Déontologie

Informations sur la décision

Résumé :

L’avis d’audience disciplinaire d’origine contenait une allégation de contravention à l’article 7.1 du Code de déontologie de la GRC et une allégation de contravention à l’article 4.2 du Code de déontologie de la GRC. Cette deuxième allégation a ensuite été retirée par l’autorité disciplinaire.

L’allégation de contravention à l’article 7.1 du Code de déontologie de la GRC portait sur une conduite déshonorante du gendarme McDonald, impliquant des actes sexuels sur une personne vulnérable.

Le Comité de déontologie a conclu que l’allégation est fondée et a ordonné le congédiement immédiat du gendarme McDonald.

Contenu de la décision

Protégé A

OGCA 202233821

2023 DAD 10

Interdiction de publication : Toute information qui pourrait identifier N.S. ou ses enfants dans la présente décision ne peut être publiée, diffusée ou transmise de quelque manière que ce soit.

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GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

dans l’affaire d’une

audience disciplinaire tenue en vertu de la

Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, LRC, 1985, ch. R-10

Entre :

Surintendant principal Steven Ing

Autorité disciplinaire désignée, Division E

(Autorité disciplinaire)

et

Gendarme Connor McDonald

Numéro de matricule 65661

(Membre visé)

Décision du Comité de déontologie

Christine Sakiris

16 octobre 2023

Mme Sabine Georges, représentante de l’autorité disciplinaire

M. Brad Kielmann, représentant du membre visé


table des matières

RÉSUMÉ 4

INTRODUCTION 4

Interdiction de publication 5

ALLÉGATION 5

PREUVE 7

Principes juridiques applicables pour déterminer la crédibilité et la fiabilité de la preuve 9

Principes juridiques applicables limitant l’utilisation de déclarations antérieures cohérentes 10

Témoignage de N.S. 13

Témoignage de T.L. et M.L. 16

Témoignage de C.T. 17

Témoignage de C.K. 19

Témoignage du gendarme McDonald 21

Constatation des faits 24

Est-ce que N.S. était une personne vulnérable au sens de la loi? 25

Le gendarme McDonald a-t-il rendu la pareille au flirt de N.S.? 27

Quelles étaient l’heure et la durée de la présence du gendarme McDonald à la résidence de N.S.? 28

Que s’est-il passé pendant la visite du gendarme McDonald à la résidence de N.S.? 32

DÉCISION RELATIVE À L’ALLÉGATION 42

MESURES DISCIPLINAIRES 44

Preuve 44

Décision relative aux mesures disciplinaires 47

CONCLUSION 53

 

RÉSUMÉ

L’avis d’audience disciplinaire d’origine contenait une allégation de contravention à l’article 7.1 du Code de déontologie de la GRC et une allégation de contravention à l’article 4.2 du Code de déontologie de la GRC. Cette deuxième allégation a ensuite été retirée par l’autorité disciplinaire.

L’allégation de contravention à l’article 7.1 du Code de déontologie de la GRC portait sur une conduite déshonorante du gendarme McDonald, impliquant des actes sexuels sur une personne vulnérable.

Le Comité de déontologie a conclu que l’allégation est fondée et a ordonné le congédiement immédiat du gendarme McDonald.

INTRODUCTION

[1] À l’origine, le gendarme McDonald faisait face à deux allégations, telles qu’énoncées dans l’Avis d’audience disciplinaire du 4 novembre 2022. La première allégation est une allégation de contravention à l’article 7.1 du Code de déontologie de la GRC (conduite déshonorante). Le gendarme McDonald se serait livré à des actes sexuels avec N.S., une personne vulnérable (allégation 1). La deuxième allégation est une allégation de contravention à l’article 4.2 du Code de déontologie de la GRC, à savoir que le gendarme McDonald n’a pas exercé ses fonctions avec diligence et ne s’est pas acquitté de ses responsabilités en tant que membre (allégation 2).

[2] Le 3 février 2023, le gendarme McDonald a fourni sa réponse aux allégations, conformément au paragraphe 15(3) des Consignes du commissaire (déontologie), DORS/2014-291 [les CC (déontologie)]. Le 6 février 2023, j’ai fait part au représentant du membre visé de ma préoccupation quant au fait que la réponse était insuffisante et ne respectait pas les exigences du paragraphe 15(3) des CC (déontologie). Le 3 mars 2023, j’ai tenu une conférence préparatoire à l’audience au cours de laquelle j’ai passé en revue mes préoccupations avec l’avocat. Le représentant du membre visé a accepté de soumettre une réponse modifiée, et j’ai fourni des directives détaillées à cet égard.

[3] Le 14 mars 2023, le gendarme McDonald a présenté une réponse modifiée (réponse) aux allégations ainsi que des preuves à l’appui, y compris un enregistrement audio de certaines de ses interactions avec N.S. Bien que le gendarme McDonald ait admis certains détails, il a nié les deux allégations.

[4] Le 31 mars 2023, l’autorité disciplinaire a retiré l’allégation 2. Par conséquent, l’allégation 1 est la seule dont je suis saisie.

[5] J’ai été désignée pour diriger le Comité de déontologie en vertu du paragraphe 43(1) de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, L.R.C., 1985, ch. R-10 [Loi sur la GRC]. Conformément à l’article 45 de la Loi sur la GRC, je dois décider si l’allégation 1 est fondée selon la prépondérance des probabilités. Autrement dit, je dois déterminer s’il est plus probable qu’improbable que le gendarme McDonald ait contrevenu au Code de déontologie. Si je conclus que l’allégation 1 est fondée, je dois imposer des mesures disciplinaires.

[6] Pour les motifs qui suivent, je conclus que l’allégation 1 est fondée et j’ordonne le congédiement immédiat du gendarme McDonald.

Interdiction de publication

[7] Conformément à l’alinéa 45.1(7)a) de la Loi sur la GRC, j’ordonne que tout renseignement qui pourrait révéler l’identité de la plaignante, N.S., ou de ses enfants ne soit publié, diffusé ou transmis dans aucun document ou de quelque façon que ce soit.

[8] L’allégation 1 et ses détails ont été modifiés pour refléter l’interdiction de publication.

ALLÉGATION

[9] Conformément à l’avis d’audience disciplinaire, l’allégation et les détails sont les suivants :

Allégation 1

Le ou entre le 14 août et le 15 août 2021, à [caviardé] ou à proximité, dans la province de la Colombie-Britannique, le gendarme Connor McDonald a adopté un comportement contraire à l’article 7.1 du Code de déontologie de la Gendarmerie royale du Canada.

Détails :

1. Pendant toute la période pertinente, vous étiez un membre de la Gendarmerie royale du Canada (GRC), exerçant des fonctions générales en uniforme, affecté à la Division E, [nom du détachement caviardé] dans la province de la Colombie-Britannique.

2. Le 15 août 2021, [N.S.] qui était alcoolique chronique et suicidaire, a été trouvée inconsciente et semblait faire une surdose. Elle a été appréhendée en vertu de la Loi sur la santé mentale et emmenée à l’hôpital [nom caviardé].

3. Vous êtes resté plusieurs heures avec [N.S.] à l’hôpital pendant sa convalescence. Vous avez eu des conversations personnelles et vous avez flirté avec elle pendant cette période.

4. Après avoir eu son congé de l’hôpital, [N.S.] vous a demandé de la raccompagner chez elle. Au lieu de cela, vous l’avez emmenée au centre commercial [nom caviardé] au [lieu caviardé] et l’avez déposée devant le restaurant McDonald’s. Vous saviez qu’elle allait acheter plus d’alcool, car elle a clairement dit qu’elle avait l’intention d’aller au magasin d’alcool.

5. [N.S.] a ensuite acheté six bières au magasin d’alcool Beer & Wine.

6. Alors qu’elle était assise dans la rue et qu’elle parlait au téléphone avec son amie, [C.T.], [N.S.] vous a vu revenir dans le véhicule de police et elle vous a supplié en vous disant « s’il vous plaît, ne me ramenez pas ». [N.S.] avait peur que vous la rameniez à l’hôpital. En retour, vous lui avez proposé de l’ajouter sur Facebook si elle rentrait chez elle à pied.

7. Aux petites heures du 15 août 2021, vous avez téléphoné à [N.S.] et lui avez demandé si vous pouviez venir chez elle, ce qu’elle a accepté. Après votre quart de travail, vous vous êtes rendu à son domicile en tenue civile. Il n’y avait aucune justification légale et/ou opérationnelle pour justifier votre présence à sa résidence.

8. À votre arrivée, vous avez déclaré quelque chose comme « Je pourrais avoir beaucoup de problèmes pour ça ».

9. Pendant que vous étiez à sa résidence, vous avez eu des relations sexuelles avec [N.S.] dans sa chambre. En outre, vous avez commis des attouchements sexuels par voie orale sur [N.S.] et vous avez éjaculé dans sa bouche.

10. Vous n’avez donc pas respecté les normes éthiques élevées sur le lieu de travail et en dehors des heures de travail et vous avez eu une conduite déshonorante en vous livrant à des actes sexuels avec un membre vulnérable du public, dans un contexte vraiment pas convenable.

[traduit tel que reproduit dans la version anglaise]

PREUVE

[10] Le dossier dont je dispose comprend deux déclarations de N.S. Les amies de N.S., C.T. et C.K., sa sœur T.L. et son beau-frère, M.L., ont également fait des déclarations.

[11] Le dossier comprend également de nombreuses preuves documentaires. Il convient de noter en particulier :

  1. Rapports généraux d’incidents relatifs à l’arrestation de N.S. en vertu de la Loi sur la santé mentale, RSBC 1996, c 288 [Loi sur la santé mentale], le 14 août 2021;
  2. Journaux de requête pour le gendarme McDonald le 14 août 2021;
  3. Images de profils Facebook;
  4. Requête de la Direction des véhicules à moteur effectuée par le sergent Michael Kokkoris;
  5. Rapport d’analyse technique des données GPS du véhicule de police que conduisait le gendarme McDonald les 14 et 15 août 2023, tel que préparé par M. William Speechley de la Section des analyses des crimes;
  6. Carte montrant les tours de téléphonie cellulaire utilisées par le téléphone personnel du gendarme McDonald le 15 août 2021, préparée par Alicia Johnson, analyste de la criminalité de la GRC (données sur les tours de téléphonie cellulaire);
  7. Analyse des images de télévisions en circuit fermé (TVCF) du Détachement et des caméras de circulation;
  8. Dossiers de l’ordonnance de communication et du mandat de perquisition du téléphone personnel du gendarme McDonald;
  9. Rapport d’extraction des dossiers téléphoniques personnels du gendarme McDonald préparé par le sergent Michael Kokkoris, Groupe de la responsabilité professionnelle.

[12] Comme il en a fait droit, le gendarme McDonald n’a pas fait de déclaration au cours de l’enquête relative au Code de déontologie. À l’appui de sa réponse aux allégations, le gendarme McDonald a fourni un enregistrement audio qu’il avait fait en transportant N.S. de l’hôpital au centre commercial le 14 août 2021. Il a ensuite fourni l’enregistreur audio utilisé pour faire l’enregistrement au Groupe de la responsabilité professionnelle de la Division E, qui a ensuite pris des dispositions pour que l’enregistrement audio soit amélioré et transcrit.

[13] Le 10 octobre 2022, N.S. a été retrouvée morte à sa résidence.

[14] Lors d’une conférence préparatoire à l’audience, le 3 mars 2023, le représentant du membre visé a fait savoir qu’il s’opposait à l’admissibilité des déclarations de N.S. ainsi qu’à certaines parties des déclarations d’autres témoins qui font référence au compte rendu des événements de N.S. des 14 et 15 août 2021. D’autres communications ont suivi, en vue de clarifier les éléments des déclarations des témoins qui étaient en cause. Le 28 mars 2023, j’ai ordonné la tenue d’un « voir dire ».

[15] Le 13 avril 2023, les parties ont fait savoir qu’elles étaient parvenues à un accord sur l’admissibilité des déclarations en cause[1] et ont proposé une façon de procéder à l’audience. J’ai accepté la façon proposée de procéder avec certaines précisions. Les directives que j’ai données à la fin de cette conférence préalable à l’audience, et qui ont été répétées et reconnues par les parties au début de l’audience[2], prévoient ce qui suit :

  1. Le gendarme McDonald ne s’oppose pas à l’admissibilité des déclarations des témoins au dossier, en tout ou en partie, y compris celles de N.S.
  2. Les parties conviennent que toute déclaration antérieure cohérente dans les déclarations des témoins fait partie du dossier et peut être invoquée comme preuve circonstancielle et contextuelle, et non pour la véracité de son contenu. Je déterminerai le poids à accorder à cette preuve dans le contexte du dossier dans son ensemble et des observations des parties.
  3. Les parties ne feront aucune déposition de vive voix à l’étape des allégations de l’audience.
  4. L’autorité disciplinaire a renoncé à son droit de contre-interroger le gendarme McDonald à l’étape des allégations de l’audience.
  5. De même, le gendarme McDonald a renoncé à son droit de contre-interroger tous les autres témoins.
  6. La réponse du gendarme McDonald aux allégations, datée du 14 mars 2023, y compris l’enregistrement audio et sa transcription, fait partie du dossier. J’évaluerai le poids à accorder à cette preuve dans le contexte du dossier dans son ensemble et des observations des parties.
  7. Les parties fourniront un exposé conjoint des faits qui sera examiné dans le contexte du dossier dans son ensemble et des observations des parties. Par conséquent, mes conclusions de fait ultimes pourraient ne pas concorder directement avec l’exposé conjoint des faits.

[16] Le 16 juin 2023, les parties ont fourni un exposé conjoint des faits, ainsi qu’une transcription modifiée de l’enregistrement audio.

Principes juridiques applicables pour déterminer la crédibilité et la fiabilité de la preuve

[17] Pour évaluer la déposition de chaque témoin, je dois déterminer si elle est sincère et si elle est fiable (c.-à-d. si le témoin est en mesure de percevoir et de se rappeler avec exactitude ce qu’il a observé). Il est possible que je considère la déposition d’un témoin comme étant sincère, mais non fiable. Je peux aussi accepter une partie ou la totalité de la déposition du témoin ou la rejeter au sujet d’un fait particulier[3].

[18] Pour évaluer la crédibilité, je ne dois pas examiner le témoignage d’un témoin en vase clos, mais plutôt l’ensemble du témoignage. Je dois également tenir compte de l’incidence des contradictions dans le témoignage et déterminer si, prises globalement dans le contexte de l’ensemble de la preuve, elles ont une incidence sur la crédibilité du témoin[4].

