal, pourquoi tu ne me serres pas dans tes bras maintenant?[33] ».

[113] La gendarme S.P. a témoigné qu’elle attendait que la gendarme Moar la prenne dans ses bras, mais au lieu de cela, elle se tenait à côté du lit et a commencé à boutonner frénétiquement sa chemise. La gendarme S.P. a expliqué qu’elle pouvait « voir » la gendarme Moar boutonner sa chemise d’uniforme parce qu’il y avait de la lumière à l’extérieur de son appartement qui passait à travers ses rideaux d’obscurcissement total.

[114] La gendarme S.P. a répété que la gendarme Moar [traduction] « la regardait[34] » comme si elle n’était pas présente ou en transe. En réponse, la gendarme S.P. est sortie du lit et est allée près de la gendarme Moar [traduction] « pour la calmer[35] » et la sortir de l’état de transe dans lequel elle se trouvait.

[115] La gendarme S.P. a témoigné que la gendarme Moar avait alors déclaré textuellement : [Traduction] « Oh, je peux juste le voir maintenant. Un membre supérieur viole un membre subalterne » et [traduction] « Oh, et tu vas leur dire aussi que j’ai chargé un – j’ai braqué une arme à feu chargée sur toi?[36] ».

[116] La gendarme S.P. a déclaré qu’elle a continué à essayer de rassurer la gendarme Moar et l’a saisie. Elle a lentement réussi à faire en sorte que la gendarme Moar arrête de boutonner sa chemise, s’est assise sur le lit et a tiré la gendarme Moar pour qu’elle s’assoie sur le lit afin qu’elle puisse la serrer dans ses bras.

[117] Selon la gendarme S.P., elle s’est repliée dans une position fœtale, la gendarme Moar s’est allongée à côté d’elle, et elle a saisi son bras et l’a placé autour d’elle.

[118] La gendarme S.P. ne se rappelait pas si elles avaient commencé à parler, si elles avaient fait l’amour pour une deuxième fois, ni combien de temps la gendarme Moar serait restée.

[119] En réponse à la question du représentant de l’autorité disciplinaire de savoir si elle avait subi une blessure, la gendarme S.P. a déclaré : [Traduction] « Comme, je n’ai jamais vu de médecin, mais mes entrailles étaient tranchées, je le sais. Mes entrailles gonflaient, je pouvais le sentir. C’était horrible[37]. » La gendarme S.P. a déclaré qu’en plus de l’enflure, elle a remarqué quelques jours plus tard une décharge lorsqu’elle s’est essuyée et en a pris une photo[38].

[120] Le représentant de l’autorité disciplinaire a demandé que la photographie, datée du 17 février 2020, soit marquée comme sa deuxième pièce. En l’inscrivant comme pièce, j’ai décrit la photo comme étant une « photo d’un morceau de papier hygiénique avec des pertes brunes[39] ». La gendarme S.P. m’a corrigée en expliquant qu’elle était en train de nettoyer la salle de bain et qu’elle a utilisé de l’essuie-tout au lieu de papier toilette, pour s’essuyer.

[121] Lorsqu’on lui a demandé ce dont elle se souvenait de ses interactions avec la gendarme Moar à la suite de l’agression sexuelle alléguée du 15 février 2020, la gendarme S.P. a témoigné qu’elles étaient simplement redevenues normales. Elle a déclaré que la gendarme Moar lui avait envoyé un message texte plus tard le même jour pour lui indiquer qu’elle allait en ville et demander si la gendarme S.P. avait besoin de quoi que ce soit. La gendarme S.P. lui a demandé de ramasser de la nourriture pour chat. La gendarme Moar a ramassé la nourriture pour chat et l’a déposée à l’appartement de la gendarme S.P. avant de partir en voyage à Las Vegas.

[122] La gendarme S.P. a confirmé que, alors que la gendarme Moar était à Las Vegas avec son ex-conjointe, elles continuaient à s’envoyer des messages textes. Elle a produit un échange de messages textes entre elle et la gendarme Moar du 18 février 2020. Le premier texte est horodaté à 12 h 8 et a été envoyé par la gendarme Moar et dit [traduction] « L’heure du tatouage! Pas de noms cette fois hahaha. »

[123] À 0 h 42, la gendarme S.P. écrit qu’elle devra peut-être aller voir un médecin concernant ce que la gendarme Moar lui a fait. À 2 h 23, la gendarme Moar répond que [traduction] « […] je ne me suis pas rendue compte que je te faisais mal. Ou je ne l’aurais pas fait […][40] ».

[124] La gendarme S.P. a témoigné qu’elle n’est jamais allée voir un médecin au sujet des blessures présumées qu’elle a subies et qu’elle n’a jamais mentionné ni discuté des incidents du 15 février 2020 avec la gendarme Moar après l’échange susmentionné, et la gendarme Moar ne l’a pas mentionné.

[125] La gendarme S.P. a témoigné qu’elle avait porté l’agression sexuelle à l’attention du caporal M.H. en novembre 2020 parce que leur [traduction] « relation se terminait, et je voulais que les gens sachent ce qu’elle était capable de faire. Et je me sens en partie responsable d’empêcher que cela arrive à d’autres personnes[41] ».

Contre-interrogatoire de la gendarme S.P.

[126] Au cours de son contre-interrogatoire, la gendarme S.P. a confirmé que, pendant sa relation avec la gendarme Moar, elles communiquaient par message texte, courriel, WhatsApp et en personne. Elle utilisait à la fois son téléphone cellulaire personnel et son téléphone cellulaire professionnel lors de ces communications.

[127] La gendarme S.P. a témoigné qu’elle avait parlé à des amis des divers incidents qui sous-tendent les allégations contre la gendarme Moar. Elle a précisé avoir parlé à son ex-épouse, J. P., à ses amis K. P., S.M., S.G. et Brit.

[128] Le représentant de la membre visée a interrogé la gendarme S.P. au sujet de « Brit ». La gendarme S.P. a confirmé que « Brit », aussi connu sous le nom de « B. J. », était en fait la gendarme B.J. de la GRC, sa meilleure amie, et qu’elle parlait ou communiquait avec elle tous les jours, soit par téléphone, par message texte ou par courriel. La gendarme S.P. a déclaré que ses communications constantes avec la gendarme B.J. étaient une source de tension entre elle et la gendarme Moar[42].