[19] Dans la décision Faryna[5], la Cour fait observer que la déposition d’un témoin ne peut être évaluée uniquement en fonction de son comportement, c’est-à-dire qu’il semble dire la vérité. Le juge des faits doit plutôt déterminer si le témoignage du témoin est conforme à l’interprétation la plus probable des circonstances.

[20] Enfin, il est important de noter que les conclusions d’un comité de déontologie sur la crédibilité peuvent être déterminantes pour la question finale qui lui est soumise[6].

Principes juridiques applicables limitant l’utilisation de déclarations antérieures cohérentes

[21] Une déclaration antérieure cohérente est une déclaration faite par un témoin avant, dans ce cas, une audience disciplinaire, qui est cohérente avec son témoignage lors de l’audience. Une telle déclaration est généralement irrecevable lorsqu’elle est avancée par la partie qui a appelé le témoin, car elle est généralement considérée comme intéressée et de peu de valeur probante[7]. En bref, la crédibilité d’un témoin ne peut être renforcée simplement parce qu’il a répété la même histoire à d’autres personnes. En outre, les déclarations antérieures cohérentes sont considérées comme des ouï-dire; elles ne peuvent être invoquées comme preuve de la vérité de leur contenu.

[22] Une déclaration antérieure cohérente peut toujours être admissible en vertu de certaines exceptions et peut aider un comité de déontologie à évaluer la crédibilité d’un témoin. Ces exceptions comprennent, sans s’y limiter, son utilisation comme preuve circonstancielle, pour réfuter une allégation de fabrication récente ou comme preuve narrative (contextuelle).

[23] Lorsqu’elles sont admissibles, deux inférences interdites découlent de ces témoignages : 1) il est plus probable qu’un témoin dise la vérité parce qu’il a fait la même déclaration dans le passé, et 2) la déclaration antérieure cohérente corrobore le témoignage d’un témoin[8].

[24] En l’espèce, les déclarations antérieures cohérentes en cause se trouvent dans les déclarations de T.L., de C.T. et de C.K. Elles reflètent le souvenir que les témoins ont du récit des événements de N.S. du 15 août 2021. En particulier, elles se rapportent au récit de N.S. sur les actes sexuels précis auxquels elle s’est livrée avec le gendarme McDonald pendant qu’il était à sa résidence, ainsi qu’aux déclarations prétendument faites par le gendarme McDonald, selon lesquelles il pourrait avoir des ennuis à la suite de ses actes[9].

[25] Les parties ont proposé conjointement, et j’ai accepté, que les déclarations antérieures cohérentes en cause soient recevables en tant que preuves circonstancielles et contextuelles. Les deux parties ont renoncé à leur droit de contre-interroger les témoins à l’étape des allégations de l’audience.

[26] En pratique, cela signifie que je peux me fonder sur les déclarations antérieures cohérentes comme preuve circonstancielle de l’état d’esprit de N.S., lorsqu’il est en cause[10]. Comme je l’ai indiqué dans mon analyse ci-dessous, le représentant du membre visé a mis en cause l’état d’esprit de N.S.

[27] Je peux également me fier aux déclarations cohérentes antérieures comme preuve contextuelle ou narrative des circonstances dans lesquelles l’incident présumé a eu lieu ou pour établir le moment des événements, y compris le fait et le moment du dépôt d’une plainte[11].

[28] Dans The Law of Evidence, les auteurs illustrent comment ces concepts doivent être appliqués[12] :

[TRADUCTION]

Dans l’affaire R. c. Dinardo, la preuve a démontré que la plaignante qui se prétend victime d’une agression sexuelle, souffrant de troubles mentaux, avait de la difficulté à situer les événements dans le temps, était facilement confuse et mentait à l’occasion. À la lumière de ce qui précède, la Cour suprême du Canada a reconnu que « la spontanéité de sa déclaration initiale ainsi que la répétition des éléments essentiels de ses allégations fournissent un contexte très utile à l’appréciation de sa crédibilité ».

[…]

Essentiellement, la façon spontanée et répétitive dont les déclarations cohérentes antérieures ont été faites devait être prise en compte pour évaluer si la plaignante avait de la difficulté à situer les événements allégués dans le temps, ou si elle était confuse au sujet de ce qui s’est passé.

[29] Et plus loin, dans Langan[13] :

[TRADUCTION]

[95] […] le fait que la plaignante ait fait des déclarations à l’accusé, le moment où elles ont été faites et les circonstances dans lesquelles elles ont été faites donnent des conclusions qui confirment la sincérité et la fiabilité du témoignage de la plaignante au tribunal. C’est là que réside la valeur probante de ces messages texte après l’événement; leur utilisation à cette fin était permise […]

[96] Un point important est que la défense s’est appuyée sur les messages au procès pour tenter d’établir des contradictions dans le compte rendu des événements et des réactions émotionnelles de la plaignante, ce qui a rendu nécessaire leur examen par le juge de première instance. […]

[…]

[99] Il est bien établi que des déclarations antérieures cohérentes peuvent être utilisées pour évaluer la crédibilité. L’utilisation appropriée dépend de la question de savoir si les déclarations sont utilisées pour conclure qu’un témoin est crédible en raison d’inférences précises et autorisées en matière de crédibilité, comme : « l’évaluation du contexte dans lequel la plainte initiale a été déposée, en particulier le fait et le moment de la plainte » (Khan, au paragraphe 43); comprendre « la séquence des événements depuis l’infraction présumée jusqu’à la poursuite afin que [le juge des faits] puisse comprendre la conduite de la plaignante et évaluer sa sincérité » (R. vs F. (J.E.), 1993 CanLII 3384 (Ont. C.A.) à la p. 476, cité dans Dinardo au paragr. 38); ou évaluer s’il existe « des preuves qu’une personne a un motif de mentir » (R. c. Stirling, 2008 CSC 10, paragr. 12).

Témoignage de N.S.

[30] N.S. a fourni deux déclarations aux enquêteurs avant son décès, qui se trouvent dans le dossier. N.S. n’étant pas disponible pour témoigner à l’audience, ses déclarations constituent des ouï-dire. Cependant, leur admission est nécessaire en raison de son incapacité à témoigner. En consentant à leur admission, le gendarme McDonald a concédé qu’ils respectaient le seuil de fiabilité requis pour la recevabilité des déclarations. Toutefois, je dois déterminer le poids à accorder à son témoignage (ou sa fiabilité ultime).

[31] Je suis d’accord avec le représentant du membre visé pour dire qu’en évaluant la crédibilité du témoignage de N.S., je ne peux pas me fier à des hypothèses stéréotypées. Par exemple, je ne peux pas présumer que les plaignants ne s’exposeraient pas au processus d’enquête ou de procès à moins que ce qu’ils disent soit vrai[14].

[32] Bien que le représentant du membre visé n’affirme pas explicitement que N.S. a menti ou que son témoignage manque de crédibilité, il conteste la fiabilité de ses déclarations pour plusieurs motifs.

[33] Premièrement, il soutient que la façon dont les déclarations ont été prises est problématique. Il soutient que le fait de ne pas avoir enregistré de déclarations sur bande video rend difficile l’évaluation du comportement, que les déclarations n’ont pas été faites sous serment, que les enquêteurs n’ont pas insisté sur l’importance de dire la vérité et qu’ils ont suggéré des réponses à N.S. Sauf votre respect, je n’accepte pas ces arguments.

[34] Les déclarations de N.S. ont été enregistrées sur bande audio. Son ton et son comportement général, qui, je le souligne, ne sont pas déterminants quant à la crédibilité, peuvent être évalués. Il ressort clairement des déclarations de N.S. qu’elle était pleinement consciente que tout ce qu’elle disait pouvait avoir de graves conséquences pour le gendarme McDonald. Elle a explicitement déclaré à plusieurs reprises qu’elle ne voulait pas qu’il perde son emploi. Elle a fait prevue d’empathie à l’égard du gendarme McDonald et elle n’a pas essayé de le dépeindre de façon négative[15]. Enfin, comme l’a fait remarquer la représentante de l’autorité disciplinaire, le gendarme McDonald avait la possibilité d’appeler les enquêteurs pour qu’ils attestent la façon dont les déclarations ont été prises. Il a choisi de ne pas le faire. Par conséquent, il ne peut pas maintenant chercher à contester la fiabilité des déclarations de N.S. sur cette base.

[35] Deuxièmement, le représentant du membre visé met en cause l’état d’esprit de N.S. lorsqu’il affirme que son témoignage n’est pas fiable en raison de pertes de mémoire attribuables à son alcoolisme et des interactions possibles avec d’autres médicaments qu’elle a pu prendre. Il soutient en outre que N.S. [TRADUCTION] « a fait preuve d’un degré de délire qui mine considérablement la fiabilité de ses déclarations[16]. » Ici, il fait référence à un incident survenu le 21 août 2021, au cours duquel N.S. a subi des blessures au visage. Elle a accusé à tort des policiers d’avoir causé ces blessures. Le représentant du membre visé laisse entendre en outre que les propos de N.S. au sujet de la visite du gendarme McDonald à sa résidence ne sont rien de plus qu’un fantasme.

[36] Personne ne conteste le fait que N.S. était alcoolique. Elle le reconnaît volontiers dans ses déclarations aux enquêteurs et l’avoue lorsqu’elle ne peut se souvenir de l’information.

[37] Le représentant du membre visé souligne que, dans sa deuxième déclaration, N.S. indique qu’elle a pris récemment des médicaments qui ont affecté sa lucidité[17]. N.S. n’est pas sûre de la date à laquelle elle a commencé à prendre le médicament. Le représentant du membre visé laisse entendre que les informations contenues dans sa première déclaration ne sont donc pas fiables. Cependant, cet argument va dans les deux sens. J’estime que le fait que N.S. déclare explicitement qu’elle ne se souvient pas de ce qu’elle a dit dans sa première déclaration, et qu’elle donne ensuite sa version des faits qui est largement cohérente avec cette première déclaration, ce qui renforce la crédibilité et la fiabilité de son témoignage, au lieu de les mettre en doute. De plus, son témoignage dans la deuxième déclaration, dans laquelle elle fournit des détails supplémentaires sur ses interactions avec le gendarme McDonald, peut donc être considéré comme encore plus fiable que son témoignage dans la première déclaration, car elle est davantage lucide à ce moment-là.

[38] Troisièmement, le représentant du membre visé soutient qu’il existe de multiples incohérences entre le témoignage de N.S. et celui d’autres témoins. Je ne suis pas d’accord, sur l’ensemble de la preuve, pour dire que c’est le cas. Comme je l’expliquerai, et comme l’a fait remarquer la représentante de l’autorité disciplinaire, les incohérences qui existent sont accessoires aux questions ultimes dont je suis saisie. À ce titre, je ne pense pas qu’ils nuisent à la crédibilité de N.S. ou à la fiabilité globale de son témoignage.

[39] Il ne fait aucun doute que N.S. a du mal à se souvenir du moment de certains éléments de ses interactions avec le gendarme McDonald. Toutefois, comme je l’explique dans mon analyse ci-dessous, lorsque l’on considère la preuve matérielle et que l’on tient compte des éléments de preuve contextuels et circonstanciels fournis par les déclarations des témoins pour évaluer son état d’esprit ainsi que la chronologie des événements et de ses révélations, j’estime que le témoignage de N.S. est à la fois crédible et fiable.

Témoignage de T.L. et M.L.

[40] T.L. est la sœur de N.S. Elle a fourni une déclaration aux enquêteurs dans laquelle elle se souvenait d’un appel avec N.S., environ une semaine après l’incident présumé. Lorsqu’elle a appris que N.S. avait eu des relations sexuelles avec un policier, T.L. a communiqué cette information à son mari M. L., un policier à la retraite. Par la suite, il a communiqué avec la GRC et déposé une plainte, ce qui a mené à l’enquête relative au Code de déontologie dans cette affaire.

[41] Les déclarations antérieures cohérentes en cause dans la déclaration de T.L., telles qu’elles ont été identifiées par le représentant du membre visé, sont soit la répétition par T.L. de déclarations faites par N.S., soit le souvenir qu’en a T.L. :

[TRADUCTION]

  1. Quand il a terminé, il m’a regardé et m’a dit : « Tu ne dois le dire à personne parce que je peux avoir beaucoup de problèmes pour ça[18]. »
  2. D’accord? Et puis euh, donc elle, elle a dit qu’ils avaient eu des relations sexuelles[19].
  3. Non, non, non. Ils ont eu des relations sexuelles[20].
  4. Elle m’a dit qu’il avait dit qu’elle n’était pas censée le dire à personne qu’il pourrait avoir de gros problèmes[21].

[42] Le représentant du membre visé n’a pas soulevé, et je n’ai pas identifié, de préoccupations concernant la crédibilité de T.L. ou de M.L. Toutefois, la fiabilité de leur témoignage n’est pas aussi grande que celle des autres témoins. Premièrement, il n’y a pas d’enregistrement audio ou de transcription de la déclaration de M.L., qui a été prise au téléphone. Un résumé de sa déclaration figure dans le rapport d’enquête. Deuxièmement, contrairement à C.T. et à C.K., N.S. n’a divulgué l’incident présumé à T.L. qu’environ une semaine plus tard. Par conséquent, dans la mesure où je me suis appuyée sur l’un de leurs témoignages comme preuve contextuelle ou circonstancielle de l’état d’esprit de N.S. au moment de l’incident présumé ou de la chronologie des événements, j’ai retenu le témoignage de C.T. et de C.K. plutôt que celui de T.L. et de M.L.

Témoignage de C.T.

[43] C.T. est une amie et une voisine de N.S. Elles se connaissent depuis plus de 20 ans[22]. Elle parlait avec N.S. ou la voyait plusieurs fois par jour. Elle était présente et a une connaissance directe de plusieurs éléments des événements qui se sont déroulés les 14 et 15 août 2021. En particulier, elle était présente lorsque la gendarme Hadell Alameer a ramené N.S. à sa résidence au début de l’après-midi du 14 août 2021, avant son arrestation en vertu de la Loi sur la santé mentale. C.T. était au téléphone avec N.S. pendant que N.S. était transportée par le gendarme McDonald, après sa sortie de l’hôpital. C.T. était également au téléphone avec N.S. alors qu’elle était à l’extérieur du magasin d’alcool et est allée rejoindre N.S. pour s’assurer qu’elle rentrait chez elle en toute sécurité.

[44] C.T. a raccompagné N.S. chez elle à partir du magasin d’alcool et a participé à un appel (sur haut-parleur) avec N.S. et C.K., au cours duquel elles ont discuté de la demande du gendarme McDonald sur Facebook. C.T. a passé du temps avec elle à sa résidence le soir du 14 août 2021 et était présente lorsque N.S. a confirmé à C.K. qu’elle devrait accepter la demande d’ami du gendarme McDonald sur Facebook.

[45] C.T. a reçu plusieurs appels manqués de N.S. au cours des premières heures du 15 août 2021. Elle s’est rendue à la résidence de N.S. entre 8 h et 9 h le matin du 15 août 2021, date à laquelle N.S. a révélé qu’elle avait eu des relations sexuelles avec le gendarme McDonald.

[46] Les déclarations antérieures cohérentes en cause dans la déclaration de C.T., telles qu’elles ont été identifiées par le représentant du membre visé, sont soit la répétition par C.T. des déclarations faites par N.S., soit le souvenir qu’en a C.T. :

[TRADUCTION]

  1. Et puis elle avait, finalement il a dit, il lui a dit d’enlever son pantalon, d’enlever ses vêtements, il est allé lui faire un cunnilingus, et après qu’ils ont eu une relation sexuelle, elle a dit qu’il n’arrêtait pas de dire qu’il pourrait avoir tellement de problèmes pour ça, et ensuite il s’est vidé dans sa bouche. Genre il a éjaculé dans sa bouche[23].
  2. La première pensée, la première chose que j’ai vue quand je me suis réveillée, c’est un message de [C.K.] disant : « Le policier était chez [N.S.] et il l’a baisée[24]. »
  3. Oui, il est revenu ici et il m’a baisée et il m’a dit de lui raconter une histoire[25].
  4. Et puis il est allé lui faire un cunnilingus…[26]
  5. Il a eu une relation sexuelle avec elle et a éjaculé dans sa bouche[27].
  6. Surtout parce qu’apparemment il lui a dit ça [de lui raconter une histoire], c’était près du lit[28].
  7. Il lui a ensuite demandé de se déshabiller, ou quelque chose comme ça. Et puis il est allé lui faire un cunnilingus[29].
  8. C’est logique, et puis elle disait, parce que quand elle m’a dit qu’il l’avait mangée, genre il lui faisait un cunnilingus…[30]

[47] Ces passages sont des passages distincts du témoignage de C.T. Je les ai examinés dans le contexte de la déclaration dans son ensemble. En évaluant la crédibilité et la fiabilité du témoignage de N.S., je me suis appuyée sur ces déclarations antérieures cohérentes dans le seul but d’établir la chronologie des événements et d’évaluer l’état d’esprit de N.S.. Je ne me suis pas appuyée sur elles pour confirmer la véracité de leur contenu.

[48] Le représentant du membre visé n’a pas soulevé, et je n’ai pas identifié, de préoccupations concernant la crédibilité ou la fiabilité globale du témoignage de C.T.

Témoignage de C.K.

[49] C.K. est une amie d’enfance de N.S. Elle parlait avec N.S. ou la voyait plusieurs fois par jour. N.S. avait accordé à C.K. l’accès à ses comptes de courriel et Facebook, car elle comptait sur C.K. pour l’aider à effectuer des opérations bancaires, à gérer sa correspondance et à gérer ses comptes de médias sociaux. Comme C.T., C.K. était présente et a une connaissance directe de plusieurs éléments des événements qui se sont déroulés les 14 et 15 août 2021.

[50] C.K. était au téléphone avec N.S. pendant que N.S. était transportée par le gendarme McDonald, après sa sortie de l’hôpital. C.K. était également sur haut-parleur avec N.S. et C.T. alors qu’elles marchaient du magasin d’alcool à la résidence de N.S. Elles ont discuté de la demande Facebook au cours de cet appel. C.K. a également parlé avec N.S. et C.T. au téléphone après leur arrivée à la résidence de N.S. C.K. est la personne qui a confirmé et agi selon la directive de N.S. d’accepter la demande Facebook du gendarme McDonald.

[51] C.K. a reçu plusieurs appels manqués de N.S. au cours des premières heures du 15 août 2021. Elle a parlé à N.S. entre 7 h 30 et 8 h le matin du 15 août 2021, date à laquelle N.S. a révélé qu’elle avait eu des relations sexuelles avec le gendarme McDonald.

[52] Les déclarations antérieures cohérentes en cause dans la déclaration de C.K., telles qu’elles ont été identifiées par le représentant du membre visé, sont soit la répétition par C.K. de déclarations faites par N.S., soit le souvenir qu’en a C.K. :

[TRADUCTION]

  1. … et à ce moment-là, elle m’a dit que le policier de la veille était venu chez elle et avait eu des relations sexuelles avec elle, et qu’ils avaient eu des relations sexuelles orales entre eux[31].
  2. Non, ils avaient eu, elle m’a dit qu’ils avaient eu des relations sexuelles, de vraies relations sexuelles ensemble et qu’il lui avait fait un cunnilingus. Je ne me souviens pas qu’elle ait dit qu’elle lui avait fait une fellation, mais [C.T.] m’a dit qu’elle lui avait dit directement qu’elle lui avait fait une fellation et qu’il avait éjaculé dans sa bouche[32].
  3. [Enquêteur] : … Donc ce que [N.S.] vous a dit, c’est qu’il lui a fait un cunnilingus.
  4. [C.K] : Oui. Il l’a fait… il l’a fait sur elle, oui[33].

[53] Ces passages sont des passages distincts du témoignage de C.K. Je les ai examinés dans le contexte de la déclaration dans son ensemble. En évaluant la crédibilité et la fiabilité du témoignage de N.S., je me suis appuyée sur ces déclarations antérieures cohérentes dans le seul but d’établir la chronologie des événements et d’évaluer l’état d’esprit de N.S. Je ne me suis pas appuyée sur elles pour confirmer la véracité de leur contenu.

[54] Le représentant du membre visé n’a pas soulevé, et je n’ai pas identifié, de préoccupations concernant la crédibilité ou la fiabilité globale du témoignage de C.K.

Témoignage du gendarme McDonald

[55] Le gendarme McDonaldl n’a pas fait de déclaration dans le contexte de l’enquête, comme il en a le droit. Il n’a pas non plus témoigné à l’audience. Encore une fois, c’est son droit et je n’ai tiré aucune conclusion négative de ses décisions à cet égard. Je note également que l’autorité disciplinaire a renoncé à son droit de contre-interroger le gendarme McDonald à l’étape des allégations.

[56] Toutefois, le résultat obtenu est que la preuve du gendarme McDonald se limite à sa réponse aux allégations, à l’enregistrement audio qu’il a fait de ses interactions avec N.S. pendant qu’il la transportait le 14 août 2021 et aux transcriptions de cet enregistrement.

[57] Le gendarme McDonald a fait certains aveux, qui sont conformes à la preuve directe au dossier. Cela dit, lorsque j’examine son témoignage dans le contexte du dossier dont je suis saisie, je ne le trouve ni crédible ni fiable.

[58] Le gendarme McDonald fait des affirmations qui ne sont pas appuyées par la preuve dont je dispose. Par exemple, au paragraphe 10 de sa réponse, il affirme que N.S. lui a dit [TRADUCTION] « qu’elle n’était pas du tout suicidaire et qu’elle avait seulement dit ça par frustration ». Son témoignage est incompatible avec celui de N.S. et avec le rapport général d’incident, qui a été rempli le 14 août 2021.

[59] Bien que N.S. ne se souvienne pas de la raison précise pour laquelle elle a été admise à l’hôpital le 14 août 2021, elle déclare avoir été hospitalisée [TRADUCTION] « plusieurs fois dernièrement », soit parce qu’elle s’était évanouie, soit parce qu’elle avait menacé de se suicider[34]. Elle affirme qu’elle appelle souvent ses amies ou ses sœurs, et qu’elles répondront même tôt le matin parce qu’elles savent qu’elle n’est [TRADUCTION] « pas dans un bon état en ce moment[35] ».

[60] Le témoignage de N.S. est conforme au rapport général d’incident rempli par la gendarme Alameer le 14 août 2021. La gendarme Alameer était suffisamment préoccupée par les idées suicidaires exprimées par N.S. pour conclure que N.S. représentait un danger pour elle-même et l’appréhender en vertu de la Loi sur la santé mentale. Sur ce point, je retiens le témoignage de la gendarme Alameer, qui n’a aucun intérêt dans cette affaire.

[61] Un autre exemple est l’affirmation du gendarme McDonald selon laquelle il ne savait pas que N.S. avait l’intention d’acheter de l’alcool après avoir été déposée. Il s’appuie sur l’enregistrement audio qu’il a fourni à l’appui de sa réponse comme preuve de cette affirmation. Plus particulièrement, il affirme que [TRADUCTION] « [N.S.] n’a jamais déclaré à [lui] ou à quiconque en sa présence qu’elle avait l’intention d’acheter de l’alcool[36] ». Cependant, de nombreuses parties de cet enregistrement audio sont indéchiffrables.

[62] En revanche, N.S. a déclaré que le gendarme McDonald était au courant de son intention d’acheter de l’alcool et qu’elle avait aussi dit à C.T. qu’elle se rendait au magasin d’alcool[37]. Elle affirme qu’elle l’a fait lorsqu’elle était au téléphone avec C.T. dans le véhicule de police du gendarme McDonald[38]. C.T. a également fait remarquer, dans sa déclaration, que, pendant cet appel téléphonique, N.S. lui avait dit qu’elle voulait être déposée au centre commercial afin d’aller au magasin d’alcool[39].

[63] Le gendarme McDonald cherche à s’appuyer sur sa conversation qu’il a eue avec N.S. dans le véhicule sur un certain nombre de points, y compris sa déclaration concernant l’endroit où elle voulait être déposée. Selon les transcriptions, cette déclaration en particulier a été faite pendant que N.S. était au téléphone avec une autre personne[40]. La transcription établit en outre que N.S. était au téléphone avec C.T. à ce moment-là. Par exemple, vers la fin de l’appel, N.S. informe le gendarme McDonald qu’elle parle à sa voisine, qui viendra la rencontrer[41]. Cette voisine est C.T.

[64] L’enregistrement démontre que, peu de temps après leur entrée dans le véhicule de police, le gendarme McDonald a demandé à N.S. d’abaisser la cloison de verre afin qu’il puisse l’entendre clairement[42]. Comme il a été mentionné précédemment, il cherche à s’appuyer sur des éléments de sa conversation avec C.T. pour prouver que N.S. a demandé à ne pas être déposée chez elle, qu’elle était sobre lorsqu’il l’a quittée et qu’elle avait quelqu’un qui venait la rencontrer pour s’assurer qu’elle rentrait chez elle en toute sécurité[43]. Par conséquent, même si N.S. ne l’a pas dit directement au gendarme McDonald, il est raisonnable de conclure qu’il a entendu N.S. dire à C.T. qu’elle avait l’intention d’acheter de l’alcool après avoir été déposée.

[65] De plus, bien qu’il ne soit pas contesté que N.S. flirtait avec le gendarme McDonald pendant tout le temps qu’ils ont passé ensemble, il affirme qu’il ne lui a pas rendu la pareille. Comme je l’expliquerai dans mon analyse, je conclus que cette affirmation n’est pas appuyée par la preuve.

[66] Ce qui nuit le plus à la crédibilité du gendarme McDonald, c’est son affirmation selon laquelle il s’est rendu chez N.S. pour effectuer un [TRADUCTION] « suivi » auprès d’un [TRADUCTION] « plaignant, d’une victime ou d’un témoin dans le besoin », comme l’exigent les normes de service de la GRC[44]. Compte tenu de l’ensemble de la preuve dont je dispose, et comme je l’exposerai dans mon analyse ci-dessous, sa version des faits est incompatible avec l’interprétation la plus probable des circonstances. Par conséquent, lorsque sa version des faits diverge de celle de N.S., je retiens le témoignage de N.S.

Constatation des faits

[67] Un certain nombre de faits ne sont pas contestés. Ils sont décrits dans l’exposé conjoint des faits des parties.

[68] Le gendarme McDonald avoue que, les 14 et 15 août 2021, il était membre de la GRC et qu’il exerçait des fonctions générales.

[69] Le 14 août 2021, N.S. a été appréhendée en vertu de la Loi sur la santé mentale et emmenée à l’hôpital.

[70] Le gendarme McDonald est resté à l’hôpital avec N.S. pendant plusieurs heures pendant qu’elle se rétablissait. Ils ont eu des conversations personnelles et N.S. a flirté avec lui.

[71] À sa sortie de l’hôpital, N.S. a demandé à être raccompagnée. Le gendarme McDonald a accepté et l’a emmenée dans un centre commercial près de sa résidence. Il l’a déposée devant un restaurant McDonald’s. N.S. avait dit au gendarme McDonald qu’elle ne voulait pas être déposée à sa résidence.

[72] Après avoir été déposée, N.S. a acheté six bières au magasin d’alcool.

[73] Ayant constaté que N.S. ne se déplaçait pas en direction de sa résidence, le gendarme McDonald a fait demi-tour avec son véhicule pour la retrouver. Il l’a ensuite trouvée près du magasin d’alcool.

[74] Après un bref échange devant le magasin d’alcool ou près de celui-ci, le gendarme McDonald a envoyé une demande d’ami sur Facebook à N.S. en utilisant son profil personnel.

[75] Aux premières heures du 15 août 2021, le gendarme McDonald s’est rendu à la résidence de N.S. après son quart de travail, en civil et avec son propre véhicule.

[76] Les faits contestés sont liés à la question de savoir si le gendarme McDonald a réciproquement flirté avec N.S., à l’heure et à la durée de sa visite chez N.S. le 15 août 2021, et à ce qui s’est passé pendant que le gendarme McDonald se trouvait à la résidence de N.S. La question de savoir si N.S. était une personne vulnérable est aussi quelque peu contestée. Je vais commencer par là.

Est-ce que N.S. était une personne vulnérable au sens de la loi?

[77] La preuve est claire que N.S. était alcoolique. Peu avant le 14 août 2021, elle avait perdu la garde de ses enfants en raison de sa consommation d’alcool[45].