[129] La gendarme S.P. a témoigné qu’elle avait informé la gendarme B.J. de tous les incidents tels qu’ils se sont produits, mais qu’elle n’avait pas fourni son nom au sergent G.S. comme témoin à interroger. Lorsqu’on lui a demandé pourquoi elle n’avait pas fourni le nom et les coordonnées de la gendarme B.J., la gendarme S.P. a répondu qu’elle ne voulait pas l’impliquer parce que la gendarme B.J. pouvait faire l’objet d’une enquête pour manquement au code de déontologie pour avoir omis de signaler les incidents. La gendarme S.P. a déclaré que la gendarme B.J. lui a demandé de ne pas donner son nom pour l’enquête.

[130] La gendarme S.P. a aussi révélé qu’elle avait aussi parlé à une autre policière, « J. », et n’avait jamais donné son nom.

[131] Lors de son contre-interrogatoire, la gendarme S.P. a affirmé que ses relations avec la gendarme Moar étaient bonnes lorsqu’elles étaient ensemble et qu’elles se disputaient rarement. Cependant, lorsqu’elles communiquaient par texte ou par courriel, elles avaient des disputes et la gendarme S.P. bloquait régulièrement la gendarme Moar pour les messages textes ou WhatsApp.

[132] La gendarme S.P. a confirmé qu’elle était contrariée par le fait que la gendarme Moar allait à Las Vegas avec son ex-conjointe et qu’elles se sont disputées à cause de ce voyage pendant une période relativement longue.

[133] La gendarme S.P. a admis que, lorsqu’elle était contrariée par la gendarme Moar à propos de quelque chose, elle lui en faisait part systématiquement par message texte ou par courriel. Elle a confirmé qu’avant l’agression sexuelle présumée du 15 février 2020, elle avait des disputes avec la gendarme Moar au sujet du prochain voyage à Las Vegas.

[134] La gendarme S.P. ne se rappelait pas de la conversation qui a mené à la présence de la gendarme Moar dans sa résidence; tout ce qu’elle se souvenait, c’était que la gendarme Moar avait déclaré : [Traduction] « Je m’en viens en crisse[43] ». La gendarme S.P. a témoigné qu’elle ne se rappelait pas si elle avait demandé à la gendarme Moar de venir ou si c’était la gendarme Moar qui avait demandé de venir pour se réconcilier juste avant de partir en voyage.

[135] Le représentant de la membre visée a ensuite demandé à la gendarme S.P. de faire référence à sa déclaration du 30 novembre 2020 au sergent G.S., dans laquelle il est écrit ce qui suit :

[Traduction]

[…] Mais elle savait que j’avais de la misère en pensant à comment ça allait se passer entre elle et son ex, en vacances. Donc, euh, notre, notre, notre conversation était du genre, « Bébé, laisse-moi venir te voir. Laisse-moi venir. Je veux juste te voir, et, tu sais, apaiser les choses avant qu’on parte ou peu importe »[…][44]

[136] La gendarme S.P. a confirmé qu’elle avait en effet dit cela et qu’elle essayait de décrire le contexte entourant la venue de la gendarme Moar.

[137] Le représentant de la membre visée a laissé entendre à la gendarme S.P. que la raison pour laquelle la gendarme Moar s’était rendue à son appartement le 15 février 2020 était de ramasser divers articles dont elle avait besoin pour son voyage, comme son eau de Cologne, ses médicaments contre la migraine et sa veste[45]. La gendarme S.P. a témoigné qu’elle ne se souvenait pas de tout cela. Elle a témoigné qu’à un moment donné dans leur relation, elle a jeté l’eau de Cologne de la gendarme Moar, mais qu’elle ne se souvenait pas du moment de cet incident[46].

[138] La gendarme S.P. ne pouvait pas décrire la position de la gendarme Moar au-dessus d’elle. Elle a répété que la gendarme Moar est entrée dans la chambre, s’est mise sur elle et a inséré sa main à l’intérieur d’elle. Le représentant de la membre visée a demandé où se trouvait la tête de la gendarme Moar par rapport au corps de la gendarme S.P., ce à quoi la gendarme S.P. a répondu que la tête de la gendarme Moar était juste au-dessus de son entrejambe[47].

[139] Lorsqu’on lui a demandé comment la gendarme Moar pouvait se trouver au-dessus d’elle si sa tête était au niveau de son entrejambe, la gendarme S.P. a tout d’abord déclaré que la gendarme Moar l’avait chevauchée, qu’elle ne se rappelait pas comment ses jambes étaient positionnées et qu’elle se souvenait seulement que la gendarme Moar était en elle.

[140] La gendarme S.P. a alors insisté sur le fait que la gendarme Moar mettait tout son poids sur elle. Elle ne pouvait pas décrire comment la gendarme Moar la maintenait, elle ne pouvait pas décrire quelle partie de son corps, le cas échéant, se trouvait sur elle, seulement que la gendarme Moar avait une main posée sur le lit à côté d’elle. La gendarme S.P a déclaré :

[Traduction]

Je ne sais pas ce qu’il y avait sur moi. Je ne pouvais pas l’enlever de moi. Je ne sais pas – elle n’était pas, comme allongée sur moi. Clairement, elle n’était pas allongée si elle était capable de faire ce mouvement de va-et-vient[48].

[141] Au cours du contre-interrogatoire, la gendarme S.P. a déclaré qu’elle ne se souvenait pas si elle avait demandé du soutien en santé mentale après l’incident allégué. Elle a confirmé qu’au printemps ou à l’été 2020, elle a entrepris un processus de fertilité, ce qui comprenait un examen interne. Lorsque l’avocat lui a demandé si l’examen interne avait révélé des cicatrices, la gendarme S.P. a délibérément évité la question.

[142] Le représentant du membre visé a ensuite demandé directement à la gendarme S.P. si, en novembre 2020, elle avait dit au caporal M.H. qu’elle avait des cicatrices réelles découlant de l’agression sexuelle alléguée. L’échange s’est déroulé comme suit :

[Traduction]

Q. Niez-vous lui avoir dit que vous aviez des cicatrices, que vous aviez des cicatrices réelles issues de cet incident?

R. Je ne sais pas ce que je lui ai dit.

Q. D’accord. Si vous lui aviez dit ça, cependant, cela aurait été incorrect, n’est-ce pas?

R. Encore une fois, je ne peux pas attester de ce à quoi je faisais référence lorsque j’ai dit « cicatrices ».

Q. Non, mais vous n’avez pas de cicatrices en raison de l’incident.

R. Je ne sais pas, je n’ai jamais demandé à un médecin de voir s’il y avait des cicatrices.

Q. Vous n’avez pas de cicatrices dont vous avez connaissance.

R. Je ne sais pas à quoi ressemblent mes entrailles, non.

[traduit tel que reproduit dans la version anglaise][49]

[143] Au cours de son entrevue prévue par la loi du 30 novembre 2020 avec le sergent G.S., la gendarme S.P. a fait le témoignage suivant :

[Traduction]

[…] J’ai récemment eu… eu… J’ai passé des tests parce que j’essayais d’avoir un bébé et… J’ai passé des examens internes, et cetera. Et c’était l’une des préoccupations que j’avais, c’était… si j’avais eu des cicatrices profondes ou quoi que ce soit. Euh… mais pour le moment, les tests ne démontrent rien, donc… […][50] [traduit tel que reproduit dans la version anglaise]

Témoignage du caporal M.H.