[78] Le 14 août 2021, la GRC a reçu un appel signalant qu’une femme s’est évanouie et qui [TRADUCTION] « pourrait être en train de faire une overdose ». La gendarme Alameer est intervenue et a trouvé N.S. assise sur un banc. Je suis d’accord avec le représentant du membre visé pour dire qu’il n’y a aucune preuve que N.S. a consommé des substances illicites. Cependant, elle était fortement intoxiquée par l’alcool.

[79] La gendarme Alameer a ramené N.S. à sa résidence, où elle a appris que N.S. avait récemment perdu la garde de ses enfants en raison de sa dépendance à l’alcool. N.S. a exprimé des idées suicidaires et était émotionnellement désemparée. N.S. a finalement été appréhendée en vertu de la Loi sur la santé mentale et emmenée à l’hôpital à 15 h[46].

[80] Le gendarme McDonald a été dépêché sur les lieux à titre d’unité de couverture à l’hôpital à 16 h 42. Il est arrivé à 16 h 51 et est resté avec N.S. jusqu’à sa sortie de l’hôpital à 20 h[47]. Il savait qu’elle était en état d’ébriété lorsqu’elle est arrivée à l’hôpital[48].

[81] Le gendarme McDonald a interrogé le CIPC au sujet de la plaignante à 17 h 15 le 14 août 2021[49]. N.S. a été identifiée comme une personne susceptible d’intéresser les préposés aux armes à feu. Il a également consulté le rapport général d’incident, tel qu’il avait été établi par la gendarme Alameer, qui reflétait les circonstances dans lesquelles N.S. avait été hospitalisée. Bien qu’il ne soit pas clair quand il a consulté le rapport général d’incident pour la première fois, il l’a certainement consulté pour faire ses propres entrées à 20 h 49 ce soir-là. Je note que le rapport général d’incident identifie expressément la plaignante comme une [TRADUCTION] « personne émotionnellement perturbée » et que son appréhension en vertu de la Loi sur la santé mentale était due à un risque pour elle-même ou pour autrui.

[82] Bien que je convienne avec le représentant du membre visé que N.S. avait un réseau de soutien, elle avait de la difficulté à fonctionner seule. C.K, C.T. et T.L. ont tous noté que N.S. était très anxieuse et qu’elle les appelait plusieurs fois par jour, à toute heure de la journée. N.S. avait accordé à C.K. l’accès à ses renseignements personnels, y compris ses renseignements bancaires, afin qu’elle puisse l’aider à payer ses factures et gérer ses comptes de courriel et Facebook.

[83] Comme le montre le propre témoignage de N.S., elle n’était [TRADUCTION] « pas dans un bon état ». Elle a déclaré qu’au moment ou aux alentours de l’incident présumé les 14 et 15 août 2021, elle avait eu plusieurs interactions avec la police, dont certaines l’ont amenée à l’hôpital[50]. Sa version des faits est corroborée par le témoignage relatif à l’incident du 21 août 2021, qui a entraîné des blessures au visage de N.S.

[84] Par conséquent, je conclus que, pendant toute la période pertinente, N.S. était une personne vulnérable et que, les 14 et 15 août 2021, le gendarme McDonald savait qu’elle était en fait une personne vulnérable.

Le gendarme McDonald a-t-il rendu la pareille au flirt de N.S.?

[85] Il n’est pas contesté que N.S. ait flirté avec le gendarme McDonald à l’hôpital et dans son véhicule de police. Cependant, le témoignage n’appuie pas l’affirmation du représentant du membre visé selon laquelle ses flirts n’ont jamais été réciproques.

[86] J’ai écouté l’enregistrement audio soumis par le gendarme McDonald à de nombreuses reprises. Je n’accepte pas certaines parties de la transcription modifiée présentée conjointement par les parties. J’estime qu’il y a des éléments qui sont audibles et qui ne sont pas reflétés dans la transcription modifiée. Je les ai ajoutés en caractères gras dans le passage suivant :

[TRADUCTION]

M : OK. As-tu besoin de quelque chose de moi?

N.S. : J’ai besoin d’un câlin. Oui, (INDÉCHIFFRABLE) peux faire.

M: OK.

N.S. : Mais tu es tellement délicieux!

M : Oh, non… euh, je ne peux pas te donner ça maintenant, c’est bon. […][51]

[87] Même si la transcription modifiée est exacte, lorsqu’elle est examinée dans le contexte des actions du gendarme McDonald, elle démontre un comportement de flirt de la part du gendarme McDonald. En particulier, après que N.S. eut suggéré qu’elle aimerait un [TRADUCTION] « suivi » de la part du gendarme McDonald, il a donné à N.S. sa carte professionnelle, sur laquelle il a rayé son téléphone de travail, et a écrit ce qui a été confirmé comme son numéro de téléphone cellulaire personnel[52]. Il a ensuite dit :

[TRADUCTION]

M : OK. J’ai rayé mon numéro de téléphone de travail là-dessus, OK donc le numéro de téléphone là-dessus est…

N.S. : (RIRES)

M : Le numéro de téléphone qui est là est celui qui fonctionne, d’accord?

[88] Le gendarme McDonald ne donne aucune explication crédible pour avoir fourni à N.S. son numéro de téléphone cellulaire personnel. Si le flirt était uniquement unilatéral, il n’y aurait eu aucune raison pour que le gendarme McDonald biffe son numéro de travail, écrive son numéro personnel, attire l’attention de N.S. sur le fait qu’il s’agit du [TRADUCTION] « numéro qui fonctionne ». Par conséquent, je conclus que, même si N.S. était certainement beaucoup plus ouverte dans son flirt, le ton général de leur échange a démontré qu’il avait été réciproque vers la fin de leur temps ensemble dans l’après-midi du 14 août 2021.

Quelles étaient l’heure et la durée de la présence du gendarme McDonald à la résidence de N.S.?

[89] Le gendarme McDonald admet qu’il s’est rendu à la résidence de N.S. aux premières heures du 15 août 2021, alors qu’il n’était pas en service et qu’il portait des vêtements civils[53]. L’heure et la durée de cette visite sont pertinentes pour évaluer la plausibilité de la version des faits du gendarme McDonald et de N.S. sur ce qui s’est passé.

[90] Le représentant du membre visé fait référence à la déclaration de N.S. du 25 août 2021, dans laquelle elle déclare que le gendarme McDonald est resté [TRADUCTION] « probablement quelques heures, je dirais un maximum de deux heures[54] ». Il soutient que cette version des faits est invraisemblable face à la preuve matérielle et est incompatible avec sa déclaration du 10 septembre 2021, dans laquelle elle affirme à plusieurs reprises que le gendarme McDonald n’est pas resté longtemps, peut-être une demi-heure[55].

[91] Le représentant du membre visé s’appuie sur le témoignage de C.K. et sur ce qui, en fin de compte, est son hypothèse selon laquelle le gendarme McDonald s’est rendu chez la plaignante vers 3 h du matin pour faire valoir que la période de temps de N.S., si elle avait été acceptée, aurait laissé huit minutes entre son arrivée à la résidence de N.S. et son appel à C.K. à 3 h 09. Il soutient qu’il n’est pas possible pour le gendarme McDonald d’avoir commis les actes sexuels allégués dans ce court délai.

[92] Toutefois, C.K. ne disposait pas de nombreux éléments de preuve lorsqu’elle a fait sa déclaration.

[93] La preuve matérielle, et en particulier l’analyse technique, les données de la tour cellulaire, les images TVCF (au détachement et aux caméras de circulation), l’ordonnance de communication et le rapport d’extraction, font partie intégrante de l’établissement de la chronologie des événements. En fin de compte, cette période de temps correspond au témoignage de N.S. quant au moment où elle interagit avec le gendarme McDonald, et il témoigne de la fiabilité de son témoignage.

[94] N.S. a quitté l’hôpital avec le gendarme McDonald à 20 h 36 le 14 août 2021[56]. Il a fallu environ 16 minutes entre le moment où ils sont partis dans le véhicule de police du gendarme McDonald et celui où il a déposé N.S. devant le McDonald’s. Le gendarme McDonald a fait un enregistrement audio du trajet en voiture, au cours duquel N.S. a parlé avec le gendarme McDonald. Elle a également reçu deux appels téléphoniques[57]. Il y a 49 cas où les paroles du gendarme McDonald ou de N.S. sont indéchiffrables, allant de quelques secondes à plus de deux minutes[58].

[95] Lorsque N.S. sort du véhicule de police, le gendarme McDonald lui remet sa carte professionnelle, en faisant référence au numéro de dossier du rapport général d’incident pour son arrestation. Il biffe aussi son numéro de travail et écrit son numéro de téléphone personnel, disant à N.S. : « Le numéro de téléphone là-dessus est celui qui fonctionne, d’accord?[59] »

[96] Le gendarme McDonald a fait des entrées dans le rapport général d’incident à 20 h 49[60]. Il a effectué le transfert de N.S. à 20 h 53 et était « de retour en service » à 20 h 56[61].

[97] Après avoir été déposée, N.S. a acheté six bières au magasin d’alcool[62].

[98] Le gendarme McDonald affirme qu’il a remarqué que N.S. ne se dirigeait pas vers sa résidence. Il a fait demi-tour de son véhicule et l’a retrouvée près du magasin d’alcool. Le gendarme McDonald et N.S. affirment qu’ils ont eu une conversation. Le gendarme McDonald n’a pas fourni d’enregistrement audio pour cette partie de leur interaction.

[99] Il n’est pas contesté que le gendarme McDonald ait offert ou accepté d’ajouter N.S. sur Facebook si elle acceptait de rentrer chez elle.

[100] Peu après cette interaction, le gendarme McDonald a envoyé à N.S. une demande d’ami sur Facebook, en utilisant son profil personnel[63]. Sa photo de profil personnelle sur le compte « Connor Glen » correspond à sa photo de profil avec la GRC[64].

[101] Le soir même, C.K. a accepté la demande d’ami du gendarme McDonald au nom de N.S.[65]

[102] À 2 h 32, le 15 août 2021, le gendarme McDonald est entré au poste du détachement en portant son uniforme. Il est sorti du poste à 2 h 42 du matin, portant un t-shirt noir avec un motif ou une image sur le devant et dans le dos, des shorts turquoise, des chaussettes noires et des sandales de plage[66].

[103] À 2 h 44, le gendarme McDonald a marché jusqu’au coin sud-ouest du stationnement du détachement. Il est sorti du stationnement à 2 h 47 dans une camionnette rouge[67]. Pendant toute la période pertinente, le gendarme McDonald possédait une camionnette Ford 150 rouge de l’année 2020[68].

[104] La résidence du gendarme McDonald était située au sud du détachement. La résidence de N.S. se trouvait au nord-ouest du détachement[69].

[105] N.S. affirme que le gendarme McDonald l’a appelée[70]. La preuve confirme qu’à 3 h 23, le gendarme McDonald a appelé N.S. à l’aide de son téléphone cellulaire personnel. Cet appel a duré 3 min 24 s. Bien que je reconnaisse que les données de la tour de téléphone cellulaire ne peuvent pas fournir l’emplacement exact de l’appelant, elles placent le gendarme McDonald à un endroit situé au sud-ouest du détachement au moment de l’appel[71].

[106] À 3 h 35, le gendarme McDonald a passé un deuxième appel à N.S. en utilisant son téléphone cellulaire personnel. Cet appel a duré 3 min 51 s. Les données de la tour cellulaire montrent que le gendarme McDonald se trouvait au nord-ouest du détachement, à environ mi-chemin entre le détachement et la résidence de N.S. Le gendarme McDonald a par la suite supprimé l’enregistrement de ces appels de son téléphone[72].

[107] De plus, à 3 h 35, les caméras de circulation montrent une camionnette rouge, correspondant à celle que le gendarme McDonald conduisait lorsqu’il a quitté le détachement, se dirigeant vers le nord sur une route principale près de la résidence de N.S.[73]

[108] À 4 h 14, les caméras de circulation montrent une camionnette rouge, correspondant à celle que conduisait le gendarme McDonald lorsqu’il a quitté le détachement, se dirigeant vers le sud sur cette même route principale. L’intersection à laquelle les images ont été capturées se trouve à proximité de la résidence de N.S. Le temps écoulé entre les observations de la caméra de circulation est de 39 minutes[74].

[109] La capture d’écran de l’enregistrement de l’appel sur le téléphone de C.K. est conforme à la preuve de tous les témoins : N.S. les appellerait à plusieurs reprises, à toutes les heures de la journée. On y voit des appels manqués à 3 h 09, 3 h 12, 4 h 14, 4 h 19, 5 h 52, 6 h 21, 6 h 34 et 6 h 35. Ici, je remarque un écart de 1 h 2 min entre 3 h 12 et 4 h 14[75]. Cet écart correspond au moment des appels téléphoniques et à la preuve qui placent le gendarme McDonald près de la résidence de N.S. dans cette période.

[110] Par conséquent, je conclus que la prépondérance de la preuve établit que le gendarme McDonald s’est rendu à la résidence de N.S. entre 3 h 35 et 4 h 14 le 15 août 2021 et qu’il est resté environ une demi-heure.

Que s’est-il passé pendant la visite du gendarme McDonald à la résidence de N.S.?

[111] Je suis d’accord avec la représentante de l’autorité disciplinaire pour dire que les versions des faits du gendarme McDonald et de N.S. sur ce qui s’est passé pendant sa visite à sa residence ne peuvent coexister.

[112] N.S. a déclaré aux enquêteurs que le gendarme McDonald l’avait appelée aux petites heures du 15 août 2021, puis qu’il était allé chez elle. Elle a déclaré qu’il était en civil. Elle n’a pas vu le véhicule qu’il conduisait. Elle a affirmé que, pendant que le gendarme McDonald était à sa résidence, il lui a fait un cunnilingus, qu’ils ont eu une relation sexuelle et qu’il a éjaculé dans sa bouche[76]. Elle a déclaré que les actes sexuels étaient consensuels et que le gendarme McDonald est parti peu après. Elle a aussi dit que, pendant qu’il était à sa résidence, le gendarme McDonald a fait des commentaires à l’effet qu’il pouvait avoir beaucoup de problèmes pour ce qu’ils avaient fait[77].

[113] Le gendarme McDonald avoue qu’il s’est rendu à la résidence de N.S., mais il insiste sur le fait que c’était seulement pour vérifier son bien-être, comme l’exigent les normes de service de la GRC. Bien qu’il n’ait pas été directement mentionné dans la réponse du gendarme McDonald, le représentant du membre visé soutient que, subsidiairement, le gendarme McDonald avait établi un lien personnel avec N.S. et qu’il voulait la surveiller par souci général. Le gendarme McDonald affirme que, pendant qu’ils étaient à la résidence de N.S., ils ont eu une conversation et qu’il est parti. Il nie avoir commis des actes sexuels avec N.S.

[114] Le représentant du membre visé a maintes fois mis en cause l’état d’esprit de N.S. en faisant valoir que le témoignage de N.S. n’est pas fiable parce qu’elle était, en raison de l’influence de l’alcool ou d’autres médicaments, confuse au sujet de ce qui s’est passé, ou qu’elle délirait et fabriquait la réalisation d’un fantasme. Le représentant du membre visé soutient en outre que la version des faits de N.S. sur ses interactions avec le gendarme McDonald a évolué au fil du temps. Dans ce contexte, les déclarations antérieures cohérentes et, en particulier, le moment et la manière dont la divulgation a été faite peuvent être révélateurs de la crédibilité et de la fiabilité.

Est-ce que N.S. s’est trompée sur l’identité du gendarme McDonald?

[115] Le représentant du membre visé laisse entendre que, même si N.S s’est livrée aux actes sexuels décrits, elle s’est trompée quant à l’identité de la personne avec qui elle était. Il affirme ici qu’elle a « mal identifié » le profil Facebook du gendarme McDonald et sa description de ses vêtements lorsqu’il s’est rendu à sa résidence. Elle a décrit une chemise de style surfer, tandis que la vidéo du détachement montre le gendarme McDonald en t-shirt noir avec un motif ou un logo sur le devant et le dos. Il se fie également à son identification erronée de l’agent qui l’aurait agressée le 21 août 2021, et à ses souvenirs inexacts des événements qui ont mené à ses blessures au visage. En résumé, il soutient que son état d’ébriété l’a rendue incapable d’identifier de façon fiable le gendarme McDonald.

[116] La preuve n’appuie pas l’affirmation du représentant du membre visé selon laquelle N.S. a mal identifié le profil Facebook du gendarme McDonald. Au contraire, le gendarme McDonald admet qu’il lui a envoyé une demande d’ami en utilisant son profil Facebook personnel. C.K. et C.T. ont une connaissance directe des circonstances dans lesquelles la demande d’ami du gendarme McDonald a été acceptée. Leur preuve est cohérente : C.K. a montré à N.S. la demande et a confirmé avec elle que la personne sur la photo de profil était en fait le gendarme McDonald avant d’accepter la demande d’ami au nom de N.S. Le gendarme McDonald ne nie pas que la capture d’écran fournie par C.K. soit, en fait, sa photo de profil personnel[78]. Il est également incontesté que, lorsque C.K. a vérifié à nouveau le compte Facebook de N.S. à 8 h le 15 août 2021, le gendarme McDonald s’était « désabonné » au compte Facebook de N.S. Comme il est indiqué dans le rapport d’enquête, lorsque N.S. a montré le profil du gendarme McDonald au sergent d’état-major Douglas le 25 août 2021, elle n’avait pas les mêmes privilèges d’accès et, par conséquent, la photo de profil n’était peut-être pas la même.

[117] Le gendarme McDonald avoue, et le témoignage de N.S. concorde, qu’il portait des vêtements civils. Elle [TRADUCTION] « pense » qu’il portait une chemise de style surfer[79]. Le motif du t-shirt noir vu sur la vidéo de surveillance n’est pas clairement visible. Cela a peut-être inspiré un « style surfer » à N.S. De plus, le gendarme McDonald a quitté le détachement plus d’une demi-heure avant que je constate qu’il était arrivé à la résidence de N.S. Il n’a fourni aucun compte rendu de ses activités après avoir quitté le détachement. Il est possible qu’il ait changé de nouveau à un moment donné avant d’arriver à la résidence de N.S. En bref, le témoignage est ambigu quant au style précis de chemise qu’il portait et je ne trouve aucune incohérence significative à cet égard.

[118] Il ne fait aucun doute que N.S. s’est trompée sur l’origine de ses blessures au visage du 21 août 2021. Elle a affirmé de façon cohérente qu’elle avait été agressée physiquement par un agent de police et qu’elle a d’abord mal identifié cet agent. Cependant, au moment où elle a subi les blessures en question, elle était profondément en état d’ébriété. Elle a semblé avoir perdu conscience et s’est d’abord effondrée sur le trottoir. Le 25 août 2021, N.S. affirme qu’elle ne peut pas décrire l’agent qui l’a frappée, admettant qu’elle était [TRADUCTION] « assez anéantie » à ce moment-là[80].

[119] Il n’est pas contesté que N.S. était fortement en état d’ébriété lorsque la gendarme Alameer l’a retrouvée pour la première fois vers 13 h 30, le 14 août 2021. Cependant, environ sept heures plus tard, à son congé de l’hôpital, elle était cohérente. Le gendarme McDonald affirme qu’elle était, en fait, sobre lorsqu’elle est sortie de l’hôpital, et il se fie à l’enregistrement audio comme preuve de son affirmation[81].

[120] Bien que T.L. ait déclaré que N.S. était en état d’ébriété le soir du 14 août 2021 et aux petites heures du 15 août 2021, N.S. n’a parlé de l’incident avec T.L. qu’environ une semaine plus tard. Contrairement à T.L., C.T. et C.K. ont parlé avec N.S. pendant qu’elle était dans le véhicule de police avec le gendarme McDonald, à l’extérieur du magasin d’alcool, pendant qu’elle rentrait chez elle, et de nouveau lorsqu’elle était à la maison. C.T. était avec elle en personne pour la ramener chez elle à pied et elle est restée à sa résidence jusqu’à environ 23 h 30 ce soir-là[82]. C.T. et C.K. ont indiqué que N.S. était toujours sous l’influence de l’alcool, mais cohérente et, relativement parlant, pas très ivre. Cela concorde avec l’évaluation que N.S. a faite de son niveau d’intoxication le soir du 14 août 2021[83].

[121] Il n’est pas contesté que N.S. a eu accès à six bières entre le moment où elle a été déposée par le gendarme McDonald et le moment où elle a parlé avec C.K. le lendemain matin. J’accepte le témoignage de N.S. selon lequel six bières suffiraient pour [TRADUCTION] « la mettre en état d’équilibre[84] ». Je note également qu’elle a indiqué qu’il lui restait encore de la bière pendant que le gendarme McDonald était à sa résidence[85].

[122] C.K. et C.T. ont parlé avec N.S., au téléphone ou en personne, tôt le matin du 15 août 2021. Ni l’une ni l’autre n’a fait remarquer qu’elle était considérablement ivre au moment où elle a spontanément divulgué sa relation sexuelle avec le gendarme McDonald. Elles l’ont plutôt décrite comme heureuse et excitée de leur dire ce qui s’est passé.

[123] À la lumière de ce qui précède, je conclus que la capacité de N.S. d’observer et de se rappeler les événements des 14 et 15 août 2021 est beaucoup plus fiable que pour les événements du 21 août 2021, au cours desquels elle a subi des blessures au visage. Par conséquent, je ne conclus pas que son incapacité à se souvenir avec précision des événements du 21 août 2021 met en doute la crédibilité ou la fiabilité de son témoignage en ce qui concerne les événements des 14 et 15 août 2021 et, en particulier, son identification du gendarme McDonald comme étant la personne qui s’est rendue à sa résidence et avec qui elle s’est livrée à des actes sexuels.

N.S. a-t-elle concocté un fantasme?

[124] Il n’est pas contesté que N.S. était attirée par les policiers. N.S. était très ouverte à ce sujet. Elle a déclaré qu’elle avait toujours voulu avoir des relations sexuelles avec un policier[86].

[125] Le représentant du membre visé soutient que N.S. avait une fixation sur les policiers et que l’agent McDonald avait été gentil avec elle. Il soutient qu’elle a donc concocté un fantasme d’avoir eu une relation sexuelle avec le gendarme McDonald. À l’appui de cette position, le représentant du membre visé soutient en outre que la version des faits de N.S. concernant leur interaction évolue au fil du temps.

[126] Dans l’évaluation de cet argument, le moment des divulgations de N.S. et son état d’esprit à ce moment-là sont importants.

[127] Lorsque N.S. a révélé pour la première fois à C.K. sa relation sexuelle avec le gendarme McDonald entre 7 h 30 et 8 h le 15 août 2021, N.S. a dit avoir eu des relations sexuelles avec le gendarme McDonald et qu’il lui a fait un cunnilingus. C.K. ne se souvient pas que N.S. lui avait dit qu’elle avait fait une fellation au gendarme McDonald.

[128] N.S. a ensuite parlé à C.T. en personne, peu après 8 h. C.T. a déclaré que, même si elle croyait que N.S. avait consommé de l’alcool, elle n’était pas [TRADUCTION] « en état d’ébriété[87] ». C.T. a ajouté que N.S. était [TRADUCTION] « extrêmement excitée d’avoir eu une relation sexuelle avec un policier[88] ». C.T. a indiqué que N.S. a décrit la demande du gendarme McDonald à ce que N.S. lui raconte une histoire, lui disant de se déshabiller, lui faisant un cunnilingus, se livrant à une relation sexuelle et éjaculant dans sa bouche[89]. C.T., qui connaît N.S. depuis son adolescence, fait bien comprendre que N.S. n’aime pas qu’on lui fasse un cunnilingus et que N.S. lui a fait [TRADUCTION] « une face de grand dégoût » en le disant[90].

[129] Dans les deux cas, la version des faits de N.S. comprend le gendarme McDonald qui quitte les lieux peu de temps après qu’ils ont fini de se livrer à des activités sexuelles et qui déclare qu’il pourrait avoir des problèmes à cause de ce qu’ils faisaient.

[130] Je note que le représentant du membre visé a attiré l’attention sur le commentaire de C.T., selon lequel N.S. était souillée et s’est interrogé sur la probabilité d’avoir des relations sexuelles orales dans cet état. Cependant, C.T. a laissé N.S. seule dans sa résidence vers 23 h 30 le 14 août. Elle n’a aucune connaissance directe de ce qu’a fait N.S. après cela et, en particulier, si elle a pris une douche avant l’arrivée du gendarme McDonald.

[131] Lorsque N.S. a fait sa première déclaration le 25 août 2021, elle a déclaré qu’elle et le gendarme McDonald avaient eu des relations sexuelles. Elle a déclaré à plusieurs reprises qu’elle avait honte et qu’elle ne voulait clairement pas entrer dans les détails au sujet de la relation[91].

[132] Je n’accepte pas l’allégation du représentant du membre visé selon laquelle N.S. a passé plus de temps à raconter l’incident du 21 août 2021 qu’à raconter ses interactions avec le gendarme McDonald. L’incident du 21 août 2021 a été brièvement mentionné au début de sa déclaration du 25 août 2021. Il n’en a pas été question de nouveau jusqu’à ce que N.S. demande aux enquêteurs de partir, après quoi l’enquêteur a brièvement attiré son attention sur l’incident du 21 août 2021. Il est ensuite revenu pour poser d’autres questions sur les événements des 14 et 15 août 2021.

[133] N.S. a ensuite déclaré qu’elle ne voulait pas porter plainte, que le gendarme McDonald était un homme gentil et qu’elle ne voulait pas [TRADUCTION] « faire ça ». Elle a ajouté que, lorsqu’elle avait 12 ans, elle avait été agressée sexuellement, avait passé deux ans à traverser le processus judiciaire et avait déclaré à plusieurs reprises qu’elle ne voulait pas [TRADUCTION] « recommencer[92] ». Les enquêteurs ont indiqué qu’ils mettaient fin à sa déclaration et elle les a remerciés de leur compréhension.

[134] Dans sa deuxième déclaration du 10 septembre 2021, N.S. a de nouveau exprimé sa honte et sa réticence lorsqu’on lui a demandé d’expliquer en détail ce qu’elle avait fait avec le gendarme McDonald[93]. Elle a dit qu’ils avaient eu des relations sexuelles, a confirmé la compréhension de l’enquêteur que le gendarme McDonald lui avait fait un cunnilingus et a déclaré qu’il avait éjaculé dans sa bouche. Elle a déclaré que ce dernier acte l’a dégoûtée[94]. Elle a ajouté qu’ils étaient à l’étage, dans sa chambre et qu’ils étaient nus. Enfin, elle a rapporté que le gendarme McDonald a dit à plusieurs reprises [TRADUCTION] « qu’il pourrait avoir beaucoup de problèmes pour cela » et qu’il est parti rapidement après qu’ils ont eu terminé.

[135] N.S. a fait des révélations détaillées et spontanées à ses deux amies les plus proches dans les quelques heures qui ont suivi la relation sexuelle présumée. La nature spontanée de ces divulgations et la répétition des éléments essentiels de l’allégation fournissent un contexte pour évaluer sa crédibilité[95]. La honte et la réticence de N.S. lorsqu’elle s’entretient avec les enquêteurs expliquent de façon raisonnable le récit plus abrégé des actes sexuels en cause dans ses déclarations et, en particulier, dans sa première déclaration.

[136] Il n’y a aucun élément de preuve donnant à penser que N.S. avait déjà menti ou inventé des fantasmes de se livrer à des activités sexuelles avec un policier ou toute autre personne. C.T. précise que N.S. ne l’avait jamais fait[96].

[137] De plus, j’estime qu’il est peu probable que N.S. concocte un fantasme d’une relation sexuelle qui comprenait deux actes sexuels qu’elle n’aimait pas, à savoir le gendarme McDonald qui lui a fait un cunnilingus et le fait qu’il l’éjacule dans sa bouche.

[138] En revanche, la version des faits du gendarme McDonald concernant le but de sa visite à la résidence de N.S., à titre de vérification du bien-être lié à son devoir ou à sa compassion, défie la crédibilité.

[139] Comme l’a fait remarquer la représentante de l’autorité disciplinaire, et comme je l’ai constaté, l’enregistrement audio, en particulier le segment dans lequel le gendarme McDonald donne sa carte professionnelle, indique un flirt réciproque.