[144] Le caporal M.H. a témoigné que l’une des premières interactions qu’il a eues avec la gendarme S.P. remonte au 18 novembre 2020, lorsqu’elle est venue le trouver pour lui demander des conseils sur la façon de traiter avec un commis de bureau qui avait des problèmes avec un ex-conjoint. Au cours de cette conversation, après avoir discuté de la question concernant le commis, il a soulevé le fait qu’il avait remarqué qu’elle était renfermée et a demandé à la gendarme S.P. s’il y avait quelque chose qui se passait.

[145] Le caporal M.H. a expliqué que la gendarme S.P. était venue travailler pendant son quart de travail vers mai 2020 et qu’il avait constaté qu’elle était extravertie, qu’elle avait un bon sens de l’humour et qu’elle se joignait aux conversations. Cependant, en octobre 2020, il a remarqué un changement dans sa personnalité. Elle ne se joignait plus aux membres de l’équipe pour le diner ou les pauses-café et ne participait plus aux conversations.

[146] Le caporal M.H. s’est rappelé que, lorsqu’il lui a demandé pourquoi elle était renfermée, la gendarme S.P. a déclaré qu’il lui était arrivé quelque chose de criminel, mais qu’elle n’était pas prête à le divulguer.

[147] Le caporal M.H. a témoigné que, le 29 novembre 2020, lorsque la gendarme S.P. est retournée au détachement après avoir suivi la gendarme Moar et M.B., il l’a fait entrer dans son bureau au détachement. Il se souvient qu’elle était contrariée et qu’il l’a encouragée à donner des détails sur ce qu’elle voulait dire le 18 novembre 2020, lorsqu’elle a déclaré qu’il lui était arrivé quelque chose de criminel. Le caporal M.H. a déclaré ce qui suit :

[Traduction]

Et elle a dévoilé qu’elle - - que [la gendarme Moar], je pense qu’elle a dit qu’elle l’avait violée et avait pointé une arme à feu sur elle[51].

[…]

Et je pense qu’à un moment donné, elle avait dit [traduction] « il y a des cicatrices à cause de ce qui s’est passé[52] ».

[148] Le caporal M.H. a ajouté que la gendarme S.P. n’avait pas mentionné une partie du corps en particulier lorsqu’elle avait fait allusion à ses cicatrices, mais il croyait qu’elle avait peut-être dit quelque chose comme [traduction] « en bas[53] ». Au cours du contre-interrogatoire, le caporal M.H. a déclaré qu’il avait compris que la gendarme S.P. parlait de cicatrices physiques qui prouveraient qu’elle avait été violée.

[149] Le caporal M.H. a témoigné qu’après que la gendarme S.P. eut laissé échapper le commentaire concernant le viol et l’arme à feu, il n’a pas cherché à obtenir plus de détails. Il a appelé le commandant du détachement pour signaler la divulgation de la gendarme S.P. et ouvrir une enquête prévue par la loi. Il a expliqué que la gendarme S.P. avait peur pour sa sécurité, ne voulait pas être laissée seule, et qu’elle a fini par passer la nuit à sa résidence.

Témoignage de la gendarme Moar

[150] La gendarme Moar a témoigné que, lorsqu’elle a rencontré la gendarme S.P. pour la première fois en septembre 2019, elle était en couple avec N.D. depuis environ cinq ou six ans et qu’elles partageaient une résidence commune. Cette relation a pris fin à la mi-octobre 2019 et, en novembre 2019, elle a commencé une relation avec la gendarme S.P. La gendarme Moar a témoigné que N.D. n’avait pas quitté leur résidence avant mars 2020 et que cela était une source de tension entre elle et la gendarme S.P.

[151] La gendarme Moar a décrit sa relation avec la gendarme S.P. comme une relation occasionnelle et que la gendarme S.P. ne voulait pas mettre d’étiquette sur leur relation ni prendre un engagement quelconque. Elle a fait remarquer qu’elles se disputaient beaucoup, par message texte et courriel, et qu’avec le recul, ce n’était pas une relation saine.

[152] La gendarme Moar a témoigné qu’il n’y avait jamais eu de violence ou de menaces de violence dans la relation. Elle a déclaré qu’au cours de la relation, elles se sont souvent séparées pendant une semaine ou deux, la gendarme S.P. la bloquant sur ses comptes de réseaux sociaux.

[153] La gendarme Moar a indiqué que la relation s’était terminée définitivement le 19 octobre 2020 et qu’il s’agissait d’une décision mutuelle. À la fin d’octobre 2020, elle a commencé à fréquenter M.B., sa conjointe actuelle.

[154] La gendarme Moar a témoigné qu’en 2019, elle et N. D. ont vécu une fausse couche. La date d’accouchement prévue de l’enfant aurait été en février 2020. Pour faire face à la perte, elles avaient planifié un voyage à Las Vegas du 16 au 21 février 2020.

[155] La gendarme Moar s’est souvenue que, au début de sa relation avec la gendarme S.P., elle l’a informée du voyage de février 2020. La gendarme S.P. était contrariée par le voyage prévu et elles en discutaient souvent par messages textes et courriels. Dans les jours précédant le 15 février 2020, la tension s’est accrue dans leur relation.

[156] La gendarme Moar a témoigné que, le 15 février 2020, elle travaillait de nuit et a envoyé un message texte à la gendarme S.P. dans le but de passer à l’appartement de la gendarme S.P. et de ramasser divers articles dont elle avait besoin pour son voyage à Las Vegas. Plus précisément, elle voulait obtenir sa veste de printemps North Face, de l’eau de Cologne et ses médicaments contre la migraine.

[157] Selon la gendarme Moar, la gendarme S.P. a accepté de la laisser passer pour prendre ses affaires. La gendarme Moar a déclaré que, dans son esprit, elle croyait que sa visite se transformerait probablement en une sorte d’expérience sexuelle. Elle a souligné que, dans le cours de leur relation, elles avaient l’habitude de se disputer et de se réconcilier ensuite en ayant des relations sexuelles.

[158] La gendarme Moar a déclaré que, le 15 février 2020, cela n’avait pas d’importance dans un sens comme dans l’autre; son objectif était de ramasser ses affaires pour son voyage à venir.

[159] La gendarme Moar s’est souvenue que son quart de travail s’est terminé à 2 heures du matin – il s’agit d’un trajet de 15 minutes jusqu’à Whitewood, et, selon elle, elle serait arrivée à l’appartement de la gendarme S.P. vers 2 h 30 ou 3 heures du matin.

[160] La gendarme Moar a témoigné qu’à son arrivée, la gendarme S.P. lui a ouvert la porte à l’aide de l’interphone; elle a pris l’ascenseur jusqu’au bon étage et est entrée dans l’appartement. Elle a constaté que la gendarme S.P. était au lit et qu’il n’y avait pas de lumières allumées.

[161] La gendarme Moar a déclaré qu’elle est entrée dans la chambre de la gendarme S.P. et qu’elle a utilisé la lumière de son téléphone cellulaire pour trouver ses effets personnels dans la chambre. Elle se souvient qu’elles ont commencé à parler et elle a demandé à la gendarme S.P. pourquoi elle avait eu tant de mal à la laisser venir récupérer ses affaires.

[162] La gendarme Moar se souvient qu’elle n’a pas pu trouver son eau de Cologne et a demandé à la gendarme S.P. où elle se trouvait. La gendarme Moar a déclaré ce qui suit :

[Traduction]

Et elle a dit qu’elle l’avait jetée parce qu’elle ne voulait pas que j’en porte et - - donc après une conversation du genre : « qu’est-ce qui se passe ici? Pourquoi es-tu si contrariée à ce sujet? », elle a révélé qu’elle avait plus de sentiments pour moi que ce qu’elle avait laissé entendre et que l’idée que j’aille à Vegas était encore plus un point sensible maintenant parce qu’elle avait l’impression que ça allait être la fin et que j’allais me réconcilier complètement avec [N.D.] et que ce serait fini entre nous[54].

[163] La gendarme Moar poursuit en affirmant que la reconnaissance par la gendarme S.P. de ses sentiments a déclenché un moment romantique :

[Traduction]

On a fini par s’embrasser. Vous savez, ça se transforme en une sorte de séance de baisers passionnée et finit par devenir, je suppose, ce qu’on appellerait des rapports sexuels ou du sexe[55].

[164] Lorsqu’on lui a demandé de décrire les mécanismes de leur rapport sexuel, la gendarme Moar a expliqué ce qui suit :

[Traduction]

D’accord. Alors elle était allongée sur le dos et elle - - nue. Elle dort toujours nue, donc ce soir-là elle était nue. Je - - elle est sur son dos. Je me suis en quelque sorte retournée, pas sur elle, mais en quelque sorte entre ses jambes de sorte que le haut de mon corps et mon torse se trouvent entre ses cuisses ou ses genoux qui sont en l’air.

Ma main gauche soutient le poids du haut de mon corps afin que je ne m’appuie pas sur elle. Et j’utilise ma main droite pour la stimuler sexuellement au niveau de son vagin[56].

[165] La gendarme Moar a témoigné que la gendarme S.P. gémissait et semblait apprécier. Après plusieurs minutes, elle pouvait dire que la gendarme S.P. avait eu un orgasme et elle s’est etendue à côté d’elle.

[166] La gendarme Moar se souvient qu’elles ont parlé de son voyage et qu’elle a tenté de rassurer la gendarme S.P. quant à sa conviction erronée que le voyage conduirait à une réconciliation avec son ex-conjointe.

[167] La gendarme Moar a nié que la gendarme S.P. criait et pleurait ou qu’elle ait jamais dit « non » à l’interaction sexuelle du 15 février 2020. À aucun moment, elle n’a eu de craintes ou le sentiment que la gendarme S.P. n’était pas consentante.

[168] La gendarme Moar a rappelé qu’après un court moment, elle s’est levée et a quitté la chambre. Le chat de la gendarme S.P. se baladait et la gendarme Moar l’a nourri. Elle a remarqué qu’il ne restait plus beaucoup de nourriture pour chat et a offert d’acheter de la nourriture pour chat pour la gendarme S.P. puisqu’elle devait aller en ville ce jour-là, avant son départ pour Las Vegas. Selon la gendarme Moar, la gendarme S.P. a accepté l’offre et a déclaré qu’elle enverrait à la gendarme Moar un transfert électronique pour la payer. Selon la gendarme Moar, l’humeur était joyeuse.

[169] La gendarme Moar a témoigné qu’elle avait quitté l’appartement et qu’elle s’était rendue chez elle, où elle avait dormi quelques heures avant de se rendre à Regina avec N.D. pour acheter des articles de toilette et d’autres articles de dernière minute pour leur voyage.

[170] La gendarme Moar a également acheté de la nourriture pour chat pour le chat de la gendarme S.P., qu’elle a déposé à son appartement le matin du 16 février 2020, passant devant Whitewood sur sa route vers l’aéroport.

[171] La gendarme Moar a remis au Comité de déontologie une copie du courriel Gmail du virement Interac transmis par la gendarme S.P., en date du 15 février 2020, à 13 h 15. Le virement électronique de cent dollars contenait le message suivant :

Nourriture pour chat et hier soir [emoji de visage souriant][57]

[172] La gendarme Moar a témoigné qu’elle est arrivée à Las Vegas peu après le souper, heure de Las Vegas, le 16 février 2020, et qu’elle a continué à communiquer avec la gendarme S.P. par message texte tout au long de son séjour.

[173] La gendarme Moar n’a pu produire aucun de ces messages textes ou messages WhatsApp échangés au cours cette période. Elle a expliqué qu’en juillet 2020, elle et la gendarme S.P. se sont une fois de plus séparées et elle a déclaré ce qui suit :

[Traduction]

Donc, quand vous vivez des épisodes de rupture, il y en a eu un en particulier en juillet quand je - - je ne pouvais plus le faire et je me suis débarrassée de tout ce qui était directement devant moi et ce qui me faisait penser à elle et à la relation que nous avons eue de façon intermittente en quelque sorte, donc je me suis débarrassée de tout ce qui précédait ces dates et, j’ai en quelque sorte supprimé les conversations[58].