[140] Le gendarme McDonald affirme que N.S. lui a demandé à plusieurs reprises de l’ajouter sur Facebook et qu’il a refusé. Il ajoute qu’il a seulement dit à N.S. qu’il l’ajouterait sur Facebook pour l’encourager à rentrer chez elle. Le gendarme McDonald savait que C.T. venait rencontrer N.S. et il affirme qu’il a attendu pour s’assurer qu’elle était en sécurité avant de partir. Étant donné que N.S. était aux soins de C.T., il n’y avait aucune raison pour lui d’envoyer une demande d’ami sur Facebook à N.S. : l’incitatif n’était plus nécessaire pour s’assurer que N.S. arrivait chez elle en toute sécurité. J’estime que son affirmation selon laquelle il l’a fait [TRADUCTION] « parce qu’il voulait tenir sa promesse[97] » est peu plausible s’il n’avait pas l’intention de poursuivre le contact avec N.S.

[141] Le gendarme McDonald nie avoir demandé à N.S. s’il pouvait venir. Le témoignage de N.S. sur ce point est ambigu, mais elle reconnaît qu’elle lui a peut-être demandé de venir. Son témoignage indique qu’elle l’aurait fait de façon aguicheuse[98].

[142] Que le gendarme McDonald ait demandé s’il pouvait venir ou qu’il ait été invité, il est clair que c’est lui qui a lancé les communications. À aucun moment, N.S. n’a communiqué avec le gendarme McDonald après qu’elle est rentrée chez elle à pied du magasin d’alcool. Au contraire, comme l’a déclaré N.S., la preuve matérielle démontre qu’il l’a appelée.

[143] De plus, les appels ont été faits par le gendarme McDonald après son quart de travail. Il n’agissait pas à ce moment-là à titre opérationnel.

[144] Le gendarme McDonald ne donne aucun détail sur la discussion lors des deux appels qu’il a faits à N.S. aux petites heures du 15 août, après son quart de travail. Comme l’a fait remarquer la représentante de l’autorité disciplinaire, il n’indique pas non plus que N.S. a dit quoi que ce soit dans ces conversations qui l’a amené à croire qu’un suivi urgent en personne était nécessaire.

[145] Dans sa réponse, le gendarme McDonald a déclaré que N.S. lui avait demandé de venir la voir. Pourtant, comme l’a fait remarquer la représentante de l’autorité disciplinaire, il s’est appuyé sur le fait que C.T. avait accompagné N.S. chez elle comme preuve qu’il avait essayé de s’assurer que N.S. rentrait chez elle en toute sécurité. De plus, le gendarme McDonald a déclaré que N.S. lui avait dit que [TRADUCTION] « elle n’était pas du tout suicidaire[99] ». Bref, même selon son propre témoignage, le gendarme McDonald n’avait aucune raison opérationnelle de faire un suivi auprès de N.S dans un délai aussi court.

[146] Le gendarme McDonald ne fournit aucune preuve, ni même aucune explication d’un changement de circonstances qui a conduit à un besoin urgent de se présenter à la résidence de N.S. au milieu de la nuit, alors qu’il n’était pas en service, et en tenue civile. Je n’accepte pas la suggestion du représentant du membre visé selon laquelle il a agi ainsi afin d’éviter de causer de l’embarras à N.S.

[147] Nulle part dans sa réponse, qui est le seul exemple de sa position déclarée, le gendarme McDonald a-t-il expliqué pourquoi, si un suivi était en fait requis par les normes de service de la GRC ou pour d’autres raisons opérationnelles, il n’a pas informé un collègue ou un superviseur de son intention de se rendre à la résidence de N.S., de prendre des notes de sa présence ou de passer le suivi au quart suivant.

[148] L’absence d’enregistrement de sa visite à la résidence de N.S., si c’est effectivement un suivi opérationnel, est frappante, étant donné que le gendarme McDonald a jugé nécessaire et qu’il avait l’intention de consigner ses interactions avec N.S. pendant son transport dans son véhicule de police dans l’après-midi du 14 août 2021.

[149] De plus, dans le contexte du flirt poussé de N.S., qui est clairement établi, la raison qu’il a invoquée pour se rendre à sa résidence sans aucun avis ou enregistrement de ses actions est invraisemblable. Comme l’a souligné la représentante de l’autorité disciplinaire, il est peu probable qu’un agent de police se place dans une telle situation compromettante.

[150] Par conséquent, compte tenu de l’ensemble de la preuve, je retiens le témoignage de N.S. et, en particulier, son récit des actes sexuels décrits dans ses déclarations. Je conclus que, alors qu’elle se trouvait à sa résidence, entre 3 h 35 et 4 h 14, le 15 août 2021, le gendarme McDonald a eu des relations sexuelles avec N.S., lui a fait un cunnilingus et a éjaculé dans sa bouche.

DÉCISION RELATIVE À L’ALLÉGATION

[151] L’article 7.1 du Code de déontologie de la GRC prévoit ce qui suit : « Les membres se comportent de manière à éviter de jeter le discrédit sur la Gendarmerie ».

[152] Pour satisfaire au critère d’une conduite déshonorante selon le paragraphe 7.1 du Code de déontologie de la GRC, l’autorité disciplinaire doit établir les quatre éléments suivants selon la prépondérance des probabilités :

  1. les actes qui constituent le comportement allégué;
  2. l’identité du membre qui aurait commis ces actes;
  3. le fait que le comportement du membre est susceptible de jeter le discrédit sur la GRC;
  4. le fait que le comportement du membre est suffisamment lié à ses devoirs et fonctions pour donner à la GRC un intérêt légitime à le discipliner.

[153] Les actes qui constituent le comportement allégué sont les suivants : Le 14 août 2021, le gendarme McDonald a rencontré N.S., une personne vulnérable, dans l’exercice de ses fonctions. Pendant qu’il était en service, il a rendu la pareille aux flirts de N.S. Il a donné à N.S. son numéro de téléphone personnel et a communiqué avec elle sur Facebook. Aux petites heures du 15 août 2021, alors qu’il n’était pas en service, le gendarme McDonald a passé deux appels à N.S. et s’est rendu à sa résidence en civil. J’ai constaté que le gendarme McDonald s’est rendu à la résidence de N.S. entre 3 h 35 et 4 h 14 le 15 août 2021, et que pendant ce temps, la gendarme McDonald a eu des relations sexuelles avec N.S., lui a fait un cunnilingus et a éjaculé dans sa bouche.

[154] L’identité du membre n’est pas en cause. Le gendarme McDonald avoue avoir été avec N.S. à l’hôpital, l’avoir conduite au centre commercial près de sa résidence à sa sortie, lui avoir donné son numéro de téléphone cellulaire personnel, lui avoir parlé à l’extérieur du magasin d’alcool, lui avoir envoyé une demande d’ami sur Facebook, et s’être présenté à sa résidence pendant qu’il n’était pas en service aux petites heures du 15 août 2021. Pour des raisons déjà mentionnées, je n’accepte pas l’allégation du représentant du membre visé selon laquelle N.S. s’est trompée quant à l’identité de la personne avec qui elle a eu des relations sexuelles aux petites heures du 15 août 2021.

[155] Il est évident que le comportement du gendarme McDonald est susceptible de discréditer la Gendarmerie. J’ai conclu que N.S. était une personne vulnérable que le gendarme McDonald a connue dans l’exercice de ses fonctions. En tant que membre de la GRC, le gendarme McDonald occupait un poste de confiance et d’autorité. J’ai également conclu qu’en tout temps, le gendarme McDonald savait que N.S. était une personne vulnérable. Dans ce contexte, il y a eu un déséquilibre de pouvoir évident. Je suis d’accord avec la représentante de l’autorité disciplinaire pour dire que le gendarme McDonald a franchi les limites du comportement professionnel attendu d’un membre de la GRC en donnant son numéro de téléphone personnel, en communiquant avec N.S. sur Facebook, et en se rendant à sa résidence alors qu’il n’était pas en service aux petites heures du 15 août 2021. Le fait qu’il ait également commis des actes sexuels avec N.S., une personne vulnérable, est un comportement particulièrement flagrant et répréhensible. J’estime que ses actes feraient sans aucun doute en sorte qu’une personne raisonnable, connaissant toutes les circonstances pertinentes, y compris les réalités des services de police en général et de la GRC en particulier, perçoit ses actes comme susceptibles de discréditer la Gendarmerie.

[156] Je suis également d’accord avec la représentante de l’autorité disciplinaire que le gendarme McDonald a utilisé sa position de confiance et d’autorité en tant que membre de la GRC à son avantage personnel afin de faciliter sa présence à la résidence de N.S. et, pendant qu’il était là, de se livrer à des actes sexuels avec elle. Par conséquent, j’estime que ses agissements sont suffisamment liés à ses devoirs et à ses fonctions pour donner à la GRC un intérêt légitime à le discipliner.

[157] À la lumière de ce qui précède, je conclus que l’allégation 1 est fondée.

MESURES DISCIPLINAIRES

[158] Ayant conclu que l’allégation 1 est fondée, j’ai l’obligation, en vertu du paragraphe 45(4) de la Loi sur la GRC et du Guide des mesures disciplinaires de la GRC, d’imposer « une mesure juste et équitable selon la gravité de l’infraction, le degré de culpabilité du membre et la présence ou l’absence de circonstances atténuantes ou aggravantes »[100].

Preuve

[159] Comme N.S. n’a pas fourni de déclaration de la victime avant son décès, la représentante de l’autorité disciplinaire a fourni la déclaration écrite de T.L., la sœur de N.S., que j’ai lue dans le dossier pendant cette audience.

[160] T.L. a noté le traumatisme que N.S. avait subi dans sa vie, de l’enfance à sa mort. Elle a parlé de la nature aimante et attentionnée de N.S., de la gentillesse dont elle a fait preuve à l’égard de ses proches, de son amour et de son dévouement envers ses enfants.

[161] T.L. a décrit comment des traumatismes répétés ont rendu N.S. incapable de faire confiance et l’ont fait vivre dans la peur. Elle a écrit, en partie :

[TRADUCTION]

[…] La seule exception à son manque de confiance était les policiers. Elle a eu de nombreuses relations avec les premiers intervenants au cours de sa vie et a toujours été traitée avec dignité et respect par la police, peu importe son état au moment de ses rencontres. Pour cette raison, elle estimait qu’ils étaient les seuls dont elle pouvait être sûre qu’ils ne lui feraient jamais de mal. […]

[162] T.L. a décrit l’impact direct des actes du gendarme McDonald sur N.S et l’enquête qui a suivi :

[TRADUCTION]

[…] [Cela] a causé un traumatisme supplémentaire alors qu’elle commençait à éprouver une profonde anxiété et a exprimé comment cela la ramenait à l’époque où elle était soumise à des procédures judiciaires liées à l’agression sexuelle qu’elle a subie lorsqu’elle était enfant. Ma sœur était dans un état d’extrême nervosité et plus elle buvait, moins elle le sentait. Elle a en fait déclaré qu’elle préférerait mourir plutôt que de devoir revivre cela. […]

[163] T.L. a décrit son incapacité à dormir en raison de sa peur pour N.S. et le bien-être de ses enfants. Elle a fait remarquer que N.S. l’appelait 10 à 15 fois à toute heure du jour et de la nuit en raison de sa détresse. Cela s’est poursuivi jusqu’au 10 octobre 2022, date à laquelle l’un des enfants mineurs de N.S l’a trouvée morte.

[164] Le gendarme McDonald s’est adressé à moi en tant que comité de déontologie. Il a confié son désir de toute sa vie d’être policier et sa fierté d’être membre de la GRC. Il a expliqué comment il avait eu des difficultés à s’en sortir en 2021, principalement en raison de sa séparation de son réseau de soutien et de ses expériences en service. Il a déclaré qu’il n’avait pas pris soin de sa santé mentale et qu’il avait évité d’être seul pour éviter de faire face à ses pensées.

[165] Le gendarme McDonald a exprimé des remords pour son mauvais jugement. Il a déclaré qu’il avait vraiment apprécié sa rencontre avec N.S. et qu’ils avaient des liens personnels, mais il a reconnu qu’il était en position d’autorité et qu’elle était une personne vulnérable. Il a exprimé des remords pour la façon dont il a fait défaut à N.S. en tant que cliente et pour la situation dans laquelle il l’a placée en raison de ses actes.

[166] Enfin, le gendarme McDonald a parlé de la possibilité d’obtenir des services de counseling afin d’améliorer sa santé mentale et de son désir de continuer à contribuer à titre de membre de la GRC. Il a demandé la possibilité de prouver à sa famille, à la collectivité et à la GRC qu’il a appris de ses erreurs et d’encourager les autres membres à prendre soin de leur propre santé mentale.

[167] Je remarque qu’il s’agissait d’un témoignage non solennel. J’ai expressément informé le représentant du membre visé, avant cette audience, qu’il s’agissait du choix du gendarme McDonald de s’adresser au comité de déontologie ou de témoigner sous serment et qu’il ferait l’objet d’un contre-interrogatoire. Cependant, j’ai également mis en garde que le témoignage non solennel ne pouvait pas avoir autant de poids que le témoignage sous serment[101].

[168] Le gendarme McDonald a également fourni la preuve documentaire suivante :

  1. Une note médicale, datée du 5 avril 2023, confirmant deux diagnostics et des médicaments prescrits. La note comporte trois phrases. La date à laquelle les diagnostics ont été posés n’est pas indiquée. Il n’y a pas non plus d’information sur les symptômes du gendarme McDonald dans les environs du mois d’août 2021 à ce jour.
  2. Une note d’un conseiller, datée du 7 janvier 2023, qui fait deux phrases. Il confirme que le gendarme McDonald a participé activement aux séances de counseling individuel depuis novembre 2021.
  3. Une lettre d’appui du sergent Jody Turpin, qui était le superviseur du gendarme McDonald. La note traite de l’éthique du travail du gendarme McDonald, exprime sa confiance dans la capacité du gendarme McDonald à tirer des leçons de « cette situation ». Enfin, le sergent Turpin exprime sa volonté d’accueillir le gendarme McDonald au travail.
  4. Les évaluations du rendement du gendarme McDonald pour les exercices 2019-2020, 2020-2021 et 2021-2022.
  5. Un journal de rendement, daté du 12 octobre 2020, reconnaissant le gendarme McDonald comme faisant partie d’une équipe de membres qui ont fait preuve de sang-froid dans une situation difficile.
  6. Un journal de rendement, daté du 22 mars 2021, reconnaissant les commentaires positifs d’un client. Le client a fait remarquer qu’il n’avait généralement pas une opinion positive de la police, mais que le professionnalisme et le niveau d’effort du gendarme McDonald pour régler sa plainte ont changé son point de vue.