[174] La gendarme Moar a témoigné qu’à Las Vegas, elle voulait faire un tatouage. Elle l’a fait le 17 février 2020, à 15 h 41. Lorsqu’elle a eu le pochoir sur l’avant-bras, elle en a immédiatement pris une photo et l’a envoyé à la gendarme S.P.

[175] La gendarme Moar a pu fournir une copie de la photo qu’elle a transmise à la gendarme S.P. alors qu’elle était assise au salon de tatouage[59]. Lors de son témoignage, la gendarme Moar a expliqué le contenu de la photo :

Donc, le 17 février 2020 était la date du rendez-vous et la date du tatouage, et 15 h 41, c’était l’heure de Las Vegas. Et c’est à ce moment-là que la photo a été prise alors que j’étais assise sur la chaise[60].

[176] En haut du message texte, il y a un horodateur indiquant « 10 h 42 ». La gendarme Moar a expliqué que cela représentait l’heure actuelle sur son téléphone cellulaire lorsqu’elle a pris la capture d’écran de la photo sur son téléphone.

[177] La gendarme Moar a témoigné que, pendant son séjour à Las Vegas, les échanges avec la gendarme S.P. étaient sporadiques. Elle a fait remarquer qu’elle n’avait pas de données pour son téléphone à Las Vegas et qu’elle n’a utilisé son téléphone que pour prendre des photos et envoyer rapidement un message de façon sporadique.

[178] La gendarme Moar a en outre témoigné que la gendarme S.P. n’avait jamais soulevé d’allégation d’agression sexuelle et n’en avait jamais parlé dans un message texte, un courriel ou une conversation. Elle a appris l’existence de l’allégation d’agression sexuelle environ un jour après le 29 novembre 2020, date à laquelle la gendarme S.P. a fait cette allégation.

[179] La gendarme Moar est retournée en Saskatchewan le 22 février 2020. Le 23 février 2020, elle est allée à l’appartement de la gendarme S.P. où elle a séjourné une semaine. Elle a déclaré ce qui suit dans son témoignage : [Traduction]

[…] on s’entendait bien, c’est, je pense, la raison pour laquelle je suis restée là si longtemps. Tout allait vraiment bien. Je me rendais au travail puis je revenais chez elle et on faisait le souper et elle n’était pas en service à ce moment-là, donc elle était toujours là. Et donc, vous savez, je préparais le souper ou elle préparait le souper, et vice versa.

Et tout était… allait bien cette semaine-là[61].

[180] La gendarme Moar a nié qu’il y ait eu une agression sexuelle ou qu’elle ait jamais demandé à la gendarme S.P. si elle allait dire aux gens qu’elle avait pointé une arme à feu sur elle.

Preuve documentaire

[181] Le représentant de l’autorité disciplinaire a déposé comme pièce 3 un document de 2 pages contenant une série de messages textes, en date du 18 février 2020, horodatés entre 0 h 8 et 14 h 5, entre la gendarme Moar et la gendarme S.P. Ce document a été remis au sergent G.S. par la gendarme S.P.

[182] Le premier message texte, horodaté à 0 h 8, est [traduction] « L’heure du tatouage. Pas de noms cette fois hahaha. » La gendarme Moar a témoigné qu’il s’agissait d’une référence au fait qu’elle a le nom de sa première femme tatoué sur son bras ainsi que les initiales de sa deuxième conjointe « N.D. » sur son autre bras. Elle a expliqué qu’il s’agissait d’une [traduction] « plaisanterie/point sensible » et que si jamais elle devait se faire tatouer de nouveau, elle ne se ferait jamais tatouer le nom de quelqu’un sur elle.

[183] La gendarme Moar a confirmé qu’elle se souvenait avoir envoyé ce message à la gendarme S.P., mais pas au moment indiqué dans le message texte. Elle explique avoir envoyé la photo immédiatement après l’avoir prise à 15 h 41. Heure de Las Vegas. Il y a un décalage horaire de deux heures entre Las Vegas et la Saskatchewan; l’horodatage devrait donc indiquer 17 h 41.

[184] Le message texte suivant, également horodaté à 0 h 8, se lit comme suit : [Traduction] « Alors, j’ai droit au traitement silencieux maintenant[62]? » La gendarme Moar a témoigné qu’elle se souvenait d’avoir envoyé un message texte similaire, car elle était frustrée que la gendarme S.P. n’ait pas répondu. Toutefois, l’horodatage est inexact puisqu’elle n’a envoyé ce message qu’une fois son tatouage terminé. Le tatouage a duré deux heures.

[185] En ce qui concerne le reste des échanges de messages textes contenus dans ce document de deux pages, la gendarme Moar s’est souvenue de messages similaires, mais elle n’a pas pu confirmer qu’il s’agissait de messages réels, car les heures indiquées n’avaient pas de sens.

[186] L’un des messages texte, horodaté à 0 h 42, se lit comme suit :

[Traduction]

« Pcq, il se peut que je doive en fait voir un médecin à cause de ce que tu m’as fait, câlice[63] ».

[187] La gendarme Moar a témoigné qu’elle se rappelait avoir eu une conversation semblable avec la gendarme S.P. Elle a déclaré ce qui suit :

[Traduction]

Je me souviens de la conversation. Elle était bouleversée et a dit que sa santé mentale était tellement horrible et qu’elle voulait passer ses heures de congé de maladie en Ontario, pour voir ses anciens psychologue et médecin et qu’elle avait parlé à quelqu’un qu’elle connaissait en Ontario, ce qui lui permettait en quelque sorte de l’aider dans ce processus éventuel[64].

[188] Quant aux raisons pour lesquelles sa santé mentale était mauvaise, la gendarme Moar a déclaré ce qui suit :

[Traduction]

[…] Elle m’a beaucoup blâmée pour ma relation avec [N.D.], c’est-à-dire [sic] ça lui causait son chagrin et la stressait […][65]

[189] La gendarme Moar a témoigné qu’elle avait compris l’échange mentionné comme signifiant que la gendarme S.P. était contrariée et en colère contre elle d’avoir fait le voyage à Las Vegas, et qu’elle supposait que la gendarme Moar se faisait tatouer avec N.D.

[190] La gendarme Moar a été interrogée à propos du message texte, horodaté à 0 h 49, qui dit : [Traduction] « Je savais que tout allait se retourner contre moi, câlice[66] ». Elle a déclaré qu’elle ne se souvenait pas d’avoir dit cela exactement, mais que si elle l’avait fait, c’était en rapport avec le voyage.