Décision relative aux mesures disciplinaires

[169] Il y a cinq principes que je dois appliquer pour évaluer les mesures disciplinaires appropriées. Tout d’abord, il est bien accepté que les membres soient tenus à une norme de conduite plus élevée, qu’ils soient en service ou hors service.

[170] Deuxièmement, la détermination d’une sanction appropriée suppose, en son cœur, un équilibre entre des intérêts : celui du public, de la GRC en tant qu’employeur, du membre à traiter équitablement et de ceux qui sont touchés par l’inconduite en cause. L’équité envers le membre exige, en partie, que les mesures disciplinaires imposées soient proportionnelles.

[171] Troisièmement, je dois appliquer les pouvoirs applicables en vertu de la Loi sur la GRC, à savoir le paragraphe 45(4) et l’article 36.2. Ce dernier énonce, aux alinéas b), c) et e), les principes directeurs suivants :

  • Le système de conduite fait partie intégrante du maintien de la confiance du public dans l’administration de la GRC.
  • Les membres ont la responsabilité et la responsabilisation pour ce qui est de promouvoir et de maintenir la bonne conduite au sein de la Gendarmerie.
  • Les mesures disciplinaires doivent être adaptées à la nature et aux circonstances de la contravention et, s’il y a lieu, elles doivent être éducatives et correctives plutôt que punitives.

[172] Le principe de la parité des sanctions est implicite dans ce qui précède. Le Guide des mesures disciplinaires, bien qu’il ne soit pas normatif, vise à promouvoir la parité des sanctions. Cependant, le Guide des mesures disciplinaires doit être lu dans le contexte des normes sociétales changeantes, telles qu’établies par la jurisprudence, les politiques et la législation applicables.

[173] Par ailleurs, bien que je ne sois pas liée par les décisions antérieures relatives à la conduite, celles-ci peuvent fournir des indications concernant les sanctions appropriées pour une catégorie particulière de comportement. Un défi particulier est le poids à accorder aux cas qui sont résolus par des propositions conjointes sur des mesures disciplinaires. J’estime qu’ils ne sont pas aussi convaincants en ce qui concerne l’évaluation des facteurs de proportionnalité en cause.

[174] Quatrièmement, il y a la présomption de la disposition la plus basse. Toutefois, comme pour le principe selon lequel les mesures doivent être éducatives et correctives plutôt que punitives, il convient de noter que cette présomption peut être écartée lorsque la gravité de l’inconduite ou l’intérêt public l’exige.

[175] Cinquièmement, le principe de proportionnalité. Les avocats ont identifié des facteurs de proportionnalité (atténuants, aggravants ou neutres) que je dois soupeser afin de déterminer une sanction appropriée qui équilibre les intérêts divergents et reflète les principes fondamentaux à appliquer.

[176] Les avocats ont pris note des lignes directrices fournies aux pages 65 à 69 du Guide des mesures disciplinaires pour divers types de comportements discréditables impliquant des activités sexuelles. Je conviens qu’aucune des catégories de relations sexuelles inappropriées examinées dans ces sections ne s’applique directement aux faits de la présente affaire.

[177] Toutefois, ces sections du Guide des mesures disciplinaires identifient un certain nombre de facteurs qui témoignent de la gravité du comportement. Plusieurs d’entre elles sont présentes en l’espèce :

  1. N.S. était un membre du public.
  2. N.S. était une personne vulnérable pour des raisons qui comprenaient une dépendance à l’alcool. Le gendarme McDonald connaissait également son statut à ce titre.
  3. Le gendarme McDonald a appris à connaître N.S. en raison de ses fonctions. En particulier, à la suite de son arrestation en vertu de la Loi sur la santé mentale quand, dans un état d’ébriété et de désarroi émotionnel, elle a exprimé son intention de se suicider.
  4. Le gendarme McDonald était en position de confiance et d’autorité vis-à-vis de N.S. Comme en témoignent le témoignage et la déclaration de T.L., N.S. avait une admiration particulière à l’égard des premiers intervenants et leur faisait confiance.
  5. Le gendarme McDonald était dans cette position de confiance et d’autorité lorsqu’il a établi un lien avec N.S. alors qu’elle se rétablissait à l’hôpital.
  6. Cette relation de confiance et d’autorité était toujours en place lorsqu’il a donné à N.S. son numéro de téléphone personnel, lui a envoyé une demande d’ami sur Facebook, s’est rendu à la résidence de N.S. et s’est livré à des actes sexuels avec elle.

[178] Tout dans les interactions du gendarme McDonald avec N.S. reposait sur cette relation de confiance et d’autorité. Par conséquent, il y avait un déséquilibre de pouvoir dans leurs interactions.

[179] Compte tenu du contexte dans lequel leur relation a été établie et s’est poursuivie, je ne trouve pas que le fait que N.S. ait flirté avec le gendarme McDonald, qu’elle l’ait invité ou qu’elle ait affirmé qu’elle avait consenti à l’acte sexuel soit un facteur atténuant.

[180] Le gendarme McDonald avait le devoir de rester professionnel dans ses interactions avec N.S., un devoir qui s’est encore renforcé en raison de son statut de personne vulnérable. Il a manqué à son devoir.

[181] Ses actes, en raison de sa position de confiance et d’autorité, étaient l’exploitation d’une personne vulnérable. De par leur nature, ses actes nuisent énormément à la confiance du public envers la GRC. Ils constituent une violation fondamentale de l’intérêt public.

[182] Je suis d’accord avec le représentant du membre visé pour dire que le gendarme McDonald avait tout à fait le droit de se défendre contre l’allégation. Je n’ai tiré aucune conclusion négative d’une absence d’aveux à quelque étape que ce soit du processus disciplinaire ou de la façon don’t il a présenté son témoignage à l’audience.

[183] Toutefois, le gendarme McDonald a pris certaines mesures au cours des événements en question qui témoignent de l’intention de dissimuler ses actes. Même s’il était d’avis que sa présence à la résidence de N.S. était destinée à assurer le suivi conformément aux normes de service de la GRC ou à vérifier son bien-être, il n’a dit à personne qu’il avait l’intention de le faire. Il n’a pas pris de notes de ses interactions avec elle. Il s’est désabonné de son compte Facebook peu après avoir quitté sa résidence et a supprimé de son téléphone personnel l’enregistrement des appels qu’il lui avait faits aux petites heures du 15 août 2021.

[184] L’incidence profonde de l’inconduite, et de l’enquête qui s’en est suivie, sur N.S. était évidente dans sa déclaration du 25 août 2021 et dans la déclaration de T.L. N.S. a subi un nouveau traumatisme qui a contribué à son désespoir avant son décès.

[185] Je rejette sans équivoque l’allégation du représentant du membre visé selon laquelle il est possible d’établir une distinction entre l’inconduite et l’enquête et que ce n’est pas l’acte sexuel lui-même, mais plutôt la participation au processus disciplinaire qui a traumatisé de nouveau N.S. Les actes du gendarme McDonald sont la raison pour laquelle N.S. a été obligée de participer à ce processus et, en particulier, à l’enquête sur l’inconduite sexuelle.

[186] Après avoir examiné ces facteurs en même temps que les cas fournis par les parties, je conclus que l’inconduite du gendarme McDonald se situe dans la fourchette des infractions graves, à savoir celle du congédiement. La question est donc de savoir s’il existe des facteurs suffisamment atténuants pour justifier une sanction moindre qui, comme l’a fait valoir le représentant du membre visé, répondrait aux objectifs du processus disciplinaire, y compris la dissuasion spécifique et générale.

[187] Je reconnais que le gendarme McDonald a des remords pour ses actes. Cependant, je n’ai pas eu l’impression qu’il comprenait la nature flagrante de ses actes. Par exemple, il dit avoir établi un véritable lien avec N.S., qu’il aimait vraiment. Cela n’atténue en rien la situation. Comme l’a fait remarquer la représentante de l’autorité disciplinaire, cela exacerbe davantage la violation de la confiance sur laquelle ce lien était fondé.

[188] Je reconnais que le gendarme McDonald a éprouvé des problèmes de santé mentale et je reconnais ses efforts constants pour prendre soin de lui-même. Toutefois, je ne peux accorder beaucoup de poids à son témoignage non assermenté. Je n’ai aucune preuve devant moi, médicale ou autre, qui établit un diagnostic ou même confirme que le gendarme McDonald présentait des symptômes d’un problème de santé en août 2021. Il n’y a pas non plus de preuves médicales qui me permettraient d’établir un lien entre les deux diagnostics identifiés et son inconduite. Enfin, même si la note du conseiller sert à confirmer que le gendarme McDonald a participé à des séances de counseling, elle ne fournit aucune indication sur la raison de ce traitement, ses progrès ou son potentiel de réadaptation.

[189] Je n’accepte pas que le fait que les témoins n’aient pas été tenus de témoigner à la suite du processus proposé conjointement par les parties constitue un facteur atténuant important. Il s’agissait d’une décision stratégique qui a profité aux deux parties. De plus, on ne peut présumer que les témoins n’étaient pas disposés et aptes à témoigner.

[190] Je reconnais que le gendarme McDonald a eu un bon rendement au cours de ses deux années de service actif à la GRC, qu’il n’a pas fait l’objet de mesures disciplinaires antérieures pendant cette courte période et que, d’une certaine façon, il bénéficie du soutien de son superviseur. Toutefois, comme l’a reconnu le représentant du membre visé, il n’est pas clair que le sergent Turpin était pleinement conscient de la nature de l’allégation dont je suis saisie. Par conséquent, je ne peux pas conclure que les évaluations du rendement et la lettre d’appui, même l’on tient compte du fait que le gendarme McDonald a participé à des séances de counseling, constituent une preuve particulièrement convaincante du potentiel de réadaptation du gendarme McDonald.

[191] Le représentant du membre visé a attiré mon attention sur les cas de déontologie dans lesquels les membres en question avaient commis une inconduite sexuelle répétée et a laisse entendre qu’il s’agissait, par contraste, d’un incident isolé et moins grave. Cependant, je juge que c’est une simplification excessive de ce qui s’est passé. L’inconduite en cause a entraîné une progression d’un engagement inapproprié avec N.S. au cours d’une période d’environ 12 heures. Comme l’a fait remarquer la représentante de l’autorité disciplinaire, le gendarme McDonald avait eu amplement le temps de réfléchir et de [TRADUCTION] « suivre la bonne voie » dans les cinq à six heures entre le moment où il a quitté N.S. à l’extérieur du magasin d’alcool et celui où il l’a appelée après son quart de travail. Même si je considère qu’il s’agit d’un incident isolé, il s’agit d’une inconduite si grave qu’elle constitue, au mieux, un facteur neutre.

[192] Le représentant du membre visé a proposé d’autres mesures disciplinaires :

  1. une mutation;
  2. une surveillance étroite pendant une période d’un an;
  3. une directive pour suivre des séances de counseling tel que précisé par un agent des services de santé;
  4. l’inadmissibilité à toute promotion pour une période de deux ans;
  5. une confiscation de 40 jours de salaire;
  6. le retrait de 15 jours de congé annuel;
  7. des excuses écrites à la famille de N.S.;
  8. une réprimande.

[193] Bien que les mesures proposées comprennent plusieurs mesures disciplinaires sérieuses, y compris une mutation et la confiscation du salaire, je n’estime pas que l’inadmissibilité à la promotion ait de grandes conséquences. Le gendarme McDonald n’a que deux ans de service. Il est peu probable qu’il soit promu dans les deux prochaines années. Bien que je reconnaisse que le retrait de jours de congé proposé constitue une mesure disciplinaire grave au sens de l’article 5 des CC (déontologie), son incidence est inévitablement tempérée par le fait que le gendarme McDonald a continué d’accumuler des congés pendant qu’il était suspendu.

[194] Les autres mesures disciplinaires proposées sont de nature corrective. En l’absence de preuves médicales établissant un lien entre l’inconduite et un problème de santé, je ne peux pas accorder beaucoup de poids à une directive de suivre un traitement médical. Je remarque également que les excuses n’ont de l’importance que si la famille est ouverte à la recevoir et qu’elles sont présentées d’une manière qui respecte les souhaits de la famille. Je n’ai aucune indication que c’est le cas. Enfin, j’estime que la réprimande proposée n’aura que peu d’effet étant donné que la présente décision écrite sera disponible sur le Web.

[195] Le représentant du membre visé soutient que le gendarme McDonald a fait preuve d’ouverture et qu’il a su tirer des leçons de ses erreurs, et qu’il devrait avoir l’occasion de le faire.

[196] Même si je devais conclure que l’agent McDonald a démontré un potentiel de réadaptation, ce qui n’est pas le cas, j’estime que les observations du représentant du membre visé et les mesures disciplinaires proposées ont miné la gravité de l’inconduite, qui est totalement incompatible avec l’exécution des fonctions d’un membre et la position de confiance que les membres détiennent. Par conséquent, elles ne reflètent pas la nécessité d’une dissuasion spécifique et générale d’une telle inconduite sexuelle grave. Si l’on tient compte de l’ensemble des circonstances, leur acceptation entraînerait une priorisation inappropriée des intérêts du gendarme McDonalds par rapport à ceux de la GRC en tant qu’employeur, des personnes touchées et du public, dans une mesure telle qu’elle est intenable. On ne peut demander au public de supporter le risque que ce comportement se répète.

[197] Par conséquent, conformément au paragraphe 45(4) de la Loi sur la GRC, j’ordonne que le gendarme McDonald soit congédié de la Gendarmerie.

CONCLUSION

[198] J’ai conclu que le gendarme McDonald avait commis des actes sexuels avec N.S., une personne vulnérable qu’il avait rencontrée dans l’exercice de ses fonctions, lorsqu’il occupait un poste de confiance et d’autorité. Une personne raisonnable, connaissant toutes les circonstances pertinentes, y compris les réalités du travail policier en général et celles de la GRC en particulier, percevrait ses agissements comme étant susceptibles de jeter le discrédit sur la Gendarmerie. Par conséquent, l’allégation 1 est fondée.

[199] L’inconduite du gendarme McDonald est flagrante et a eu des répercussions profondément négatives sur N.S. et sa famille. Elle est totalement incompatible avec l’exercice des fonctions d’un membre et la position de confiance que les membres détiennent. La confiance du public dans la Gendarmerie serait minée par le maintien de l’emploi du gendarme McDonald. Par conséquent, son inconduite se situe dans la fourchette des infractions graves. Les mesures disciplinaires proposées par le représentant du membre visé ne reflètent pas la gravité de l’inconduite en cause. Il n’y a pas non plus suffisamment de facteurs atténuants pour justifier des mesures disciplinaires moins sévères que le congédiement en l’espèce. Par conséquent, j’ordonne que le gendarme McDonald soit congédié de la Gendarmerie.

[200] L’une ou l’autre des parties peut interjeter appel de cette décision en déposant une déclaration d’appel auprès du commissaire dans le délai prévu à l’article 45.11 de la Loi sur la GRC.

 

 

16 octobre 2023

Christine Sakiris

Comité de déontologie

 

Date

 



[1] Les déclarations antérieures cohérentes en cause, qui seront énoncées dans mon examen de la preuve, ont été identifiées dans l’Identification des déclarations cohérentes antérieures, présentée par le représentant du membre visé le 11 avril 2023.

[2] Résumé de la conférence préalable à l’audience 2 par le Comité de déontologie, daté du 13 avril 2023; et Transcription de l’audience disciplinaire, volume 1, aux pages 6 à 8.

[3] R. c. R.E.M., 2008 CSC 51, au paragraphe 65.

[4] F. H. c. McDougall, 2008 CSC 53 [McDougall], au paragraphe 58.

[5] Faryna vs Chorny, 1951 CanLII 252 (BC CA) [Faryna], page 357.

[6] McDougall, au paragraphe 86.

[7] PACIOCCO, David M. et Lee STREUSER. The Law of Evidence, 7e édition (Toronto : Irwin Law Inc., 2015), aux pages 527 et 528; et R. c. Dinardo, 2008 CSC 24 [Dinardo], au paragraphe 36.

[8] The Law of Evidence, à la page 530; Commandant, Division E et gendarme John Irvine, 2019 RCAD 03 [Irvine], au paragraphe 159; et R. vs Langan, 2019 BCCA 467 [Langan], comme affirmé dans R c. Langan, 2020 CSC 3, au paragraphe 1.

[9] Identification des déclarations cohérentes antérieures, soumises par le représentant du membre visés le 11 avril 2023.

[10] The Law of Evidence, à la page 530.

[11] The Law of Evidence, à la page 543; Langan, au paragraphe 99.

[12] The Law of Evidence, à la page 542, citant Dinardo, au paragraphe 39.

[13] Langan, aux paragraphes 95, 96 et 99.

[14] R vs Snell, 2021 BCSC 673 (CanLII), au paragraphe 44; R. vs J.C., 2021 ONCA 131 (CanLII), au paragraphe 88.

[15] Classeur de la DRAD, aux pages 88 à 98, Déclaration de N.S., en date du 25 août 2021, aux lignes 137, 144 et 145, 150, 208, 308 et 309; Classeur de la DRAD, aux pages 101 à 134, Déclaration, de N.S., en date du 10 septembre 2021, aux lignes 242 à 245, 273 à 285, 314 à 316 et 1000 à 1001.

[16] Transcription de l’audience disciplinaire, volume 1, page 78.

[17] Classeur de la DRAD, aux pages 113 et 114, Déclaration de N.S., en date du 10 septembre 2021, aux lignes 389 à 415.

[18] Classeur de la DRAD, à la page 49, Déclaration de T.L., en date du 3 septembre 2021, aux lignes 64 et 65.

[19] Classeur de la DRAD, à la page 53, Déclaration de T.L., en date du 3 septembre 2021, à la ligne 183.

[20] Classeur de la DRAD, à la page 53, Déclaration de T.L., en date du 3 septembre 2021, à la ligne 193.

[21] Classeur de la DRAD, à la page 56, Déclaration de T.L., en date du 3 septembre 2021, aux lignes 284 et 285.

[22] Classeur de la DRAD, à la page 137, Déclaration de C.T, en date du 3 septembre 2021, aux lignes 55 à 59.

[23] Classeur de la DRAD, à la page 137, Déclaration de C.T., en date du 3 septembre 2021, aux lignes 72 à 75.

[24] Classeur de la DRAD, à la page 146, Déclaration de C.T., en date du 3 septembre 2021, aux lignes 336 et 337.

[25] Classeur de la DRAD, à la page 146, Déclaration de C.T., en date du 3 septembre 2021, à la ligne 358.

[26] Classeur de la DRAD, à la page 147, Déclaration de C.T., en date du 3 septembre 2021, à la ligne 362.

[27] Classeur de la DRAD, à la page 147, Déclaration de C.T., en date du 3 septembre 2021, à la ligne 364.

[28] Classeur de la DRAD, à la page 149, Déclaration de C.T., en date du 3 septembre 2021, à la ligne 447.

[29] Classeur de la DRAD, à la page 149, Déclaration du C.T., en date du 3 septembre 2021, aux lignes 449 et 450.

[30] Classeur de la DRAD, à la page 155, Déclaration de C.T., en date du 3 septembre 2021, aux lignes 634 et 635.

[31] Classeur de la DRAD, à la page 168, Déclaration de C.K., en date du 9 septembre 2021, aux lignes 120 et 121.

[32] Classeur de la DRAD, à la page 169, Déclaration de C.K., en date du 9 septembre 2021, aux lignes 166 à 169.

[33] Classeur de la DRAD, à la page 169, Déclaration de C.K., en date du 9 septembre 2021, aux lignes 172 et 173.

[34] Classeur de la DRAD, à la page 116, Déclaration de N.S., en date du 10 septembre 2021, aux lignes 467 à 469.

[35] Classeur de la DRAD, aux pages 122 et 123, Déclaration de N.S., en date du 10 septembre 2021, aux lignes 668 à 683.

[36] Réponse du gendarme McDonald, en date du 14 mars 2023, au paragraphe 12.

[37] Classeur de la DRAD, à la page 103, Déclaration de N.S., en date du 10 septembre 2021, aux lignes 56 et 57.

[38] Classeur de la DRAD, à la page 103, Déclaration de N.S., en date du 10 septembre 2021, aux lignes 56 et 57.

[39] Classeur de la DRAD, à la page 139, Déclaration de C.T., en date du 3 septembre 2021, aux lignes 133 à 141.

[40] Transcription du transport de l’hôpital de N.S., telle que modifiée par les parties et soumise le 16 juin 2023, aux lignes 47 à 149.

[41] Transcription du transport de l’hôpital de N.S., telle que modifiée par les parties et soumise le 16 juin 2023, aux lignes 127 à 129 et 149.

[42] Transcription du transport de l’hôpital de N.S., telle que modifiée par les parties et soumise le 16 juin 2023, aux lignes 4 et 5.

[43] Réponse du gendarme McDonald, en date du 14 mars 2023, aux paragraphes 27 et 28.

[44] Documents de référence du représentant du membre visé, tels qu’ils ont été soumis le 6 juin 2023, à la page 482, Photo de la carte des normes de service de la GRC.

[45] Classeur de la DRAD, à la page 69, Rapport général d’incident 2021-122945.

[46] Classeur de la DRAD, aux pages 67 à 75, Rapport général d’incident 2021-122945.

[47] Classeur de la DRAD, aux pages 76 à 85, Journal principal des interrogations.

[48] Classeur de la DRAD, aux pages 67 à 75, Rapport général d’incident 2021-122945; et transcription modifiée de l’audio, aux lignes 50 et 51.

[49] Classeur de la DRAD, à la page 72, Rapport général d’incident 2021-122945.

[50] Classeur de la DRAD, aux pages 122 et 123, Déclaration de N.S., en date du 10 septembre 2021, aux lignes 668 à 683.

[51] Transcription du transport de l’hôpital de N.S., telle que modifiée par les parties et soumise le 16 juin 2023, aux lignes 130 à 134, avec texte en gras supplémentaire de l’enregistrement audio, commençant à environ 12 min 50 s

[52] Classeur de la DRAD, à la page 44, Photo de la carte professionnelle; Classeur de la DRAD, à la page 24, Analyse technique; enregistrement audio et transcription modifiée.

[53] Exposé conjoint des faits, en date du 16 juin 2023, au paragraphe 8.

[54] Déclaration de N.S., en date du 25 août 2021, à la ligne 198, à la page 94 du Classeur de la DRAD.

[55] Déclaration de N.S., en date du 10 septembre 2021, aux lignes 121 à 122, 364 à 367, 662 à 669, aux pages 105 à 123 du Classeur de la DRAD.

[56] Classeur de la DRAD, aux pages 76 à 85, Journal principal des interrogations.

[57] Enregistrement audio, transcriptions originales et modifiées.

[58] Enregistrement audio, transcriptions originales et modifiées.

[59] Classeur de la DRAD, à la page 44, Photo de la carte professionnelle; Classeur de la DRAD, à la page 24, Analyse technique; enregistrement audio et transcription modifiée.

[60] Classeur de la DRAD, à la page 70, Rapport général d’incident 2021-122945.

[61] Classeur de la DRAD, aux pages 76 à 87, Journal principal des interrogations.

[62] Énoncé conjoint des faits, au paragraphe 5; Classeur de la DRAD, à la page 91, Déclaration de N.S., en date du 25 août 2021, à la ligne 116; Classeur de la DRAD, à la page 105, Déclaration de N.S., en date du 10 septembre 2021, à la ligne 141.

[63] Énoncé conjoint des faits, au paragraphe 7; Classeur de la DRAD, aux pages 91 et 92, Déclaration de N.S., en date du 25 août 2021, aux lignes 116 à 118; Classeur de la DRAD, à la page 143, Déclaration de C.T., en date du 3 septembre 2021, à la ligne 2; Classeur de la DRAD, à la page 166, Déclaration de C.K., en date du 9 septembre 2021, aux lignes 77 à 79.

[64] Classeur de la DRAD, à la page 158, Journal du compte Facebook de N.S., avec des photos du profil du gendarme McDonald; Classeur de la DRAD, à la page 21, photo du profil de la GRC du gendarme McDonald.

[65] Classeur de la DRAD, à la page 166, Déclaration de C.K., en date du 9 septembre 2021, aux lignes 77 à 79.

[66] Classeur de la DRAD, aux pages 192 à 202, Images statiques de la vidéosurveillance du détachement.

[67] Classeur de la DRAD, aux pages 192 à 202, Images statiques de la vidéosurveillance du détachement.

[68] Classeur de la DRAD, aux pages 21 et 22, Rapport d’enquête final.

[69] Classeur de la DRAD, à la page 28, Plan de l’analyste; Classeur de la DRAD, à la page 208, Rapport d’extraction.

[70] Classeur DRAD, aux pages 109 et 110, Déclaration de N.S., en date du 10 septembre 2021, aux lignes 269 à 280.

[71] Classeur de la DRAD, à la page 28, Plan de l’analyste.

[72] Classeur de la DRAD, à la page 208, Rapport d’extraction; Classeur de la DRAD, à la page 30, Rapport d’enquête final.

[73] Classeur de la DRAD, à la page 28, Plan de l’analyste.

[74] Classeur de la DRAD, à la page 27, Photo des caméras de surveillance de la circulation.

[75] Classeur de la DRAD, à la page 163.

[76] Classeur de la DRAD, aux pages 94 et 95, Déclaration de N.S., en date du 25 août 2021, aux lignes 208, 209 à 222; Classeur de la DRAD, aux pages 104 et 105, Déclaration de N.S., en date du 10 septembre 2021, aux lignes 101 à 122.

[77] Classeur de la DRAD, aux pages 104 et 122, Déclaration de N.S. en date du 10 septembre 2021, aux lignes 106, 107, 662 et 663.

[78] Classeur de la DRAD, à la page 169, Déclaration de C.K., en date du 9 septembre 2021, aux lignes 160 à 163.

[79] Classeur de la DRAD, à la page 113, Déclaration de N.S., en date du 10 septembre 2021, aux lignes 378 à 380.

[80] Classeur de la DRAD, à la page 96, Déclaration de N.S., en date du 25 août 2021, aux lignes 245 à 247.

[81] Réponse du gendarme McDonald, en date du 14 mars 2023, au paragraphe 27.

[82] Classeur de la DRAD, aux pages 144 et 145, Déclaration de C.T., en date du 3 septembre 2021, aux lignes 285 à 307.

[83] Classeur de la DRAD, à la page 105, Déclaration de N.S., en date du 10 septembre 2021, aux lignes 145 et 146.

[84] Classeur de la DRAD, à la page 105, Déclaration de N.S., en date du 10 septembre 2021, aux lignes 138 à 143.

[85] Classeur de la DRAD, à la page 105, Déclaration de N.S., en date du 10 septembre 2021, à la ligne 139.

[86] Classeur de la DRAD, à la page 104, Déclaration de N.S., en date du 10 septembre 2021, à la ligne 104.

[87] Classeur de la DRAD, à la page 137, Déclaration de C.T., en date du 3 septembre 2021, aux lignes 77 à 85.

[88] Classeur de la DRAD, à la page 137, Déclaration de C.T., en date du 3 septembre 2021, aux lignes 55 à 59.

[89] Classeur de la DRAD, à la page 137, Déclaration de C.T., en date du 3 septembre 2021, aux lignes 72 à 75.

[90] Classeur de la DRAD, aux pages 155 et 156, Déclaration de C.T., en date du 3 septembre 2021, aux lignes 634 à 637.

[91] Classeur de la DRAD, à la page 95, Déclaration de N.S., en date du 25 août 2021, aux lignes 209 à 221; Classeur DRAD, aux pages 104 et 105, Déclaration de N.S., en date du 10 septembre 2021, aux lignes 101 à 12.

[92] Classeur de la DRAD, à la page 98, Déclaration de N.S., en date du 25 août 2021, aux lignes 308 à 320.

[93] Classeur de la DRAD, aux pages 104 et 105, Déclaration de N.S., en date du 10 septembre 2021, aux lignes 111 et 117.

[94] Classeur de la DRAD, à la page 113, Déclaration de N.S., en date du 10 septembre 2021, aux lignes 375 à 377.

[95] Dinardo, au paragraphe 39.

[96] Classeur de la DRAD, à la page 155, Déclaration de C.T., en date du 3 septembre 2021, aux lignes 611 à 619.

[97] Réponse du gendarme McDonald, en date du 14 mars 2023, au paragraphe 17.

[98] Classeur de la DRAD, à la page 104, Déclaration de N.S., en date du 10 septembre 2021, aux lignes 101 à 104.

[99] Réponse du gendarme McDonald, en date du 14 mars 2023, au paragraphe 10.

[100] Guide des mesures disciplinaires de la GRC, à la page 3.

[101] Résumé de la conférence préparatoire à l’audience 2, en date du 13 avril 2023.

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