[191] Le message texte suivant qui aurait été envoyé par la gendarme Moar est horodaté à 2 h 23 et indique ce qui suit :

[Traduction]

Je ne me suis pas rendu compte que je te faisais mal. Ou je ne l’aurais pas fait. Super maintenant, je dois m’inquiéter de ça aussi[67].

[192] La gendarme Moar ne se rappelait pas avoir envoyé ce message exact, mais elle a expliqué qu’elle n’aurait pas fait allusion au fait d’avoir blessé physiquement la gendarme S.P., comme dans le contexte d’une agression sexuelle. La gendarme Moar a expliqué qu’elle aurait fait référence à ce qui suit :

[Traduction]

Partir en voyage, me faire tatouer. En gros, tout ce que j’avais fait.

Comme [sic] ce stade, j’essaie de dire tout ce que je peux pour adoucir la conversation parce que je sais, avec le recul, ma principale préoccupation était, super, je suis à Las Vegas, elle est en Saskatchewan. Elle parle maintenant, vous savez, d’un retour en arrière et, vous savez, de possiblement déménager de nouveau chez ses parents si elle peut obtenir l’aide dont elle pense avoir besoin.

Quand je retournerai en Saskatchewan, est-ce qu’elle y sera encore[68]?

Conclusions sur l’allégation 3

[193] Comme nous l’avons mentionné précédemment, c’est un fait non contesté que la gendarme Moar s’est rendue à l’appartement de la gendarme S.P. au petit matin du 15 février 2020, après son quart de nuit. La gendarme S.P. l’a fait entrer dans le bâtiment à l’aide de son téléphone portable, avait déverrouillé la porte de son appartement et est restée au lit, nue, sans aucune lumière.

[194] Selon la gendarme Moar, elle allait récupérer des effets personnels avant de partir pour un voyage à Las Vegas avec son ex-conjointe, et elle voulait déterminer où en était la relation entre elle et la gendarme S.P.

[195] La gendarme S.P. n’a pas indiqué dans son témoignage ni mentionné que la gendarme Moar voulait récupérer des articles personnels. Toutefois, questionnée à ce sujet lors de son contre- interrogatoire, elle a indiqué qu’elle ne se rappelait pas que la gendarme Moar voulait récupérer une veste, des médicaments et son eau de Cologne.

[196] La gendarme S.P. s’est souvenue d’un problème avec l’eau de Cologne, mais pas en lien avec cette nuit-là. La gendarme S.P. a déclaré qu’elle avait jeté l’eau de Cologne de la gendarme Moar à un moment donné.

[197] Je trouve intéressant que la gendarme Moar indique dans son témoignage qu’elle a pu récupérer sa veste et ses médicaments, mais qu’à cette date, la gendarme S.P. lui a dit qu’elle avait jeté l’eau de Cologne. Cependant, à son retour de Las Vegas, pendant son séjour à la résidence de la gendarme S.P., la gendarme Moar a trouvé son eau de Cologne.

[198] Bien que les témoignages de la gendarme S.P. et de la gendarme Moar concordent sur les événements entourant la matinée du 15 février 2020, elles ont chacune fourni des éléments de preuve différents sur l’acte précis d’inconduite énoncé dans l’Avis d’audience disciplinaire. Dans l’ensemble, je préfère la version de la gendarme Moar.

[199] La gendarme S.P. affirme que ses entrailles étaient tranchées et gonflaient et qu’elle saignait les jours suivants. Toutefois, elle ne se « rappelle pas » de sang sur ses draps ou sur son couvre-lit. Le bon sens veut que si elle avait subi des coupures, des enflures et des saignements, ses draps ou son couvre-lit auraient été tachés de sang, elle l’aurait remarqué à un moment donné et les aurait nettoyés.

[200] Dans sa déclaration du 30 novembre 2020 au sergent G.S., elle déclare qu’il y avait des saignements foncés provenant de son vagin—qu’elle avait [traduction] « […] du sang noir, très foncé qui sortait de […][69] » d’elle.

[201] Cependant, son message texte du 18 février 2020 à K.P. parle de [traduction] « trucs bruns avec des squames[70] » qui sortent et lorsque K.P. mentionne que c’est peut-être simplement le début de ses règles, elle répond que [traduction] « […] c’est vraiment brun, pas du sang foncé […][71] ».

[202] La photo qu’elle a produite, prise le 17 février 2020, à 13 h 47, est d’un « essuie-tout » avec une substance brune[72]. La gendarme S.P. a témoigné qu’elle était en train de nettoyer la salle de bain en utilisant une feuille d’essuie-tout lorsqu’elle a senti le besoin d’utiliser les toilettes. Elle a alors utilisé l’essuie-tout pour s’essuyer. On peut se demander pourquoi la gendarme S.P. aurait utilisé du papier essuie-tout pour soi-disant s’essuyer après être allée aux toilettes plutôt que du papier toilette?

[203] La gendarme S.P. a témoigné qu’elle se souvenait d’avoir vue la gendarme Moar boutonner sa chemise et avoir eu l’air fâchée après l’agression alléguée, mais elle avait auparavant indiqué qu’elle était couchée dans l’obscurité totale lorsque la gendarme Moar est arrivée initialement.

[204] Aucun des voisins interrogés pendant l’enquête prévue par la loi n’a entendu des cris et des pleurs au petit matin du 15 février 2020.

[205] La révélation dramatique que la gendarme S.P. a faite au caporal M. H. au sujet des « cicatrices » qu’elle avait pour prouver l’agression du 29 novembre 2020 est contredite par le fait qu’elle a subi des examens internes au printemps 2020, ainsi que par sa déclaration au sergent G.S. le 30 novembre 2020, dans laquelle elle a confirmé qu’elle n’avait aucune cicatrice.

[206] Je note également les réponses argumentatives et évasives de la gendarme S.P. sur la question de la cicatrisation lors de son contre-interrogatoire.

[207] Il y a trop d’incohérences dans le témoignage de la gendarme S.P. pour les énumérer toutes. Je souligne que j’ai déjà résumé un certain nombre de ces incohérences[73] et je ne les répéterai pas à ce stade-ci. Il suffit de dire que je préfère et j’accepte le témoignage de la gendarme Moar concernant les événements survenus tôt le matin du 15 février 2020.

[208] Comme il est mentionné dans McDougall, il arrive que la conclusion sur la crédibilité d’un témoin soit déterminante quant à l’issue de l’affaire. C’est le cas en l’espèce.

[209] On ne m’a pas présenté d’éléments de preuve clairs et convaincants démontrant que l’allégation 3 est fondée selon la prépondérance des probabilités. Au contraire, les éléments de preuve appuient clairement la version des événements de la gendarme Moar.

[210] Le représentant de l’autorité disciplinaire n’a pas établi, selon la prépondérance des probabilités, l’acte constitutif de l’inconduite alléguée. C’est-à-dire que la gendarme Moar a pénétré la gendarme S.P. sans son consentement.

[211] L’allégation 3 n’est pas fondée.

MESURES DISCIPLINAIRES

[212] Puisque l’allégation 1 sur l’usage abusif de biens et du matériel de la GRC est fondée, j’ai l’obligation, au titre du paragraphe 45(4) de la Loi sur la GRC et du Guide des mesures disciplinaires de la GRC, d’imposer « […] une mesure juste et équitable selon la gravité de l’infraction, le degré de culpabilité du membre et la présence ou l’absence de circonstances atténuantes ou aggravantes »[74]. Au titre de l’alinéa 36.2e) de la Loi sur la GRC, les mesures disciplinaires doivent être « […] adaptées à la nature et aux circonstances des contraventions aux dispositions du code de déontologie et, s’il y a lieu, des mesures éducatives et correctives plutôt que punitives […] ».

[213] Je reconnais qu’à la lumière de mes conclusions au sujet des allégations et en particulier de ma conclusion selon laquelle les allégations 2 et 3 ne sont pas fondées, le représentant de l’autorité disciplinaire a indiqué que le congédiement ne constitue plus une mesure proportionnelle. Je suis d’accord avec cela.

[214] Le représentant de l’autorité disciplinaire et le représentant de la membre visée ont propose conjointement une réprimande et une sanction pécuniaire de deux jours à déduire de la paye de la gendarme Moar.

[215] Le représentant de l’autorité disciplinaire s’est appuyé sur la décision 2021 DAD 16 [MacGillivray] du Comité de déontologie de la GRC, qui a établi une fourchette de trois à six jours de rémunération. Il a fait remarquer qu’une sanction pécuniaire de deux jours de paye était plus que raisonnable et qu’elle constituerait un niveau de dissuasion approprié.

[216] Le représentant de la membre visée a souligné que la gendarme Moar souhaite que l’affaire soit close et est d’accord avec les mesures disciplinaires proposées.

[217] Lorsqu’un comité de déontologie reçoit une proposition conjointe de mesures disciplinaires, il existe peu de situations où il peut refuser d’accepter les mesures disciplinaires proposées.

[218] La Cour suprême du Canada a reconnu la valeur des discussions sur le règlement de litige, ainsi que celle des motifs des politiques qui favorisent fortement la promotion de la certitude pour les parties que les propositions seront acceptées quand une entente est conclue[75]. En général, un tribunal administratif ne refuse pas les ententes conclues entre les parties, à moins que l’entente aille à l’encontre de l’intérêt public.

[219] Je dois donc déterminer si le fait d’accepter la proposition conjointe irait à l’encontre de l’intérêt public. Pour en arriver à cette conclusion, il est utile d’avoir une idée des autres mesures qui peuvent être imposées. À cet égard, le Guide des mesures disciplinaires est un excellent outil.

Éventail des mesures disciplinaires possibles

[220] Le Guide des mesures disciplinaires, aux pages 28 à 30, précise l’éventail des mesures disciplinaires imposées pour l’utilisation abusive de véhicules de la Gendarmerie. Une gamme de mesures disciplinaires pour des cas graves allant de 1 à 10 jours est jugée justifiée dans les situations où l’usage abusif d’un véhicule par le membre impliquait un usage abusif répété ou prolongé, le transport d’un passager non autorisé ou un usage continu malgré des avertissements préalables.

[221] La gendarme Moar admet qu’elle a utilisé un véhicule de la flotte à des fins purement personnelles. Elle a transporté une passagère non autorisée.

[222] Il s’agit d’un incident isolé et la gendarme Moar n’a pas fait l’objet de sanction disciplinaire antérieure. Elle reconnaît qu’elle n’avait pas l’autorisation d’avoir M.B. comme passagère et de la conduire à sa résidence.

[223] Cela dit, en utilisant le véhicule pour conduire M.B. à sa résidence afin d’éviter une éventuelle confrontation avec la gendarme S.P., qui se trouvait dans le stationnement du détachement à côté du véhicule privé de la gendarme Moar, je conclus que la gendarme Moar n’a pas utilisé le véhicule à des fins très inappropriées qui compromettraient la réputation de la GRC.

[224] Je conclus que la fourchette appropriée est celle des violations moyennes à graves, qui prévoit une sanction pécuniaire de 1 à 3 jours de paye, seule ou en combinaison avec d’autres mesures.

Conclusion relative aux mesures disciplinaires

[225] Les mesures disciplinaires proposées sont conformes à trois objectifs du processus disciplinaire : l’intérêt public; l’intérêt de la GRC à maintenir la discipline; et l’intérêt de la gendarme Moar à ce que l’affaire soit réglée.

[226] De plus, les mesures disciplinaires proposées sont à la fois correctrices et réparatrices et se situent à l’extrémité inférieure de la plage appropriée. Elles reconnaissent que l’usage abusif du véhicule en l’espèce n’était pas dans un but hautement inapproprié et n’a pas compromis la réputation de la GRC.

[227] Enfin, les mesures disciplinaires proposées témoignent de la reconnaissance du fait que les policiers devraient être tenus de respecter les normes de conduite les plus rigoureuses. Elles auront un effet dissuasif sur la gendarme Moar et serviront aussi d’avertissement pour les autres membres.

[228] En conciliant ces facteurs, je conclus que les mesures disciplinaires proposées ne vont pas à l’encontre de l’intérêt public. Par conséquent, j’accepte les mesures disciplinaires proposées et j’impose par les présentes ce qui suit :

  1. une réprimande écrite;
  2. une sanction pécuniaire de deux jours à être déduite de la paye de la gendarme Moar.

CONCLUSION

[229] L’allégation 1 est fondée. Les allégations 2 et 3 ne sont pas fondées.

[230] Ayant conclu que l’allégation 1 est fondée, les mesures disciplinaires susmentionnées sont imposées.

[231] Toute mesure disciplinaire provisoire en place devrait être réglée dans les plus brefs délais, conformément à l’article 23 du Règlement de la Gendarmerie royale du Canada (2014), DORS/2014-281.

[232] L’une ou l’autre des parties peut interjeter appel de cette décision en déposant une déclaration d’appel auprès du commissaire dans le délai de prescription prévu au paragraphe 45.11 de la Loi sur la GRC.

 

 

Le 21 septembre 2023

Louise Morel

Comité de déontologie

 

Ottawa (Ontario)

 



[1] R. c R.E.M., 2008 CSC 51, au paragraphe 65.

[2] Faryna c Chorney, (1952) 2 DLR 354, à la page 357.

[3] F. H. c. McDougall, 2008 CSC 53 [McDougall], au paragraphe 58.

[4] McDougall, paragraphe 86.

[5] Transcription de l’entrevue enregistrée de [la gendarme S.P.], le 30 novembre 2020, à la page 58.

[6] Transcription de l’entrevue enregistrée du caporal [M.H.], le 7 décembre 2020, à la page 19.

[7] Transcription de l’entrevue enregistrée de [la gendarme S.P.], le 30 novembre 2020, aux pages 48 à 51.

[8] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, à la page 38.

[9] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, aux pages 40 à 42.

[10] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, à la page 42.

[11] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, aux pages 44 et 45.

[12] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, aux pages 45 et 46.

[13] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, aux pages 46 et 47.

[14] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, à la page 47.

[15] McDougall, paragraphe 57.

[16] Guide des mesures disciplinaires, novembre 2014, à la page 29.

[17] Détermination des faits établis, en date du 10 février 2023, au paragraphe 5.

[18] McDougall, paragraphe 46.

[19] McDougall, paragraphe 46.

[20] Avis d’audience disciplinaire, le 3 février 2022, à la page 2.

[21] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, aux pages 40 à 42.

[22] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, à la page 42.

[23] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, à la page 42, lignes 14 à 19.

[24] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, de la page 42, ligne 24, à la page 43, ligne 15.

[25] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, à la page 308, lignes 6 à 9.

[26] Transcription de l’entrevue du caporal [M.H.], le 7 décembre 2020, à la page 19.

[27] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, à la page 16, lignes 7 à 10.

[28] Avis d’audience disciplinaire, le 3 février 2022, à la page 2.

[29] McDougall, paragraphe 46.

[30] Transcription de l’audience disciplinaire, en date du 22 février 2023, à la page 54, lignes 18 à 20.

[31] Transcription de l’audience disciplinaire, en date du 22 février 2023, à la page 57, lignes 10 à 12.

[32] Transcription de l’audience disciplinaire, en date du 22 février 2023, à la page 58, lignes 8 à 10.

[33] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, à la page 61, lignes 11 à 13.

[34] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, à la page 64, ligne 5.

[35] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, à la page 64, ligne 9.

[36] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, à la page 64, lignes 20 à 23.

[37] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, à la page 70, lignes 1 à 3.

[38] Représentant de l’autorité disciplinaire – Pièce 2, « photo d’un morceau de papier hygiénique avec des pertes brunes ».

[39] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, à la page 71, lignes 22 et 23.

[40] Représentant de l’autorité disciplinaire – Pièce 3 – 2 pages.

[41] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, à la page 80, lignes 5 à 8.

[42] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, à la page 99, lignes 11 à 25, et à la page 100, lignes 1 à 9.

[43] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, à la page 118, lignes 8 à 11.

[44] Transcription de l’entrevue enregistrée de [la gendarme S.P.], le 30 novembre 2020, à la page 7.

[45] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, à la page 121, lignes 17 à 25, et à la page 122, lignes 1 à 5.

[46] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, à la page 123, lignes 11 et 12.

[47] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, à la page 139, lignes 19 et 20.

[48] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, de la page 144, ligne 23, à la page 145, ligne 2.

[49] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, de la page 198, ligne 20, à la page 199, ligne 10.

[50] Transcription de l’entrevue enregistrée de [la gendarme S.P.], le 30 novembre 2020, à la page 45.

[51] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, à la page 288, lignes 9 à 11.

[52] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, à la page 288, lignes 16 et 17.

[53] Transcription de l’audience disciplinaire, le 22 février 2023, à la page 290, ligne 15.

[54] Transcription de l’audience disciplinaire, le 23 février 2023, à la page 25, lignes 4 à 13.

[55] Transcription de l’audience disciplinaire, le 23 février 2023, à la page 25, lignes 19 à 22.

[56] Transcription de l’audience disciplinaire, le 23 février 2023, à la page 26, lignes 1 à 10.

[57] Réponse à l’audience disciplinaire de la gendarme Moar en vertu du paragraphe 15(3), en date du 30 mai 2022, à l’onglet 3.

[58] Transcription de l’audience disciplinaire, le 23 février 2023, à la page 34, lignes 4 à 11.

[59] Réponse à l’audience disciplinaire de la gendarme Moar en vertu du paragraphe 15(3), en date du 30 mai 2022, à l’onglet 4.

[60] Transcription de l’audience disciplinaire, le 23 février 2023, à la page 35, lignes 16 à 20.

[61] Transcription de l’audience disciplinaire, le 23 février 2023, de la page 45, ligne 22, à la page 46, ligne 5.

[62] Pièce 3 du représentant de l’autorité disciplinaire, à l’onglet 13 du Cartable électronique des preuves des parties.

[63] Pièce 3 du représentant de l’autorité disciplinaire, à l’onglet 13 du Cartable électronique des preuves des parties, à la page 2.

[64] Transcription de l’audience disciplinaire, le 23 février 2023, à la page 39, lignes 5 à 12.

[65] Transcription de l’audience disciplinaire, le 23 février 2023, à la page 39, lignes 16 à 18.

[66] Pièce 3 du représentant de l’autorité disciplinaire, à l’onglet 13 du Cartable électronique des preuves des parties.

[67] Pièce 3 du représentant de l’autorité disciplinaire, à l’onglet 13 du Cartable électronique des preuves des parties.

[68] Transcription de l’audience disciplinaire, le 23 février 2023, de la page 40, ligne 25, à la page 41, ligne 10.

[69] Transcription de l’entrevue enregistrée de [la gendarme S.P.], le 30 novembre 2020, à la page 44.

[70] Pièce 3 du représentant de l’autorité disciplinaire, à l’onglet 12 du Cartable électronique des preuves des parties.

[71] Pièce 3 du représentant de l’autorité disciplinaire, à l’onglet 12 du Cartable électronique des preuves des parties.

[72] Pièce 2 du représentant de l’autorité disciplinaire, à l’onglet 11 du Cartable électronique des preuves des parties.

[73] Voir les paragraphes 36 à 50 de la présente décision.

[74] Guide des mesures disciplinaires, novembre 2014, à la page 3.

[75] Rault c. Law Society of Saskatchewan, 2009 SKCA 81 (CanLII), au paragraphe 19.

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